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La nouvelle avait fait le tour de l'université comme une traînée de poudre. À peine un an et demi après les meurtres de Lucy Barton et d'Emy Paich, un nouveau drame venait de toucher la jeunesse de River Falls.
Bien que la police se soit refusée à donner la moindre précision sur les meurtres de Lewis Stark et de Nathaniel Morrison, la presse avait eu vite fait de parler de prédateur sexuel.
– Et ma mère qui me soutenait qu'il n'y avait pas meilleure université dans la région ! s'exclama Luke Porter.
Grand blond au visage rectangulaire, il aurait pu passer pour un play-boy, si seulement il s'était mis au sport. À défaut, la fortune de ses parents donnait le change.
– Aucun d'eux n'était étudiant, rectifia Kevin Fisher.
De taille moyenne, les cheveux bruns, il avait un léger embonpoint qui ne nuisait en rien à son charisme nonchalant.
– Ouais, et d'ailleurs, Nathaniel Morrison n'allait même pas à l'école. Il prenait ses cours chez lui, précisa Gerald.
À l'inverse de ses deux camarades, il avait un corps svelte de sportif. Et comme eux, il était le fils d'un riche entrepreneur de la ville.
– Les Enfants de Marie. Je sais, reprit Luke. Je n'arriverai jamais à comprendre comment on peut se faire avoir par ce genre de secte.
C'était l'heure de la pause déjeuner. Gerald et ses deux meilleurs amis s'étaient retrouvés à la cafétéria de l'université. Aux autres tables, tout le monde ne parlait que de ça.
– La solitude, la détresse, le besoin de reconnaissance, d'appartenance à un groupe. Les raisons ne manquent pas, remarqua Kevin.
Il avait connu une fille en dernière année de lycée qui avait tout abandonné pour entrer dans l'Église de scientologie.
Un sacré bon coup au lit, se souvint-il, sans oublier les interminables discussions qu'ils avaient sur le sens de la vie.
– Je sais bien, mais quand même, faut être très con pour croire à ces conneries, argua Luke.
Il tripatouilla le plat du jour du bout de sa fourchette et, sans conviction, piqua un morceau d'un légume non identifiable qu'il mit dans sa bouche.
– Pas forcément. Si tu es né dedans, quel autre choix as-tu ? dit Gerald en repensant à la jeune fille éplorée qu'il avait croisée le matin même.
– Là, il t'a eu, lança Kevin, qui lui fit un clin d'œil et le pointa du doigt.
– OK, va pour leurs enfants. Mais pour les autres ? Je n'en démordrai jamais : tous des timbrés.
Gerald marmonna un assentiment et baissa le regard sur son assiette. Lui non plus n'avait guère envie d'avaler ce plat peu ragoûtant où viande et légumes nageaient dans une sauce insipide. Cependant, autre chose le perturbait. Il n'avait pas compté en parler, mais les mots sortirent tout seuls :
– J'ai vu une des leurs ce matin.
Deux mines perplexes le dévisagèrent.
– Une des leurs ? Tu veux dire une « alien » ? chuchota Luke en mimant des guillemets avec ses doigts.
– Arrête, je parlais d'une fille des Enfants de Marie.
Luke allait se foutre de lui s'il continuait, mais peut-être était-ce important.
– Oui, je vois très bien qui c'est. Elle est en première année, fit Kevin en passant sa main dans sa barbe de trois jours.
– Évidemment que je vois qui c'est. On dirait qu'elle sort d'un film d'époque. Une putain d'Amish ! fit Luke.
– Je l'ai croisée ce matin.
– Ne me dis pas que tu lui as fait du rentre-dedans. Elle est franchement trop moche ! se moqua Luke.
Une coiffure de grand-mère avec son chignon torsadé. Aucun maquillage, des lunettes énormes aux verres en cul de bouteille. Et des vêtements sortis tout droit de la penderie de Laura Ingalls. Il ne manquait plus que les sabots et la caricature aurait été parfaite.
– C'est pour ça que tu as raté le cours de Mandel ? Pour te prendre un râteau avec cette fille ? s'étrangla Kevin.
Les deux amis de Gerald n'en revenaient pas. Qu'est-ce qu'il lui était passé par la tête ? Il était si désespéré que ça ?
– Vous êtes vraiment des malades, les mecs. Jamais de la vie je sortirais avec un thon pareil, se défendit-il, stupéfait que ses amis aient pu imaginer une telle horreur.
