Petit lexique
affaire : il s’agit des éléments qui ont conduit à la détention ou à l’exécution sans qu’il y ait eu obligatoirement un procès. (Voir troïka et Conférence spéciale.)
aide-médecin : à l’origine, le mot feldscher désigne un médecin militaire ou fonctionnaire. En camp, il s’agit d’un infirmier spécialisé, capable d’assurer le fonctionnement d’une infirmerie.
à la polka : coupe de cheveux classique, cheveux courts.
ASSA : propagande antisoviétique (antisovietskaïa aguitatsia) ; article-sigle de condamnation équivalant à l’alinéa 10 de l’article 58 du Code pénal.
badigeonneur : terme méprisant du langage des truands pour désigner les membres du corps médical.
Bamlag : groupe de camps de la ligne Baïkal-Amour (construction du chemin de fer).
Biélomorkanal (Biélomorsko-baltiïski kanal) : canal reliant la mer Baltique à la mer Blanche. Creusé, à l’aide de pelles et de brouettes, par les bras de trois cent mille détenus dans les marécages et les roches de Carélie. La réalisation de ce grand chantier du premier plan quinquennal fut confiée à l’Oguépéou. Cette « école de rééducation socialiste », comme l’écrivit Gorki, préluda à l’extension des camps dans tout le pays.
Berlag (Béréguitelny laguer) : camp à surveillance renforcée où régnait une très grande discipline et où les détenus étaient constamment sous la surveillance de soldats armés, flanqués de chiens policiers. Ces camps, destinés aux « récidivistes », ne portaient pas des noms mais des numéros.
borchtch : soupe à base de viande et de légumes, essentiellement du chou et de la betterave, qu’on mange avec de la crème fraîche. Plat typique ukrainien ou russe.
boura : jeu de cartes inventé par les truands. Les effets personnels ou parfois même la vie des autres prisonniers en était l’enjeu.
bourki : chaussures cousues avec des bouts de tissus.
Boutyrki : la plus grande prison de Moscou, utilisée déjà à l’époque tsariste, réservée, à l’époque stalinienne, aux détenus dont les dossiers étaient suivis par le NKVD et le MVD. Chalamov y séjourna en 1937. (Il l’évoque dans Vichéra.)
bouzille : tatouage dans l’argot des truands.
brasse : ancienne mesure de longueur égale à cinq pieds, soit 1,60 mètre environ.
brigade culturelle : dans tous les camps, il y avait des équipes d’« artistes amateurs » placées sous la direction des départements ou sections culturelles et éducatives (KVO et KVTch).
camp à numéros : voir Berlag.
campos (kant) : 1. travail léger. 2. temps chômé pendant une journée de travail.
caoutchoucs tchouni : chaussures d’été des détenus ; caoutchoucs fabriqués avec de vieux pneus et maintenus par des ficelles.
Capstan : tabac de pipe de luxe.
cave (freier) : dans la langue des truands, un homme qui n’appartient pas au monde de la pègre.
champignon : construction sommaire en bois permettant aux soldats d’escorte de s’abriter de la pluie.
chapka : bonnet de fourrure à oreillettes.
chaussettes russes : bandelettes de tissu qu’on enroule autour des pieds.
chauve-souris : lampe de mineur.
chef de baraque (dnevalny) : détenu responsable de l’ordre et de la propreté dans une baraque. Il est aussi appelé staroste dans certains camps.
chef de brigade (brigadir) : détenu qui dirige une équipe de travail (brigada), chargé de présenter des rapports journaliers sur la production et responsable des résultats.
chienne (souka) : un truand qui a accepté de travailler ou de collaborer d’une manière ou d’une autre avec l’État. Considéré comme traître par ses camarades, il peut être exécuté.
cinquante-huit : on désigne ainsi un détenu politique condamné selon l’article 58 du Code pénal. Fort de quatorze alinéas, l’article 58 énumère toutes les formes possibles d’atteintes aux intérêts et à la sécurité d’État, y compris la non-dénonciation ou la négligence. Il restera en vigueur jusqu’en 1959.
