SCÈNE VII

 

LES PRÉCÉDENTS, LES COSAQUES

 

UN COSAQUE. – Du schnaps, matouchka ?

HATTOUINE. – Je n’ai pas de schnaps pour vous.

LE HETTMANN, d’un ton impérieux. – Donne du schnaps à mes hommes… Tu me dois obéissance, vieille…, donne du schnaps !

LE DOCTEUR, à Hattouine. – Et moi je te défends de verser du schnaps !

LE HETTMANN. – Tu le défends.

LE DOCTEUR. – Oui, c’est moi qui commande ici, ce schnaps est en réquisition pour les blessés.

LE HETTMANN. – J’en veux.

LE DOCTEUR. – Quand tu reviendras avec une balle dans le ventre, je t’en mettrai une compresse dessus, hettmann, mais pas avant.

LE HETTMANN. – Tu n’es pas un chef.

LE DOCTEUR, sortant une paire de pistolets de la charrette. – Je suis assez chef pour te brûler les moustaches, si tu bouges, hettmann. Je m’appelle docteur Sthâl, chirurgien aux grenadiers de Rymnik, et si je dis un mot de ta conduite…

LE HETTMANN. – Allons… c’était pour rire… pour voir ce que tu répondrais.

LE DOCTEUR. – À la bonne heure ! seulement, je n’aime pas les plaisanteries cosaques.

(Grande rumeur au-dessous du plateau. Hattouine se lève et regarde.)

HATTOUINE. – Le régiment d’Ismaïl arrive.

CRIS. – Vive Souworow !… Vive Souworow !…

LE DOCTEUR. – Ah ! ah ! le feld-maréchal…

NOUVEAUX CRIS. – Vive Souworow !… vive Souworow !…

(Une file de mules paraissent, portant les canons et les affûts démontés. Des soldats d’artillerie escortent ce convoi ; quelques-uns s’arrêtent sur le plateau pour reprendre haleine. Au moment où la queue de colonne s’engage dans le défilé, Souworow paraît avec son état-major.)