Jeudi 10 mars 2011

Le nombre de fonctionnaires à géométrie variable

Il est fier, Baroin. On le comprend. 100 000 emplois publics en moins en trois ans, ce n’est pas un mince exploit. Nicolas Sarkozy pourra légitimement dire qu’il a tenu une de ses promesses de campagne électorale : ramener les effectifs de la fonction publique à leur niveau de 1990. « Sous François Mitterrand, disait-il avec ironie, la France n’était pas sous-administrée. » Nous sommes revenus à l’étiage de 1990. Les querelles sur les économies générées ne vont pas cesser. 2,7 milliards dont 1,4 milliard versé aux fonctionnaires eux-mêmes paraissent dérisoires. Mais il faut voir plus loin : un emploi public est à la charge de l’État pendant plus d’un demi-siècle, y compris avec la retraite du fonctionnaire.

La puissance de l’État n’a rien à voir avec le nombre de fonctionnaires. On parle toujours de tradition colbertiste française ; en oubliant que Colbert avait à sa disposition une administration étique et que Bonaparte, autre saint patron laïc de l’État, épuisait littéralement les fonctionnaires à la tâche. Depuis la monarchie, l’État en France a une fonction protectrice. Depuis trente ans, on avait réduit cette tradition à l’embauche des fonctionnaires. La gauche le trompétait fièrement, la droite le faisait honteusement. Sarkozy a, pour une fois, assumé une vraie rupture, même si la courbe avait déjà été infléchie à partir du second mandat de Jacques Chirac. Tout cela, bien sûr, au nom du poids, devenu insupportable, de la dette et des impôts.

Le paradoxe français est qu’il n’y a jamais eu autant de fonctionnaires qu’aujourd’hui. Plus de 5 millions. 20 % de l’emploi total. 650 000 emplois publics de plus qu’il y a dix ans. Cherchez l’erreur… Elle s’appelle « collectivités locales ». Pendant que l’État s’achetait une petite vertu, les régions et communes recrutaient à tout-va. L’un faisait carême, et pour les autres, c’était la grande bouffe. On connaît l’argument des élus locaux : l’État nous a transféré des compétences, nous devons les assumer. Et il n’est pas tout à fait faux. Mais il ne justifie pas tout. Les emplois d’animateurs culturels ou sociaux ont explosé. Les dépenses de communication aussi. La création des communautés de communes a été l’occasion pour celles-ci d’embaucher en double ce que les communes avaient déjà en stock.

La France est devenue le pays des doublons. Tout a explosé avec la seconde loi de décentralisation de 2003, portée par Jean-Pierre Raffarin. En trente ans, nos élites technocratiques, de gauche comme de droite, se sont ainsi donné la main pour tenter de concrétiser leur rêve d’État fédéral à l’allemande, mais l’évolution est inachevée. L’État a transféré sa traditionnelle fonction de protection aux collectivités locales, et la gauche, qui domine dans toutes les collectivités locales, en a fait un outil clientéliste. Nous évoluons ainsi entre deux mondes. Entre notre État jacobin qui n’est plus et le système fédéral de Länder à l’allemande qui n’est pas encore. Pour l’instant, nous cumulons les inconvénients des deux époques et des deux modèles.

Le Bûcher des vaniteux
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