Collège de la Vétchéka : institué par le Sovnarkom (le Conseil des commissaires du peuple) le 7 décembre 1917, premier tribunal des Organes, présidé par Dzerjinski lui-même. Avait le pouvoir de prononcer des condamnations, jusqu’à la peine capitale.
commando opérationnel (operativniki, sychtchiki-operativniki, opergrouppa) : groupe d’officiers ou de sous-officiers dépendant des Organes et plus directement de leurs délégués locaux (les oper) ; chargés de traquer les détenus évadés, ils avaient des postes sur la route de la Kolyma.
chef de chantier ou chef de travaux (prorab) : responsable de la production, choisi la plupart du temps parmi les libres.
combinat : complexe industriel.
Conférence spéciale ou Osso (Ossoboïé soviechtchianiïé) : Organes rattachés à l’Oguépéou, puis au NKVD, héritiers des commissions de la Tchéka et des troïkas, les Osso, apparus dès la fin des années vingt, fonctionnaient hors procédure et condamnaient les prévenus en leur absence. C’est ce qu’on appelait les sanctions administratives. Les Osso se bornèrent à infliger des peines de camp mais, en 1937, elles reçurent aussi le droit de condamner à mort. Les sentences ne se référaient pas au Code pénal, mais aux sigles.
continent : le reste du pays par rapport à la Kolyma. La région de la Kolyma, qui doit son nom au fleuve et aux monts Kolyma, est partie intégrante du continent asiatique, mais elle n’est accessible que par bateau (de Vladivostok à Magadane) ou par avion. Voilà pourquoi cette région est perçue comme une île par les détenus.
contremaître (diessiatnik) : responsable de l’organisation et du contrôle du travail dans un secteur de production, il a sous ses ordres aussi bien des détenus que des libres.
corbeau ou corbeau noir : le panier à salade.
crevard (dokhodiaga) : détenu réduit à la dernière extrémité.
crispins : ce mot, qui désigne normalement des manchettes de cuir cousues à certains gants pour protéger les poignets, désigne à la Kolyma des gants très longs.
Dalstroï (Glavnoïé oupravléniïé stroïtielstva dalniego severa) : Direction centrale de la construction de l’Extrême-Nord. La région de la Kolyma fut placée sous le contrôle du Dalstroï, branche du NKVD, en 1931. Il s’agissait d’exploiter les richesses minières de la région et de la coloniser. En 1937, quand Chalamov arriva à la Kolyma, le Dalstroï se subdivisait en sept directions locales. Toute personne libre ou détenue dépendait du Dalstroï, qui avait la haute main sur la région. Bien des anciens détenus, n’ayant pas obtenu le droit de regagner le continent, continuèrent à travailler pour le Dalstroï comme « salariés libres ».
déchargements : actions consistant à vider les camps par des condamnations à la relégation, des amnisties ou des exécutions capitales. Les décisions étaient prises par un groupe de trois hommes, une troïka dite « de déchargement ».
décomptes (des jours de travail) : système permettant de comptabiliser une journée de détention comme plusieurs à condition que la norme soit remplie. Cela concernait des travaux très durs ou dangereux et donnait aux détenus l’espoir d’une libération anticipée. Ainsi, dans les mines, on pouvait gagner jusqu’à sept jours pour un jour et, dans des cas exceptionnels, on promettait des décomptes plus avantageux. Cette mesure, qui allait de pair avec la « rééducation-refonte » des détenus par le travail, était renforcée par le système des rations de nourriture calculées en fonction du rendement au travail.
délégué : il s’agit du représentant des Organes dans les camps. Il a les pleins pouvoirs de police et d’instruction des affaires au camp, comme l’indique son nom en russe : oupolnomotchenny (qui a les pleins pouvoirs). Le délégué local était placé sous les ordres d’un délégué en chef, lequel dépendait à son tour d’un délégué en chef principal. Surnommé « parrain » ou « compère » (koum), le délégué des Organes recrutait aussi les mouchards.
direction (oupravléniïé) : administration d’un ensemble de camps.
dochka : veste avec de la fourrure à l’intérieur et à l’extérieur.
dossier pénitentiaire : dossier établi en deux exemplaires, dont l’un est conservé à la direction des camps et l’autre suit le détenu. Il contient les renseignements concernant le détenu : état civil, article(s) du Code pénal, condamnation(s) et, dans certains cas, les « directives spéciales » de Moscou : interdiction de toute correspondance, affectation aux travaux pénibles et obligation pour les autorités du camp de faire des rapports trimestriels.
