33.

Elle est la déesse victorieuse des démons du Mal et de l'Ignorance, l'épouse du dieu Shiva, la fille des Himalayas, la reine aux multiples incarnations, l'énergie féminine des dieux, tour à tour symbole de douceur et de cruauté. Les Purâna, la légende dorée de l'hindouisme, consacrent des milliers de versets aux exploits merveilleux qu'elle a accomplis sous une pléiade de noms et d'apparences. Dans sa forme tendre, elle s'appelle Oumâ, la lumière et la grâce ; ou Gauri, la déesse à la peau claire ; ou Pârvati, la reine des montagnes ; ou Jagan Mâtâ, la mère de l'univers. Dans sa forme destructrice, elle est Kâlî la Noire, Bhaïravi la Terrible, Chandi la Furieuse, ou Dourga l'Inaccessible. C'est sous ce dernier nom et cette forme de divinité triomphatrice du mal qu'on l'adore tout particulièrement au Bengale. Tous les enfants connaissent sa fabuleuse et merveilleuse histoire.

Il y a des centaines de milliers d'années, un terrible démon ravageait la Terre. Il bouleversait les saisons et détruisait les sacrifices. C'était le démon du Mal, et les dieux eux-mêmes ne pouvaient en venir à bout. Brahma, le Créateur, avait déclaré que seul un fils qui naîtrait du dieu Shiva pourrait le vaincre.

Mais l'épouse de Shiva était morte et lui-même, tout à sa douleur, ne songeait guère à donner un fils au monde. Il vivait en ascète qui mendie sa nourriture dans les villages, comme on en voit encore aujourd'hui en Inde, les cheveux longs et le corps couvert de cendres.

Cependant la situation empirait sur la Terre et, dans le Ciel, les dieux se lamentaient que Shiva ne pensât point à se remarier. Ils demandèrent donc à Kama, dieu de l'Amour et du Désir, de faire naître l'amour dans le cœur de Shiva. Kama se mit en route, accompagné de son épouse, la Volupté, et de leur ami, le Printemps. Ils arrivèrent au pied de la montagne où méditait Shiva et, lorsque la tension de l'ascète sembla se relâcher un instant, Kama lui décocha, avec son arc de fleurs, la flèche de jasmin à laquelle personne ne résiste. Depuis lors, Shiva se mit à penser à Oumâ, fille de l'Himalaya, dans le corps de laquelle s'était réincarnée son épouse disparue. Après différentes épreuves, ils se marièrent et elle prit le nom de Pârvati, « fille de la montagne ».

Mais le démon du Mal continuait à dévaster la Terre, et si l'on devait attendre un fils de Shiva pour s'attaquer à lui, peut-être serait-il trop tard. C'est alors que les dieux unirent leurs diverses énergies en un même souffle de feu et le concentrèrent sur Pârvati qui en fut transfigurée. Elle devint la Grande Déesse, Dourga, « celle que rien ne peut atteindre ».

Pour combattre le démon dans les dix directions de l'espace, elle avait dix bras que les dieux armèrent de leurs propres armes et son père, Himalaya, le Roi des Montagnes, lui offrit le lion pour monture ; puis la Lune lui donna la rondeur du visage, et la Mort ses longs cheveux noirs. Et elle avait la couleur de l'Aurore.

Le démon apparut alors sous la forme d'un énorme buffle accompagné par les multitudes de ses armées, et la bataille commença. Les haches, les flèches et les javelots volèrent à travers l'espace, et le lion rugissant que montait la déesse se jeta sur l'armée des démons comme les flammes dans la forêt. Elle-même, de ses dix bras armés, pourfendait ses ennemis, leurs chevaux, leurs éléphants, leurs chars qui s'amoncelaient en un terrible chaos. De ses mugissements furieux, le buffle géant faisait frémir les mondes ; de ses cornes, il déracinait les montagnes et les lançait contre la déesse, qui les pulvérisait de ses flèches. Le combat dura trois jours. Plusieurs fois, Dourga fut près de succomber. Un seul instant — c'était au soir de la troisième journée —, elle interrompit sa colère pour porter doucement à ses lèvres une coupe de la liqueur des dieux, et ses yeux se mirent à flamboyer. Alors, d'un coup terrible, elle enfonça son trident dans la poitrine du monstre.

Blessé à mort, celui-ci tenta d'abandonner son corps. Il projeta de sa gueule un nouveau monstre qui brandissait un cimeterre. Mais aussitôt, la déesse triomphante le décapita.

C'est alors qu'elle devint toute noire et qu'on l'appela Kâlî, « la Noire », noire comme le Temps qui dévore tout. La Terre et le Ciel retentirent des cris de joie et des chants de victoire.