Luke et Kevin eurent une moue dubitative et attendirent la suite, l'air moqueur.
Gerald décida d'aller à l'essentiel.
– Quand cet enfoiré de Mandel ne m'a pas laissé entrer en cours, je suis allé à la bibliothèque et en allant aux toilettes…
– … pour une petite branlette ! le coupa Luke, qui s'excusa aussitôt : Pardon, mais la perche était trop belle. Continue.
Gerald leva les yeux au ciel, priant pour qu'on lui change d'amis au plus vite.
– Bref, j'ai entendu des pleurs du côté des toilettes des filles, je suis entré, et c'était cette fille.
– Tu penses qu'il y a un rapport ?
– Elle devait savoir qu'un membre de sa famille était mort.
– Le truc, c'est qu'il devait être 8 heures à peine passées, bien avant l'annonce des médias, lâcha Gerald. Maintenant, ça ne veut rien dire, mais je n'arrête pas d'y penser.
– Effectivement, dit comme ça, c'est étrange, mais peut-être qu'elle chialait juste parce qu'elle a découvert qu'elle avait ses règles et pas de tampon ! se moqua Kevin.
Ou simplement parce que quelqu'un avait renversé ses affaires sur le parking détrempé et que personne ne l'avait aidée.
Gerald aurait dû le leur dire, mais au fond il se sentait coupable de ne pas s'être arrêté à ce moment-là. Aussi tarée et moche soit-elle, elle méritait un peu de compassion, et il n'aimait pas l'idée d'en avoir manqué ce matin.
– Tu ne comptes pas en parler aux flics, quand même ? demanda Kevin, qui ne prenait pas ça très au sérieux. La pauvre fille a suffisamment de soucis pour lui foutre la police au cul !
Les propos de Kevin éteignirent totalement la paranoïa de Gerald. Cette fille n'avait rien à voir avec le meurtre des deux garçons, même si l'un d'eux faisait partie de sa secte.
– Ouais, tu as raison, dit-il, soulagé de ne pas avoir à la dénoncer.
– Hey les gars, vous délirez, intervint Luke. N'oubliez pas que Lewis Stark était un bon petit gars bien de chez nous. Même si la possibilité que cette fille soit liée à cette affaire est infime, il ne faut pas l'ignorer !
Gerald n'y croyait plus du tout. Il ne s'agissait que de cahiers mouillés.
– Je me suis emballé, c'est tout, fit-il, étonné de la réaction de son ami.
– Si elle n'y est pour rien, les flics auront vite fait de le découvrir, et ils la laisseront tranquille, rétorqua Luke. Le shérif est plutôt un cador. C'est lui qui a buté Paul Ringfield et Jack Mitchell.
– Mitchell est mort en tombant d'une falaise, corrigea Gerald, obligé de reconnaître la pertinence de cet argument. Écoute, je vais y réfléchir.
Kevin se mit à rire. C'était du grand n'importe quoi.
– Fais pas cette tête ! Si ça se trouve, grâce à tes indications, les flics vont arrêter le tueur en un rien de temps, plaisanta Luke.
– OK, et si on parlait d'autre chose, enchaîna Kevin. Vous avez vu la bande-annonce de Coraline, ça a l'air aussi bon que L'Étrange Noël de Monsieur Jack !
Et la conversation repartit sous de meilleurs auspices.



Après le repas, Gerald, Luke et Kevin se rendirent au Hot Spot, un des bars situés en face du campus, où se retrouvait une partie de la jeunesse estudiantine de River Falls.
– Et Jamie Land ? demanda Gerald.
Assis dans une alcôve feutrée ayant vue sur le reste de la salle, les trois jeunes gens avaient depuis longtemps oublié la mort des deux adolescents pour revenir à leur sujet favori.
– Un cul d'enfer. Dommage qu'elle ait cette tronche, regretta Luke.
L'étudiant blond s'était fait larguer la semaine précédente et depuis il était à la recherche active d'une nouvelle partenaire sexuelle.
– Elle n'est pas si moche que ça, la défendit Kevin.
Il avait couché une fois avec elle, mais personne n'était au courant.
– En plus, il paraît que c'est un très bon coup, continua Gerald.
Luke reposa sa bière et regarda ses amis d'un air menaçant.
– Hé les mecs, faut pas vous en faire pour moi. J'ai jamais eu de problème avec les filles.
