En dehors de la connaissance et de l’acceptation conscientes du lien de parenté qui nous unit à tous ceux qui nous entourent, il ne peut exister de véritable synthèse de la personnalité.


C. G. Jung, Archives de la Mnefmothèque.


Une grappe de varech ballottée par les vagues raclait en rythme l’avant du coracle. Le contact de la réalité, songeait Twisp. La nuit par ailleurs silencieuse s’étirait en bâillant à l’approche de l’aube. Twisp entendit Bushka remuer inconfortablement à l’avant du coracle. Depuis que Brett et Scudi les avaient quittés au début de la nuit, le Sirénien n’avait pas dû fermer l’œil.


La mer n’a jamais été aussi calme, se dit Twisp.


Seule une brise très légère lui effleurait la joue gauche tandis que les deux coracles dérivaient lentement au milieu du varech envahissant.

Il inclina la tête pour regarder le poudroiement d’étoiles que laissait apercevoir une percée dans les nuages. Il reconnut la pointe de flèche familière des Gardes avant qu’elle disparaisse, les nuages ayant changé de place.


Le cap est bon et le courant favorable.


C’était toujours bon de confirmer les indications du compas par l’observation des étoiles. Il avait choisi un cap intermédiaire qui leur permettrait, le moment venu, de rejoindre rapidement Vashon. Le bip bip du gonio-compensateur permettant de localiser l’île avait été rendu muet pour la nuit, mais une lumière rouge clignotait à ses pieds, en phase avec le signal émis par Vashon. Son récepteur fonctionnait normalement. L’aube allait les trouver hors de portée de vue, avec leur coque basse, de la station de lancement, mais pas hors de portée des enfants.


Ai-je bien fait d’agir ainsi? se demanda-t-il.


C’était une question qu’il avait posée plusieurs fois, à haute voix à Bushka mais aussi silencieusement à lui-même. Au moment de la décision, cela lui avait paru raisonnable. Mais maintenant, dans la nuit…

De formidables changements étaient en train de s’opérer sur la planète. Et que représentaient-ils face aux forces maléfiques dont il sentait la présence dans ces changements ? Un pêcheur trop âgé avec des bras trop longs pour être bons à autre chose que remonter des filets. Un intellectuel geignard qui avait honte de ses origines îliennes et qui, peut-être, ne reculait pas devant un assassinat collectif. Un gamin en train de devenir un homme et qui avait de bons yeux la nuit. Une gamine sirénienne qui était l’héritière de tout le monopole alimentaire de Pandore. Mais les conséquences de la mort de Ryan Wang avaient une odeur douteuse.

Les couacs commencèrent à s’agiter dans leur cage au fond du coracle. Faiblement d’abord, puis plus fort, quelque part sur sa droite, là où le varech était plus dense, Twisp entendit le feulement d’un capucin. Posant un doigt sur la commande du bouclier de protection, il attendit en plissant les yeux pour essayer d’apercevoir quelque chose, n’importe quoi, dans la nuit silencieuse que déchirait ce feulement sinistre.

Un tel cri pouvait signifier beaucoup de choses. Le capucin était peut-être endormi, en train de rêver, ou bien repu; il avait peut-être senti une proie alléchante, ou il était tout simplement… content de vivre.

Twisp coinça la barre avec sa jambe et se prépara à mettre le moteur en marche pour s’éloigner éventuellement de ces parages dangereux. De sa main libre, il tâtonna pour extraire le laztube de sa cachette derrière le banc.

Bushka se mit à ronfler.

Le feulement du capucin s’interrompit puis reprit un ton plus bas. Avait-il entendu?

Bushka grogna, changea de position et se remit à ronfler. Le capucin continuait à feuler mais le son faiblissait et semblait se déplacer sur la droite, en arrière des deux coracles.

77 dort, se dit Twisp. Faire confiance à mes couacs. Les deux volatiles ne semblaient pas alarmés.

Le bruit de contentement du capucin s’éteignit dans le lointain. Twisp tendait l’oreille, essayant de faire abstraction des ronflements de Bushka. Il fit un effort pour se relaxer. Il venait de s’apercevoir qu’il avait retenu sa respiration. Il souffla lentement puis respira une bonne bouffée d’air marin. Mais sa gorge était toujours âpre.

