CHAPITRE VI
La mine sombre, Ogier chevauchait à côté de Blade. Quand ils débouchèrent dans la plaine des Pyramides, Blade vit qu'elle s'étendait sur des kilomètres et il compta plus de vingt pyramides. D'autres se dressaient encore à l'horizon, mais toutes étaient dominées par la masse inachevée du mausolée de l'Izmir.
— Je n'aime pas ça, bougonna Ogier. Et l'Izmir ne l'aimera pas davantage. On ne peut se lier à Castra. C'est un prêtre, d'abord, et ensuite il reste là, seul, à pratiquer sa sorcellerie et sa magie noire. Cela ne me dit rien de bon.
Blade se retourna pour examiner son escorte, dix cavaliers bien armés. Il portait lui-même une armure de guerre, un glaive et une masse d'armes, et une dague glissée dans son ceinturon. Il rit au nez de son capitaine.
— Si nous ne sommes pas capables d'affronter un troupeau de prêtres, nous ferions mieux de renoncer à l'armée et à devenir prêtres nous- mêmes. Allons, calme-toi, Ogier. Laisse-moi faire. Et n'oublie pas que je suis mon propre maître à présent, même si je suis l'héritier de l'Izmir. Je fais ce que bon me semble. Si mon service ne te plaît pas, libre à toi de me quitter.
— Tu ne comprends pas, grommela Ogier. C'est parce que tu es un dieu, ou tout comme, et que tu ne crains pas ce qui fait peur aux simples mortels. Mais je te dis que Casta et ses prêtres sont à craindre. Ils se livrent là dans le secret à des pratiques infâmes. On dit qu'ils fabriquent des monstres, des créatures si abominables que l'homme qui les voit en perd la vue.
— Et que font-ils de ces monstres?
— Ils s'en servent pour garder leurs trésors. Ces bêtes hantent le labyrinthe et tuent et dévorent tous ceux qui cherchent à voler. Les prêtres de Zir, et Casta en particulier, sont plus riches qu'on ne peut l'imaginer, Blade.
Blade éclata de rire.
— Je le croirai quand je le verrai. Quand j'aurai vu un de ces monstres.
Ogier ne répondit pas. Ils poursuivirent leur chemin en silence. Le gigantesque bloc de marbre qui devait être la dernière demeure de l'Izmir grossissait à l'horizon.