Lundi 14 novembre 2011

Le jusqu’au-boutisme des écologistes

Il ne peut pas s’en empêcher. Il faut qu’il imite Mitterrand, en tout. Bien sûr, les Verts n’ont pas le poids historique et politique des communistes d’antan et Cécile Duflot n’a ni la verve ni le talent de Georges Marchais. Mais Hollande fait avec ce qu’il trouve. On se souvient que la renégociation du programme commun avait défrayé la chronique à la veille des législatives de 1978 ; qu’on s’était déchirés sur le nombre de nationalisations ; que la rupture avait fait perdre les législatives à la gauche. Mais que Mitterrand avait alors montré qu’il pouvait résister aux communistes, qu’il n’était pas la gauche molle. De même, Hollande se sert des Verts comme d’un faire-valoir. Sa fermeté à leur égard doit lui valoir certificat de virilité présidentielle. Il le fait avec d’autant plus de jubilation que tous les leaders verts ont soutenu Martine Aubry pendant la primaire.

Comme au temps de l’Union de la gauche, les négociateurs mélangent les questions de fond essentielles : « Doit-on continuer l’EPR – une technologie nucléaire très sophistiquée que la France ne pourra plus exporter si elle l’arrête chez elle – et les affaires politiciennes ? » On s’envoie à la figure des milliards d’euros et on s’échange des circonscriptions. Comme les communistes jadis, les Verts sont coincés par leur refus existentiel de la culture bonapartiste de la Ve République. Leur rejet viscéral de l’homme providentiel. Ils présentent un candidat à la présidentielle alors qu’ils refusent le principe même de l’élection du chef de l’État au suffrage universel. Les socialistes ne sont guère plus cohérents, toujours marqués au fer rouge par leur culture parlementaire. Avec les primaires, ils ont fait pourtant le grand saut vers la présidentialisation. Mais aussitôt désigné, le candidat Hollande prend en main les négociations pour les législatives avec les Verts, comme un vulgaire chef de parti. Hollande, tout à son imitation, a simplement oublié que, dans sa querelle avec les communistes, Mitterrand se voulait aussi à gauche qu’eux, parlait le même langage marxiste que les dirigeants du Parti communiste.

Hollande ne prend pas les mêmes précautions oratoires avec les écologistes. Il leur jette à la figure que le nucléaire, c’est le progrès. C’est une position, certes, tout à fait conforme et à la tradition républicaine et à la tradition socialiste, mais qui met aujourd’hui Hollande dans le même camp que la droite. C’est Nicolas Sarkozy qui, depuis l’accident de Fukushima, a fait du maintien du programme nucléaire la garantie de la souveraineté nationale. C’est Sarkozy qui, habilement, a hissé le nucléaire à un niveau régalien, en a fait un symbole de sérieux, de crédibilité. Comme pour la rigueur. Il a contraint son adversaire à s’aligner sur lui. Et à se détacher de ses alliés verts sur le nucléaire, Front de gauche sur la rigueur. Il le paye cher. Alors, entre le « capitaine de pédalo », comme dit le cruellement drôle Mélenchon, et le souverain hautain à la Mitterrand, le destin de François Hollande hésite encore.

Le Bûcher des vaniteux
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