Il n’entendait plus le capucin. Cependant, la tension ne le quittait pas. Et brusquement, les couacs se déchaînèrent, prouvant qu’ils portaient bien leur nom. Instinctivement, Twisp “abaissa la manette du bouclier. On entendit le bruit caractéristique d’une créature qui se raidissait dans l’eau puis les couinements et les glapissements frénétiques d’une meute de capucins qui se ruaient à la curée.


Maudits cannibales, pensa Twisp.


- Qu’est-ce que c’est? demanda Bushka en se réveillant. Le coracle bougea quand il s’assit.

- Des capucins, dit Twisp.


Il pointa le laztube en direction du remue-ménage et tira six brèves giclées. La vibration produisit un effet désagréable sur la paume de sa main droite. Les minces rayons mauves trouèrent la nuit. Au second coup, la meute avait explosé en une cacophonie de piaillements et de rugissements affolés qui s’étaient rapidement éloignés du coracle. Les capucins avaient appris à détaler sans demander leur reste devant le vrombissement mauve du laztube.

Twisp désactiva le bouclier et prit sa lampe de poche car un autre bruit lointain, sur sa gauche, venait de mobiliser son attention. Cela ressemblait au froissement régulier d’une pagaie dans la mer encombrée de varech. Il braqua le rayon de la lampe dans cette direction, mais la nuit l’aspira sans renvoyer rien d’autre que la pulsation de l’océan bercé par les thalles noirs et luisants du varech.


Une voix lointaine se fit alors entendre :


- Ohé, du coracle! Les cales sont pleines?


Le cœur de Twisp battit trois fois plus vite dans poitrine. C’était la voix de Brett!


- A ras bord! cria Twisp exultant en agitant la lampe pour le guider. Fais attention, il y a des capucins dans les parages!

- Nous avons aperçu ton laztube.


Twisp les distingua à ce moment-là sur leur dérisoire canot bercé par la mer plate. Deux pagaies reflétaient les éclats de sa lampe.


Bushka s’était penché au bord du coracle pour mieux les voir et l’embarcation gîtait dangereusement.


- Restez à votre place, imbécile! lui cria Twisp. Vous ne voyez pas que vous nous déséquilibrez?


Bushka retourna précipitamment de l’autre côté mais continua d’observer avec attention la forme noire qui approchait dans le bruit cadencé des pagaies.


- C’est bien eux, dit-il. Je savais qu’ils n’iraient pas loin.

- Taisez-vous, grogna Twisp. Ils sont vivants et c’est le principal.


Il poussa un profond soupir de gratitude. Le gosse était devenu sa famille et la famille était de nouveau au complet.


- Maman, j’arrive! cria Brett, comme s’il avait lu ses pensées.


Il avait le cœur de plaisanter. La situation ne devait pas être si catastrophique, dans ce cas, se dit Twisp, l’oreille toujours à l’affût des capucins.

La boutade du gosse avait provoqué le rire de Bushka, un rire terminé par une note éraillée qui avait eu le don de mettre les nerfs de Twisp à fleur de peau. Le canot était maintenant à bonne portée de voix. Twisp continuait de diriger le faisceau de la lampe vers le large, en prenant bien soin de laisser dans l’ombre son visage où ruisselaient des larmes de fatigue et de soulagement. Dès qu’ils cessèrent de pagayer, Brett lança un bout au coracle. Twisp le saisit au vol et hala le canot comme s’il s’agissait d’un filet de murelles. Dès qu’il toucha la coque du coracle, Twisp projeta un long bras qui encercla la taille de Brett. La combinaison de plongée du gosse était gonflée et ruisselante.

Les couacs choisirent cet instant pour ébouriffer leurs plumes, mais le signal d’alarme demeura sans suite. Les capucins restaient à distance prudente du laser.

Ce doit être une sacrée meute, se dit Twisp. La faim les faisait approcher, mais la peur les tenait à distance.


- On peut monter à bord? demanda Scudi.

- Bien sûr, fit Twisp en hissant Brett. Puis il aida Scudi à enjamber la lisse et à s’asseoir en face de lui sur la traverse. Il fixa l’amarre de manière à maintenir le canot contre la coque du coracle. Puis il rangea la lampe sous son siège. Il prit le bras de Brett et ne le lâcha plus, comme s’il refusait de briser ce contact rassurant.

