Rive gauche

1.

KIM : abréviation de Kommounistitcheski internatsional molodioji, l’Internationale communiste de la jeunesse, organisation qui fonctionna de 1919 à 1943.

2.

Le mot (en russe souka) désigne un truand qui a transgressé la loi du milieu en acceptant de travailler pour les autorités. Cf. « La guerre des chiennes » in « Essais sur le monde du crime ».

3.

Voir note 5 du récit « Le bouquiniste ».

4.

Il s’agit probablement de Mehmet Talaat Pacha (1872-1921) : membre du parti jeune-turc, il fut ministre de l’Intérieur et porta alors le titre de Talaat Bey. À partir de 1913, il participa avec Enver Pacha et Djamal Pacha au triumvirat qui entraîna l’Empire ottoman dans la guerre mondiale aux côtés des empires centraux. Considéré comme le responsable du massacre des Arméniens de 1915, il fut assassiné en 1921 à Berlin, où il s’était retiré après la défaite, par un Arménien du nom de Soghoman Tehlerian. On ignore si ce dernier était un SR. Il est probable que Chalamov a fait une confusion de dates ou de personnes.

5.

Jeu de cartes.

6.

Il s’agit des prisons de détention tsaristes. Allusion, notamment, à Morozov et à Figner.

7.

Le jour où Andreïev fut libéré de prison (voir « Le plus bel éloge »).

8.

Nestor Makhno (1889-1935) : chef paysan ukrainien qui organisa les masses paysannes de l’Ukraine du Sud après la révolution d’Octobre 1917 pour combattre les troupes d’occupation allemandes et autrichiennes et les forces blanches opposées à l’armée rouge. Mais les paysans ne comprenaient pas la révolution comme Lénine. Dès 1918, alors que l’armée rouge se lançait contre les paysans, Makhno lui opposa une armée de quelque 50 000 combattants qui bénéficiaient de la complicité et du soutien de la population. Après l’échec de la guerre paysanne, Makhno s’enfuit en Roumanie en 1921, puis il gagna Paris où il mourut en 1935.

9.

Il s’agit d’amalgames entre délits politiques et de droit commun, une des stratégies des « Organes ».

10.

Le général Vitovt Poutna, considéré comme l’un des meilleurs stratèges de l’armée rouge, fut une des premières victimes de l’épuration de l’armée de juin 1937.

11.

Personnage du récit éponyme d’Anton Tchekhov (1860-1904) publié en 1885 sous le pseudonyme de Tchékhonté.

12.

La région du Primorié, plus exactement Primorski Kraï, se situe sur la côte orientale de la Sibérie, à proximité de la mer du Japon.

13.

Viatcheslav Mikhaïlovitch Scriabine, dit Molotov (1890-1986), devint le 4 mai 1939 commissaire du peuple aux Affaires étrangères à la place de Maxime Litvinov et signa, avec Ribentropp, le pacte de non-agression germano-soviétique. En juillet 1957, Khrouchtchev le démit de ses fonctions au sein du PC. Il fut alors ambassadeur en Mongolie, puis représentant de l’URSS à Vienne, à l’Agence internationale pour l’énergie atomique jusqu’en 1961. Date à laquelle il fut mis à la retraite.

14.

Kliment Efrémovitch Vorochilov (1881-1969) : fait maréchal en 1935 par Staline, il cautionna la liquidation de tout l’état-major de l’armée rouge, de Toukhatchevski à Blücher. Il fut vice-président du gouvernement de décembre 1947 à la mort de Staline (1953). En mars 1953, il fut nommé président du praesidium du Soviet suprême, c’est-à-dire chef nominal de l’État. Il perdit ce poste en 1960 au profit de Léonid Brejnev. Khrouchtchev, alors chef du parti et du gouvernement, l’écarta de toutes ses responsabilités pour complicité avec le « groupe anti-parti » de Molotov, Malenkov et Kaganovitch. En 1965, il fut réélu membre du Comité central du parti par le XXIICongrès après quatre ans de purgatoire. Il mourut en 1969.

