Les hélicoptères-citernes avaient noyé le feu et dispersé les enfants nus sous des trombes d’eau glacée. Les policiers les avaient saisis, empilés dans des cars blindés et stockés dans les rues adjacentes. L’Avenue et la Place déblayées, le cortège commença à se dissoudre. Pour hâter sa dislocation, un double pont roulant d’autocars faisait son plein de femmes aux deux extrémités du cortège et allait les déverser aux stations de métro Auber et La Défense, celles des Champs-Elysées et de l’Étoile à Neuilly ne suffisant pas à absorber la foule. Les ambulances ramassaient les femmes évanouies ou blessées, et les nouveau-nés qui avaient été poussés prématurément vers la sortie. Parmi eux se trouvait la fille de Roseline, mauve comme un pétunia.
Toute la circulation s’était figée jusqu’aux portes de Paris. L’embouteillage tentaculaire s’étendit jusqu’à Orléans, Lille. Le Mans, puis atteignit Lyon et Strasbourg puis Marseille et toute la Côte d’Azur et commença à geler l’Allemagne et la Belgique. Il y eut par endroits de l’énervement et des rixes. On joua aussi à la belote et à la pétanque. Et quand la nuit tomba il y eut, dans les voitures immobiles ou les fossés des autoroutes, quelques gestes d’amour
Ce furent les derniers.