Homme-femme, mode d’emploi
Tout est politique, scandait-on en Mai 68. Pourtant, on ne pensait pas qu’un jour les programmes scolaires de biologie susciteraient les passions politiques. Il est vrai qu’il s’agit de sexe. Apparemment, pas de quoi fouetter un chat. La circulaire ministérielle instaure très sobrement la différence entre l’identité sexuelle, homme ou femme – à l’évidence biologique –, et l’orientation sexuelle, qui relève de choix privés. Entre les deux, les rôles dévolus à chaque sexe, qui sont le reflet de l’interaction séculaire entre le biologique et l’organisation sociale, diverse selon les époques et les sociétés. Déjà, à première vue, on ne voit pas très bien ce que cette étude fait en classe de biologie, quand on la mettrait spontanément en sociologie ou en classe de philo. On pourrait alors étudier les livres passionnants de Simone de Beauvoir ou de Margaret Mead.
Mais en biologie, cherchez l’erreur. Quand on consulte certains ouvrages scolaires, l’erreur saute aux yeux. Pas l’erreur, l’embrouille. Pas l’embrouille, la manœuvre. La question de l’identité sexuelle est marginalisée au profit de celle de l’orientation sexuelle ; la liberté d’orientation sexuelle est exaltée comme un droit de l’homme ; les photos en rajoutent, Gay Pride par-ci, transsexuels par-là ; la minorité est privilégiée sur la majorité ; l’exception devient la norme. La biologie – et sa rigueur toute scientifique – est utilisée pour donner un fondement scientifique indiscutable à une théorie idéologique : la théorie du genre.
Cette théorie du genre est née sur les campus américains des années 70, au sein des mouvements féministes radicaux. Il s’agissait, au départ, de mettre en musique la fameuse formule de Simone de Beauvoir : « On ne naît pas femme, on le devient. » Avec cors et trompettes, mais sans nuance. L’identité sexuelle est, dans la théorie du genre, assimilée à une pure construction psychologique et sociale : on n’est plus défini comme un homme ou une femme, mais seulement comme pratiquant d’une forme de sexualité : hétérosexuelle, homosexuelle, bisexuelle, transsexuelle.
Le but de l’existence n’est plus d’accomplir au mieux son destin biologique – deviens un homme, mon fils ! – mais de choisir sa pratique sexuelle en fonction de ses désirs, voire de son humeur. En passant l’Atlantique, cette théorie, chère aux féministes radicales, a été récupérée par les lobbies gays. Le ministre UMP de l’Éducation, tétanisé par le qu’en-dira-t-on médiatique et syndical, n’ose dénoncer le décalage entre sa circulaire et les livres scolaires.
Les députés de la Droite populaire pourraient aussi s’intéresser aux livres d’instruction civique, souvent des tracts au service des associations antiracistes, ou aux ouvrages d’histoire. Cette polémique montre à quel point des décennies de faiblesse et de désintérêt pour la chose culturelle et scolaire ont rendu la droite impuissante. Quand elle se tait, la gauche sociétale utilise l’école pour endoctriner des générations d’enfants. Quand elle réagit, elle est accusée d’être réactionnaire, de se mettre au service des lobbies catholiques, de faire de l’idéologie. C’est la suprême habileté de l’idéologie dominante que de nier sa nature d’idéologie.