88.
Voici trois jours que je suis arrivé au monastère, et ce soir, n’y tenant plus, j’ai téléphoné à Z. Il n’a pas répondu et j’ai réessayé trente-six fois en quinze minutes. Le père m’a surpris et quand je lui ai demandé de l’aide, une solution au fond, pour me débarrasser de cette tyrannie, il s’est contenté de dire : « C’est là qu’il faut pratiquer zazen. » C’est bien ça le problème ! Accueillir les tempêtes mentales, les laisser passer sans résister. Quelle lutte avec un portable : « Je l’appelle ! », « Je ne l’appelle pas ! » Une heure s’est écoulée et la voix du maître en détachement m’a délivré, enfin. Répit provisoire. Depuis des mois, je tente de m’affranchir de cet attachement et me voilà déboussolé par une heure d’attente…
Je retiens cependant la leçon. Tout doit être zazen. Avant la méditation du soir, en retard à cause de la péripétie du téléphone, je m’acharne à essayer de boutonner mon pantalon. En vain, le bouton résiste. Détente. Considérer chaque obstacle, chaque difficulté comme zazen, être totalement dans l’action, ne se préoccuper ni de l’avant ni de l’après, ne plus commenter. Soudain, j’arrive à fermer mon pantalon, calmement, en souplesse.