À quoi sert l’UMP ?
C’est le temps de la droite plurielle. Boutin qui se lance, Villepin qui s’obstine, Borloo qui se prépare. Sans oublier Nicolas Dupont-Aignan qui s’incruste. Et Bayrou qui n’a jamais renoncé. La gauche n’est plus la seule à se diviser. L’UMP avait été fondée en 2002 pour éviter la dispersion à la présidentielle, qui avait provoqué l’arrivée de Jean-Marie Le Pen au second tour. L’UMP a échoué. Non seulement elle n’aura pas le monopole de la candidature à droite, mais en son sein les clivages s’aiguisent ; les sujets de discorde se multiplient ; la Droite populaire et les centristes s’exaspèrent ; Bachelot traite Wauquiez de beauf parce qu’il critique le RSA ; la droite populaire demande la tête de Bachelot parce qu’elle est favorable au mariage homosexuel ; on se croirait revenu au bon vieux temps du RPR et de l’UDF.
Nicolas Sarkozy, qui sait qu’en 2007 il avait gagné la présidentielle dès le soir du premier tour avec son score dépassant les 30 %, fait tout pour les arrêter. Pour l’instant en vain. Les droites françaises ont une vieille tradition de division. Sans remonter aux monarchistes pris entre légitimistes et orléanistes, il suffit de se rappeler les querelles homériques entre Chirac et Giscard, puis entre Chirac et Barre, Chirac et Balladur.
Ces temps héroïques pourraient revenir. Pas seulement à cause des ambitions personnelles. C’est le compromis idéologique ayant fondé l’UMP qui explose. Le ralliement du RPR aux thèses de l’UDF, libérales – en économie mais aussi sur le plan des mœurs –, européistes et décentralisatrices, avait permis la progressive fusion des deux anciens ennemis ; les héritiers du gaullisme gardaient les places, mais pour mener une politique que les ennemis du Général avaient défendue.
Chacun des candidats d’aujourd’hui reprend un morceau de la vraie croix : Boutin, la défense de la famille traditionnelle, Villepin, l’indépendance nationale, Dupont-Aignan, le refus de la domination de Bruxelles. Nicolas Sarkozy lui-même, de manière désordonnée, a ramené l’UMP sur les terres du RPR dans les domaines ô combien controversés de l’immigration et de la sécurité. Il faut lire le programme du RPR des années 80 et 90 pour s’apercevoir que sur l’immigration légale, sur le code de nationalité, sur l’islam et même la préférence nationale, le RPR de Chirac était alors très proche du Front national d’hier et d’aujourd’hui.
Les centristes, furieux, parlent de droitisation ; ils ont le sentiment d’être trahis ; ils croient en leurs chances depuis que le renoncement de Dominique Strauss-Kahn leur dégage miraculeusement un espace ; ils se rapprochent de François Bayrou. Si le Président sortant, le soir du premier tour d’avril 2012, parvient à s’arracher au magma de ses rivaux de droite, ceux-ci se rallieront presque tous au vainqueur. Si Sarkozy retrouvait les scores médiocres de Chirac, si Marine Le Pen rivalisait avec lui autour des 20 %, si la gauche l’emportait, alors l’UMP exploserait sous le poids de ses contradictions et des haines accumulées.