Marko le tira de ses réflexions.
— Un signal, prince!
Blade se dressa sur ses étriers. Une bannière écarlate claquait devant lui, dans le lointain, à peine plus qu'un point près de l'horizon. Puis un héliographe se mit à clignoter au soleil. Blade jura tout bas. Si Bloodax avait des éclaireurs si loin en arrière, ils verraient ces éclairs.
— Traduis-moi ça, ordonna-t-il à Marko.
Le jeune courrier se redressa et déchiffra les éclairs du miroir.
— Le premier escadron de cavalerie vire maintenant vers l'ouest, prince. Aucun Hitt n'a été vu. Ils ont découvert un village abandonné, où il ne reste même plus de volaille ni de bétail. L'officier pense qu'après une demi-lieue il sera juste derrière la ligne de bataille des Hitts. Il attend des ordres.
— Envoie-lui ceci... As-tu un miroir?
Marko tira une petite glace de sa tunique.
— Il doit avancer d'une demi-lieue vers l'ouest avant de tourner au sud. Il restera hors de vue, en se servant des arbres et des collines comme écran. Quand ses éclaireurs d'avant-garde arriveront en vue de l'arrière des Hitts, il devra faire halte et reculer de quatre cents mètres pour m'attendre. Assure- toi qu'il a bien reçu et compris le message.
Le garçon poussa son cheval au soleil et fit scintiller un moment son miroir. Ils attendirent. Des éclairs lointains répondirent. Marko rejoignit Blade.
— Il a compris et il repart.
— Parfait. Maintenant, Marko, tu vas retourner auprès du capitaine Thane et lui répéter ce que j'ai dit au premier escadron. Le même message, en ajoutant que je vais attendre son arrivée, tout comme le premier escadron m'attend. Ses hommes doivent tripler le pas. Dis-lui qu'il doit les fouetter s'il le faut. Va.
Marko partit au grand galop et Blade retourna en tête de sa colonne. Elle s'ébranla au petit galop. Bientôt, ils traversèrent le village. Blade l'examina brièvement sans s'arrêter : des rues disposées en rectangles réguliers, des maisons de bois et de torchis, peintes de couleurs vives. Portes et fenêtres étaient ouvertes et une odeur de cuisine planait dans l'air, mais rien ni personne ne bougeait. Blade fit une grimace. On ne lui avait pas menti; quand les Hitts combattaient, c'était totalement.
L'escadron d'avant-garde avait suivi les ordres à la lettre. Blade trouva les cavaliers attendant sous des arbres au bas d'une longue pente. Ils avaient mis pied à terre et se taisaient, les soldats bouchonnant leur monture, ou déjeunant de viande séchée. Au-delà de la crête montait le bruit de la bataille, plus sonore à présent et plus terrifiant.