Quand ils furent seuls, elle tendit les bras à Blade.

Maintenant, mon amour, viens. J’ai trop longtemps souffert et rêvé de ce moment pour attendre encore. Pose cette statuette et laisse-moi sentir ton corps contre le mien.

Il tenait toujours la statue à son image, si délicatement sculptée et si transparente que l'on voyait ses doigts au travers.

Je suis sale, tout couvert de la poussière de la route.

Je te laverai. Viens...

Blade tomba à genoux à côté de la couche, la main toujours crispée sur la statue de jade, et se pencha pour embrasser Lali. Ses paupières mi-closes dissimulaient les vertes profondeurs de ses yeux, sa bouche entrouverte frémissait; elle lui prit la figure entre ses mains et, doucement, l'attira contre elle.

La douleur frappa Blade comme des griffes de tigre. Il étouffa un cri et tomba en avant, sentant contre sa joue rugueuse la douceur des seins de Lali, ses doigts dans ses cheveux drus.

Blade! Qu'as-tu? Que t'arrive-t-il? Blade!

Il s'entendit émettre des sons étranges, des mots sans suite. Elle lui soulevait la tête, le berçait, pleurait et cherchait son regard.

Blade sombra dans des profondeurs de jade. Il était devenu minuscule, un Tom Pouce, un nain, un atome, et il plongea dans les yeux de Lali. Elle se cramponnait à lui, ses mains étaient immenses, mais il était trop tard, il avait déjà disparu. Il tombait interminablement dans la verdeur qui hurlait autour de lui et le brisait, si verte qu'elle ne pouvait être vraie. Il plongea dans une fontaine verte jaillissante, fut aspiré dans un tourbillon, dans un tunnel sans fin à une vitesse de plus en plus vertigineuse et finalement expulsé dans un ciel vert où il savait qu'il allait se perdre à jamais. Il fut projeté en orbite autour d'une sphère verte portant son nom en lettres vertes...

Il était dans une chambre d'écho et les ondes sonores l'assaillaient de toutes parts : Blade... Blade... Blade... Blade... blade... blad-bla-bl-b...

Le néant.