L’elfe ne se démonta pas.
— Je ne suis qu’un messager, dit-il calmement.
Hart ravala une repartie cinglante. A quoi bon ? Son précédent éclat n’avait pas impressionné l’intermédiaire. Il prenait les choses avec décontraction. Katherine aurait aimé en faire autant, mais elle détestait qu’une affaire tourne mal.
Celle-ci virait à la catastrophe.
La patrouille de Tir ne s’était pas couverte de gloire. L’avoir raté elle, la reine des ombres, on pourrait le comprendre. Mais pour manquer ce pigeon de Verner, il fallait être vraiment mauvais.
Pire que mauvais : nul !
— Tire-toi de là ! cracha-t-elle au messager.
— Pas de réponse ?
— Je ne réponds jamais aux gens dont j’ignore le nom.
— Mon employeur pensait vous rendre service…
— Je suis très touchée… Dis-moi son nom !
— Il vous serait familier, croyez-moi. Mais le connaître aussi tôt ne serait pas sage. A l’avenir, sa protection vous sera précieuse… Tout ce qu’il demande, en échange, c’est un rapide aperçu de vos affaires en cours.
— Miroir menteur !
— Pardon ?
— Dis-lui juste ça : miroir menteur.
Le messager perdit un peu de son impassibilité.
— Très bien. Si vous le prenez comme ça…
Il fit volte-face et s’éloigna.
Un partout, mon vieux ! Transmet mon message à ton maître, M. Mystère. A énigme, énigme et demie…
L’employeur du messager pouvait avoir informé Katherine pour une dizaine de raisons. Le double jeu en était une. Mais il serait temps de s’y intéresser plus tard…
Tessien doit savoir. Ce contrat le regarde autant que moi.
Hart longea la plage et grimpa jusqu’à la grotte où le dracomorphe se reposait. Il s’éveilla à son entrée.
— J’ai de mauvaises nouvelles, Tessien.
— Tout ce qui me dérange quand je dors est mauvais…
— L’heure n’est plus à dormir…
Il ne dit rien, mais elle le sentit attentif.
— Le crétin qui nous a servi de couverture pour l’opération doppelganger est toujours vivant. Il se promène à San Francisco avec un runner appelé Dodger. C’est un decker. Ces deux casse-pieds farfouillent dans la Matrice. Tôt ou tard, ils trouveront nos noms et celui de Drake.
— Drake sait que le plouc est vivant ?
— Je ne crois pas.
— Il faut agir vite.
— C’est aussi mon avis. Je déteste les affaires qui traînent en longueur.
Le serpent à plumes acquiesça d’un grognement.