15.

Fils de Pierre le Grand qui reçut le knout des mains de son propre père.

16.

Imitant Staline.

17.

Héros de Don Carlos, drame en cinq actes et en vers de Schiller (1787), défenseur de la liberté, qui mourut, victime du despotisme.

18.

Chalamov fait ici allusion à des méthodes d’interrogatoire dont il a parlé dans le récit « Le bouquiniste ». Ornaldo était le pseudonyme d’un médecin de Moscou, prénommé M.A. Smirnov et spécialiste de l’hypnose collective. Il aurait travaillé pour le NKVD au début des années trente. Quant aux « stations debout à la chaîne », il s’agissait d’interrogatoires ininterrompus où l’on obligeait le détenu à rester debout sans dormir plusieurs jours de suite tandis que les juges d’instruction se relayaient auprès de lui.

19.

Poème de Pouchkine (1799-1837) datant de 1828 et chantant la gloire de Pierre le Grand, vainqueur en 1709 des 18 000 Suédois de Charles XII aidés par les 12 000 Cosaques de Mazeppa. Cette victoire marqua l’entrée de la Russie dans le concert européen et la fin de la suprématie suédoise dans la Baltique.

20.

Ivan Fiodorovitch Nikichov fut à la tête du Dalstroï de 1939 à 1948. Les directeurs précédents du Dalstroï avaient été Berzine (1931-1937), Garanine (1938-1939), et Vychnevitski (1939-1941), dont la disgrâce fut causée par l’incident raconté à la fin de ce récit.

21.

Wallace, Henry Agard (1888-1965), représentant du Parti démocratique, vice-président des États-Unis (1941-1945), quitta le gouvernement en 1946.

22.

Allusion au récit de Nicolas Leskov, Le Gaucher.

23.

Vadim Kozine (1903-1994), chanteur connu.

24.

Léonid Viktorovitch Varpakhovski (1908-1976), documentaliste au théâtre Meyerhold de 1933 à 1935, puis metteur en scène du théâtre russe d’Alma-Ata de 1936 à 1937. Emprisonné de 1937 à 1953, il travaille ensuite au théâtre Griboïedov de Tbilissi jusqu’en 1955. En 1957, il est metteur en scène en chef au théâtre Ermolova de Moscou ; en 1962, il passe au théâtre Maly et en 1970 au théâtre Vakhtangov.

25.

Vsevolod Meyerhold (1874-1942), metteur en scène et théoricien du théâtre, arrêté en 1939, mort en camp.

26.

Mise en scène du roman de Saltykov-Chtchédrine, Histoire d’une ville. Version satirique de l’histoire russe et, tout particulièrement, des colonies militaires créées par Araktcheïev, ministre d’Alexandre Ier, ce roman pouvait se lire, pendant l’époque soviétique, comme une critique de l’État totalitaire.

27.

Sans doute, une adaptation de La Belle Hélène (1864) de Jacques Offenbach.

28.

Du Dalstroï.

29.

Association d’aide à la défense et à la construction aéronavale et chimique (Obchtchestvo sodeïstvia oborone i aviatsionno-khimitcheskomou stroïtelstvou).

30.

À cause de la négligence des autorités. Voir « Le dernier combat du commandant Pougatchov. »

31.

Pièce de l’écrivain polonais Gabriela Zapolska (1906).

32.

Vers de Pouchkine, Dorojnyïe jaloby, 1830.

33.

Bruno Jasienski, poète et écrivain polonais qui se fixa à Moscou en 1929. Arrêté en 1937 et condamné à 15 ans de camp, il mourut à Vladivostok dans une prison de transit.

34.

Premier envoi d’êtres vivants dans l’espace, dont la chienne Laïka, ainsi prénommée à cause de la race de chiens de chasse aboyeurs de Sibérie à laquelle elle appartenait (de laïat, aboyer).

