Vendredi 2 septembre 2011
Français, vous avez le sexe et l’argent. Petits veinards !
Affaires, scandales, mensonges d’État… Les grands mots sont de sortie. C’est un rituel avant chaque présidentielle, comme un passage obligé, comme si une loi non écrite de la Ve République obligeait les dossiers sulfureux à patienter jusqu’à la veille de la campagne présidentielle pour voir la lumière, quitte à replonger dans l’obscurité après. On tirait sur le général de Gaulle à balles réelles. Ses successeurs subirent tous le feu des affaires. On raconte que de Gaulle refusa d’utiliser la fameuse photo de Mitterrand recevant la francisque des mains du maréchal Pétain, car il ne voulait pas de la politique des boules puantes.
Ces pudeurs disparurent avec le grand homme. Les partisans du Général lui-même n’hésitèrent pas à faire circuler sous le manteau des photos truquées, dit-on, de Mme Pompidou dans des parties fines. Alors qu’il était un Premier ministre très populaire, Jacques Chaban-Delmas fut tiré en plein vol comme un perdreau par la sortie inopinée dans Le Canard enchaîné de sa feuille d’impôts qui montrait justement qu’il ne payait pas d’impôts. On murmura que cette révélation venait des services fiscaux que dirigeait son grand rival, le ministre des Finances Valéry Giscard d’Estaing, qui, une fois élu président, reçut de plein fouet les fameux diamants offerts par le président Bokassa. Avec la guerre fratricide entre Chirac et Balladur pour la présidentielle de 1995, on atteint des sommets : terrains vendus par Bernadette Chirac d’un côté, affaire Schuller-Maréchal de l’autre – match nul. Mais à gauche, Bernard Tapie est encore aujourd’hui persuadé que tous ses ennuis judiciaires viennent de l’acharnement des socialistes qui craignaient sa concurrence à la présidentielle. On se souvient de 2002, et de la campagne autour du financement du RPR, qui a fait « pschit » lorsque la gauche s’avisa que super-menteur et super-voleur Chirac était l’ultime adversaire de Jean-Marie Le Pen. En 2007, en revanche, les affaires financières furent supplantées par celles de cœur. La femme du candidat de droite et le compagnon de la candidate de gauche étaient déjà partis ailleurs, mais chut ! il ne fallait pas le dire.
Les affaires tournent toujours autour des deux mêmes thèmes : le sexe et l’argent. Comme quoi, les hommes politiques sont des hommes comme les autres. Les révélations viennent toujours du propre camp du présidentiable. On comprend mieux la fameuse maxime de Charles Pasqua : « Avec des amis comme ça, je n’ai pas besoin d’ennemis. » Le Canard enchaîné fut longtemps la boîte aux lettres des règlements de comptes. Aujourd’hui, la multiplication des médias lui a fait perdre son monopole sulfureux. Changement de degré, mais pas de nature. Les Français, vieux peuple politique, regardent ce spectacle entre gourmandise et mépris. Les affaires sont devenues une sorte de rite d’initiation, un mode cruel de sélection des candidats. Nicolas Sarkozy a toujours été convaincu que la peur des affaires le débarrasserait et de DSK et de Borloo. Pour l’instant, il a eu raison pour le premier. Pour cette présidentielle de 2012, les Français ont déjà eu fromage et dessert : le sexe et l’argent. DSK et Bettencourt. Petits veinards, va !