éditer : dans l’argot de la pègre, raconter des œuvres littéraires, les réciter par cœur. Les truands aimaient « pomper la culture » et se choisissaient des caves instruits – des rômanciers ou « écrivains » – capables d’« éditer des rômans ».
équipes de rétablissement (ozdorovitielnyïé komandy) : voir OPé, OKa.
escorte : elle était composée de soldats (qu’on a appelés « combattants » avant de les nommer « soldats ») regroupés au sein d’une garde spéciale préposée aux camps, appelée VOKhR (Vnoutrenniaïa okhrana respoubliki), Garde intérieure de la République, ou Vokhra (Voïennizirovannaïa okhrana), Garde paramilitaire.
galouchka (pl. galouchki) : boulette à base de farine de pomme de terre, de beurre et de lait (plat ukrainien).
gonfler : rester à ne rien faire.
Gosplan (Gossoudartsvienny planovy komitet) : comité d’État chargé de la planification.
Goulag (Glavnoïé oupravléniïé laguérieï) : Direction centrale des camps.
Grande Terre : voir continent.
Ijevka : fusil de chasse ou de sport qui tire son nom de la ville où se trouve l’usine qui le fabrique : Ijevsk (capitale de la République autonome d’Oudmourtie).
Ivan Ivanovitch : nom méprisant donné par les truands aux intellectuels ou aux gens instruits.
isolateur : 1. prison spéciale destinée à des détenus politiques « dangereux » (notamment des SR, jusqu’en 1936 environ, date à partir de laquelle ils furent aussi envoyés dans les camps). 2. nom donné à la prison qui était dans le camp et où on enfermait les gens par mesure punitive (cachot).
jakan : balle fabriquée au XIXe siècle en Lituanie par un chasseur nommé Iakan et destinée au gros gibier.
juge d’instruction (sledovatel) : les enquêteurs dépendant des Organes étaient à la fois chargés de mener les enquêtes et d’instruire les dossiers.
kacha : bouillie de céréales souvent à base de variétés de sorgho utilisées normalement pour le bétail.
kalym (ou kalyn, kalim) : cadeaux que le futur époux doit remettre aux parents de sa fiancée chez les Tatars et d’autres peuples musulmans.
kissel : gelée liquide sucrée faite avec du sirop de fruits ou du vin et de la fécule de pomme de terre. Le kissel du camp était une eau colorée et légèrement sucrée.
kolymka : lampe à essence de fabrication artisanale de la région de la Kolyma.
Komintern : IIIe Internationale communiste, fondée en mars 1919 par Lénine et dissoute en juin 1943 par Staline.
Komsomol (Kommounistitcheski soïouz molodioji) : Union des jeunesses communistes.
KPK (Kraïskipartiïny komitet) : comité de parti du territoire, le territoire étant la division administrative supérieure à la région, elle-même supérieure au district.
KRTD (Kontr-revolioutsionnaïa trotskistskaïa deïatelnost) : activité contre-révolutionnaire trotskiste. Article-sigle. L’un des plus graves chefs d’accusation à cause de la lettre T (trotskiste). En effet, l’article-sigle KRD (activité contre-révolutionnaire) était courant et n’entraînait pas l’impossibilité d’obtenir un passeport à l’issue de la peine, ni les fameuses directives spéciales (voir dossier pénitentiaire), qui étaient le lot des « trotskistes ».
kvas : boisson légèrement alcoolisée obtenue par la fermentation de seigle (ou de pain de seigle), parfois additionné d’orge ou de fruits acides.
