Le Chaos

Les branches s’écartèrent tandis que Pahtun – il n’avait pas d’autre nom – les guidait dans les profondeurs de la forêt. Tiadba craignait de ne jamais retrouver le chemin de la sortie. Les branches les laissaient passer à contrecœur, puis essayaient de se refermer sur eux, peut-être par réflexe de défense. Son armure ne l’écoutait plus et refusait de se sceller. Le Grand dirigeait manifestement les opérations et semblait savoir ce qu’il faisait.

Macht avait le front barré par un pli perpétuel et Denbord affichait une attitude insolente, même s’il ne disait rien. Ils en avaient déjà trop vu.

— Avez-vous essayé vos claves ? demanda Pahtun. Elles ont fonctionné ?

Le Grand écarta les bras et tourna sur lui-même. Aussitôt, les branches qui les surplombaient diffusèrent une lumière aussi intense que celle d’une veillée.

— Nous les avons essayées, répondit Denbord. Elles sont difficiles à manier. Quelques marcheurs sont tombés… les morts, je veux dire. Ils se sont décomposés.

— Des échos, à n’en pas douter. Il y en a beaucoup dans les parages.

— Sont-ils morts ? l’interrogea Tiadba.

— Peut-être pas morts, mais très malchanceux. Il se peut que vous ayez croisé des versions de vous qui ont fait les mauvais choix et ont été piégés, leur destin transformé en boucle par le Typhon. Celui-ci utilise tout ce qu’il trouve, tous ceux qu’il capture. Je ne souhaite à personne de finir entre ses mains. Quoique « finir » n’est pas le terme adéquat, si j’en crois ce que j’ai vu ces dernières dizaines de milliers de veillées. J’essaie de comprendre ce que je vois, j’apprends, et je transmets mon savoir à ceux qui arrivent jusqu’ici.

— Combien de créatures ont survécu ? demanda Denbord.

Nico leva les mains pour prier.

— Je ne sais pas trop. Une centaine… sans doute moins.

Pahtun toucha le sol, et une boîte de la taille d’un coffre à vêtements en jaillit. Il la contourna, se gratta la paume des mains, prononça quelques mots à voix basse, et pencha la tête sur le côté. La boîte réagit, et ses flancs s’ouvrirent. À l’intérieur, de fines brindilles se multipliaient et tournoyaient à une vitesse vertigineuse, lançant des étincelles alentour : des versions miniatures des arbres qui les entouraient et les abritaient.

— Retirez votre armure et étalez-la par terre. Lorsqu’elles seront bien aérées, nous les mettrons là-dedans, expliqua-t-il en désignant la boîte. Vos armures seront reconstruites, améliorées : nouvelles connaissances, meilleur système de guidage. Ensuite, vous repartirez. Je vais moi-même lever le camp et m’enfuir. La bande est toute proche, et je n’ai pas envie d’être capturé par un Silencieux. Par ailleurs, nous sommes beaucoup trop proches du Témoin.

— Comment est-ce possible ? s’interrogea Tiadba. Nous avons pénétré le Chaos très loin de lui.

— La distance, les angles, la métrique… tout est différent ici, j’en ai peur. La situation ne s’arrangeant pas, il sera de plus en plus difficile de planifier une mission et de s’y préparer.

Il agita les mains, le doigt-fleur proéminent, et, un à un, sans enthousiasme, ils retirèrent leur armure et la posèrent sur le sol. Sauf Macht. Herza et Frinna restèrent près de la boîte, comme si elles trouvaient réconfortant son mystère en apparence inoffensif. Shewel se joignit à elles.

Pahtun rassembla les armures et les jeta dans les brindilles tournoyantes, où elles grésillèrent et disparurent. Il attendit que Macht se décide.

— De la magie de Grands, dit Denbord avec un clignement d’œil et un hochement de tête.

Puis il se toucha le nez. Il ne croyait pas un mot de ce que racontait ce Pahtun, mais avaient-ils vraiment le choix ? La protection du Grand, si elle était temporaire, était évidente.

