19.
Bergenhem traversait de nouveau la place, mais
il ne voyait plus le roi. Il avait dû quitter son socle pour entrer
dans l’un des cafés le long du port. Il n’y en avait pas autant à
l’époque. Quel supplice d’être figé sur son socle. Tiens ! il
était remonté dessus. Le roi tendait le bras en direction de
l’inspecteur, comme s’il cherchait à lui montrer la voie. Bergenhem
tâchait de se représenter son propre avenir, mais il n’y parvenait
pas. Il suivit la rue du Port Nord, traversa le pont, dépassa le
restau de poissons Fiskekrogen, poursuivit le long de la résidence
du préfet en direction du fleuve, traversa le boulevard Oskar qui
ne se ressemblait plus depuis qu’on avait construit le tunnel de
Göta. La rumeur du trafic s’était enfin tue. Les riverains
pouvaient enlever leurs masques à gaz. Longeant le fleuve et les
péniches à quai, Bergenhem marcha vers l’ouest jusqu’aux rues
turbulentes de Rosenlund. L’eau du fleuve se confondait avec le
ciel dans une même teinte. Le Rapido l’attendait. Il venait à peine
de monter à bord que le petit ferry larguait les amarres. Il resta
sur le pont aux côtés d’une fille avec un vélo. Sans doute une
étudiante, à peine vingt ans. Elle a encore toute la vie devant
elle, songea-t-il. J’espère qu’elle le sait. Moi j’y ai cru, à son
âge j’y croyais. J’espérais rencontrer quelqu’un avec qui partager
ma vie, et c’est ce qui m’est arrivé, peu de temps après. Mais je
n’y crois plus. Peut-être n’y ai-je jamais vraiment cru. Il vit le
quai des Docks surgir au-devant du bateau. L’espace d’une seconde,
il crut que le Rapido allait se fracasser contre la jetée de
pierre, mais il ralentit et glissa vers l’appontement. La fille
débarqua son vélo puis elle l’enfourcha et s’éloigna du côté de
Sannegårdshamn. C’était Halders qui disait vouloir être réincarné
en selle de vélo pour dame. Mais ça devait faire un moment. On
aurait presque regretté. Il était gagné par
l’âge, comme eux tous. La fatigue peut-être. On perdait la haine.
You’re losing all your highs and lows, ain’t
it funny how the feeling goes. C’étaient les Eagles,
Desperado, un groupe de la côte ouest.
Côte ouest pour côte ouest, sourit Bergenhem en traversant la place
Eriksberg, avant de continuer sur le quai des Machines. Les
bâtiments s’arrêtaient là. Plus pour longtemps : on
construisait à un rythme effréné. Il voyait les pylônes du pont
d’Älvsborg au-dessus de Färjenäs. Le pont semblait grimper vers le
ciel. Bergenhem entra chez Sushi et s’installa à l’une des tables.
Il était le seul client. Une femme aux traits asiatiques vint lui
apporter un menu. Bergenhem refusa d’un geste qui signifiait :
désolé, j’attends quelqu’un.
Marie Sellberg ne voulait pas voir le corps de
son frère. Elle croyait Winter sur parole. Il ne surprit aucune
larme dans ses yeux. Ce qui ne voulait rien dire.
– Il avait sûrement des ennemis,
fit-elle.
– Pour quelle raison ?
– C’était quelqu’un d’agressif.
– Comment cela ?
– Eh bien… il devenait fou furieux, tout
simplement. Pour un rien. Il ne se contrôlait pas, comme on
dit.
– Savez-vous avec qui il a pu se
quereller ?
Elle éclata d’un rire bref et dur.
– Il y a eu pas mal de gens.
– Et ces derniers temps ?
– Je ne sais pas. Ça fait un an que je ne
l’ai pas vu.
– Pourquoi se mettait-il à ce point en
colère ?
– Je ne suis pas psychologue.
– Vous avez bien dû y réfléchir.
– Ça doit remonter à notre enfance.
– Ah bon ?
