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Addison suait à grosses gouttes. S’il n’avait tenu qu’à lui, il serait resté le plus loin possible d’Alice Crenshaw. Les gens de la sécurité lui flanquaient des frissons dans le dos.

Manque de chance, une de ses meilleures amies, Lisa Miggs, avait cru futé d’utiliser le Persona de Jiro Tanaka pour se payer une balade dans la zone du Mur. L’affaire avait mal tourné. Lisa s’en était sortie grâce au renfort d’Addison.

Depuis lors, celui-ci mourait de terreur. Crenshaw avait découvert le pot aux roses. Il était à sa merci.

Ces derniers jours, elle l’avait chargé d’enquêter sur les têtes pensantes du projet IA.

Il venait lui faire son rapport.

— J’écoute, Addison. On voit bien que tu n’as que ça à faire…

— Je…

— D’accord, je pose des questions et tu réponds. Vanessa Cliber ?

— Rien à signaler, madame… Une vierge de fer. Seules ses machines comptent.

— Dommage. J’espérais devoir m’occuper d’elle… Huang et Hutton ?

— Ils sont beaucoup moins clairs… Je veux dire, tous les deux. Ce sont des habitués des garçonnières du niveau 6. Huang est marié. On parie que sa femme ne sait rien ?

— C’est tout ? Bon sang, tous les cadres supérieurs mènent ce genre de double vie. Tu as des détails ?

— Hum… Oui… Huang suit une sorte de routine. Je veux dire qu’il a des horaires réguliers…

— Une maîtresse attitrée… Si elle est influençable, ça peut me donner une prise. Rien d’autre ?

— Eh bien… C’est peut-être peu de choses, mais j’ai repéré un trou dans les archives…

— Un trou ?

— Des données effacées. C’était une des nuits habituelles de Huang, mais il n’y a pas trace de sa visite au niveau 6.

— Le président est assez doué pour avoir fait sa petite rectification lui-même, c’est ça que tu veux dire ? Hutten était en goguette, cette nuit-là ?

— Non. Il a commencé une semaine après cet incident… Il vient tous les trois quatre jours, un peu au hasard.

— Tu as visionné les enregistrements ?

— Tu es dingue, Crenshaw ? Ces fichiers sont hyper-défendus…

— Je croyais que tu étais un champion ?

Un champion d’opérette, oui ! Ce mec n’a pas de tripes…

— Je suis bon, mais pas fou. Tout ça me dépasse, Crenshaw. Tu t’attaques à des gens importants. Le moins puissant pourrait me virer d’un claquement de doigts. Et Huang est le président. Le président !

— Tu as plus à craindre de moi, Addison. Huang, Hutten et les autres ont trop à faire pour remarquer un miteux de ton espèce. Obéis-moi et tout ira bien.

— Compris, madame… Compris.

— Alors si tu as autre chose à dire, accouche !

— C’est ce Werner…

— Verner !

— Oui… Il ne travaille plus pour nous, je crois…

— Exact…

— C’est bien ce que je pensais… Il s’est aventuré près du Mur, il y a trois jours. J’ai vu son Persona.

— Et tu n’as rien dit ?

— Bien sûr que non ! Je n’avais rien à faire là…

— Logique…

Ainsi, Verner fouinait dans le réseau de Renraku. Quel fils de chienne ! Depuis l’enlèvement, elle se tuait à dire que ce type était dangereux. Mais personne ne l’avait écoutée. Rirait bien qui rirait le dernier.

— Oublie l’histoire des garçonnières, Addison. Je te charge de repérer Verner. Tiens-moi au courant de tout. J’ai bien dit : tout ! Compris ?

Addison hocha la tête.

— Rien à ajouter.

— Non…

— Alors dégage !