Le médecin de Michael.

 

Michael se glissa dans le couloir et trouva Jon en train de lire un magazine près du bureau des infirmières.

- Hé, fit le médecin, tu es censé rester couché, bonhomme !

Michael s'assit à côté de lui, vêtu simplement de sa chemise de nuit d'hôpital.

- Argh ! glapit-il en se raidissant lorsque ses fesses nues touchèrent le plastique froid de la chaise.

- Ce n'est pas pour les malades, lui fit remarquer Jon.

- Quoi ? Les chaises ou la nuisette ?

Le médecin lui désigna sa chambre avec un regard réprobateur.

- J'y retourne dans une seconde, promit Michael. Je me suis dit que les amoureux avaient besoin de quelques minutes d'intimité. Et puis arrête de jouer les toubibs.

- Je ne suis pas en blanc, si ?

- Non, mais c'est tout comme... Je le sens. Pourquoi ne rentres-tu pas te coucher, Jon ? Ça fait combien de temps que tu es ici, au fait ?

- Je vais bien, rétorqua Jon. Je rentrerai avec Mary Ann quand elle partira.

- Mme Madrigal est déjà partie ?

- Oui. Elle était en retard pour le déjeuner de Bambi.

- Zut, grogna Michael. J'avais complètement oublié ce petit détail désagréable.

- On l'a tous oublié.

- Mary Ann reconnaît que c'est la prochaine chose dont elle doit s'occuper, maintenant que les gosses sont revenus. Tu as eu des nouvelles de la police, au fait ? Rien de neuf, je veux dire ?

Jon secoua la tête :

- Je ne crois pas qu'il y en aura. Pas de numéro de plaque, pas de signalement assez précis. Les gens qui vous ont trouvés n'ont appelé la police qu'une demi-heure après l'agression. Je crois qu'on peut faire une croix dessus.

Michael avait les yeux vitreux.

- Hé, fit Jon. Tu m'écoutes ?

- Ouais.

- Ç'a été horrible, Michael, mais il ne faut pas te laisser abattre. Ne laisse pas ces salauds changer ta façon de vivre. Dis, banane, tu me regardes ?

Michael avait la lèvre inférieure qui tremblait sans qu'il puisse s'en empêcher. Des larmes lui inondèrent le visage.

- Je sais, Jon... C'est pas ça... expliqua-t-il. Il y a seulement que...

- Que quoi ?

- Tu crois qu'ils pensent que c'est ma faute ?

Jon cligna des yeux sans comprendre :

- Qui ?

- Mary Ann et Brian.

- Michael... Mais qu'est-ce que tu racontes ?

- Eh bien, balbutia Michael d'une voix tremblante, les mecs qui nous ont agressés... Ils croyaient qu'on était tous les deux pédés... Et... si je n'avais pas été là...

- Mon Dieu, murmura Jon.

- Non, écoute... Ils se trompaient, concernant Brian. Ils avaient encore moins de raisons de l'agresser, lui. Mais c'est lui qui a presque tout pris. Il...

- Encore moins de raisons, hein ? Tu veux sans doute dire qu'ils avaient au moins un mobile pour t'agresser ? C'est ça que tu penses, Michael ? Tu crois vraiment que tu méritais de dérouiller plus que Brian ?

- Jon... Je ne...

- Merde, Michael ! Comment oses-tu parler comme ça ? Brian ne le pense pas. Et encore moins Mary Ann. Tu es le pire homophobe de la famille. En quoi le fait d'être pédé a-t-il quelque chose à voir avec ça ?

Michael le regarda d'un air implorant, les yeux remplis de larmes :

- Jon... Je t'en prie... Je suis venu pour que tu me fasses un câlin.

Ce à quoi il eut droit.

- Écoute, lui chuchota Jon à l'oreille. C'est toi qui m'as appris tout ce que je sais pour être heureux de ce que je suis. Alors maintenant c'est pas le moment de craquer, petit bonhomme.

- Jon, c'est juste que je peux pas garder...

- Si, tu peux, le corrigea le médecin. Tu es le petit con le plus dur que je connaisse. Tu es toujours le premier sur la brèche... Et c'est comme ça que je t'aime. Mince, Michael... C'est moi qui refusais que tu m'embrasses dans les aéroports.

Silence.

- Je suis différent, à présent ! poursuivit Jon. C'est toi qui m'as fait changer.

Michael se dégagea et le regarda dans les yeux :

- Qui as-tu embrassé dans les aéroports à part moi ?

- Oh, des tas de gens... répondit Jon d'un ton faussement détaché.

- Je parie que c'est vrai !

- Tu veux essayer dans un hôpital ?

Leur baiser dura presque une minute, jusqu'à ce que l'infirmière-chef arrive.

Elle se racla bruyamment la gorge.

- Messieurs, si ça ne vous ennuie pas...

Jon leva le nez et sourit.

- Ne vous inquiétez pas, dit-il. Je suis médecin.

 

 

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