— Vas-y, insista Tiadba.

Macht lui fit les gros yeux, mais finit par confier son armure à Pahtun, qui la lâcha dans l’enchevêtrement argenté.

 

Presque nues, allongées autour de la boîte, les créatures se relayèrent pour raconter la dernière intrusion, les dégâts subis par la Kalpa, leur entraînement, la mort du premier Pahtun, l’apparition et la disparition des navires spatiaux dans la vallée, les mirages de cités en ruine, l’étrange manière dont la lumière voyageait dans le Chaos.

Et les échos.

— Perf est devenu l’un d’entre eux, dit Macht.

Nico s’agenouilla, joignit ses mains en pyramide et pria : qui ou quoi, cela, personne n’aurait pu le dire.

Pahtun écoutait avec attention, même si Tiadba le suspectait d’avoir déjà entendu des histoires similaires à de nombreuses reprises.

— Vous vous êtes bien débrouillés, et ce contre toute attente, jeunes créatures, commença-t-il. Je suis content que nous soyons toujours capables de produire des spécimens tels que vous. Néanmoins, la cité ne sait pas grand-chose sur le Chaos. Cela a toujours été le cas, d’ailleurs. Je ne peux ni y retourner, ni communiquer ce que je sais, car ce serait un trop gros risque. Après tout, nous pourrions très bien être des produits du Typhon, modelés pour désinformer.

— C’est ce que nous a dit l’instructeur, intervint Macht, l’air triste.

— Nous pourrions seulement, reprit Pahtun. Usez de vos instincts : ils sont tellement plus efficaces que ceux des Soigneurs ou des Eidolons. Vous êtes plus proches de la Terre primordiale, de la vérité. À votre avis, suis-je un produit du Chaos ?

— Non, répondit Denbord.

Tiadba acquiesça. Les autres se turent.

— Eh bien, certains croient, d’autres se méfient… tous les avis se valent. Vous ne pouvez pas tous avoir raison tout le temps. C’est tout ce que je puis vous dire. Les bandes grossissent et se déplacent. Il y en a de plus en plus, qui convergent vers un grand cratère coupé par un val qui s’étire sur presque la moitié de ce qui reste de la Terre. J’ai vu des choses étranges se réunir et grossir dehors. Je ne sais ni ce qu’elles sont ni de quoi elles sont capables. Pour l’instant, le Chaos les laisse s’accumuler. J’ai entendu des Eidolons les appeler des « Turvies ». Lorsque la lumière du Chaos leur est favorable, les angelins de la Tour brisée les observent parfois. Les Turvies entourent votre objectif : Nataraja.

— Nataraja existe-t-elle toujours ? demanda Nico.

— Espérons-le. Dans le cas contraire, tous nos efforts auront été vains. Les Grands Eidolons, dans leur infinie sagesse, ont exilé des gens importants dans la cité rebelle. Des gens qui sont partis, ai-je entendu dire, avec des outils très puissants.

— C’est-à-dire ? insista Nico, le regard pétillant.

— Eux seuls le savent. Avez-vous déjà entendu le récit du Bibliothécaire, jeunes créatures ?

— Non, répondirent-ils.

— Pas en entier, précisa Nico.

Tiadba produisit les livres qu’elle avait transportés dans une poche de son armure.

— Peut-être n’avons-nous pas besoin de le connaître, dit-elle.

À plusieurs reprises, Pahtun avait regardé ces livres avec envie.

— Je doute que votre ignorance serve à quiconque, rétorqua-t-il. Ce récit appartient à une grande histoire, à la plus grande de toutes les histoires. Mais vous, jeune créature… vous vous appelez Tiadba, n’est-ce pas ?

Elle ne lui avait pas dit son nom. Peut-être l’avait-il appris grâce à son armure.

— Oui, répondit-elle.

— Pourquoi ne liriez-vous pas pour nous ? Nous avons un peu de temps devant nous, et cela fait une éternité que je n’ai pas entendu une histoire de marcheur.

