Puis, comme un arc détendu, le cou bascula à droite d'un coup sec.
La secousse fit perdre prise à Blade. Il s'envola dans les airs, perdant par la même occasion son deuxième poignard de pierre. Pendant un moment atroce il crut qu'il allait s'écraser sur les rochers. Puis il vit sous lui l'eau cristalline, les formes grises des rochers couverts d'algues sous la surface. Il eut tout juste le temps d'emplir ses poumons et de fermer la bouche avant de piquer une tête.
Le choc faillit faire perdre à Blade le souffle qu'il retenait. Il plongea profondément, sentant la fraîcheur de l'eau et la morsure du sel sur ses plaies. Battant fébrilement des bras et des jambes, il s'efforça de s'éloigner des rochers, de remonter à la surface, alors que ses poumons étaient en feu et qu'il sentait le vertige le gagner. Enfin, il émergea brusquement à l'air et au soleil.
Pendant quelques secondes, il fut trop occupé à respirer pour s'inquiéter de la créature. Puis il s'aperçut que le seul bruit qu'il entendait était le vent et le grondement des vagues. Les sifflements, les cris, le grattement de vingt tonnes d'écailles sur de la pierre, tout cela s'était tu. Nageant sur place, Blade allongea le cou pour regarder du côté du promontoire. Il ouvrit de grands yeux étonnés. La créature gisait, inerte, en travers de la pointe, la tête presque dans l'eau. Le sang coulait de ses blessures et déjà de petits poissons se battaient dans l'eau rougie.
Blade avait du mal à croire que la bête était morte si vite, si facilement. Il se dit qu'il devait sortir de l'eau avant que le sang attire des poissons plus gros et plus affamés. Il se hissa sur le promontoire au prix de nouvelles égratignures.