Lundi 10 octobre 2011
Le palmarès des villes les plus endettées
Toutes n’en mouraient pas, mais toutes étaient touchées. La peste de la dette a frappé les villes françaises. Les grandes et les petites. Celles gérées par la gauche et celles dirigées par la droite. Tout s’accumule. On découvre, effaré, que de nombreux élus locaux ont souscrit des emprunts dits toxiques, c’est-à-dire adossés à des devises étrangères – franc suisse ou livre sterling. La déconfiture de la banque Dexia révèle que cohabitaient, au sein de cette même banque, l’activité traditionnelle de prêt aux collectivités locales et les spéculations les plus audacieuses sur les marchés mondiaux. Monsieur Le Trouhadec saisi par la débauche. Des maires de grandes villes, PS et UMP, comme celles de Dijon et du Havre, étaient administrateurs de la banque. Sans doute pour attirer et rassurer leurs collègues.
Cet endettement local s’ajoute à ceux de l’État et de la sécurité sociale. Il alourdit la note qui sera bientôt présentée au contribuable français. Cette situation est inédite. Elle est née de la décentralisation de 2003 qui a donné aux maires des responsabilités de gestion autrefois verrouillées par les préfets. À l’époque, Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre de Jacques Chirac, voulait encore approfondir la décentralisation engagée par le socialiste Gaston Defferre en 1982. Le girondin de droite rejoignait ainsi le grand maire de gauche pour dépouiller l’État central aux deux bouts, par en haut avec l’Europe, par en bas avec les régions et les communes. Mission accomplie. L’État a transféré des compétences innombrables et essentielles à l’Europe et aux collectivités locales. Il s’est désarmé alors que le peuple réclame toujours qu’il joue le rôle de protecteur d’antan.
Mais l’État tarde à se dépouiller des fonctionnaires qui allaient avec ses compétences. Doublons et dépenses à l’envi. Le fameux non-renouvellement d’un fonctionnaire sur deux à la retraite ne produit pas toutes les économies espérées, si bien qu’il est déjà remis en cause. L’embauche dans les collectivités locales bat son plein : 500 000 emplois en dix ans ! Les maires, les départements et les régions expliquent que l’État leur a transféré des compétences sans les financements qui vont avec. Mais nombre d’élus se mêlent de domaines que la loi n’avait pas prévus.
Clientélisme et communication sont souvent les deux mamelles de la décentralisation. Les préfets affaiblis n’osent plus contredire la volonté des élus locaux. C’est justement à cause de cette évolution dramatique que Nicolas Sarkozy a fait voter à la hussarde sa loi sur la réforme territoriale ; ce grand virage jacobin que dénonce désormais Raffarin, après la défaite de la droite aux sénatoriales, qui a vu nombre de petits maires ruraux, furieux de cette réforme, voter socialiste. Il est incontestable que le pouvoir sarkoziste s’est comporté de manière technocratique, comme si le nombre de communes – 36 000, un record en Europe – était l’unique problème. Cependant la question demeure : qui ramènera à la raison une décentralisation emballée comme un cheval fou ? L’État ou la faillite ?