— C'est bien, déclara Lali. Mon assassin a bien fait son travail. Dommage que j'aie dû le faire tuer.
Une idée vint à Blade.
— Et si demain, au grand jour, on découvre le corps de votre mari? Même nu, quelqu'un risque de le reconnaître.
Les petites fesses rondes flirtaient devant lui, les ravissantes épaules se haussèrent avec indifférence.
— Il n'y a aucun danger. Les singes charognards ne laisseront rien. Et je trouverai une histoire pour expliquer pourquoi il n'y a pas de corps dans le Temple. Ce sera facile. Le plus difficile, ce sera d'expliquer ton corps vivant, et ton aspect. Le premier imbécile venu, en te voyant, peut constater que tu n'es pas de Cath. Mais ne t'inquiète pas. J'ai dit que j'inventerai un mensonge et je le ferai.
Blade n'en doutait pas un instant.
Quelques minutes plus tard, il se trouva plongé dans un luxe qui l'abasourdit. Et Blade avait connu le luxe, en son temps, aussi bien que les privations.
Ils se baignèrent dans un immense bassin d'eau chaude et parfumée. Il n'y avait pas de savon, du moins pas comme Blade le connaissait, mais une poudre odorante et légère dont ils se frottèrent le corps, mutuellement. Lali le lava dans les recoins les plus intimes, et il fit de même pour elle. Ils bavardèrent.
Ils étaient servis par une nuée de jolies filles aux seins nus, uniquement vêtues d'une espèce de slip minimum. Lali ne faisait absolument pas attention à elles, sauf pour donner des ordres.
Blade, quand il était dans la Dimension N — J et Lord L avaient pris l'habitude d'appeler ainsi la dimension normale — vivait dans un monde d'intrigue où l'on ne pouvait se fier à aucun domestique. Lorsqu'il confia son souci à Lali elle se contenta de rire.
— Elles ne parleront pas de toi. Elles n'oseront pas. Il me suffit de claquer des doigts pour qu'elles perdent la tête.
Il la crut sans peine.
Après le repas, elle l'emmena dans une vaste chambre où se trouvait un épais tapis rond moelleux, en soie, qui était son lit. A Cath, expliqua-t-elle, tout le monde couchait par terre. Elle s'étonna qu'il trouve cela bizarre.
Ils firent l'amour. Ils causèrent. Ils refirent l'amour. Et bavardèrent encore. Lorsque le soleil se leva comme d'un bond, aussi soudainement qu'il avait disparu la veille — Blade allait mettre un moment à s'y habituer — elle avait, comme promis, imaginé un merveilleux mensonge. Elle avait l'esprit très vif et très rusé. Et, à ce moment-là, elle était tout à fait soumise et amoureuse de lui.
Les servantes apportèrent des stores pour plonger la chambre dans la pénombre et, en s'endormant, Blade se dit qu'il avait vraiment très bien réussi jusque-là!