53.

La vérité sur Mangroz


La nuit tomba sur le marais de Mangroz en quelques minutes seulement.

Un batelier entreprit alors d’éteindre les torches sur les péniches.

– Qu’est-ce que vous faites ? s’inquiéta Tobias. Et les MousTiques ?

– Ils ne chassent jamais la nuit, répondit placidement l’homme. Il faut économiser l’huile de citronnelle.

– Et comment va-t-on voir où on se dirige ? demanda Matt.

L’homme écrasa la dernière torche et attendit une dizaine de secondes avant de tendre le bras devant eux.

Une myriade de points verts apparut tout autour de l’embarcation. Partout, des essaims de vers luisants volants projetaient leur faible halo sur la jungle, mais ils étaient si nombreux, assemblés par grappes, que leur lueur suffisait largement pour circuler et se repérer. Les Pans étaient admiratifs devant ce tour de magie naturelle aussi pratique que beau.

Un filet de brume se coula au-dessus de la surface des canaux au fil de la soirée, et celui sur lequel ils avançaient commença à s’élargir. À travers le coassement permanent des grenouilles et les crécelles des insectes nocturnes, qui ne manquaient pas de prendre la relève dès que leurs cousins diurnes se terraient dans leur coin, un battement régulier montait peu à peu. Un roulement de tambour lointain résonnait dans la forêt tropicale.

La rivière déboucha alors sur un lac de brume éclairé par ses chandeliers dansants et, tout au fond, lovées dans les replis de trois gigantesques séquoias, des colosses sans fin dignes de la Forêt aveugle, brûlaient les lanternes de Mangroz.

La ville était construite autour de son port, à même l’écorce des trois géants qui dominaient le paysage. Pour ce que les Pans pouvaient en voir en approchant, l’essentiel de la cité des pirates était constitué de ruelles sculptées le long des racines, garnies d’escaliers un peu partout. Mangroz s’étalait mais grimpait beaucoup aussi, de nombreuses habitations creusées dans les arbres surplombaient les quais, et vu d’en bas, cela ressemblait à un véritable labyrinthe de passages étroits, de marches, de tunnels et de petits ponts qui enjambaient d’autres rues. Les fenêtres étaient illuminées par les teintes orangées des lanternes à huile, tandis que l’extérieur était garni de globes pleins de vers luisants.

Plusieurs navires occupaient les longs quais du port, les plus gros ressemblaient à des anciens galions, avec leurs deux ou trois mats et leur allure générale, tandis que l’essentiel de la flotte consistait en barges à fond plat ou en péniches creuses comme celles qui transportaient les Pans et leurs chiens.

Le roulement de tambour devenait plus présent et s’accélérait, des cris festifs devenaient audibles.

– Qu’est-ce qui se passe ? demanda Ambre.

– C’est la fête du partage. Ce matin les chasseurs ont trouvé et tué la lamproie géante qui harcelait nos pêcheurs depuis une semaine. Elle est cuite sur une place du haut-village et partagée entre tous.

– C’est quoi le « haut-village » ?

– Mangroz est divisée en quatre parties : le port, où les visiteurs, les commerçants et les marins sont invités à rester. C’est pas l’endroit le plus sûr du monde, mais au moins on sait à quoi s’attendre. Au-dessus, le haut-village, où sont installés la plupart des habitants de Mangroz.

– Nous n’avons pas le droit d’y monter ? s’étonna Chen.

– Si, mais on vous regardera de travers. Surtout… des gosses.

– Et ensuite ? l’incita à continuer Ambre.

– Tout en haut, à même les troncs des grands arbres, il y a les Maîtres-Guildes. Les trois institutions qui nous gouvernent et régissent le commerce dans la région. Je vous déconseille fortement de vous en approcher, c’est de la politique là-haut, rien n’est fait sans une arrière-pensée, sans un calcul, et les trois se font concurrence, donc c’est le siège de tous les espions, profiteurs et manipulateurs de Mangroz. On dit que chaque Guilde dispose de sa propre flotte de pirates cachée dans le marais et qu’ils servent les intérêts de leurs patrons. Politique je vous dis ! N’y allez pas sans une excellente raison !

