CHAPITRE V
Avant midi, ils rencontrèrent un convoi de deux vaisseaux marchands et de trois bateaux de pêche. Un des vaisseaux avait aussi repoussé une attaque des yulons dressés des « tritons ». Tous avaient vu les épaves calcinées d'autres navires et embarcations. Le capitaine Foyn ne s'était pas trompé. Une immense armée d'hommes-poissons ravageait les mers à l'ouest de Talgar et faisait payer un sanglant tribut aux Villes,
A bord de la Maîtresse, l'équipage restait armé jusqu'aux dents. Les vigies furent doublées, des armes supplémentaires entassées à portée de la main. Les six bateaux arboraient toute leur toile et le convoi poussé par le vent de plus en plus fort faisait bonne route.
Svera vint rejoindre Blade à la rambarde et glissa un bras sous le sien. Il la sentit trembler légèrement. L'attirant contre lui, il lui murmura à l'oreille :
— Ne t'inquiète pas, Svera. Ce soir nous serons au port. D'ailleurs je ne crois pas que les hommes-pois- sons nous attaquerons alors que nous filons à une telle vitesse.
Elle hocha la tête, puis elle soupira.
— Mais comment ont-ils pu faire ça? Qu'avons- nous fait pour qu'ils nous attaquent ainsi? Ce devait être effroyable.
Heureusement, le vent emporta le murmure de Svera et aucun des matelots ne l'entendit. Blade savait bien ce qu'ils répliqueraient à de pareilles réflexions, après avoir vu tant de leurs camarades tués par les hommes-poissons.