35.

Le 1er Congrès international de la paix organisé par les communistes et leurs sympathisants eut lieu en 1949 à Paris, d’une part, et à Prague, d’autre part, pour ceux des délégués que les autorités françaises ne voulurent pas laisser entrer en France. À partir de cette date, les réunions se multiplièrent dans diverses capitales selon les besoins de la propagande soviétique…

36.

La cybernétique fut condamnée en URSS peu après la guerre comme une invention capitaliste nocive. Les autorités revinrent sur leur erreur en 1958, mais l’URSS accumula un retard important dans ce domaine par rapport à l’Occident. Pour cette campagne anticybernétique, le pouvoir mobilisa philosophes, mathématiciens et physiciens qui condamnèrent à coups d’articles tonitruants les modestes tentatives faites par certains de leurs collègues pour développer cette science.

37.

D’après la pièce de Mikhaïl Lermontov (1814-1841).

38.

Nikolaï Alexeïevitch Nekrassov, dirigea la revue Le Contemporain, créée par Pouchkine, de 1847 à 1866.

39.

Allusion à une controverse entre physiciens, les « lyriques » se retrouvant souvent à Akademgorodok et défendant une position humaniste de la science face à la tendance « technicienne », académique (et orthodoxe par rapport au pouvoir).

40.

Le son « ou » est le cri d’agonie d’Ivan Ilitch dans le récit de Tolstoï et le bruit sinistre du vent, porteur de la révolution de 1905, dans Pétersbourg d’Andreï Biély.

41.

En réalité, le légendaire héros est anglais.

42.

Karl Gustav Emil Mannerheim (1867-1951), général finlandais, commandant en chef des troupes qui luttèrent contre l’URSS en 1939-1940.

43.

Diminutif de Sérafima (la femme de Bougreïev).

44.

La campagne antisémite, déclenchée par Staline à partir de 1948, qui commença par l’arrestation et la liquidation du Comité Juif antifasciste et qui culmina en 1953, avec l’arrestation de plusieurs médecins juifs (le « complot des blouses blanches ») visait officiellement les « cosmopolites ». Ces derniers, c’est-à-dire les Juifs, furent alors partout démis de leurs fonctions.

45.

Article 58, alinéa 10 : « La propagande et l’agitation » entraînant les « mesures de protection sociale » désignées à l’article 58/2 du Code pénal : peine de mort et confiscation des biens, ou détention d’au moins trois ans avec perte de droits civiques et relégation à vie.

46.

On appelait ainsi l’évasion.

47.

Natalia Volokhova, actrice au théâtre de Véra Komissargevskaïa, inspira à Blok une « année insensée » de passion en 1906-1907.

48.

Le patriarcat de Moscou est le territoire soumis à la juridiction du patriarche de Moscou, chef de l’Église orthodoxe autocéphale de Russie. Il est notoire que le patriarche dépend en tous points des autorités.

49.

Sofia Pérovskaïa (1853-1881) prit part à l’attentat qui causa la mort d’Alexandre II (1er mars 1881). Première femme de Russie condamnée à mort et exécutée pour raison politique.

50.

Premier établissement supérieur pour femmes créé par Catherine II en 1764 à Pétersbourg près du monastère Smolny. Réservé aux jeunes filles de la noblesse. Durant la révolution d’Octobre, quartier général des bolcheviks.

51.

SR, socialiste révolutionnaire, parti créé en 1901.

52.

Boris Savinkov (1879-1825). SR, organisateur de nombreux attentats, notamment celui dans lequel le grand-duc Sergueï Alexandrovitch, gouverneur de Moscou, trouva la mort en 1906. Auteur du roman Le Cheval blême (1909), confession d’un terroriste déçu.

53.

Ivan Kaliaïev (1877-1905) : SR, l’un des auteurs de l’attentat qui causa la mort d’un ministre de l’Intérieur, V. K. Plehwe. Exécuté à la forteresse de Schlüsselbourg.