En y regardant de plus près, Ambre remarqua des passerelles de cordes et de bambous qui reliaient les trois troncs entre eux dans les hauteurs.

– Oh, nous allons nous en tenir à l’écart, soyez-en certains, assura Lily d’un air entendu.

Un poisson crevait l’eau de temps à autre en bondissant avant que la brume ne reprenne sa place comme un voile de lait, mais personne n’y prêtait attention, chacun admirait cet endroit chargé de mystère.

Matt donna un coup de coude à Orlandia :

– Tout ça ressemble beaucoup à chez vous !

La Kloropanphylle parut outrée :

– Le Nid est bien plus raffiné et respectueux des arbres ! Regarde ! Ici les hommes ont coupé à même les racines, un passage par-ci, un escalier par-là, ils se sont imposés !

Matt leva les mains en signe de capitulation.

– Et le quatrième secteur ? fit Ambre qui n’avait pas oublié.

L’homme lui jeta un regard mauvais.

– Toute ville est forcément construite sur des fondations et des égouts. Des endroits nauséabonds qu’on préfère oublier. C’est ça le quatrième quartier. Les souterrains de Mangroz qui délivrent leurs mauvaises eaux et leurs détritus de toutes sortes derrière la cité, sur l’autre flanc des séquoias, dans ce qu’on appelle le Basse-cul.

– Vous dites que c’est un quartier, nota Tobias, ça signifie que des gens y vivent ?

– Si on peut encore appeler ça des gens…

– C’est un bidonville, résuma Tania.

– Non, c’est pire, corrigea le batelier. Basse-cul c’est un cimetière peuplé d’hommes et de femmes qui ne sont plus tout à fait vivants et pas encore tout à fait morts.

Sur quoi il s’enferma dans le silence, et plus un mot ne fut prononcé jusqu’à l’accotement.

Les Pans avaient débarqué en catimini, presque comme des clandestins, pour être livrés à eux-mêmes sur le port de Mangroz : un assemblage de quais grinçants et de cordages qui donnaient sur l’esplanade taillée à même la base des séquoias. Des façades troglodytiques les observaient de leurs fenêtres illuminées et plus loin des maisons avaient été montées avec des rondins, des planches et de l’ardoise.

Juste avant d’accoster, ils avaient sorti de leur paquetage la cape qu’ils avaient emportée pour remonter la capuche sur leur visage. Ils attireraient moins l’attention en dissimulant leur jeune âge.

Ambre ignorait si c’était à cause de la fête du partage dont le batelier leur avait parlé, mais le port était bien calme. Ils circulèrent parmi les piles de tonneaux, les pyramides de caisses, et s’enfoncèrent un peu plus dans la ville.

– Y a-t-il des démarches à effectuer ? demanda Ambre.

– Seulement si on transporte de la marchandise, dit Lily. Dans ce cas il faut se déclarer à la capitainerie, mais pour nous je ne crois pas.

– C’est une taverne que je vois là-bas, sur la place ? s’interrogea Torshan à voix haute.

Lily confirma :

– Oui, mais nous n’irons pas. C’est un endroit mal famé. J’en connais une autre un peu plus haut sur le premier balcon. C’est comme ça que s’appellent les différents niveaux ici.

– C’est dans le haut-village ? réagit Ambre. Le batelier nous a dit d’éviter d’y aller…

– Non, le port s’étend sur tout le niveau de l’eau et sur une large partie des deux premiers balcons, rassure-toi. Si tout se passe bien, nous n’aurons pas à aller plus loin. Tout ce qu’il nous faut c’est un lieu où dormir cette nuit, puis demain nous chercherons un navire qui part pour New Jericho.

– Il y en a beaucoup ?

– Ça dépendra de notre chance !

– Et les chiens ? demanda Matt. Est-ce qu’ils seront les bienvenus en ville ?

Lily secoua la tête.

– Non, il faut aller les confier à l’écurie de la ville. Venez !

Ils gagnèrent ce qui ressemblait à une longue grange où deux palefreniers somnolaient dans la paille, et un homme au visage sévère sortit de l’ombre pour enregistrer le dépôt des montures. Lorsqu’il vit qu’il avait affaire à des adolescents, il se crispa un peu, et ses yeux manquèrent lui tomber des orbites quand il vit les chiens.

