Chapitre 37

 

 

Vêtu de cuir noir moulant, des plumes pourpres fichées en diagonale de sa crête noire à l’arrière de sa tête, Troghöl avait cessé de lambiner. À la tête de ses soixante meilleurs guerriers, il traversait la jungle, se rapprochant des Pics Jumeaux. Il avalait les mètres et les kilomètres, bondissant par-dessus les obstacles sans dévier sa course ni freiner son élan. Troghöl courait, oui, et ses traits à la fois maigres et puissants se paraient d’une exaltation sanguinaire. Fiers de l’assister, ses guerriers le suivaient, distancés de quelques dizaines de mètres par la fougue de leur révéré N’Dalloch, excités, eux aussi, par la conclusion de la traque, par la promesse à venir du Grand Festin.

D’autres groupes de Sang-Pitié, plus restreints, venus de tous les côtés de la jungle, accouraient dans la même direction.

Troghöl leva la tête et lâcha un cri perçant mêlant autorité et défi. Il rejoignait Skärgash et son clan, ils avaient débusqué les proies. Sa meute reprit son cri avant de se mettre à scander la chanson. L’unique chanson de leur répertoire, celle du sang.

— Nous sommes les tueurs, les Sang-Pitié. Nous, les tueurs. Nous buvons le Sang, nous crachons sur la Pitié ! Nous, les tueurs, les Sang-Pitié.

Sang ! Pitié ! Hache, hache ! Sang ! Pitié ! Nous, les tueurs, les Sang-Pitié. Hache, hache et traque ! Hache, hache et tue !

Nous sommes les tueurs, les Sang-Pitié !