Elle ouvrit son livre et trouva un passage dans lequel Sangmer décrivait son équipage et leur voyage dans les confins torturés de ce qui subsistait de l’espace et du temps.

L’ARRIVÉE D’ISHANAXADE

« Même entouré des magnifiques mondes shens et d’œuvres d’art rapportées de toutes les galaxies habitées, mon équipage ne pouvait ressentir que de la pitié après avoir vu ces choses… et de la crainte à l’idée de devoir traverser une nouvelle fois ces espaces détruits. Quoi que nous rapportions avec nous – qui que nous transportions –, le retour serait encore plus difficile.

Tandis que Polybiblios procédait à ses préparatifs – se débarrassant de ses incarnations shens et recouvrant l’unité d’un Deva –, je marchais sur le sol granuleux qui entourait le bassin dans lequel les Shens stockaient leurs découvertes. Là, luisant tel un océan de jade sous la lumière du plus grand anneau-étoile, était immergé l’enregistrement des destins des Shens qui avaient voyagé au temps de l’Éclat, avant la fin de la création. Toutes ces informations étaient depuis longtemps brouillées et irrécupérables, mais l’ensemble n’en était pas moins superbe.

J’avais besoin de calme, de paix et de solitude pour contempler notre oubli presque certain dans le Chaos.

Mon équipage se détendait en visitant les reliquaires qui abritaient les plus grands accomplissements des Shens… des reliquaires érigés par des étudiants humains venus de mondes depuis longtemps avalés par le Chaos. Les Shens se moquaient des cadeaux et des manifestations ostentatoires de respect. Tant et si bien qu’il ne leur était pas venu à l’esprit de refuser ou de démolir ces tributs. Abandonnés tels d’anciens éléments de décor, ces monuments apparaissaient et disparaissaient en fonction des caprices et des mouvements de la pseudo-planète.

Les Shens avaient été les premiers à cartographier les cinq cents galaxies habitées, les premiers à relier les tourbillons de soleils mourants pour en faire des anneaux-étoiles. Les premiers à accomplir tant de choses.

Je contemplai cette mer morte de savoir et d’exploration, ces vagues qui clapotaient sur les grains de sable, pied de nez à tous ceux qui avaient couru après la gloire.

Avec mes sombres pensées pour seule compagnie, je me déshabillai et m’avançai dans les vecteurs, et les sentis vibrer comme du cristal gélatineux, froids et argentés autour de mes chevilles, cherchant la lueur de mon ordre interne. Mais ils étaient incapables de partager avec moi. Alors, ils se retirèrent avec des murmures, une plainte à peine perceptible, comme s’ils étaient encore en mesure de raconter des contes perdus. Leur mélancolie répondait à la mienne, et à la mienne seulement, pensai-je, jusqu’à ce que j’aperçoive, à un kilomètre et demi de là, une jeune femelle qui marchait vers moi.

C’était impossible. Une silhouette humaine sur un monde où les seuls humains étaient les membres de mon équipage : d’humbles Soigneurs auxquels il fallait bien sûr ajouter Polybiblios, le Deva.

La fille aurait pu être un jeune Soigneur, mais aucun des miens n’avait plus cette apparence enfantine et jeune depuis des dizaines de billions d’années.

Comme elle continuait à approcher, je m’avançai péniblement vers la berge, où je m’agenouillai pour caresser les petits morceaux luisants, arrondis et verts, polis par les mouvements de l’eau. Désemparé, je surveillai du coin de l’œil cette fillette. Je sentais l’imminence d’un moment véritablement irréversible.

Il n’y avait plus moyen de reculer.

— Êtes-vous le Pèlerin ? demanda l’enfant lorsque sa voix put couvrir les murmures du bassin.

— D’aucuns m’appellent ainsi. Qui étiez-vous ?

Je pensai qu’elle pouvait être le fantôme d’un vecteur ramené à la vie à cause de mon interaction avec cette mer trouble et lumineuse : un morceau de peau abandonné, ranimé par des forces qui dépassaient la capacité de compréhension d’un simple Soigneur.

