Assis sans bouger et sans rien faire
Lorsque j’étais un jeune méditant zen, je faisais partie du personnel médical d’une maison de repos accueillant des personnes aussi différentes que cette jeune femme se remettant d’un cancer des os ou que le père d’un membre du Congrès qui se mourait d’emphysème.
Quelqu’un, dans cette foule hétéroclite, me fascinait. Il s’agissait d’un vieux pêcheur italien qui avait perdu ses deux jambes dans un accident de pêche. Lorsque sa famille venait le voir, il tenait cour avec une grande dignité, recevant leurs hommages en tant que patriarche de la famille. Contrairement à beaucoup d’autres malades, heureux de rester toute la journée allongés dans leur lit en pyjama, il s’habillait, faisait sa toilette et s’asseyait avec fierté – droit comme un i – dans sa chaise roulante, observant en silence les événements qui se déroulaient autour de lui.
Un jour, alors que je courais dans tous les sens sans savoir vraiment ce que je devais faire, le vieux marin m’appela, une lueur de malice dans les yeux. « Eh ! vous n’avez rien à faire ? » « Ouais, répondis-je d’un air énervé, je ne sais pas ce que je suis censé faire. » « Si vous n’avez rien à faire, poursuivit-il, eh bien asseyez-vous ! »
Petite mise en garde : ces instructions pour
s’asseoir n’ont pas pour objectif de vous transformer en
pierre – pas plus que le bambou de transformer le serpent
en tige ! Sachez que vous bougerez tant que vous serez en vie.
Le but est de vous asseoir avec l’intention de rester immobile et
d’observer ce qui se passe. Le Bouddha aimait à utiliser la
métaphore du luth – trop serrées les cordes cassent, trop
lâches elles sont injouables ! Si vous êtes trop tendu, vous
terminerez la méditation dans état lamentable et si vous bougez
sans cesse, vous n’arriverez jamais à concentrer et apaiser
suffisamment votre esprit pour tirer un quelconque bénéfice de
votre séance.