54.

Association moscovite des centrales électriques d’État.

55.

Panneau en fer, en bois ou parfois en verre dépoli, installé à l’extérieur de la fenêtre de façon à ce que les prisonniers ne voient qu’une étroite bande de ciel.

56.

Grigori Guerchouni (1870-1908), un des fondateurs et dirigeants du parti SR, organisateur de nombreux attentats. Après une condamnation à mort commuée en travaux forcés à perpétuité, fut transféré en Sibérie, s’enfuit de prison, gagna l’Europe en passant par la Chine et les États-Unis. Mourut à Zurich.

57.

La Volonté du peuple (Narodnaïa volia) : mouvement extrémiste créé en 1879, regroupant des révolutionnaires qui envisageaient la lutte politique comme l’organisation d’attentats visant le renversement de l’autocratie. L’une de leurs actions fut l’assassinat d’Alexandre II le 1er mars 1881.

58.

Nikolaï Kibaltchitch (1853-1881), expert en explosifs de la Volonté du peuple, fut impliqué dans l’attentat contre Alexandre II. Alexandre Mikhaïlov (1855-1884) faisait fonctionner une imprimerie clandestine ; fut condamné à mort. Andreï Jéliabov (1851-1881), terroriste et idéologue, arrêté à la veille de l’assassinat du tsar, exigea d’être jugé avec ses compagnons et fut condamné à mort avec eux.

59.

Mot ukrainien signifiant « pères », qui était le nom donné aux chefs des innombrables bandes se battant à la fois contre les Blancs et contre les Rouges.

60.

Andreï Ianouarovitch Vychinski (1883-1954) : menchevik en 1903, puis bolchevik en 1920. Avocat et professeur de droit, il devint procureur général adjoint en 1933 et procureur général en 1936. Il fut l’accusateur public des grands procès de Moscou en 1936, 1937 et 1938. Adjoint de Molotov aux Affaires étrangères en 1940, il se préoccupe ensuite d’instaurer des régimes communistes en Roumanie et en Bulgarie. Après la mort de Staline, il fut délégué à l’ONU et se distingua par son intransigeance pendant la guerre froide.

61.

Un des célèbres procès de Moscou des années 1936-1938. Piatakov était le vice-commissaire du peuple à l’Industrie lourde.

62.

On appelait ainsi les gens condamnés pour avoir raconté des histoires drôles.

63.

Mikhaïl Rafaïlovitch Gots (1866-1906), SR, émigra en 1901 à Paris. Il mourut à Berlin.

64.

« Cinq ans de camps éloignés ».

65.

C’est-à-dire la torture.

66.

Les décembristes, ou décabristes (du mot russe dekabr : décembre) : groupe de nobles hostiles à l’autocratie, qui le 14 décembre 1825 soulevèrent quelques régiments contre Nicolas Ier, sur la place du Sénat à Saint-Pétersbourg. La révolte fut écrasée. Cinq de ses chefs, dont Pestel et Mouraviov, furent pendus, cent vingt personnes emprisonnées à la forteresse de Schlüsselbourg ou déportées en Sibérie.

67.

Il s’agit de Sergueï Mikhaïlovitch Lounine (1787-1845) : il ne participa pas au soulèvement du 14 décembre 1825, car il se trouvait alors à Varsovie. Arrêté en janvier 1826, il fut condamné à vingt ans de travaux forcés qu’il purgea à partir de 1828 au bagne de Nertchinsk. Il fut envoyé en relégation près d’Irkoutsk en 1836. Il eut alors une activité de publiciste jusqu’en 1841 où il fut de nouveau arrêté pour avoir propagé des idées décembristes. Envoyé à Nertchinsk, il y mourut en détention. Herzen fut le premier à publier certaines de ses œuvres en 1859 et 1861 dans la revue L’Étoile polaire.

68.