KVO (Koultourno-vospitatelny otdiel) : département culturel et éducatif.
KVTch. (Koultourno-vospitatelnaïa tchast) : section culturelle et éducative (subordonnée au département culturel et éducatif).
Léfortovo : ancienne caserne située dans le sud-est de Moscou et transformée en prison.
libre (un libre ou un travailleur libre) : personne qui travaillait à la Kolyma sans être un détenu ni un membre de l’administration des camps. Il pouvait s’agir de personnes venues volontairement dans la région (médecins, ingénieurs, géologues, etc.) – le gouvernement accordant des primes spéciales et toutes sortes d’avantages à ceux qui acceptaient d’aller travailler à la Kolyma –, ou d’anciens détenus qui restaient pour travailler comme salariés après avoir purgé leur peine, soit volontairement, soit parce qu’ils n’avaient pas le droit de quitter la région.
liqueur La Nuit bleue : alcool dénaturé.
Loubianka : une des vieilles prisons de Moscou. Après la guerre, au moment de la reconstruction de la capitale, la prison fut détruite et les Organes s’installèrent sur cette même place Dzerjinski, dans un ancien immeuble construit autrefois pour une compagnie d’assurances britannique (la Rossia). C’est ce bâtiment que l’on continue d’appeler la Loubianka.
Magadane : capitale de la région de la Kolyma. Port situé sur la mer d’Okhotsk où les détenus arrivaient par bateau de Vladivostok. Ville entièrement construite par les détenus.
magar : céréale (une variété de sorgho) destinée au bétail, dont on nourrissait les détenus.
Maglag (Magadanskiïé laguéria) : administration des camps de Magadane.
malakhaï : chapka de fourrure avec de larges oreillettes ajustées sur l’arrière de la tête.
métreur (zamerchtchik) : nom donné à celui qui mesurait le cubage de terre enlevée dans les travaux de construction des routes ou le cubage de bois scié dans les travaux d’exploitation forestière.
mission (komandirovka) : un travail effectué en dehors du camp principal, dans la forêt, une prospection géologique, un combinat de vitamines, etc. Ce mot peut être employé de façon ironique : « mission des fusillades » pour la Serpentine.
Moskanal : canal reliant la Moskova à la Volga. Il fut construit par des détenus, comme le Biélomorkanal, après l’achèvement de ce dernier.
MOUR (Militsia ougolovnogo rozyska) : police criminelle.
MVD (Ministerstvo vnoutrennikh diel) : ministère des Affaires intérieures. Voir Organes.
Nagan : revolver fabriqué selon le système du Belge Nagan et qui porte son nom (en Russie, on utilisa son modèle de 1895).
NKVD (Narodny komissariat vnoutrennikh diel) : Commissariat du peuple aux Affaires intérieures. Voir Organes.
normeur : chargé de vérifier l’exécution ou la non-exécution de la norme ; un détenu la plupart du temps.
octuor du camp (« sept cafards et une mouche », en russe : sept qui soufflent et un qui tape) : ce fameux « orchestre de jazz » du camp est un jeu de mots intraduisible en français. Il s’agit de huit mouchards. Souffler (dout) et taper (stoutchat) signifient moucharder : les sept instrumentistes à vent et l’instrumentiste à percussion forment l’octuor de la dénonciation.
Oguépéou (Obiedinionnoïé gossoudarstviennoïé polititcheskoïé oupravléniïé) : administration politique unifiée de l’État. Voir Organes.
OLP (Otdielny laguerny pounkt) : poste isolé, situé en dehors du camp principal.
OPé et OKa : Ozdorovitielnypounkt (poste de rétablissement) et Ozdorovitielnaïa komanda (équipe de rétablissement). Les OPé et OKa furent créés en 1939 pour permettre aux détenus complètement à bout de forces (les crevards : dokhodiagui) de se rétablir. Comme le note Chalamov, les détenus en étaient arrivés à un point tel qu’il leur aurait fallu un repos de plusieurs années ; par conséquent, un passage en OPé et OKa se terminait souvent par la mort, symbolisée par la « plaque au pied » attachée à la cheville ou au genou gauche lors de l’enterrement, ainsi que le chante ce couplet célèbre dans toute la Kolyma :
D’abord l’OPé, après l’OKa
La plaque au pied, adieu les gars !
