Mardi 13 septembre 2011

Requiem pour la Grèce

La question n’est plus de savoir si la Grèce devra quitter la zone euro, mais quand. Les responsables allemands au plus haut niveau l’envisagent publiquement ; alors que c’est impossible juridiquement, puisque le traité européen a prévu une clause de sortie de l’Union européenne, mais pas de l’euro.

Mais foin de juridisme : les traités interdisent aussi à la Banque centrale européenne de financer les États, ce qui n’empêche nullement Jean-Claude Trichet de racheter depuis des mois des centaines de milliards de créances douteuses sur la Grèce et les autres États, que les marchés ne veulent plus financer qu’à des taux exorbitants. C’est le paradoxe Trichet : pour sauver son bébé, l’euro, cet homme achève son mandat en reniant tout ce qu’il a fait depuis vingt ans. Ce parangon de la rigueur, cet obsédé de la lutte contre l’inflation, ce héraut du franc fort, puis de l’euro fort, finit par mener une politique de sauve-qui-peut expansionniste, au risque de créer ces tensions inflationnistes qu’il craint comme le diable. Lui qui se voulait plus germanique que les Allemands doit subir les démissions successives du gouverneur allemand puis, plus grave encore, du chef économiste de la Banque centrale, allemand lui aussi. Cet homme admirable de self-control tance violemment les journalistes ; ce haut fonctionnaire qui fait la morale aux politiques qui n’ont pas respecté les règles de bonne gestion voit lui succéder à la tête de la BCE l’Italien Mario Draghi, qui travaillait naguère chez Goldman Sachs, la banque américaine qui a justement maquillé les comptes grecs pour permettre à ce pays d’entrer dans l’euro.

Mais les Allemands ont compris que le problème de la Grèce n’était pas tant un manque de liquidités que de compétitivité. Ce n’est pas seulement leur État qui ne parvient pas à se réformer, mais aussi leur économie qui étouffe d’avoir la même monnaie que les Allemands. Ces derniers ne veulent pas avoir une nouvelle Allemagne de l’Est sur les rives de la Méditerranée. Avec la Grèce, mais aussi le Portugal et même l’Espagne, qu’ils devraient soutenir jusqu’à la fin des temps. Quand la Cour constitutionnelle de Karlsruhe a autorisé, la semaine dernière, les transferts vers la Grèce, elle a précisé avec soin que ces aides devaient avoir un caractère temporaire. Berlin en doute de plus en plus. Jusqu’à présent, les dirigeants allemands ont résisté à la tentation de se débarrasser des pays du Club Med, comme ils disent, parce que l’euro leur a permis d’avoir une monnaie sous-évaluée par rapport à la parité qu’aurait eue un mark ressuscité.

L’impossibilité pour les Français et les Italiens de dévaluer leur monnaie a permis à l’Allemagne de laminer la concurrence industrielle de ses voisins et d’accumuler des excédents commerciaux inouïs. Mais le prix à payer commence à être élevé : les Allemands n’ont pas envie de devenir comptables des dettes de tous les pays de la zone euro. Les Allemands ne veulent plus mourir pour Athènes, Madrid, Lisbonne, Rome. Et pas même pour Paris.

Le Bûcher des vaniteux
titlepage.xhtml
cover.html
ident1.html
pre2.html
c1_split_000.html
c1_split_001.html
c1_split_002.html
c1_split_003.html
c1_split_004.html
c1_split_005.html
c1_split_006.html
c1_split_007.html
c1_split_008.html
c1_split_009.html
c1_split_010.html
c1_split_011.html
c1_split_012.html
c1_split_013.html
c2_split_000.html
c2_split_001.html
c2_split_002.html
c2_split_003.html
c2_split_004.html
c2_split_005.html
c2_split_006.html
c2_split_007.html
c2_split_008.html
c2_split_009.html
c2_split_010.html
c2_split_011.html
c3_split_000.html
c3_split_001.html
c3_split_002.html
c3_split_003.html
c3_split_004.html
c3_split_005.html
c3_split_006.html
c3_split_007.html
c3_split_008.html
c3_split_009.html
c3_split_010.html
c3_split_011.html
c3_split_012.html
c3_split_013.html
c3_split_014.html
c3_split_015.html
c3_split_016.html
c3_split_017.html
c4_split_000.html
c4_split_001.html
c4_split_002.html
c4_split_003.html
c4_split_004.html
c4_split_005.html
c4_split_006.html
c4_split_007.html
c4_split_008.html
c4_split_009.html
c4_split_010.html
c4_split_011.html
c4_split_012.html
c4_split_013.html
c4_split_014.html
c4_split_015.html
c4_split_016.html
c5_split_000.html
c5_split_001.html
c5_split_002.html
c5_split_003.html
c5_split_004.html
c5_split_005.html
c5_split_006.html
c5_split_007.html
c5_split_008.html
c5_split_009.html
c5_split_010.html
c5_split_011.html
c5_split_012.html
c5_split_013.html
c5_split_014.html
c5_split_015.html
c5_split_016.html
c6_split_000.html
c6_split_001.html
c6_split_002.html
c6_split_003.html
c6_split_004.html
c6_split_005.html
c6_split_006.html
c6_split_007.html
c6_split_008.html
c6_split_009.html
c6_split_010.html
c6_split_011.html
c6_split_012.html
c6_split_013.html
c6_split_014.html
c7_split_000.html
c7_split_001.html
c7_split_002.html
c8_split_000.html
c8_split_001.html
c9_split_000.html
c9_split_001.html
c9_split_002.html
c9_split_003.html
c9_split_004.html
c9_split_005.html
c9_split_006.html
c9_split_007.html
c9_split_008.html
c9_split_009.html
c9_split_010.html
c9_split_011.html
c9_split_012.html
c9_split_013.html
c10_split_000.html
c10_split_001.html
c10_split_002.html
c10_split_003.html
c10_split_004.html
c10_split_005.html
c10_split_006.html
c10_split_007.html
c10_split_008.html
c10_split_009.html
c10_split_010.html
c10_split_011.html
c10_split_012.html
c10_split_013.html
c11_split_000.html
c11_split_001.html
c11_split_002.html
c11_split_003.html
c11_split_004.html
c11_split_005.html
c11_split_006.html
c11_split_007.html
c11_split_008.html
c11_split_009.html
c11_split_010.html
c11_split_011.html
c11_split_012.html
c11_split_013.html
c11_split_014.html
c11_split_015.html
c12_split_000.html
c12_split_001.html
c12_split_002.html
c12_split_003.html
c12_split_004.html
c12_split_005.html
c12_split_006.html
c12_split_007.html
c12_split_008.html
c12_split_009.html
c12_split_010.html
c12_split_011.html
c12_split_012.html
c12_split_013.html
c12_split_014.html
c12_split_015.html
collec3.html