– On a morflé, je peux vous dire.
Winter garda le silence. Il attendait qu’elle
poursuive. Il entendit le grondement d’un hélicoptère dans le ciel,
derrière la vitre.
– Notre père nous battait.
Winter hocha la tête.
– Et notre mère ne faisait rien pour
l’empêcher. (Marie Sellberg tourna son regard vers le commissaire.
Jusque-là, elle avait fixé la fenêtre, le ciel bleu, la lumière du
soleil, toute cette beauté dehors.) Elle
n’osait pas. Elle n’avait pas le courage. Je ne sais pas. Je ne lui
ai pas pardonné. Je ne sais pas pourquoi je vous dis tout ça.
– C’est moi qui vous le demande.
– Il nous… violait. Mon père.
Winter hocha de nouveau la tête.
– Ce n’est pas la première fois que vous
entendez ça ?
– Non.
– On n’avait personne pour nous défendre,
Bengt et moi. On était tout petits. Mais… on n’a pas pu continuer à
se voir après. On n’y arrivait pas.
Winter lisait la douleur sur son visage tandis
qu’elle parlait. Il y avait en elle une blessure qui jamais ne se
refermerait. Aucun remède à cela. Si, la parole, mais seulement
dans une certaine mesure. Elle s’était renfermée derrière une
palissade qu’elle avait dressée d’elle-même, depuis sa plus tendre
enfance. Non, son enfance n’avait rien eu de tendre. Elle lui avait
été volée et parmi les criminels qu’il pourchassait, si Winter en
haïssait certains, c’étaient bien les voleurs d’enfance.
– Où sont vos parents
aujourd’hui ?
– Ils sont morts, tous les deux. Dieu
merci. C’est ma seule joie dans cette vie.
***
L’hélicoptère bourdonnait toujours au-dessus du
centre de Göteborg. Winter ignorait pourquoi. Il se promenait tout
seul dans le parc du commissariat. La sonnerie de son portable
retentit.
– Je suis arrivé, lui dit la voix dans
l’appareil.
– Ça doit faire un moment.
– Qu’est-ce que vous vouliez ?
– Sellberg s’est fait tirer dessus et vous
quittez la ville.
– J’étais assigné à résidence ?
– Non. Mais je vous avais demandé de vous
tenir à disposition pour d’éventuelles questions.
– Vous pouvez y aller.
– Où êtes-vous ?
– Dans ma chambre d’hôtel.
– Je vous rappelle dans quelques minutes.
Le nom de l’hôtel, le numéro de chambre ?
– Hôtel Stockholm. Chambre 189.
– Vous ne me faites pas confiance ?
s’étonna Ademar.
– Je ne veux pas parler dans un portable
plus que nécessaire. À cause des ondes.
– Vous vous moquez de moi ?
Mais Winter avait déjà raccroché. Il regagna le
commissariat et prit l’ascenseur. Il pensait à Marie Sellberg. En
sortant de son bureau, elle avait l’air d’être seule au monde. Il
ne restait plus qu’elle. La mort violente de son frère ne l’avait
aucunement réjouie. Elle était une digne représentante de cette
tragédie qu’est la vie. Winter s’était senti abattu après son
départ. Une sensibilité qui ne faisait que s’accroître avec les
années. Il se mettrait bientôt à pleurer en pleine audition. Le
monde est trop méchant. C’étaient toutes ces pensées qu’il
s’efforçait de chasser dans la solitude du parc, tout à l’heure. De
faire s’envoler en même temps que la fumée de son cigare. Les
Corps, c’était quand même quelque chose à quoi se raccrocher.
Il composa le numéro de l’hôtel d’Ademar et
attendit d’être mis en relation.
– Oui ?
– Vous avancez dans votre
bouquin ?
– Comment ça ?
– Je m’y intéresse.
– Pourquoi ?
– Rien d’étonnant : l’affaire date
d’avant moi, mais c’est toujours gênant pour la police, une
disparition non élucidée.
– Ça n’arrive pas couramment ? demanda
Ademar.