– Ah, mais je fais pas ça moi ! s’écria-t-il, réveillant du coup les deux lads qui se plaquèrent dans leur paille en découvrant la gueule de Lycan qui les fixait.

– C’est pas comme si vous et nous avions le choix, n’est-ce pas ? fit Lily assez finement.

– Ils sont extrêmement dociles pour peu qu’on ne les maltraite pas, prévint Ambre. Nous ne comptons pas rester longtemps.

– J’espère bien parce que moi je garde les chevaux, les ânes et parfois même les bœufs, mais pas… ça !

Plume soupira bruyamment, manifestant clairement sa consternation canine à l’égard de ce représentant de l’espèce humaine.

Lily paya un box pour chacun des chiens et les Pans s’éloignèrent à contrecœur, en promettant à leurs montures de revenir les voir dès le lendemain.

Ils remontèrent, en suivant l’adolescente aux cheveux bleus, dans l’une des venelles sinueuses qui épousaient les courbes des racines immenses. Ils croisèrent deux autres allées, plutôt des coupe-gorges, qui s’enfonçaient dans l’obscurité, gravirent un escalier irrégulier et parvinrent sur une terrasse qui s’ouvrait sur le port en contrebas. Les lampes à vers luisants teintaient toute la ville d’un filtre émeraude qui la rendait encore plus étrange, presque irréelle. Au-dessus de leur tête, quelque part dans l’enchevêtrement des ruelles, des colimaçons et des balcons, les coups de tambour s’étaient transformés en une musique joyeuse entonnée par des violons et des harmonicas.

Ils n’avaient croisé presque personne sur le chemin et les passants ne s’intéressaient pas à eux. Ici chacun vaquait à ses propres affaires, c’était déjà bien assez.

Dans le renfoncement produit par l’anse d’une racine haute comme deux hommes, une maison en bois et en chaux s’enfonçait dans le séquoia, en face d’une haute grange d’où s’échappaient bêlements et autres caquètements d’animaux. La lumière d’un grand feu provenait des fenêtres de l’auberge, accompagnée par la clameur de discussions animées.

– C’est là, indiqua Lily.

La jeune guide s’efforçait de paraître sûre d’elle, mais Ambre pouvait sentir sa fébrilité. Elle n’était pas du tout rassurée d’être ici. Mangroz l’effrayait au moins autant que les autres Pans, sinon plus, car elle connaissait la ville, elle savait tous les dangers qu’elle abritait.

Une enseigne pendait au-dessus de la porte : LE DAHU SAVOUREUX. Ils entrèrent un par un dans la clameur et les fumets de rôtis, de bières et de transpiration. La salle était beaucoup plus grande que l’extérieur ne le laissait supposer, car elle s’enfonçait en fait dans la paroi de l’arbre contre lequel l’auberge était adossée. La vingtaine de clients qui buvaient, mangeaient, riaient en jouant aux dés ou aux cartes tout en bavardant fort, se tut peu à peu, à mesure que les nouveaux venus traversaient en direction d’une table inoccupée et que leurs jeunes visages étaient découverts. Même les deux serveuses, qui se ressemblaient comme deux sœurs, s’interrompirent dans leur service.

Lassée par cette mascarade, Ambre fit tomber sa capuche en prenant place autour de la table ronde couverte par des générations de bougies mortes. Deux mèches crépitaient encore au centre.

– Tu es sûre que c’est un endroit fréquentable ? interrogea Orlandia.

– Mangroz ne l’est pas, mais c’est trop tard pour le regretter. Au moins ici, nous devrions être mieux accueillis qu’ailleurs.

Ambre n’eut pas le temps de demander pourquoi qu’un garçon d’environ vingt ans les salua. Il était un peu fort, les joues rondes et l’œil vif sous un casque de cheveux clairs, et il dégageait un certain charme.

– Alors ça, si on m’avait dit qu’un jour je servirais neuf « rêveurs » d’un coup ! Improbable ! Vous êtes bien loin de chez vous, les amis !

Il parlait avec un accent chantant, probablement italien, nota Ambre.

– Bonjour Marco, intervint Lily, cachée sous sa capuche.

L’aubergiste se décomposa.