— Je suis. Je n’ai pas encore de nom. Les Shens m’ont donnée à un humain que j’appellerai Père. Il a rassemblé mes morceaux dans cette mer – des morceaux comme ceux-ci – et a contribué à modeler ce que vous avez sous les yeux.

— Êtes-vous humaine ? demandai-je.

— Principalement. Je possède l’héritage de Gens Simia parce que mon père est un Deva.

Elle était toute proche, désormais, et je voyais que ses traits n’étaient pas encore arrêtés. Les possibilités en devenir étaient nombreuses et gracieuses, mais elle ne semblait ni pressée de grandir, ni embarrassée par cette multiplicité.

— Comme dois-je vous appeler ?

— J’ai un nom shen, ce qui est à peine mieux que de ne pas en avoir.

— Qu’êtes-vous encore, en plus d’être humaine, m’enquis-je en essayant de ne pas me montrer trop impoli.

— Je n’en suis pas certaine. Polybiblios m’a assurée que je contenais des éléments qui, autrefois, contribuèrent à modeler et à définir la création. Les Shens les ont trouvés, les ont ramassés et immergés dans cette mer, afin que Père puisse les retrouver et les rassembler. J’ignore comment il est parvenu à faire entrer d’aussi grandes idées dans une forme aussi petite. Vous les voyez ?

— Je ne vois rien ni personne clairement.

Elle prit un air déterminé, et sa silhouette se fit plus nette. Puis elle grandit, grandit, s’élevant au-dessus de la mer de vecteurs ; elle faisait plusieurs fois ma taille.

Je levai les yeux, charmé par cette ingénuité métrique.

— Être un véhicule de la gloire de la création, ce n’est pas rien, dis-je, la main en visière au-dessus de mes yeux pour me protéger de la lumière de l’anneau-soleil.

— La plupart du temps, je ne m’en rends pas compte, admit-elle. Parfois, cependant, je perds le contrôle et je me surprends à essayer d’arranger les choses, à apporter un peu de logique… à corriger. En mûrissant, j’apprendrai à me contrôler et à prendre des formes solides et fiables, comme la vôtre. Votre forme est plaisante. Enfin, c’est ce que dit Polybiblios.

— Êtes-vous une récompense ? Un cadeau des maîtres shens à un Deva venu étudier chez eux ?

— Mon père semble m’aimer beaucoup. (Elle avait rapetissé et était à peine plus grande que moi. Elle paraissait déjà plus mature.) Je crois qu’il veut étudier ce que je vais devenir.

Elle plongea les orteils dans la mer de vecteurs. Des ondes rouge-rose se propagèrent vers l’extérieur, comme si elle pouvait ressusciter tout ce qui avait été perdu.

— Si je reste ici, les Shens ne me donneront pas ce dont j’ai besoin. Ils ne voudront pas ou ne pourront pas. Je serai une mémoire abandonnée de plus, comme cette mer. Alors, ce qui subsiste périra lorsque les Shens succomberont au Chaos.

Ma mélancolie s’évapora. Elle exhalait nouveauté et fraîcheur. Elle irradiait une joie potentielle comme je n’en avais jamais connu. Son pouvoir de séduction était important, à n’en pas douter, mais je n’étais qu’un Soigneur.

Elle se rapprocha et me tendit une main brillante comme une étoile.

— Polybiblios dit que le capitaine du vaisseau doit d’abord m’inviter à l’accompagner dans son voyage de retour. Il dit que ce sera très dangereux. La décision vous appartient, Pèlerin.

Je sentais sa force ancienne brûler mes yeux et ma peau telle une flamme. Ce qui n’avait été qu’histoire et théories absconses – une Muse perdue, condensée et éparpillée à la fin de l’Éclat – se tenait devant moi, réelle, vivante, quoique transparente.

— Vous êtes toujours un genre de fantôme, répondis-je. Vous ne prendrez sans doute pas beaucoup de place ni ne consommerez beaucoup d’énergie.