– Non. Ça arrive, mais la plupart du temps,
les gens finissent par donner de leurs nouvelles. Ou par être
retrouvés, d’une manière ou d’une autre.
– Ce n’est peut-être pas un mystère,
suggéra Ademar.
– Que voulez-vous dire ?
– C’est peut-être un puzzle.
– Intéressant, fit Winter. J’utilise
parfois la même image. L’essentiel, dans un puzzle, c’est de
trouver toutes les pièces.
– Ce n’est pas forcément suffisant.
– Qu’est-ce que vous cherchez à
faire ? Réunir tous les morceaux ?
– Je ne sais pas. Vraiment pas. On ne peut
jamais savoir s’ils existent tous.
– Vous en avez trouvé combien ?
– Pas beaucoup.
– Non.
– Est-ce un livre purement
documentaire ?
– C’est-à-dire ?
– Je ne sais pas, reconnut Winter.
– Si vous pensez qu’il ne doit s’appuyer
que sur des faits réels, alors c’est un document. Mais il n’y a pas
beaucoup de faits. Je me demande encore si ça ne deviendra pas un
roman.
– Je comprends.
– Bien.
– Avez-vous un lien avec cette
colonie ? reprit le commissaire. Ou avec Brännö ?
– Vous voulez dire personnellement ?
Non…
– Pourquoi ces recherches sur le
sujet ?
Ademar garda le silence.
– Avez-vous consulté le rapport
d’enquête ? continua Winter.
– Non, pas encore.
– Je peux y jeter un coup d’œil.
– Pourquoi ? Vous avez le temps de
faire ce genre de chose ? Avec un meurtre à
élucider ?
– Peut-être pas tout de suite. Mais… je ne
sais pas. Cette affaire m’intéresse.
Quelque chose lui disait qu’il devait
s’intéresser à cette disparition. Un pressentiment, une intuition.
Quelque chose d’impossible à justifier de façon rationnelle, et qui
relevait sans doute de l’ordre de la fiction plus que du
document.
– Mais j’ai un lien avec… fit Ademar après
une longue pause.
– Oui ?
– Beatrice était ma sœur.
Halders et Aneta Djanali s’évitèrent jusqu’à ce
que ça devienne impossible. À savoir dans la voiture d’Aneta, en
rentrant de chez Sellberg. Ils dépassèrent le carrefour dont l’une
des branches menait à la maison d’Halders. Celle d’Halders et
d’Aneta, comme ils avaient pris l’habitude de le dire ces dernières
années. Combien d’années avaient-ils vécu ensemble dans cette
maison ? Trois ? Quatre ? Il avait oublié. Il
préférait éviter d’y penser.
– Qu’est-ce qui se passe ?
demanda-t-il.
– Je veux que tu me répondes.
– Je ne sais pas, Fredrik.
– Je ne peux pas me contenter de ça.
– Qu’est-ce que tu veux que je te
dise ?
– Dis quelque
chose bon sang !
Elle sursauta au ton de sa voix. Elle sentit que
la voiture faisait une embardée sur la chaussée et s’agrippa plus
fort au volant.
– Calme-toi, Fredrik.
– Tu crois que ça m’amuse, cette
histoire ?
– Pourquoi est-ce que je croirais
ça ?
– Si tu veux déménager, aie le courage de
le dire ! Et de le faire ! Mais te tailler le soir sans
rien dire…
Elle ne dit rien.
– Qu’est-ce qu’ils en pensent, d’après toi,
Hannes et Magda ? Hein ? Qu’est-ce qu’ils en
pensent ?
– Je… j’y réfléchis, Fredrik.
– Ah bon ?
– Laisse-moi juste un peu de temps,
fit-elle.
– Du temps pour quoi faire ? J’ai pas
la patience d’attendre. Tu me connais. Non, sûrement pas. Je
croyais. Tu le croyais aussi. Arrête la bagnole.
– Quoi ?
– Arrête-toi.