– Lily ? Ça ne peut pas être toi ? Dis-moi que j’hallucine ! Je croyais ne plus jamais te revoir après ce qui s’est passé la dernière fois ! Qu’est-ce que tu fais là ? Tu es folle ?

Ambre remarqua alors que Lily avait pris soin de s’asseoir dos à la salle pour que personne ne puisse distinguer son visage.

– Tu aurais de la place pour nous cette nuit ? demanda-t-elle.

– Tu dois avoir une sacrée bonne raison pour oser te repointer à Mangroz.

– Laisse le passé où il est, Marco, j’ai besoin de ta discrétion. Et surtout de ton hospitalité. Mes amis et moi avons fait un voyage difficile.

Le garçon passa le groupe en revue et chacun se présenta.

– On devrait avoir ça, si vous acceptez de dormir ensemble, il me reste deux chambres. Vous voulez dîner aussi ?

Les adolescents acquiescèrent tous en même temps et Marco s’éloigna sans plus de question.

Les discussions aux tables avaient repris, mais on continuait de détailler ces jeunes étrangers avec intérêt ou méfiance, selon les uns et les autres.

– Qui est-ce ? questionna Matt en désignant Marco.

– C’est un ancien de Neverland. Il n’est pas resté longtemps, il ne se sentait pas à sa place, alors il est parti pour le sud, puis l’est, et il a atterri ici. C’est notre principal contact à Mangroz. On peut avoir confiance en lui.

– Et qu’est-ce qui s’est passé la dernière fois que tu es venue ? la pressa Ambre, curieuse.

Lily pâlit un peu.

– Quelques ennuis avec les notables d’une Guilde. Tant que nous ne monterons pas dans les balcons les plus hauts, nous n’aurons pas à les rencontrer, et tout ira bien. Je vais me faire discrète, ne vous inquiétez pas.

– Avec une chevelure pareille ? fit remarquer Orlandia. Peu probable que tu passes inaperçue !

Matt se renfrogna :

– Lily, si ta présence peut nous attirer des ennuis, c’est maintenant qu’il faut le dire !

– C’est pour ça que je ne vais pas beaucoup sortir de ma chambre, répliqua-t-elle, sur la défensive. Mon rôle était de vous guider jusqu’à Mangroz, et c’est ce que j’ai fait. Maintenant je vais vous faire bénéficier de mon réseau pour trouver un bateau. Relax ! C’est moi qui risque le plus gros ici, pas vous.

Sa réponse ne plut ni à Matt ni à Ambre, mais Marco revint les bras chargés d’un plateau couvert de chopes pleines :

– C’est de l’eau fraîche. Je sais que la première chose qu’on veut quand on débarque, c’est boire.

Un long silence seulement ponctué de déglutitions tomba sur leur table. Marco fit des allers et retours pour leur servir des assiettes de viande rôtie prélevée sur un généreux morceau suspendu au-dessus des flammes dans la cheminée, accompagnée de carottes et de pommes de terre. Puis il refit un tour général dans la salle avant de tirer un tabouret pour se joindre aux Pans.

– Alors, Neverland dégraisse ?

– Euh… pardon ? fit Chen qui ne comprenait pas.

– Qu’est-ce qui vous amène ici, tous ? Vous êtes bien nombreux pour seulement faire du commerce. Et si Lily est là, c’est que c’est grave. Racontez.

– Nous cherchons un bateau qui partirait pour New Jericho et qui aurait assez de place pour nous, annonça la Pan aux cheveux bleus.

– Nous avons de quoi payer ! s’empressa d’ajouter Tobias en songeant qu’il n’y avait que ça qui comptait chez les adultes de Mangroz.

Marco posa sa grosse main sur celle de Tobias et arbora un air gêné en vérifiant que personne n’avait entendu :

– Moins fort, garçon ! Ce n’est pas un lieu pour se vanter d’avoir de l’argent. New Jericho ? C’est loin !

– Je sais que vous commercez avec eux, reprit Lily. Nous serons discrets.

– Et nous sommes pressés, ajouta Matt.

– Rien que ça ? C’est pas une gare routière ici ! Les Guildes affranchissent des navires pour New Jericho lorsqu’elles en ont besoin, mais il n’existe pas de ligne régulière !