Organes : nom donné aux différentes instances de la Sécurité d’État de l’Union soviétique :
Vetchéka (Vserossiïskaïa tchrezvytchaïnaïa komissiïa), commission extraordinaire panrusse (de lutte contre la contre-révolution, la spéculation et le sabotage) ou Tchéka (1917-1922).
Guépéou (Gossoudarstviennoïé polititcheskoïé oupravléniïé) : administration politique d’État (1922-1923).
Oguépéou (Obiedinionnoïé guépéou), administration politique unifiée de l’État (1923-1934).
NKVD (Narodny komissariat vnoutrennikh diel), Commissariat du peuple aux Affaires intérieures (1934-1941).
NKGB (Narodny komissariat gossoudarstviennoï biezopasnosti), Commissariat du peuple à la Sécurité d’État (1941-1946).
MVD/MGB (Ministerstvo vnoutrennikh diel / Ministerstvo gosoudarstvennoï biezopasnosti), ministère de l’Intérieur/ministère de la Sécurité d’État (1946-1953).
MVD (1953-1954) et KGB (Komitet gossoudarstviennoï biezopasnosti), Comité de la sécurité d’État (1954-1991). Dirigés successivement par Dzerjinski (1922-1926), Menjinski (1926-1934), Iagoda (1934-1936), Iéjov (1936-1938), Béria (1938-1946).
ourka ou ourkatch, ourkagane : le truand, dans l’argot de la pègre.
Ou.R. O. (Outchiotno-rasprediélitielny otdiel) désigné aussi par Ou. R.Tch. (Outchiotno-rasprediélitielnaïa tchast) : département ou section de comptabilité et de répartition. Service de l’administration des camps qui était chargé des comptes, de la répartition du travail, de la nourriture, etc.
OuRO (Ougolovny rozyskny otdiel) : département d’instruction criminelle.
OuSLON (Oupravléniïé severnykh laguéreï ossobogo naznatchéniïa) : Direction des camps à destination spéciale du Nord ou SLON (Solovietski laguer ossobogo naznatchéniïa), voir Solovki.
OuSVITL (Oupravléniïé severo-vostotchnykh ispravitelno-troudovykh laguéreï) de l’Oguépéou-NKVD-MVD : Direction des camps de redressement par le travail du Nord-Est, dépendant de la Direction des camps de la Kolyma.
OuVLON (Oupraléniïé vicherskikh laguérieï ossobogo naznatchéniïa) : Direction des camps à destination spéciale de la Vichéra.
permafrost : couche du sol et du sous-sol qui ne dégèle jamais. Le terme correct en français, pergélisol, est très peu usité.
pin nain (stlanik, lat. Pinus pumila) : espèce voisine du pin de Sibérie (Pinus cembra, var. sibirica), à aiguilles persistantes et port rampant, qu’on trouve au-delà du Baïkal. Il se distingue du pin de Sibérie par des cônes plus petits et des aiguilles plus courtes (2 à 4 cm). Les cônes contiennent des graines comestibles.
pirojok (pl. pirojki) : petit pâté à la viande, aux choux, etc.
planton (dnevalny) : soldat ou surveillant de service.
poud : unité de poids équivalant à 16,38 kg.
procureur vert : évasion dans la taïga.
régimes : on appelle ainsi la gradation des mesures d’incarcération ; sorte d’échelle punitive interne, avec aggravation des conditions de travail, incarcération dans des cachots aux conditions atroces, régime de famine, etc. Voir le récit « L’ingénieur Kisseliov ». Pour plus de détails, se reporter à Soljénitsyne, L’Archipel du Goulag, chap. 15.
relégation : obligation de résider en un endroit précis avec interdiction de séjour dans tout le reste du territoire (ssylka). Se distingue d’une autre mesure qui fixe des interdictions de séjour dans certaines villes du territoire, sans pour autant fixer le lieu de résidence obligatoire (vyssylka).
répartiteur : détenu chargé de répartir les travaux entre les équipes de travail. Poste très important, car c’est le répartiteur qui envoyait aux travaux généraux ou à des travaux légers dans le camp même.