Le 3 mars 1918, le pouvoir soviétique signa le traité de Brest-Litovsk avec le bloc allemand : la Russie perdait de nombreux territoires, mais obtenait la fin des hostilités. En juillet 1918, les socialistes-révolutionnaires de gauche tentèrent de faire reprendre la guerre avec l’Allemagne : le 6 juillet, Stern assassina l’ambassadeur d’Allemagne à Moscou, M. Mirbach.

69.

Épître de saint Paul aux Romains, en slavon dans le texte.

70.

Diminutif de Sergueï.

71.

On appelle « cicatrisation secondaire », ou « médiate », une cicatrisation qui ne se fait pas d’emblée, mais après une phase de suppuration, de décrustation, de détersion ou de bourgeonnement, généralement due à une plaie souillée.

72.

On appelle « communisme de guerre » la politique de coercition rigoureuse qui fut appliquée en Russie de 1918 à mars 1921 : elle visait à consolider le régime soviétique et à triompher des ennemis de l’intérieur (Russes blancs) et de l’extérieur. Mais Lénine dut admettre son échec (« le passage immédiat aux formes purement socialistes dépasse nos forces »). Aussi, après la révolte de Kronstadt, il instaura la NEP (Nouvelle Politique économique), qui fut dénoncée par Staline en 1928.

73.

Les comités des pauvres (komitety bednoty) n’existèrent que dans le monde paysan, après la révolution et avant la collectivisation des terres. Les bolcheviks créèrent ces comités pour faire pièce aux koulaks : ils constituèrent une sorte de point d’appui à la bolchevisation des campagnes.

74.

Alexandre Alexandrovitch Bestoujev (1797-1837) : romancier et poète qui adhéra en 1824 à la « Société du Nord », condamné à mort après le soulèvement des décembristes du 14 décembre 1825. Sa peine fut commuée en exil à Iakoutsk. En 1929, il fut transféré dans le Caucase où il servit comme simple soldat.

75.

Le procès des spécialistes des mines, connu sous le nom d’affaire des Chakhty (ville du Donbass qui signifie « mines »), se déroula du 18 mai au 2 juillet 1928. Cinquante-trois ingénieurs et techniciens, dont trois Allemands, furent inculpés de « contre-révolution » et de « sabotage » (vreditelstvo). Ils avaient travaillé dans les mines de charbon du Donbass, à l’administration centrale des mines de Kharkov et aux administrations minières de Moscou.

76.

L’emploi du prénom suivi du patronyme marque le respect : on s’adresse généralement ainsi à des gens plus âgés ou occupant une fonction importante.

77.

Dmitri Pletniov : cardiologue de réputation internationale, le docteur Pletniov fut impliqué dans le troisième procès de Moscou et accusé, avec d’autres médecins, d’avoir perpétré des « assassinats médicaux » sur l’ordre de Iagoda (chef du NKVD de 1934 à 1936). Condamné à 25 ans d’emprisonnement sur « expertises médicales » signées par cinq médecins, il mourut dans un camp. La journaliste social-démocrate Brigitte Garland, qui séjourna dans un des camps de Vorkouta de 1948 à 1953, dit y avoir connu le docteur Pletniov et que celui-ci mourut durant l’été 1953, juste avant sa libération (cité par Robert Conquest dans La Grande Terreur Stock, 1970, p. 394).

78.

Allusion à l’époque du servage où les grands propriétaires terriens organisaient sur leurs terres des activités artistiques et des théâtres où se produisaient leurs serfs.

79.

Il existait diverses catégories de camps définis par les réformes successives : les camps de rééducation par le travail (ITL : Ispravitelno troudovyïé lagueria) ; les camps de travaux forcés (KL : Katorjnyïé lagueria) ; on y ajouta les camps disciplinaires (chtrafnyïé lagueria) et les camps à numéros pour récidivistes (bereguitelnyïé lagueria) où les détenus étaient désignés par des numéros. En fait, il y avait toujours des « annexes » des camps où l’on pouvait envoyer les détenus punis : ainsi Djelgala, camp disciplinaire de sinistre réputation, avait une « annexe » encore plus terrible : Zolotisty.