Une fois par an, à la fin de la mousson, les huit millions d'hindous de Calcutta commémorent cette victoire par une fête de quatre jours et quatre nuits dont la splendeur et la ferveur sont probablement sans pareilles sur le reste de la terre. Quatre jours de liesse pendant lesquels la ville devient une cité de lumières, de joie et d'espoir. La préparation de cette fête commence plusieurs mois à l'avance dans le vieux quartier des kumhar, la caste des potiers, où des centaines d'artisans confectionnent, de père en fils, la collection de statues la plus magnifique jamais consacrée à une divinité ou à ses saints. Pendant toute une année, ces artistes rivalisent d'inspiration pour faire jaillir de leurs mains les représentations les plus colossales et les plus somptueuses de la déesse Dourga. Après avoir formé l'ossature avec de la paille tressée, les potiers enduisent d'argile les mannequins avant de les sculpter pour leur donner la forme et l'expression voulues. Us achèvent leurs œuvres en les décorant au pinceau et en les habillant. Commandées à l'avance par des familles, des communautés, des associations de quartiers, des usines, des ateliers, ces milliers de Dourga sont toutes destinées à prendre place, le premier jour de la fête, sous l'un des mille chapiteaux, appelés pandal, édifiés en travers des rues, des avenues et aux carrefours de la ville. La réalisation de ces chapiteaux et surtout leur décoration font l'objet d'extraordinaires surenchères.

Quelques semaines avant la fête, Paul Lambert reçut la visite de deux messieurs qui se présentèrent au nom du « Comité du quartier pour la construction des chapiteaux-reposoirs d'Anand Nagar ». Fort courtois et trop bien vêtus pour être des habitants du slum, les visiteurs exhibèrent un carnet de souscription et invitèrent le prêtre à leur remettre le montant pour lequel il avait été taxé, soit cinquante roupies. En une seule matinée, ils avaient déjà récolté plus d'un millier de roupies en rançonnant un à un les taudis de la ruelle, y compris ceux habités par des musulmans et des chrétiens.

Lambert s'indigna qu'autant d'argent pût être gaspillé pour une fête alors que tant de misère accablait les habitants de son bidonville. Il avait tort. Sa réaction d'Occidental rationnel lui faisait omettre l'essentiel. Il oubliait dans quelle osmose le peuple indien vit avec ses divinités et quel rôle les dieux jouent dans la vie de tous les jours. Un bonheur, un malheur, le travail, la pluie, la faim, une naissance, la mort, tout a toujours un rapport avec les dieux, et c'est pourquoi les plus grandes fêtes de ce pays ne commémorent jamais un anniversaire historique, pas même le jour glorieux de l'Indépendance, mais toujours un événement religieux. Aucune population n'honore ses dieux et ses prophètes avec autant de ferveur que celle de Calcutta, alors que le ciel semble l'avoir tellement abandonnée.

Chaque jour ou presque, le slum et le reste de l'agglomération retentissent du tintamarre de quelque procession témoignant de ce mariage mystique entre un peuple et son créateur.

La semaine précédente, Lambert s'était heurté au coin de Chitpore Road à une cacophonie de fanfares. Bloquant la circulation, des danseurs se contorsionnaient en scandant le nom du prophète Hussain et en faisant tournoyer au-dessus des têtes des sabres recourbés qui étincelaient dans le soleil. C'était Moharram, la grande fête musulmane qui ouvrait l'année sainte islamique. Dans le slum, comme dans le reste de la ville, tous les musulmans chiites avaient revêtu leurs habits de fête. C'était un jour férié, comme il y en a quinze ou vingt autres au calendrier de cette ville mosaïque de peuples et de croyances.

L'avant-veille, c'était un tonnerre de pétards qui avait réveillé en sursaut le locataire du 19

Fakir Bhagan Lane. Les quelques familles de sikhs du bidonville célébraient la naissance du gourou Nanak, le vénéré fondateur de leur communauté née dans le Panjab, à l'autre bout de l'Inde. Une procession d'hommes enturbannés, armés du traditionnel kirpan, traversa le slum aux accents triomphants d'une fanfare et se dirigea vers le gurdwara local. Pendant ce temps, de tous les coins de la ville, d'autres processions, accompagnées de chars richement décorés de guirlandes de fleurs, prenaient le chemin des autres gurdwara. Dans ces sanctuaires, des prêtres se relayaient pour une lecture ininterrompue du Granth, le Livre Saint. Une gigantesque tente bleu et blanc avait été dressée sur la pelouse du Maidan en vue d'un banquet monstre. L'un des responsables de la communauté sikh d'Anand Nagar, un sympathique géant au turban écarlate nommé Govind Singh, qui était chauffeur de taxi, avait invité le Français à assister à la fête. Des centaines de fidèles vinrent s'asseoir par terre, en longues rangées, d'un côté les femmes en pantalons serrés et tuniques panjabis, de l'autre les hommes avec des turbans pointus de toutes les couleurs.