R. Ou R. (Rota oussiliennogo régima) : compagnie de régime renforcé.
RSFSR : République socialiste fédérative soviétique de Russie, la plus importante des quinze Républiques qui formaient l’URSS ; elle occupait la plus grande partie de la Russie européenne et toute la Sibérie. Elle comptait plus de 130 millions d’habitants (246 millions pour toute l’URSS).
sagène : ancienne mesure équivalant à 2,13 mètres.
Sakhaline : grande île de l’océan Pacifique nord, bagne tsariste.
samedi communiste (soubbotnik) : travail « volontaire » non rémunéré.
secrets : postes volants d’opérationnels dont l’emplacement est gardé secret.
Serpentine : nom de la prison d’instruction de la Kolyma, tristement célèbre pour toutes les condamnations à mort qui y ont été prononcées.
service ou services : tous les travaux légers qui se font à l’intérieur du camp et sont confiés à des détenus (cuisinier, coiffeur, menuisier, employé de bureau, etc.), par opposition aux gros travaux (mines, exploitations forestières ou routes), appelés « travaux généraux ».
sigle, siglard : surnom donné aux détenus condamnés
par les Osso en vertu d’articles-sigles. Le plus célèbre fut ASA,
propagande antisoviétique.
Citons encore pour exemple : KRM (Kontr-révolioutsionnoïé
mychleniïé), pensée contre-révolutionnaire.
SVP Ch. (Sviazi viédouchtchiïé k podozréniou
chpionaja), relations pouvant conduire à une présomption
d’espionnage.
Tch.S. (Tchlen sémi), membre de la famille (d’un
condamné).
VAS (Vynachyvaniïé antisovietskikh nastroiéni),
sentiments antisoviétiques en gestation, etc. Et il ne faut pas
oublier le tristement célèbre KRTD (voir in situ).
solidol : graisse solide destinée à l’entretien des machines, des véhicules et des moteurs, qui a la particularité de ne pas geler, même par grand froid.
Solovki : groupe d’îlots de la mer Blanche où furent établis des camps sous l’abréviation SLON (Solovietski laguer ossobogo naznatchéniïa), camp à destination spéciale des Solovki.
sous le mont, sous la montagne, sous le dôme (aller) : mourir.
SPO (Sékretno-polititcheski otdiel) : Département politique secret. Au début des années trente, le SPO de l’Oguépéou s’occupait essentiellement de l’appareil du parti, des intellectuels, des savants, etc.
SR : membre du parti socialiste-révolutionnaire.
staroste : en général, responsable élu d’une communauté chargé des relations avec les autorités (de vieille tradition en Russie) ; dans les camps, responsable désigné par l’administration, l’appellation pouvant s’appliquer à des chefs de baraque ou à des chefs de zone.
station de machines et tracteurs, ou MTS (Machino-traktornaïa stantsia) : créées à partir de la fin de l’année 1928, ces stations regroupaient des engins agricoles qu’elles louaient aux kolkhozes moyennant un prélèvement sur les récoltes. Dissoutes en 1958.
stoss, ou chtoss : ancien jeu de cartes en usage parmi les officiers tsaristes.
streptocide : sulfanilamide (un des premiers sulfamides).
sulfidine : idem.
tchifir : thé infusé dans une toute petite quantité d’eau ; extrêmement fort ; ses effets sont semblables à ceux de la drogue.
Tchoukotstroï (Oupravléniïé stroïtielstva tchoukotki) : une des sept Directions locales du Dalstroï plus spécialement chargée de la région de la Tchoukotka.
thermomètre : les truands appellent ainsi un bâton pour tabasser les gens.
tierce : jeu de cartes.
torbazy, ou torbassy : bottes souples en peau de renne.
