Vendredi 8 juillet 2011

Le hors-jeu de la Cour des comptes

« Quand les bornes sont dépassées, il n’y a plus de limites. » Le Président Pompidou aimait beaucoup à citer cette célèbre réplique du sapeur Camember. Elle a dû trotter dans la tête de son lointain successeur à l’Élysée, à la lecture du rapport de la Cour des comptes. La colère publique du ministre de l’Intérieur atteste la colère privée de son patron.

Colère qui n’est pas sans fondements. Le rôle de la Cour des comptes est de vérifier la régularité des comptes publics, pas de porter un jugement politique sur l’action du gouvernement. Les magistrats piétinent alors les plates-bandes des parlementaires, élus du peuple. Ils ressuscitent aussi une vieille tradition française, celle des parlements de l’Ancien Régime, magistrats non élus qui faisaient des remontrances au roi. Un jour, Louis XIV, excédé, vint au Parlement de Paris, en habit de chasse, un fouet à la main. Nicolas Sarkozy n’est pas chasseur. Et c’est lui qui a donné le fouet qui le fouetterait en nommant premier président de la Cour, en remplacement de Philippe Séguin, le député socialiste de l’Isère, Didier Migaud. Nicolas Sarkozy n’a pas fini de régler la note de l’ouverture. Son choix politique aggravait une tradition de la haute fonction publique française qui veut que, les membres des grands corps du camp au pouvoir investissant les cabinets ministériels, il ne reste pour le travail administratif et juridictionnel que les opposants au régime. Pas étonnant donc que ce rapport ait été rédigé par des magistrats socialistes.

La bataille des chiffres est à la fois essentielle et vaine. Vaine, parce que, comme le disait le grand démographe Alfred Sauvy, « les chiffres sont des êtres fragiles qui, à force d’être torturés, finissent par avouer tout ce qu’on veut leur faire dire ». Les organismes publics comme l’Insee ou l’Ined sont les spécialistes de cette torture de chiffres pour donner un résultat conforme au politiquement correct. Le ministère de l’Intérieur fait le même travail de mise en conformité des chiffres avec ses propres objectifs politiques.

Or, depuis l’arrivée de Sarkozy à l’Intérieur en 2002, la violence contre les personnes a pris une ampleur inédite. L’audace sémantique du discours sarkoziste ne couvre plus l’insuffisance des résultats. Par ailleurs, les contraintes d’économies budgétaires, depuis 2007, ont effacé, en quelques années, les effectifs supplémentaires de policiers que Sarkozy avait obtenus en 2002, à son arrivée place Beauvau.

La sécurité est un enjeu politique majeur. La gauche a déjà perdu deux présidentielles, en 2002 et en 2007, là-dessus. Les souvenirs effarés de l’explosion de la délinquance dans les années Jospin s’effacent lentement ; mais en dépit des efforts d’un Manuel Valls ou d’un François Rebsamen, les socialistes n’ont toujours pas retrouvé de crédibilité aux yeux des Français. Leurs réflexes compassionnels et leur pudeur de vierges effarouchées dès qu’on lie délinquance et immigration les rendent inaudibles. La gauche a donc intérêt à abaisser la crédibilité de la droite à son niveau. La Cour des comptes peut dire : mission accomplie.

Le Bûcher des vaniteux
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