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Adar Zan’nh
Après avoir déposé les humains sur Dobro, Zan’nh, de retour vers Ildira, tomba sur cinq croiseurs lourds qui dérivaient dans l’espace. L’équipage avait disparu, des milliers de soldats ildirans incinérés sur place, et dont il ne restait plus que des traces noires sur les ponts, devant les consoles endommagées ou dans leurs cabines verrouillées. Chaque niveau résonnait du silence de la solitude.
À bord du vaisseau amiral, l’adar ne trouva que Ridek’h, l’Attitré d’Hyrillka, et le vieux tal O’nh à présent aveugle ; les ténèbres et l’isolation l’avaient conduit au bord de la folie.
Terrifié de se retrouver sur un vaisseau fantôme empestant la chair carbonisée, Ridek’h s’était replié en lui-même. Il se tenait recroquevillé sur le pont, agité de tremblements d’horreur, lorsque le commando d’abordage arriva dans le centre de commandement du croiseur.
— Les faeros ! lâcha-t-il, et les mots qui sortaient de sa gorge étaient aussi rêches que des cendres. Les faeros sont venus. Rusa’h…
Zan’nh n’avait découvert aucun indice de la présence de créatures ignées sur Dobro, et n’avait connaissance d’aucun incident sur d’autres scissions. Toutefois, le Mage Imperator avait perçu des anomalies dans le thisme, et avait envoyé des éclaireurs pour chercher d’où venait le problème. Apparemment, aucun n’était revenu.
Et à présent, cela ! La vie de milliers de soldats ildirans prise au cours d’un tel enfer, cela aurait dû résonner comme un cri d’agonie à travers le thisme. Et cependant, lui-même n’avait rien senti. Était-il possible que même le Mage Imperator n’ait pas su ?
Tal O’nh, le visage roussi, fixait sur le vide ses deux orbites noircies et encroûtées.
— Ils nous ont coupés du thisme. Ils ont brûlé les rayons-âmes et consumé l’équipage. Tous ces gens… Rusa’h a dit qu’ils alimentaient les faeros.
— Il y a combien de temps ?
C’était par hasard que Zan’nh avait détecté les vaisseaux lors de son voyage de retour au Palais des Prismes.
— Deux jours… peut-être plus, dit Ridek’h. Une éternité. Seul. Difficile à dire.
L’adar se rendit compte que s’ils étaient restés coincés là un peu plus longtemps, ils seraient devenus complètement fous.
D’une voix rauque, O’nh ajouta :
— Les faeros fonçaient vers Ildira.