– Et un petit voilier ? demanda Orlandia.

Marco se tourna vers elle. Les deux Kloropanphylles étaient les seuls avec Lily qui avaient gardé leur capuche pour masquer leur nature différente. Cette fois Marco remarqua qu’il y avait quelque chose d’étrange sous le tissu et il se pencha un peu.

Les yeux d’Orlandia brillaient en vert dans la pénombre et plusieurs de ses mèches en forme de dreadlocks sortaient de leur cachette. Elles étaient de la couleur de la jungle.

– Qu’est-ce que…, fit Marco.

– Nos deux amis sont spéciaux, intervint Matt. Mais nous aimerions que cela ne s’ébruite pas dans la taverne, si tu veux bien.

Marco hocha la tête en éprouvant du mal à quitter Orlandia des yeux.

– Un petit voilier, répondit-il enfin, encore faut-il trouver le type qui acceptera de remplacer une partie de sa cargaison par neuf passagers !

– Et nous avons aussi nos montures, précisa Dorine.

La jolie métisse regardait Marco d’un drôle d’air, et Ambre se demanda si elle n’était pas sous le charme du « vieux » Pan.

– Quelle affaire peut pousser neuf « rêveurs » vers New Jericho, en plein territoire impérial ?

– Des rêveurs ? demanda Tobias. Ça fait deux fois déjà que vous nous appelez comme ça.

– C’est le terme que certains adultes de la zone franche utilisent pour les habitants de Neverland, expliqua Lily.

– C’est une affaire que nous préférerions garder pour nous, renchérit Matt.

Ce dernier parut réellement préoccupé :

– Dans quel pétrin vous devez être pour vouloir descendre si bas ! Surtout en passant par ici avec toi, Lily.

– Tu n’as pas idée, confirma l’intéressée.

– Bon, écoutez, je vais me renseigner, mais n’attendez pas de miracle non plus.

Lorsqu’il se leva, il pointa un index menaçant vers Lily :

– Mais toi tu ferais bien de te teindre les cheveux ! Il ne faudrait pas qu’on remarque ton retour à Mangroz.

– Détends-toi, Marco, je ne compte pas me promener dans les Maîtres-Guildes. Je vais attendre ici. Personne ne me verra.

– Oh, ne les sous-estime pas ! Ils ont des yeux partout ! Si ça se trouve ils savent déjà que tu es là ! Quand même, tu es drôlement culotée de revenir ici.

– Pour moi c’est enterré.

Les sourcils du garçon s’affaissèrent :

– Parce que tu crois que la Guilde d’Oxxen pardonne et oublie, elle ? souffla-t-il, agacé. Si c’est le cas, tu te trompes de ville, Lily. Et c’est ta vie que tu joues. Tu devrais le savoir mieux que personne !

Marco secoua la tête et s’éloigna.

Ambre lut une forme de désarroi chez Lily. Elle posa sa main sur le bras de la jeune fille aux cheveux bleus.

– C’est si terrible que ça ce que tu leur as fait ?

Lily fit la moue et opina.

– Et on ne peut pas les rembourser ou réparer l’erreur ? s’enquit Matt.

– Je suppose qu’il est temps pour vous de savoir. Il y a trois Guildes, exposa Lily tout bas. Celle de la famille Tatol, la plus petite, celle du clan WatMarl, la plus puissante, et enfin Oxxen, la Guilde qui dirige le crime organisé de Mangroz et de la région.

– Tu t’es embrouillée avec la mafia locale ? comprit Tobias avec un air mortifié.

– Je connais mieux Mangroz que n’importe qui à Neverland parce que j’ai passé du temps ici. J’ai tué un de leurs chefs, avoua Lily les larmes aux yeux.

Ambre serra sa main dans la sienne.

– Je suis désolée, dit-elle. Tu vas rester à l’abri dans la chambre pendant que nous chercherons un navire. Tu en as déjà assez fait.

Chen, qui n’en revenait pas, ajouta, maladroitement :

– Un des boss ? Je comprends maintenant pourquoi ils t’en veulent.

Les mâchoires de Lily se contractèrent.

– C’était mon père, avoua-t-elle avant de sangloter dans sa capuche.

Dans son dos, la salle riait et festoyait joyeusement.