Torgsin (Vsessoïouznoïé obiédiniéniïé po torgovle s inostrantsami) : association pansoviétique pour le commerce avec les étrangers. Magasins institués sous la NEP où l’on n’acceptait que des devises fortes et, plus tard, uniquement de l’or.
toucher le fond (doplyvat, doplyt) : être réduit à un état d’extrême épuisement physique.
touloupe : veste en peau de mouton avec la laine à l’intérieur.
travaux généraux : ce sont les travaux pénibles, c’est-à-dire l’exploitation forestière, minière, ou la construction de routes. Par opposition à tous les travaux particuliers qu’on peut trouver au camp et qui sont des postes dits de « planqués » dans l’argot de la pègre.
trente-cinq : détenu condamné selon l’article 35 du Code pénal qui englobait les « éléments socialement dangereux », généralement des droit commun. Entré en vigueur dès les années trente, cet article prévoyait en général une peine de travaux forcés effectuée en camp.
tribunal d’honneur des truands (pravilka) : tradition du monde de la pègre, réunion lors de laquelle sont prises les principales décisions.
troïka : tribunal constitué de trois enquêteurs dépendant de la Vetchéka, de la Guépéou et de l’Oguépéou, qui, entre 1918 et 1934, a prononcé des condamnations sans appel, y compris à la peine capitale, hors de la procédure pénale et en l’absence des accusés.
truands : désigne les professionnels de la pègre ; le terme « droit commun » s’applique aux caves condamnés pour un délit non politique.
turia : pain émietté et trempé dans de l’eau salée ou du kvas (boisson alcoolisée obtenue par la fermentation de seigle ou de pain de seigle, parfois additionné d’orge ou de fruits acides).
ven-zone : zone réservée aux malades atteints de maladies vénériennes ; il y en avait pour hommes et pour femmes.
verste : ancienne mesure itinéraire équivalant à 1067 mètres.
Vetchéka (Vsérossiïskaïa tchrezvytchaïnaïa komissiïa) : commission extraordinaire panrusse (de lutte contre la contre-révolution, la spéculation et le sabotage). Voir Organes.
Vichéra : filiale du camp des Solovki, devint ensuite un camp indépendant. Doit son nom à une rivière qui se jette dans la Kama. Chalamov y a purgé sa première peine à partir de 1929.
vingt-cinq plus cinq : vingt-cinq ans de peine de camp plus cinq ans de privation de droits civiques et de relégation.
VOKhR (Vnoutrenniaïa okhrana respoubliki : Garde intérieure de la république) : garde des camps.
voleur : un truand. Tous ceux qui appartiennent à la pègre et se soumettent à ses lois sont appelés « voleurs », quelle que soit leur activité criminelle.
wagonnets : châlits avec des places individuelles marquées, par analogie avec les couchettes des trains et par opposition aux châlits communs.
Willis : jeeps fournies à l’URSS dans le cadre du prêt-bail.
zek ou zéka : un détenu, mots dérivés de l’abréviation officielle z/k du mot zaklioutchonny. Dans la plupart des camps on a adopté la forme zek, que l’on peut décliner, comme tout mot russe masculin se terminant par une consonne. Soljénitsyne explique cette préférence par le besoin de s’approprier et d’humaniser la langue barbare de l’administration des camps. Chalamov, en revanche, insiste sur la forme zéka, qui s’est conservée dans les camps de la Kolyma, probablement comme marque de l’étrangeté irréductible de cet univers.
ZIM (Zavod imeni Molotova) : marque d’automobiles produites par l’usine Molotov de la ville de Gorki.
ZIS (Zavod imeni Stalina) : marque d’automobiles produites par l’usine Staline de Moscou.
zone : 1. désigne une zone prohibée qui entoure le camp, espace délimité par des barbelés et des palissades et sous la surveillance de miradors. 2. désigne les différents « quartiers » délimités d’un camp.
NB : Pour des explications complémentaires, consulter Le Manuel du Goulag, dictionnaire historique de Jacques Rossi, collection « Document », Le Cherche midi éditeur, 1997.