80.

L’as de carreau : à l’époque tsariste, les bagnards étaient marqués d’un carré rouge dans le dos.

81.

C’est-à-dire des interrogatoires.

82.

Avel Drabkine, chef de l’OuSVITL.

83.

Krivitski, Efim Borissovitch, Zaslavski, Ilia Pétrovitch figurent comme témoins dans l’affaire Chalamov instruite par le délégué en chef Fiodorov en mai 1943. D’après leur témoignage Chalamov aurait tenu des propos violemment contre-révolutionnaires à l’encontre des dirigeants du Parti communiste bolchevik et du commandant en chef des Forces armées de l’Union soviétique… Il aurait calomnié la politique culturelle menée par le pouvoir soviétique. (Affaire no 9646). Note de l’édition russe.

Plusieurs témoignages d’anciens détenus viennent confirmer le rôle de faux témoin professionnel que joua au camp Krivitski, ancien vice-commissaire du peuple à l’Industrie lourde condamné à quinze ans de camp en 1937 comme contre-révolutionnaire : 1. La communiste belge Elinor Lipper, qui passa « onze ans dans les bagnes soviétiques » (titre de son livre publié par Nagel en 1950), rapporte que c’est sur le « témoignage » de Krivitski que le professeur Koch, un Allemand de la Volga, chirurgien de métier, âgé de 70 ans en 1939 et condamné à dix ans de camp pour activité contre-révolutionnaire (à cause de son origine allemande), fut fusillé pour de prétendus propos « pro-hitlériens » et « pro-fascistes » ; 2. Evguénia Guinzbourg, dans Le Ciel de la Kolyma (Seuil, 1980), dit que Krivitski, un ancien médecin, a servi de témoin à charge contre son deuxième mari, Anton Walter (également d’origine allemande). Cependant, c’est ce même Krivitski qui lui a sauvé la vie lors de la traversée pour Magadane (cf. Le Vertige, Seuil). Selon Evguénia Guinzbourg, Krivitski serait mort à l’hôpital de Bélitchia, d’une attaque.

84.

Georges Dimitrov (1882-1949) : homme politique bulgare, un des chefs du communisme international. Accusé par les nazis d’avoir incendié le Reichstag à Berlin le 23 février 1933, il assura lui-même sa défense et prononça, devant le tribunal de Leipzig, un réquisitoire si brillant contre Goering qu’il fut acquitté. En 1944, il regagna la Bulgarie où il renversa la monarchie en 1946. Il mourut en 1949 à Moscou où il était allé se soigner.

85.

Ivan Alexeïevitch Bounine (1870-1953) : poète et romancier russe qui quitta la Russie en 1920 et devint un des principaux écrivains de l’émigration russe. Prix Nobel de littérature en 1933.

86.

Lampe à pétrole de grosseur moyenne dont la mèche a une largeur de quatre lignes (10 mm environ).

87.

Allusion à un tableau du peintre Vassili Ivanovitch Sourikov (1848-1916), Menchikov à Bériozovo : il y montre le favori de Pierre le Grand, le prince Alexandre Danilovitch Menchikov (1672-1729), en exil en Sibérie, à Bériozovo, dans une isba en bois décoré. Peintre d’épisodes de guerre et d’histoire, Sourikov obtint la médaille de bronze à l’Exposition universelle de Paris en 1900.

88.

Date de l’opération Barbarossa : l’invasion de l’URSS par les troupes allemandes.

89.

« Souffler » et « frapper » veulent dire « dénoncer ».

90.

Mikhaïl Mikhaïlovitch Zochtchenko (1895-1958) : conteur qui analysa avec un esprit satirique et un humour audacieux les réalités de la révolution. Ses récits, qui portent sur des épisodes de la vie quotidienne, eurent un grand succès. Mais en 1946 ses œuvres furent déclarées « étrangères à l’esprit de la littérature soviétique ».