Des bénévoles portant des chaudrons pleins de riz et de curry de légumes passèrent entre les rangs et distribuèrent une louche de curry sur le morceau de feuille de bananier posé en guise d'assiette devant chaque convive. Des fillettes aux yeux noirs fardés de khôl versèrent du thé dans de petits bols en terre cuite qu'on briserait après usage. Toute la journée, des centaines de haut-parleurs firent retentir la joie des sikhs d'une rive à l'autre de l'Hooghly.

Hier c'était le Barra Bazar, l'immense marché de l'autre côté du pont, qui était en effervescence. Les adeptes de la secte des jaïns digambara, un rameau réformé de l'hindouisme né à l'époque du Bouddha, fêtaient le retour de la saison des pèlerinages marqué par la fin officielle de la mousson. Précédée par deux chevaux en carton blanc grandeur nature fixés sur le châssis d'une jeep, la procession se frayait un chemin dans un flot inextricable de camions, de chars à bras, de rickshaws, de véhicules de toutes sortes et d'une multitude grouillante de piétons. Au milieu du cortège, sur un char fleuri tiré par des hommes curieusement costumés en laquais élisabé-thains, le pape de la secte trônait à demi nu dans une châsse dorée, saluant la multitude qui l'acclamait à grand renfort de cymbales et de tambours.

De toutes ces célébrations, aucune sans doute ne témoignait de la présence de Dieu à Calcutta avec autant d'intensité que les puja hindoues en l'honneur de la déesse Dourga.

Même si, au cours des ans, la fête s'était quelque peu transformée en foire commerciale à l'image de Noël en Occident, c'était elle qui contribuait surtout à faire de cette ville un si haut lieu de la foi. Nulle part ce trait n'était aussi sensible que dans les slums, au cœur de ces populations déshéritées auxquelles les experts de la Fondation Ford ne promettaient aucune amélioration de leur condition avant l'année 2020. Au fond de leur misère, elles avaient su conserver l'héritage millénaire de leurs traditions. Et aucune de ces traditions ne s'exprimait plus visiblement que par un goût viscéral pour la fête. La fête qui, l'espace d'un jour ou d'une semaine, les arrachait à la réalité ; la fête pour laquelle les petites gens s'endettaient ou se privaient de nourriture afin d'acheter à leur famille des habits neufs destinés à honorer les dieux ; la fête qui véhiculait la religion mieux qu'aucun catéchisme, qui embrasait les cœurs et les sens par la magie de ses chants et le rituel des longues et fastueuses cérémonies liturgiques.

Alors, qu'importait si des aigrefins prélevaient leur dîme sur la sueur et la faim des pauvres

? Au bout du compte, c'étaient les pauvres les gagnants. A Anand Nagar, les racketteurs n'hésitèrent pas à contraindre les tireurs de cyclo-pousse et de tela-garhi qui passaient par là à verser de l'argent pour les reposoirs. Ils stoppèrent les camions et les autobus de la grand-route de Delhi pour rançonner chauffeurs et passagers. Même le quartier des lépreux au bout du slum n'échappait pas à leur ratissage. Personne ne savait quel pourcentage de cette manne allait directement dans les poches des truands. Mais ce qui restait pour la fête était suffisant pour créer sa magie.

A l'approche du jour J, une sorte d'onde vibratoire parcourut le slum. De grandes structures de bambous évoquant des arcs de triomphe s'élevèrent un peu partout. Des artistes les habillèrent d'étoffes aux couleurs vives. Donnant aux drapés des géométries d'un raffinement exemplaire, ils ornèrent les chapiteaux de somptueux motifs en forme de mosaïque et de damier. Le reposoir destiné à recevoir la statue de la déesse était lui-même une superbe réalisation florale, véritable échafaudage de roses, d'œillets et de jasmin qui embaumaient la puanteur alentour. Le plus surprenant était l'invraisemblable panoplie des accessoires dont s'accompagnait cette décoration. Aucun pandal n'était complet sans une débauche de projecteurs, de guirlandes d'ampoules, de luminaires et même de lustres victoriens. Des îlots de lumière éclaboussèrent tout à coup d'un halo surnaturel la lèpre des toits et des façades. Déversé par une chaîne de haut-parleurs, un raz de marée de chants et de musique déferla jour et nuit sur le slum. La fête s'accompagne partout en Inde des débordements sonores les plus extrêmes.