Elle freina et se gara sur le bas-côté. Juste
devant une petite aire de jeu. Trois gamins se balançaient, chacun
sur sa balançoire. Leurs rires traversaient les vitres. Halders
ouvrit la portière, sortit, claqua la portière derrière lui et se
mit à marcher sans dire un mot. Sans se retourner non plus. Je ne
peux pas partir comme ça, conclut-elle.
Sur la route de Långedrag, Winter longea l’école
de Hagen ; il prit ensuite à droite la rue Krokeback, puis
tourna à gauche dans la rue Fullriggare et continua en direction de
Hagen. Ces rues le ramenaient à son passé. Il avait eu droit à une
enfance heureuse. Personne dans sa famille ne l’avait maltraité. Sa
vie avait commencé sous de bons auspices. Il gara la Mercedes
devant la maison de son enfance. Sa grande sœur Lotta l’occupait
encore avec les filles, même si Bim vivrait bientôt sa propre vie.
En ouvrant la grille, Winter se demandait pourquoi ses visites
étaient si espacées. Lotta comptait beaucoup
pour lui. Ses filles aussi. La maison, c’était différent, pour une
raison qui lui échappait. C’était une belle bâtisse de crépi blanc
que Bengt et Siv avaient achetée une fois qu’ils avaient été à
l’aise financièrement. Ils avaient décidé de quitter Kortedala pour
se rapprocher de la mer. De fait, dans son enfance et son
adolescence, Winter en avait beaucoup profité. L’été, la famille
louait une maison dans l’archipel. Il avait vécu sur les rochers
pour ainsi dire. Ses parents avaient possédé un voilier, lui
jamais. Étonnant, sans doute. Il aurait dû s’acheter un bateau,
comme il aurait déjà dû faire construire sur leur terrain de
Billdal.
La porte s’ouvrit avant même qu’il n’atteigne le
perrron.
– Erik !
Elle l’embrassa.
– Je n’ai pas tout de suite reconnu ta voix
au téléphone.
– Elle est bien bonne !
– On ne s’est pas vus depuis l’an
dernier ?
– Si pour toi un mois, ça fait un an.
– Je vois plus Angela et les filles que mon
propre frère.
– Qu’est-ce que tu veux !
– Mais entre donc. Tu prends du
café ?
– Pourquoi pas ?
– Ou un whisky ?
– Est-ce que j’ai l’air d’avoir envie d’un
whisky ?
– Je n’en suis pas sûre. Café donc. Ce sera
de l’instantané : la machine à espresso est en panne.
– Tu ne dois pas l’utiliser assez
souvent.
– Je sais, mais Bim et Kristina ont arrêté
le café. Comme la viande. Les œufs. Et le lait. Mais surtout les
espressos.
– Et les cappuccinos ?
– Espresso plus lait : c’est tout
aussi nocif.
– Mon Dieu ! Où sont-ils ? Il
faut que je leur parle.
– Ils ne sont pas encore rentrés de
l’école.
Winter consulta sa montre. L’après-midi était
bien avancée. La nuit commençait à tomber. Le ciel plongeait en
lui-même pour se faire d’un bleu plus profond. Il voyait dans le
jardin les vieux pommiers et les poiriers dont les branches
s’étiraient de tous côtés. Il se rappelait encore l’endroit où son
père avait accroché la balançoire.
– Tu devrais faire tailler les arbres,
Lotta.
– Tu ne m’avais pas promis de t’en
charger ? Au printemps, non, en février dernier.
– J’étais en
Andalousie. Tu devrais le savoir : vous nous avez rejoints
pendant les vacances scolaires.
– Alors c’était l’année d’avant.
– Je te le fais en février prochain.
– J’ai parlé avec maman.
– Oui, elle m’a appelé, moi aussi. Elle
avait envie de revenir au pays.
– Pour un petit bout de temps, compléta
Lotta. Elle peut habiter chez moi. Pas de problème.
– Bien.
– Elle doit se sentir isolée.
Il hocha la tête.