91.

Première strophe d’un poème de M. Gorki, « Le chant du pétrel » (1901). Le pétrel, oiseau « annonciateur de tempête », est le symbole de la révolution.

92.

Boris Nikolaïevitch Bougaïev, dit Andreï Biély (1880-1934) : écrivain et poète russe de l’école symboliste. Il exprima dans son œuvre la foi en la renaissance mystique de la Russie. Auteur notamment de Pétersbourg, de Kotik Letaïev et de La Colombe d’argent (publiés en français aux éditions de l’Âge d’Homme.)

93.

Stokhod : fleuve d’Ukraine du nord-ouest, non loin de la frontière polonaise.

94.

On note de un à cinq en URSS (le cinq étant la meilleure note).

95.

« L’eau use la pierre », proverbe russe.

96.

Officier du NKVD, Zakovski survécut à la chute de Iagoda en 1936, mais disparut à la suite de Iéjov en 1938.

97.

Lion Feuchtwanger, écrivain allemand. En 1933, il émigre en France pour fuir le nazisme. En janvier 1937, il se rend en URSS où il assiste au procès Piatakov-Radek. Il en fit des comptes rendus mensongers pour les lecteurs occidentaux : son livre Moscow 1937, publié à Londres en 1937, décrit tous les procès sous un jour favorable aux autorités soviétiques. En 1940, il s’installe aux États-Unis. Auteur de nombreux romans, dont le plus célèbre est Le Juif Süss (1925), il écrivit aussi des essais sur Goya et Rousseau.

98.

Léonid Konstantinovitch Ramzine (1887-1948) : cet ingénieur fut le principal accusé du procès du prétendu « parti industriel » (1930) dans lequel fut impliqué l’historien Tarlé à cause des « aveux » de Ramzine. Deuxième affaire montée à la fin des années vingt et au début des années trente pour mettre les mécomptes financiers, industriels ou agricoles sur le dos de « saboteurs ». Le prétendu parti aurait compté deux mille membres, mais huit seulement furent déférés devant le tribunal. Ramzine survécut au camp et fut l’inventeur de la « chaudière à flux continu » à laquelle il donna son nom. On lui attribua pour cette invention, en 1943, le prix Staline, l’ordre de Lénine et l’ordre du Drapeau rouge du travail.

99.

« Dans l’autre monde », dans l’argot des truands.

100.

William Harvey (1578-1657) : médecin anglais célèbre par la découverte de la circulation du sang.

101.

Konstantin Sergueïevitch Alexeïev, dit Stanislavski (1863-1938) : acteur et metteur en scène, il s’attacha à l’étude méthodique des phénomènes psychiques qui accompagnent le jeu – la physique – de l’acteur.

102.

On distingue deux phases dans le sommeil : une phase passive (alpha) et une phase active (bêta), où l’on relève une activité du cerveau alors que tous les muscles sont relâchés : on suppose que c’est la phase des rêves.

103.

Mikhaïl Dmitrievitch Rioumine : membre du contre-espionnage militaire (Smerch = smert chpionam : mort aux espions), il devint ensuite vice-ministre de la Sécurité d’État en 1946. Sa participation à la mise en scène du « complot des blouses blanches » lui valut d’être arrêté un mois après la mort de Staline et fusillé ultérieurement.

104.

Photographe portraitiste très célèbre, voire légendaire, qui signait ses photos tantôt Paolo, tantôt du nom entier (rue Stolechnikov à Moscou).

105.

Konstantin Dmitrievitch Balmont (1867-1942) : auteur de nombreux recueils de vers qui l’apparentent surtout aux symbolistes, notamment Sous le ciel nordique (1894), Édifices en flammes (1904), Soyons comme le soleil (1903), Rien que l’amour (1904).

106.