– Non, tu en as juste un pour les garder ! se moqua Kevin en levant sa bière. À ta santé !
Luke lui fit un doigt d'honneur et regarda sa montre.
– Allez, il est presque 2 heures. Il est temps d'y retourner, lança-t-il en attrapant son blouson.
Les trois amis se levèrent de table et sortirent du bar dans le froid glacial.
– Putain, je m'y ferai jamais, fit Luke, qui remonta son col.
Cela faisait cinq ans que sa famille avait quitté San Francisco pour River Falls, et des conditions météorologiques bien différentes.
– Tu crois qu'on aime ça, nous ! répliqua Kevin. Ce n'est pas parce qu'on est nés ici qu'on aime se les geler.
– Dès que j'ai mon diplôme, à moi la Californie ! s'enthousiasma Gerald avec exagération.
Une tape dans le dos valida cette envolée.
– Ouais, vivement qu'on en finisse et qu'on aille se taper du bon temps au soleil.
Ils traversèrent la route et se retrouvèrent devant l'entrée du campus.
– Allez, je crois que c'est maintenant ou jamais, fit Luke en se tournant vers Gerald.
– Quoi ?
Mais Gerald savait très bien de quoi il parlait. La vue du parking lui avait rappelé sa rencontre matinale.
– Fais pas le malin, si tu n'appelles pas les flics, c'est moi qui le fais et tu devras expliquer pourquoi tu ne voulais pas leur parler toi-même.
Les mains dans les poches, Gerald était mal à l'aise. L'idée de dénoncer cette fille, aussi timbrée soit-elle, ne lui paraissait plus du tout pertinente.
– Écoute, je t'ai dit que je me suis emballé pour rien. Les filles, ça pleure tout le temps, non ?
– C'est clair, approuva Kevin, tout sourire.
– OK, laissez tomber, fit Luke, étonné que ses deux amis puissent avoir de la pitié pour une pauvre cinglée. Allez, moi, je vais pisser. Celui qui veut me la tenir peut me suivre.
– Plutôt crever ! répliqua Kevin.
Gerald préféra garder le silence ; les deux amis avancèrent vers le bâtiment A pour le cours de sciences physiques.
– Tu as bien fait de ne pas appeler. Aussi bien, le gamin, c'est son frère. Pas la peine de l'accabler.
– Ouais, c'est exactement ce que je pense.
Même si Luke était un de ses meilleurs amis, Kevin le comprenait bien mieux.
– Si ça se trouve, dès ce soir, ils auront le coupable.
– Peut-être bien.
À l'abri des regards, Luke se posta sous l'un des immenses séquoias jouxtant un bâtiment administratif, sortit son portable et composa le numéro de la police. Certes, la délation n'était pas un acte très recommandable. « N'empêche que si certains avaient dénoncé les terroristes d'Al-Qaïda, les tours seraient encore debout », pensa-t-il dans une piètre tentative d'autojustification.



La sonnerie annonça la fin des cours de la matinée. Margareth rangea ses affaires. Assise au premier rang de l'amphithéâtre, elle s'était depuis longtemps habituée à ce que personne ne s'assoie à côté d'elle. Même si certaines filles avaient tenté une approche amicale, très vite, elle avait senti qu'elle était pour elles davantage un objet de curiosité qu'une véritable amie. Elle avait coupé court à toute relation.
Elle sortit de la classe dans le brouhaha général. Quelque chose ne tournait pas rond. Dans les couloirs, les gens avaient tous un air grave et s'agglutinaient en petits groupes pour parler. Curieuse de nature, Margareth refusa néanmoins de s'approcher. Hormis Lindsay et sa petite bande, plus personne ne lui lançait de quolibets à la figure. Ce n'était pas le moment de se faire remarquer.
Elle quitta le bâtiment B sous un ciel couvert de nuages et se dirigea vers la cafétéria. Elle était à mi-chemin quand une voix grinçante l'apostropha :
– La sorcière ! Tu ne devrais pas être à l'enterrement ?
C'était Lindsay.
Margareth continua son chemin sans se retourner. Cela ne lui suffisait-il pas de lui avoir renversé son cartable dans une flaque d'eau, allait-elle la harceler toute la journée ?
– Hé, tu t'arrêtes quand je te parle. On ne t'a pas appris les bonnes manières ?
Lindsay se planta devant sa tête de turc préférée.
– Laisse-moi tranquille, s'il te plaît, dit Margareth, incapable de la fixer droit dans les yeux.
