Chapitre 62

 

 

Cellendhyll avait tout d’abord fait le tour des bâtiments qui ceignaient la place, les seuls habitables. Il les avait fouillés dans leur totalité sans trouver sa dague. Il pressentait que sa Belle devait se trouver aux mains du prince arikari.

Aucun des guerriers ne vit sa haute silhouette se glisser derrière l’un des bâtiments, profiter de son couvert pour longer la place, puis ramper jusqu’à la hutte.

L’Ange était en chasse. Il était temps de laisser parler la voix de la revanche.

 

Alors que les chamans continuaient de faire remonter le sang sacrificiel jusqu’à l’idole, Troghöl était rentré dans la hutte. Il devait se préparer pour la suite de la cérémonie où il occupait une fonction prépondérante, le salut à son dieu. Mais il avait encore le temps.

Il se dévêtit tout d’abord, dévoilant un corps renflé de muscles, recouvert de tatouages noirs, un motif sinueux qui partait de son nombril pour gagner ses épaules, ses hanches et ses bras, son dos, ses cuisses. Le même tracé que celui qui figurait sur le corps de Ooom. Le Prince s’enduisit les paupières et les joues d’un khôl du même noir dévoyé que celui qui ornait le reste de son corps.

Enfin, il passa un pagne de cuir, ses bottes, son ceinturon. Coiffa des plumes d’argos pourpre dans sa crête. Un torque d’or rouge vint orner son cou puissant.

« Beau tatouage. Ils font le même pour homme ? », aurait commenté Gheritarish, s’il avait pu surprendre le N’Dalloch dans une telle posture.

— Où est ma dague ? se contenta de lâcher l’Ange du Chaos.

Sa silhouette élancée sortit de l’ombre. Ses yeux verts, glacés, brillaient d’une détermination plus puissante encore que la haine.

Troghöl eut un sursaut de surprise mal maîtrisé en constatant la présence de L’Adhan :

— Dans ce coffre. Là, derrière ce meuble.

— Non, je sens que tu mens.

— C’est vrai, ta lame est ici, dans ma botte. Je la garde comme trophée que j’offrirai à l’un de mes fils, comme nous en avons la tradition… J’avoue que je suis surpris, guerrier, de constater que tu as survécu, et plus encore de te voir ici. La raclée que je t’ai octroyée la dernière fois ne t’a pas suffi ? Tu en redemandes ? Tu es fatigué de vivre ?

— Je n’ai aucune envie de mourir et je déteste souffrir. Je suis venu récupérer ma dague. Donne-la moi et tu pourras partir tranquille.

— Tu dis la vérité ?

— Évidemment pas. Je mens, comme toi.

Troghöl tourna légèrement la tête en direction de l’esplanade.

Cellendhyll arbora un sourire dur :

— Inutile d’espérer de l’aide, ils n’entendront rien. Ton odieuse cérémonie fait bien trop de bruit… Et de toute façon, tu n’as pas besoin de l’aide de tes guerriers, n’est-ce pas ? Tu es le N’Dalloch, tu ne crains personne… Eh bien je suis là, prêt à t’affronter. Je suis là, devant toi, et je vais te tuer.

— Personne ne peut vaincre le N’Dalloch ! se rengorgea Troghöl.

— Si. Moi. Et je vais te le prouver.