Il savait qu'il ne pourrait supporter bien longtemps cette horreur. Il était humain, lui. Il devait passer à l'attaque, se mettre à l'épreuve, en finir avec cette abomination. Plus il tardait, plus son courage l'abandonnait. Blade n'avait jamais connu la peur mais elle l'envahissait à présent. Et il n'avait pas encore vu la créature.

Il ramassa un crâne et le lança dans le coin.

— Sors de là, Urdur! Sors et viens te faire tuer !

Son cri se répercuta dans l'autre. La chose savait-elle qu'il était là, pouvait-elle comprendre ?

Un mouvement dans l'ombre. Un bruit traînant, une glissade comme si la bête rampait dans un marécage. Blade fit un pas en avant et s'arrêta, l'épée levée, balançant la tête de Hirga de la main gauche.

La créature apparut à la lumière.

Urdur glissait vers lui, mi-serpent mi-dragon, avec la tête et les dents redoutables d'un tyrannosaure. Des crocs immenses luisant comme des dagues. Des dizaines de crocs. Des griffes en forme de faux aux courtes pattes recouvertes d'une carapace. D'épaisses écailles sur tout le corps, sauf sur le ventre. Là, la chair était blafarde, gonflée et molle. Le ventre ! C'était sa seule chance.

Urdur s'arrêta et examina Blade de ses yeux reptiliens. Il gronda. Un rire fusa, venant de la corniche. Casta voyait, Casta savait.

Ce fut sans doute ce rire qui sauva Blade. Ce rire arrogant. Il bondit et projeta la tête ruisselante de sang sur la créature. Urdur la saisit entre ses griffes et se mit à la déchiqueter. Pendant un instant il parut oublier Blade. Une intelligence limitée, avait dit Hirga.

En un éclair Blade s'élança et trancha une des pattes antérieures d'Urdur puis il recula d'un bond. Des griffes lui effleurèrent la cuisse, les terribles mâchoires claquèrent derrière lui. Urdur rugit et hurla en se tordant. Il se précipita vers Blade et s'immobilisa soudain. Il commença à ronger sa propre patte.

Blade décrivit un cercle et repartit à l'attaque. Cette fois il dut s'y reprendre à trois fois avant de trancher une des pattes postérieures. Un épais sang noir l'inonda. Le corps de serpent se convulsa et Urdur essaya de se retourner en avançant la patte antérieure qui lui restait pour tenter d'attraper son bourreau. Blade abattit son épée et recula. Les rugissements de rage et de douleur emplissaient l'antre. Urdur n'avait plus qu'une patte postérieure. Tranche-la, se dit Blade, et tu seras vainqueur.