Deux amies de Lindsay s'approchèrent à leur tour, l'air narquois. Autour d'elles, les autres étudiants allaient et venaient sans leur prêter attention. Ce n'était pas parce que Margareth en avait l'habitude qu'elle cesserait de s'indigner de la lâcheté de ses contemporains.
– Je ne te veux pas de mal, mais j'ai comme l'impression que tu n'es pas au courant.
Si elle croyait que Margareth allait lui demander de quoi elle parlait, elle pouvait toujours attendre. Margareth n'avait pas l'intention d'entrer dans son jeu et garda le silence.
Lindsay patienta quelques secondes, puis la saisit par le menton, l'obligeant à la regarder en face.
– Tu connais Nathaniel Morrison ?
Entendre le nom de son cousin dans la bouche de cette vipère la dégoûtait. Comme si elle l'avait sali. Elle continua de se taire, mais ne put soutenir le regard de Lindsay.
– Il est mort assassiné et sans doute violé. Et ton putain de Dieu ne l'a pas sauvé !
Margareth frissonna. Pas du fait de la nouvelle. Elle n'en croyait pas un mot, mais parce qu'elle n'aurait jamais imaginé qu'on puisse être aussi emplie de fiel.
– Laisse-moi !
Pour la première fois depuis la rentrée de septembre, elle ne pouvait supporter l'acharnement de Lindsay. Tout le monde avait ses limites. Même elle. Et cela lui fit un drôle d'effet.
– Ooouuuuh ! On tente de se rebeller, se moqua Lindsay.
– Pauvre conne, ton Dieu, c'est de la merde. Quand est-ce que vous comprendrez que vous êtes tous une bande de frappadingues ! enchaîna Melany.
Les filles faisaient partie de la sororité Omega. Un melting-pot d'anarchistes bon teint, de démocrates pro-avortement et d'anticléricaux. Des féministes extrémistes, avait pensé Margareth avant de les connaître. Depuis, elle avait ajouté : fascistes !
– En quoi ça vous gêne ? leur cria-t-elle en essayant de se dégager.
Les filles ne tentèrent pas de la retenir. Margareth crut l'espace d'une seconde que c'était sa force de conviction qui les avait fait lâcher prise, mais quand elle vit un groupe de professeurs venir dans leur direction, elle comprit son erreur d'appréciation. Ces filles avaient bien trop peur de se faire virer pour l'agresser devant de tels témoins.
« Rebelles, mais pas trop », se dit Margareth, qui en aurait pleuré de rage.
Mais elle avait déjà craqué dans la matinée, elle ne recommencerait pas de sitôt.
Un des professeurs s'écarta des autres et vint à sa rencontre. C'était Mme Stewart. Cours de lettres modernes. Margareth l'adorait. Elle avait l'impression qu'elle ne s'adressait qu'à elle dans l'amphithéâtre. Elle aurait dû être romancière tant elle savait bien parler des livres et de leurs secrets.
Margareth ne sut pas comment décrypter l'étrange sourire mélancolique qu'elle lui lança. Il y avait beaucoup de chaleur dans ce visage. Mme Stewart respirait la bonté. Non, elle ne quitterait pas cette université. En toute chose, il y a du bien et du mal, et si Lindsay était la part sombre de cette université, Mme Stewart et les autres professeurs en étaient la part de lumière.
– Margareth, je suis vraiment désolée, dit-elle quand elle fut près d'elle.
Margareth ne put s'empêcher de rougir. Elle avait dû assister à son agression par Lindsay et ses amies.
– Il n'y a pas de quoi. Je me suis fait une raison. Après tout, c'est Lindsay qui est la plus à plaindre, dit-elle, heureuse de pouvoir un peu s'épancher.
Mme Stewart la regarda, étonnée.
– Tu n'es pas au courant ?
Sa voix douce avait une tonalité alarmante.
– De quoi devrais-je l'être ?
Le visage de Mme Stewart se fit plus grave.
– Deux garçons ont été assassinés cette nuit. L'un d'eux était un Enfant de Marie.
À peine Mme Stewart eut-elle terminé sa phrase que le nom de Nathaniel Morrison prononcé par Lindsay revint à Margareth comme un écho effrayant. Elle se sentit défaillir. Un flot de larmes se mit à ruisseler sur son visage.
Mme Stewart la prit tendrement dans ses bras maternels.
Un noël à River Falls
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