SCÈNE X

 

LES COMMANDANTS, en cercle, LECOURBE et DAUMAS, à l’intérieur.

 

LECOURBE. – Messieurs, il faut nous attendre à une attaque furieuse ; nous sommes trois bataillons, et nous allons avoir vingt-cinq mille vieux soldats sur les bras, commandés par Souworow en personne. Vous connaissez la jactance du vainqueur de Cassano, de la Trébia et de Novi ; vous savez qu’il se vante de nous passer sur le corps, d’écraser Masséna comme Joubert, Macdonald et Moreau, et de marcher sur Paris. Souvenez-vous que nous sommes le 3 vendémiaire ; qu’aujourd’hui l’action décisive de la campagne s’engage entre Masséna et Korsakow sur toute la ligne, de la Linth à la Limmat. Souvenez-vous de la dépêche du général en chef, qui nous ordonne de défendre le terrain pied à pied, de mourir s’il le faut jusqu’au dernier pour retarder la marche de Souworow, et l’empêcher d’arriver sur le champ de bataille. C’est la République qui nous parle ; vous justifierez tous sa confiance, j’en suis sûr !

(En ce moment, on entend s’engager au loin le feu des tirailleurs ; plusieurs hussards à la file repassent le pont au galop.)

DAUMAS. – Voici nos éclaireurs qui se replient, général.

LECOURBE, aux commandants. – Allez, messieurs, que chacun retourne à son poste ; et surtout du calme, de la vigueur, de la décision.

(Les commandants s’éloignent ; les éclaireurs continuent d’arriver.)