– C’est absurde, reprit-elle, rester toute
seule dans son ghetto de Nueva Andalucia quand elle a sa famille
ici, à Göteborg.
– Elle espère sans doute qu’on déménagera
tous en Espagne.
– Oui. Vous, vous êtes en bonne
voie !
– Non. L’hiver dernier, c’était une
exception qui ne se reproduira pas. Pas avant un moment.
– Exactement ce qu’elle veut
entendre : « Pas avant un moment » !
– C’est une expat’. Une autre race que toi
et moi, Lotta.
Sa sœur éclata de rire.
– Je prépare du café.
– Tu m’as l’air un peu fatigué, Erik.
Excuse-moi de te le dire.
– Ça ira mieux dans un an ou deux.
– Tu plaisantes ?
– Pas complètement. C’est le poids des
responsabilités. Birgersson est parti à la retraite. Je dois
m’occuper de toute la brigade maintenant.
– Ce n’est pas ce que tu as toujours
fait ?
Il s’abstint de répondre.
– Vous êtes combien dans votre
bureau ? Votre brigade, je veux dire.
– Cinquante-huit personnes.
– Combien de femmes ?
– Je… laisse-moi réfléchir… je ne sais pas.
Vingt-cinq pour cent. Disons trente.
– Kristina parlait d’entrer dans la police,
l’autre soir.
– Elle plaisantait peut-être.
– Dissuade-la en tout cas. Ce métier ne
risque pas de devenir plus facile. Et puis il y a trop de
psychopathes à l’École supérieure de la police.
– C’est la thèse officielle de la
police ?
– C’est la mienne.
– Pourquoi tu n’arrêtes pas tout de
suite ?
Il fit tourner sa tasse dans sa main en
regardant le lait se mélanger au café en poudre. Il venait de
mordre dans une brioche à la cannelle décongelée au micro-onde. Une
brioche maison, mais qui brûlait la langue et qui s’émiettait après
être restée dans le four quelques secondes de trop.
– J’aime toujours mon travail,
répondit-il.
– On ne dirait pas à t’entendre.
– Je ne voudrais pas en faire un
autre.
– Tu le détestes, ce boulot.
– On peut aimer et haïr en même
temps.
– Ça me rappelle mes relations
amoureuses.
Ce fut au tour de Winter d’éclater de
rire.
– Comment ça se passe avec le père de tes
filles ?
– Toujours aussi dingue. On a reçu une
carte de Noël, venant d’Australie cette fois.
– Elles n’ont pas envie d’aller le
voir ? De lui parler sérieusement ?
– Sérieusement ? Qu’est-ce que tu veux
dire ?
– Pour le mettre dos au mur, pardonne-moi
le cliché. Il a négligé ses gamines quand elles étaient petites et
bientôt elles seront assez grandes pour le lui dire en face.
Elle ne répondit pas. Il devinait qu’elle y
avait déjà pensé. Ce moment-là viendrait. Nécessairement. Elle
aurait dû agir autrement. Le père aussi. Mais il était trop
tard.
– J’ai tâché de leur éviter cette
impression, fit-elle.
– On a peu de chances d’y échapper dans
leur situation.
– Je ne suis pas sûre de comprendre, mais
si Bim ou Kristina commencent à en parler sérieusement, j’essaierai
de faire quelque chose.
Il hocha la tête et but une gorgée de café.
L’obscurité gagnait maintenant très vite la pelouse. Les couleurs
s’effaçaient. La vieille cabane de jeux sous la haie devenait
grise. Il y avait souvent passé la nuit, tout comme les filles de
Lotta, et les siennes. Bim et Kristina jouaient le rôle de grandes sœurs pour Elsa et Lilly. Il arrivait
qu’elles ne veuillent plus partir. Il était bon pour leur
construire des cabanes une fois rentré à la maison. Un parquet bien
poncé, ça valait le gazon.
Ils restaient assis dans la pénombre, goûtant la
tombée de la nuit. Les traits du visage de sa sœur s’estompaient.
Ses pensées lui échappaient.