- Ils n’ont pas voulu vous écouter, hein? fit Bushka. Vous vous êtes encore échappés de justesse. Qu’avez-vous fait de l’hydroptère?


- Nous rentrons à Vashon? demanda Twisp. Brett leva les deux mains pour les faire taire.


- Il faudrait qu’on en discute, dit-il.


Il leur raconta, aussi brièvement que possible, la rencontre avec Gallow et Nakano. Twisp l’écouta avec un sentiment d’admiration grandissante pour Brett.


Il y a quelque chose sous ce crâne, se dit-il. Dès que Brett eut fini, Bushka déclara :


- Il faut filer d’ici au plus vite. Ce ne sont pas des hommes mais des démons. Ils vous ont probablement suivis. Quand ils seront là…

- Oh, la ferme! coupa Twisp. Si vous n’êtes pas capable de la fermer tout seul, je vais vous aider, moi!


Il se tourna vers Brett et demanda d’une voix plus calme :


- Qu’en penses-tu? Ils ont un hydroptère et un suba. Il leur est facile de nous…

- Je ne crois pas que nous les intéressions à ce point, dit Brett. Pas dans l’immédiat, tout au moins. Ils ont d’autres sujets de préoccupation.

- Vous êtes inconscient! lança Bushka.

- Laissez-le finir! dit Scudi d’une voix aussi dure que du plastacier.

- Ils parlaient d’attendre l’arrivée d’un médecin afin de l’enlever, poursuivit Brett. Il y a toutes les chances pour que ce soit vrai, à en juger d’après leur comportement. J’ai l’impression qu’ils venaient de monter une opération qui a échoué. Ils en étaient encore tout secoués. Ils faisaient leur possible pour nous le cacher en plastronnant.

- C’est bien de Gallow, murmura Bushka.

- Mais que faisaient-ils là, à part attendre un médecin? demanda Twisp.

- Ils étaient devant la Station de Lancement, fit Brett. Connaissant Gallow, je ne pense pas qu’il s’agisse là d’une coïncidence. A mon avis, ce sont les caissons hyber qui les intéressent.

- C’est évident, grommela Bushka. Je vous l’avais dit.

- Ils représentent ce qu’il y a de plus important pour lui, admit Brett en hochant la tête.


Les caissons hyber en orbite autour de Pandore étaient l’objet de spéculation numéro un pour tout le monde. Deviner ce que leurs manifestes contenaient meublait, au même titre que le temps, la plupart des conversations pandoriennes.


- Mais que signifie cette menace d’empêcher les Siréniens d’augmenter la surface des terres émergées? demanda Twisp. Espère-t-il la mettre à exécution avec un suba et deux hydroptères?

- Je pense que Vashon est en danger, dit Brett. Guemes était beaucoup plus petite, c’est vrai, mais… éventrer des îles est une distraction trop facile pour que quelqu’un comme Gallow puisse résister à la tentation. Il essaiera de couler Vashon au moment où ils ramèneront les caissons. J’en suis sûr.

- A-t-il dit quelque chose de particulier? demanda Twisp. Il a peut-être mis la main sur un manifeste ?

- Je ne sais pas… fit Brett en secouant la tête. Quelque chose d’aussi gros… il n’aurait pas pu s empêcher de s’en vanter. Et à vous, Bushka, il n’a jamais parlé de ce qu’il y a là-haut?

- Gallow a… la folie des grandeurs, murmura Bushka. Tout ce qui peut alimenter sa mégalomanie est réel à ses yeux. Il ne s’est jamais vanté de connaître le contenu des caissons. La seule chose qui l’intéresse c’est que, politiquement, leur possession est un avantage certain.

- Brett a raison à propos de Gallow, intervint Scudi.


Twisp aperçut l’éclat sombre de ses yeux à la lueur de l’aube naissante. Scudi reprit :


- Gallow ressemble à un bon nombre de Siréniens qui sont persuadés que les caissons sauveront le monde ou le détruiront, rendront tel homme riche ou le poursuivront à jamais de leur malédiction.

- Les Iliens sont comme ça aussi, dit Brett.