Fiodor Kouzmitch Teternikov, dit Sologoub (1863-1927) : poète, romancier et dramaturge. L’un des premiers représentants du symbolisme russe ; son œuvre profondément pessimiste décrit un monde maléfique dans des poèmes (Le Cercle enflammé, Inferno), dans des pièces de théâtre (Danses nocturnes, La Victoire de la mort) ou des romans (Le Démon mesquin, 1902, son œuvre la plus célèbre parue à la NRF, Gallimard).

107.

Nikolaï Stepanovitch Goumiliov (1886-1921) : poète acméiste, mari d’Anna Akhmatova de 1910 à 1918, il fut fusillé pour avoir participé à un « complot contre-révolutionnaire ». Il fut jugé dans l’affaire du « complot du Pr Tagantsev » qui comprenait des intellectuels, des militaires et des lycéens de Leningrad. On ne sait trop pourquoi on l’appela par la suite « complot des lycéens ».

108.

Alexeïev Alexeïevitch Ignatiev (1877-1954) : général, descendant de la famille noble des Ignatiev. Diplomate et écrivain. Attaché militaire au Danemark, en Suède et en Norvège (1908-1912), il le fut ensuite en France (1912-1917). Après la révolution, il rallia le pouvoir soviétique. Il eut des postes de responsabilité dans l’armée jusqu’à sa retraite en 1947. Il s’occupa alors de littérature et publia ses souvenirs : Cinquante ans dans le rang (1959, 2 tomes).

109.

Kalym : terme tatare désignant, à l’origine, le prix payé pour obtenir une femme en mariage.

110.

La police secrète fut épurée à plusieurs reprises ; mais elle fut surtout touchée en 1938-1939, lorsque Béria, succédant à Iéjov, procéda à « l’épuration des épurateurs ».

111.

Konstantin Nikolaïevitch Léontiev (1831-1891) : philosophe de tendance slavophile. Ses idées sont exposées dans La Russie, l’Occident et les Slaves (1885-1886). Il est aussi l’auteur d’une étude intitulée Tolstoï romancier : analyse, style et atmosphère (1890). Devenu moine, il mourut à la laure de La Trinité Saint Serge (Zagorski).

112.

Elizaveta Iakovlevna Drabkina (née en 1901) : adhère au PC dès 1917. Elle prit part à la révolution et fut la secrétaire de Sverdlov. Elle écrivit ses Mémoires dans Les Biscottes noires (1957-1960) et fut l’auteur de nombreux romans et d’une biographie.

113.

Piotr Filippovitch Iakoubovitch (1860-1911) : poète et écrivain (sous de nombreux pseudonymes), membre de Narodnaïa volia (La Volonté du peuple), il est arrêté, condamné à mort, puis sa peine est commuée en dix-huit ans de bagne. Dans le monde des réprouvés constitue ses Mémoires de prisonnier.

114.

La loi du prêt-bail, ou Lend-Lease Act, votée aux USA le 11 mars 1941, donnait au président des États-Unis la possibilité de mettre certains articles énumérés par la loi à la disposition de pays dont il jugerait la défense vitale pour les USA. De novembre 1941 à août 1945, les USA ont fourni au titre du prêt-bail un apport en matériel d’environ 42 milliards de dollars, dont l’URSS reçut 28 %.

115.

Graisse solide destinée à l’entretien des machines, des véhicules et des moteurs, qui a la particularité de ne pas geler même par grand froid.

116.

Image fréquemment utilisée dans les contes russes.

117.

Ce titre renvoie probablement à la maxime romaine « à chacun son dû », que Chalamov évoque dans le récit « Ration de campagne » et dont il pensait qu’elle surmontait les portails des camps nazis.

118.

Nadejda Iakovlevna Mandelstam : veuve du poète Ossip Mandelstam, a publié ses Mémoires : Contre tout espoir, Gallimard, 1972, 1974 et 1975.

Récits de la Kolyma
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