Il s'approcha de la rambarde tribord du gaillard d'avant en repoussant deux gardes à demi paralysés par la peur. Il ramassa une lance abandonnée sur le pont, la soupesa, vérifia son équilibre. Puis la lance vola dans les airs et plongea vers la mer. Blade avait visé les deux hommes-poissons sur le dos du grand reptile, et avait bien visé. La lance disparut dans l'eau en sifflant. Une seconde plus tard, un corps nageant furieusement s'éloigna du reptile et la mer cristalline fut assombrie par le sang. Le yulon se cabra et sombra hors de vue.
Mais l'autre avait encore ses « cavaliers » qui le maîtrisaient. Il se dressa en sifflant puissamment, le long cou s'arqua et la tête vint osciller juste au- dessus de la rambarde. La mâchoire happa un des hommes émergeant de l'entrepont avant qu'il puisse lever une arme, le souleva dans les airs et le jeta par-dessus bord. Le capitaine Foyn sortit en courant du château arrière, brandissant son épée et hurlant des jurons à la bête qui avait pris un de ses hommes. Il n'émoussa pas la pointe de sa lame contre les écailles épaisses comme un blindage mais visa les yeux. La créature tourna la tête d'un côté, renversant deux matelots. Mais le bosco resta debout et enfonça un trident dans la gorge exposée de la bête. L'homme était d'une force prodigieuse; les dents brisèrent les écailles et pénétrèrent dans la chair.
Du sang jaillit, le rugissement de douleur du monstre se changea en râle mouillé. La tête oscilla et détruisit une longue section de rambarde. Foyn frappa encore et cette fois le yulon ne recula pas la tête assez vite. La rapière plongea dans l'œil droit et s'enfonça jusqu'à la garde dans le cerveau de la créature.