Ce vacarme donna le signal d'un rituel purificateur qui, en quelques jours, allait transfigurer cet univers de moisissure et de laideur. Les familles hindoues et bon nombre de familles musulmanes et chrétiennes badigeonnèrent à la chaux, teintée de vert ou de bleu, l'extérieur et l'intérieur de leurs taudis, les vérandas, les margelles des puits, les devantures des échoppes. Le vieil hindou très pieux qui tenait la tea-shop en face de chez Lambert profita d'une absence du prêtre pour repeindre entièrement la façade de sa chambre d'un beau blanc lumineux. Puis suivit la grande toilette des hommes. Pour la seule et unique fois de l'année, des milliers de pauvres échangèrent leurs hardes pour les habits de fête soigneusement conservés dans la malle familiale, ou bien achetés pour la circonstance en s'endettant de quelques dizaines de roupies de plus chez l'usurier du quartier. Tous les commerçants de Calcutta encourageaient ces emplettes en proposant des rabais spéciaux en l'honneur de la déesse.

Vraies stars qui allaient être livrées en pâture aux regards émerveillés du public, les Dourga passèrent pendant ce temps entre les mains d'une armée d'habilleurs, de maquilleurs et d'artistes qui les parèrent de somptueux vêtements et de bijoux. Leur mise en place sur les reposoirs pouvait alors se faire selon un rite minutieux sous la protection de la police.

Au jour prévu, à six heures du soir, la plainte des conques et le roulement obsédant des milliers de dhâk qui, depuis des siècles, rythmaient les puja de Dourga, annoncèrent le début officiel de la fête. Pendant quatre jours d'une délirante kermesse^, le peuple du slum, à l'instar des millions d'hommes dans la ville tout entière, allait défiler en famille devant les quatre pandal de la Cité de la joie. Curieusement, les sikhs, les musulmans, les bouddhistes et même les chrétiens s'unirent avec leurs frères hindous dans un même rêve.

Les hommes portaient des sherwani de laine sur leurs pantalons ; les femmes, des kurta de soie verte et, aux oreilles, des pendentifs dorés qui leur donnaient des airs de princesses orientales. Ñasir, le fils aîné de Mehboub qui fabriquait à longueur de journée des stylos à bille dans un atelier-bagne, et ses sœurs, y compris la petite dernière au ventre ballonné par les vers, étaient eux aussi maquillés et habillés comme des petits princes, alors que cette famille tragiquement meurtrie par la disparition de la mère était tombée dans la misère la plus absolue. A côté de Mehboub et de ses enfants, Paul Lambert reconnut le vieil hindou de la tea-shop. Son front était barré des trois raies de cendre des adorateurs de Shiva. Visiblement habité par son darshan1 avec la divinité, insensible au raffut des haut-parleurs et aux lumières, les yeux clos, il semblait abîmé dans une totale béatitude. En voyant ce saint homme en prière, Lambert songea à une parole du prophète Isaïe : « Les prières des pauvres et des orphelins ne montent jamais jusqu'à moi sans recevoir une réponse. »

Au crépuscule du quatrième jour, toutes les statues de la Cité de la joie furent hissées sur des chars illuminés, drapés d'étoffes et ornés de fleurs, afin d'être processionnellement conduites, au son des fanfares, des cornemuses, des tambours et des conques, jusqu'au bord de l'Hooghly, le bras langoureux du Gange, Mère du monde. Au même moment dans toute la ville, de semblables cortèges prenaient la même direction. A bord de camions, de chars à bras, de taxis, de voitures particulières et même de cyclo-pousses et de rickshaws, des milliers de Dourga descendaient vers le fleuve accompagnées par leurs dévots propriétaires. L'un des rickshaws prisonniers de cette marée portait le numéro 1999. A chaque arrêt, Hasari Pal se retournait pour contempler le merveilleux spectacle de la déesse qu'il transportait sur le siège de sa guimbarde, une Dourga plus grande que lui, avec ses dix bras, de magnifiques cheveux noirs coiffés d'un diadème d'or, et des yeux conquérants. « O mon Dieu, se disait-il, ébloui, même mon rickshaw est devenu un reposoir ! »

Des centaines de milliers d'habitants se pressaient ce soir-là sur les bords du fleuve sacré et il fallut des heures à Hasari pour accéder à la rive. Quand il y parvint enfin, les membres de la famille à laquelle appartenait la statue et qui l'avaient suivie dans trois autres rickshaws enguirlandèrent la déesse de fleurs et la descendirent lentement, respectueusement dans l'eau. Hasari la regarda s'éloigner avec émotion, entraînée par le courant. Comme toutes les autres Dourga, elle emportait vers l'éternité des océans les joies et les peines du peuple de Calcutta.

La cité de la joie
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