Chapitre 27

 

 

Le lendemain, Cellendhyll avança en surveillant Maurice du coin de l’œil. Ce dernier marchait tranquillement, tout en se parlant à lui-même. Il restait dans son coin et ne montrait aucune envie de se lier avec les membres de l’escouade mais ne semblait pas hostile pour autant. L’étrange bonhomme se révélait moins amusant que la première fois où ils s’étaient rencontrés, mais plus bizarre encore. Sans savoir pourquoi, Cellendhyll l’aimait bien. Il ne parvenait pas à s’offusquer du manque de clarté de ses réponses. Il décida de tout faire pour le garder sain et sauf, s’il en avait le pouvoir.

Était-il véritablement fou ? Comment ne pas y songer ? Parler tout seul pouvait être un signe de dérangement. Également celui d’une grande solitude, ce qui n’était d’ailleurs pas incompatible. L’Adhan ne savait quoi penser. Il songea à leur conversation du début de matinée. Maurice l’avait abordé durant la marche :

— Messire de Cortavar, je sais que vous affrontez le danger mais pour ma part, je ne me battrai pas, je dois vous en avertir.

— Et pourquoi donc ? Votre vie n’est pas moins menacée que la nôtre.

— Comment dire ? Je réprouve la violence et puis de toute manière je n’en ai pas le droit… Mon maître me l’a formellement interdit. Et je lui dois une absolue obéissance. Non, ne m’en demandez pas plus à ce sujet… Vous ne sauriez me faire parler. C’est ainsi… je ne suis qu’un témoin. Je ne peux interférer.

— Interférer avec quoi, par l’Épée de Lachlann ? Écoutez Maurice, je continue à ne rien comprendre. Lorsque nous avons fait connaissance vous étiez armurier, vous m’avez vendu des armes. Et à présent, vous vous déclarez contre la violence ?

— Disons qu’à l’époque c’était le meilleur moyen de vous rencontrer.

— Me rencontrer ? Et pourquoi ?

— Parce que le Destin a décidé de nous confronter, parce que je vous suis lié, d’une manière que je ne comprends pas. Mais suffit. J’en ai trop dit, déjà. N’insistez pas, messire, je vous en conjure.

Et l’étrange individu se mura dans un silence boudeur. Puis, quelques pas plus tard, il reprit d’un ton plus léger :

— Vous êtes sûr que vous n’avez pas de jus de carotte ?

 

*

 

— Dites, vous en pensez quoi ? demanda Faith.

— Il est dingue, lâcha Dreylen.

— Totalement barge, ajouta Bodvar.

— Fissuré du carafon, renchérit Khorn.

— Pour ma part, je pense qu’il est simplement différent, intervint Melfarak. Quoi, qu’est-ce que j’ai dit ?