— Je ne mange pas… pas encore, en tout cas. Le moment venu, je mangerai. Je vous mangerai peut-être, Pèlerin. (Elle paraissait très mature à présent, avec son regard intrépide, profond et doré.) Peut-être apprendrai-je mon véritable nom à bord de votre vaisseau. Peut-être aiderez-vous mon père à en trouver un.

J’étais déjà presque amoureux d’elle. »

 

Épuisée, l’esprit encombré de choses qu’elle était incapable de comprendre, Tiadba jeta un regard circulaire sur les marcheurs. Tous semblaient perplexes, ayant du mal à appréhender des mots et des mystères qui les dépassaient. Le Pahtun lâcha un grognement grave et secoua sa grosse tête.

— C’est une très vieille histoire, commença-t-il. Je ne suis pas certain de la croire.

— En tout cas, c’est ce qui est écrit, se défendit Tiadba.

— Oh, je n’en doute pas ! Tant de marcheurs, tant d’histoires… Je me suis souvent demandé comment les Eidolons et Ishanaxade étaient devenus ce qu’ils sont aujourd’hui… Encore une vérité qui persiste à m’échapper.

— Pour moi, ce récit veut dire quelque chose ! s’enthousiasma Nico. Il faudra relire les livres plus tard pour voir si les histoires ont changé.

— Je ne sais pas si les histoires changent, répéta Tiadba pour la énième fois. Disons que je les comprends différemment chaque fois.

— Il est temps que nous apprenions tous à déchiffrer ces vieux caractères, insista Denbord.

— Oui, on aimerait bien, enchérirent Herza et Frinna, à la grande surprise de Tiadba.

— Vous rêvez, lâcha Macht dans un bâillement.

— Si nous avons le temps, dit Pahtun. Les armures seront bientôt prêtes.

Quelque chose comme un voile de sommeil – transparent, superficiel – recouvrit Tiadba pour la première fois depuis qu’ils avaient quitté le camp d’entraînement et traversé la frontière du réel. Rêvait-elle ou bien évoquait-elle un genre de souvenir étrange ? Elle avait l’impression d’être dans une vaste salle entourée de rayonnages de livres deux ou trois fois plus élevés que ceux des étages supérieurs des Gradins. Elle vit quatre femmes… de grandes femmes, d’après elle, mais qui était-elle pour juger ? Elle était petite, elles étaient grandes. Elles se déplaçaient autour d’elle, discutaient… semblaient très inquiètes.

 

Elle sortit de sa transe dans un sursaut et découvrit, au centre de la clairière, le Pahtun en train d’assembler des morceaux de leurs nouvelles armures sortis de l’écheveau de brindilles tournoyantes. Il les mit debout et fixa les membres aux troncs à l’aide d’une petite sphère tenue par son doigt-fleur. Il soufflait de l’air entre ses lèvres en une succession de notes musicales. Aux oreilles de Tiadba, il ne s’agissait cependant pas d’une chanson. Il termina ce qu’il avait commencé, lui adressa un clin d’œil et se toucha le nez. Cependant, et bien que sa compréhension du langage corporel des Grands soit limitée, il lui parut soucieux.

Tandis que les autres se rassemblaient autour des nouvelles armures, Pahtun – il ressemblait tellement au Pahtun originel qu’elle ne décela aucune différence en dehors de sa crasse et de ses vêtements usés –, Pahtun, donc, fit le tour des combinaisons, qui s’activèrent sous ses doigts et émirent une lumière diffuse.

— Elles sont prêtes, annonça-t-il. Neuves et mieux informées, comme promis. Enfilez-les vite ; le temps presse. La bande se déplace et nous allons bientôt nous retrouver en travers de sa route.

Les marcheurs s’exécutèrent, puis firent quelques mouvements pour les tester. Au début, ils ne sentirent presque aucune différence. Celle de Tiadba lui semblait légèrement plus raide, mais c’était tout.

Le Pahtun referma la boîte qui contenait les brindilles argentées. Alors celle-ci rapetissa, et il la rangea dans un morceau de tissu qu’il rejeta sur son épaule.

— Vous ne portez pas d’armure, nota Tiadba.

