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CELLI

Une nouvelle fois, les hydrogues avaient subi une défaite, et les cieux de Theroc s’étaient dégagés. Celli avait l’impression qu’il lui suffirait d’étendre les bras pour s’élever et flotter pour toujours, sans jamais atteindre les nuages. Elle voulait célébrer la victoire avec Solimar.

Après la bataille, Kotto Okiah avait accueilli non sans embarras les remerciements et les applaudissements des Theroniens. Lui et ses compagnons, ainsi que ses deux compers Analystes, étaient accoudés à leur vaisseau posé dans la clairière. Kotto avait hâte de retourner mener l’étude de l’épave hydrogue sur Osquivel.

Grâce à ses sonnettes, les humains disposaient d’une arme efficace contre les orbes de guerre, auparavant indestructibles. Bien qu’éparpillés, les Vagabonds se passeraient le mot rapidement. Kotto et ses compagnons étaient partis sans prolonger les adieux.

L’air sentait la boue et la pluie issue de la comète wentale vaporisée. L’eau imprégnée d’énergie irriguait la forêt, faisant éclore une débauche de nouvelles pousses. De leur côté, Celli et Solimar se rendirent dans les zones les plus gravement touchées de la forêt-monde et dansèrent jusqu’à ce que leur cœur soit près de lâcher. Branche après branche, ils guérissaient les arbremondes. Theroc semblait plus que jamais exploser de vie.

Dans la forêt, Celli courut jusqu’au golem de son frère.

— Regarde toute cette verdure ! Voilà longtemps que je n’avais pas ressenti autant d’espoir.

Un sourire plissa les lèvres de Beneto, et il prit sa sœur par le bras.

— Ce n’est que le début. Le retour des wentals est une source de joie, et les Vagabonds se sont révélés des alliés inestimables. (Sa voix évoquait la mélodie d’un hautbois.) Cependant, le meilleur reste à venir… aujourd’hui même. Je les sens arriver, ils sont tout proches.

Celli gambada à son côté, impatiente de voir la surprise. Quand il donnait de la voix, Beneto avait la force d’un cor. Dans la clairière, il demanda à l’ensemble des prêtres Verts de se joindre à lui puis se tourna vers le récif de fongus et appela Père Idriss et Mère Alexa. Enfin, il envoya un signal par télien, afin que chacun puisse suivre l’événement.

Solimar volait sur son cycloplane. Alors qu’il faisait des cercles bourdonnants autour de la clairière principale, il agita la main vers Celli. En à peine une heure, tous les Theroniens s’étaient réunis, curieux et excités. Idriss et Alexa portaient des vêtements multicolores, prévoyant quelque chose à fêter, bien que Beneto n’ait donné à personne le moindre indice.

Les arbremondes étaient eux aussi saisis d’une ardeur renouvelée. Leurs énormes troncs grinçaient, comme s’ils voulaient s’extraire du sol pour arpenter la forêt. Leurs frondaisons bruissaient malgré l’absence de brise.

Tel le joueur de flûte d’Hamelin, Beneto mena ses fidèles jusqu’au cercle de souches calcinées qui formaient comme un temple. Les branches s’écartaient sur son passage. Celli sentait le sol humide pulser sous ses pieds nus, et elle se demanda quel effet les créatures élémentales avaient sur les arbremondes. Les forces wentales et verdanies se combinaient-elles ? Solimar, Yarrod et les autres prêtres Verts éprouvaient une excitation croissante, même s’ils n’en comprenaient pas encore l’origine.

Beneto leva ses mains grossièrement taillées et se tint au centre de l’amphithéâtre : combinaison harmonieuse d’humain et d’arbremonde. Il laissa filtrer un léger son de ses lèvres, que les arbres reprirent. Le bourdonnement se mua en grondement intense, irrésistible, qui semblait provenir de la planète elle-même. Puis Beneto retint son souffle, et les arbres se turent.

Dans le ciel, des centaines – des milliers – de gigantesques vaisseaux arrivaient des confins de l’espace. Chacun avait la forme d’un arbre fantastique de la taille d’un astéroïde, et la force qui l’animait ramenait celle de la forêt-monde, par comparaison, à guère plus qu’une étincelle. Les vaisseaux-arbres s’étaient mis en route depuis le jour où les hydrogues avaient anéanti le premier bosquet d’arbremondes sur Corvus. Ils avaient parcouru des distances inconcevables pour apporter leur aide là où on avait désespérément besoin d’eux, au cœur de la forêt-monde.

Ces structures démesurées avaient poussé à partir d’un noyau de bois, d’où les branches s’étaient étendues en s’entrecroisant à la manière d’un chardon géant. Un vaisseau organique composé de tiges, d’arcboutants, d’épines monumentales. Les graines avaient déployé leur feuillage, protégées par une enveloppe ligneuse qui les avait gardées en vie à travers l’espace infini.

Celli les contempla, bouche bée. Les prêtres Verts et les Theroniens, stupéfaits, crièrent et pointèrent les vaisseaux du doigt.

— Maintenant, nous sommes assez forts pour vaincre définitivement les hydrogues. Nous pouvons nous préparer pour la guerre finale. (Beneto leva les yeux vers les vaisseaux organiques colossaux, et son visage refléta la confiance totale qu’il éprouvait.) Les vaisseaux de combat verdanis sont enfin arrivés.

Soleils éclatés
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