Il agita la main.

— Cette forêt est mon armure. Préparez-vous : elle va bientôt s’effondrer, et je disparaîtrai avec elle. Écartez-vous. Avec un peu de chance, nous ne nous recroiserons plus. Autrement, c’est que nous aurons tous échoué. Vos armures réagiront plus vite, vous informeront mieux et seront plus fortes, mais n’oubliez pas que le pire est à venir. Par-dessus tout, ne doutez pas de ma réalité. Ne croyez pas que je n’ai jamais été ici.

Les branches disparurent au-dessus de leurs têtes, révélant le ciel froissé et l’énorme arc de feu rouge-violet. Le casque de Tiadba se scella autour de sa tête, et sa visière se colora, tintant la scène en orange, tandis que, tout autour, les branches étaient avalées par des flammes violettes trop vives pour être regardées.

Ils se retrouvèrent sur un terrain ondulé noir. Tiadba entendit les autres retenir des cris de surprise. Ils étaient de retour dans le Chaos. Pendant une fraction de seconde, elle crut voir une grande et mince silhouette s’éloigner rapidement dans un éclair de membres blancs : un Grand entouré d’un nuage de branches tournoyantes et lumineuses, un Soigneur solitaire.

— Marcheurs, tenez-vous prêts, commencèrent les armures. Écoutez votre signal.

Elle l’entendait, à présent : une vibration musicale et régulière, qui se renforçait lorsqu’elle se tournait dans une direction précise. Elle reconnaissait la nouvelle voix de son armure… celle de Pahtun.

Denbord et Khren se rapprochèrent d’elle, bientôt suivis par les autres. Ensemble, ils formèrent un cercle. Ils regardaient vers l’extérieur, et chacun voyait ce que voyaient ses camarades, ce qui leur permettait d’étudier le paysage avec une plus grande efficacité : tous ces regards combinés en un seul, étrange sensation.

— Le Grand s’est-il glissé dans nos armures ou bien les a-t-il améliorées avant de filer ? demanda Macht.

— Espérons qu’il était bel et bien réel, dit Nico, et qu’il ne nous a pas abandonnés tout nus sur cette terre noire, où nous servirons de dîner à des monstres.

— Suivez les signaux, insistèrent leurs armures. Il vous reste beaucoup de chemin à parcourir… et vite. Cette région tout entière est très dangereuse. Les Silencieux sont toujours à la recherche de ceux qui défient le Typhon.

— En marche ! cria Tiadba.

Avec une confiance retrouvée, plus alertes que jamais, ils suivirent les vibrations, formant une colonne serpentine qui ne tarda pas à devenir rectiligne. Tiadba avançait en tête, et Khren fermait la marche.

Tous les compagnons de Tiadba voyaient la même chose qu’elle : une lumière verte qui, régulièrement, jaillissait en étincelles vers le ciel, comme pour le toucher.

Ils se sentirent étrangement lourds et ralentirent la cadence. À leur droite, quelque chose apparut soudain et s’évanouit aussitôt. Quelque chose d’énorme, de large, de plat, qui glissait, juché sur des piliers hauts et fins. Puis plus rien.

— Cela avait un visage, dit Khren. Un visage humain. Plus gros qu’une prairie…

— Hâtez-vous, insistèrent les armures. Les distances paraîtront se raccourcir, la lumière se déplacera d’une manière étrange et les objets donneront l’impression de brûler. Par-dessus tout, suivez le signal.

Sur sa gauche, Tiadba vit une épée de lumière grise plus tranchante que jamais décrire un arc dans le ciel : le phare du Témoin.

— Nous sommes juste en dessous, s’exclama Nico. Comment cela se fait-il ? N’était-il pas plutôt de l’autre côté ?

— Nous devrions installer un de nos générateurs et attendre que la lumière disparaisse, proposa Macht.

— Non ! vous êtes pourchassés, expliquèrent les armures. Il n’y a aucun abri, ici. Il n’y a pas d’alternative à la fuite.

La cité à la fin des temps
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