- Ce sont des spéculations, non des faits, dit Twisp.


Scudi les regarda tour à tour. Comme Brett ressemblait à Twisp dans sa manière de s’exprimer! Laconique et pratique. Le tout assis sur une intégrité de roc. Elle étudia plus intensément Brett. Elle vit la force élancée de son jeune corps. Elle perçut la puissance de l’adulte à venir. Brett était déjà un homme. Jeune, mais solide à l’intérieur. La pensée traversa Scudi, comme sous narcose de plongée ultrarapide, qu’elle voulait ce garçon pour la vie.

Twisp reprit la barre, lança le moteur et mit le cap sur Vashon. Le coracle, quittant la zone de varech, bondit en direction de la mer libre.

Le jour s’était levé. Regardant le ciel encore pâle, Scudi frotta un doigt dans l’encolure de sa combinaison étanche puis, d’un geste impatient, l’ouvrit et s’en défit. Il l’étala sur le banc de nage pour la laisser sécher. Préalablement, elle avait regardé Brett en souriant et il lui avait rendu son sourire.

Twisp lui jeta un seul coup d’œil. Il remarqua la palmure marquée de ses orteils, mais elle possédait à part cela un corps idéal de Sirénienne normale. Il n’en avait pas vu beaucoup de si près. Il se força à détourner les yeux et remarqua que Bushka, lui aussi, avait du mal à ne pas regarder. Elle était juste à côté de lui et se penchait pour retourner la combinaison et la secouer au vent. Twisp croisa le regard fuyant de Bushka, qui ne cessait d’aller de l’océan à Scudi, de bas en haut, puis à lui, puis à l’océan et ainsi de suite.

Twisp avait toujours cru que les Siréniens n’avaient pas les mêmes pulsions que les Iliens, et il liait cela à la facilité avec laquelle les premiers exhibaient leur anatomie parfaite. L’attitude de Scudi, pour lui, était une confirmation. Les Siréniens passaient une grande partie de leur existence ou sans vêtements ou vêtus de combinaisons qui adhéraient à la peau. Il était naturel que leurs idées sur le corps humain ne soient pas les mêmes que celles des Iliens engoncés dans leurs vêtements.


Il n’y a pas tellement de différence entre une combinaison de plongée et l’absence totale de vêtements, songeait-il.


Il voyait que Bushka était gêné par la proximité le cette fille nue. Brett agissait comme n’importe quel Ilien normal. Il avait la pudeur de ne pas regarder. Scudi, cependant, était incapable de détacher ses yeux de lui.


Il se passe quelque chose entre ces deux-là, décida Twisp. Quelque chose de tenace.


Il se souvint qu’il arrivait parfois que des Siréniens épousent des Iliennes ou inversement. Et quelquefois, cela marchait.

Bushka porta son attention sur Brett et l’expression qui se lisait sur son visage équivalait pour Twisp à un cri. C’étaient les yeux du gosse qu’il regardait.


Je suis plus normal que lui! disait le visage de Bushka.


Twisp se souvint du jour où il avait vu un Ilien avec de longs bras comme lui tenant par la main une Ilienne qui avait aussi de longs bras. C’était la seule fois où il en avait vu deux d’un coup au même endroit. Il avait longtemps refoulé cette scène pour des raisons personnelles, et quand il l’avait enfin exhumée des profondeurs de sa mémoire il en avait tiré un enseignement précieux.


Ce qui est comme moi. C’est ainsi que nous avons tendance à définir le concept d’humain.


Il avait été chercher cette pensée au plus noir de son subconscient et il en avait remonté sa propre raison de juger le couple.


La jalousie.


Pour sa part, il n’avait jamais choisi que des femmes qui différaient de lui. Les chances de transmettre un caractère spécifique à sa descendance devenaient beaucoup trop élevées quand deux mutants semblables s’accouplaient. Parfois, il s’agissait d’une véritable bombe à retardement génétique, qui ne se manifestait que deux ou trois générations plus tard.


La plupart d’entre nous se refuseraient à transmettre sciemment autre chose qu’un peu d’espoir.


C’était quelque chose d’analogue qui se produisait chez Bushka.


Il n’aime pas Brett, se disait Twisp. 77 ne le sait pas encore lui-même. Quand il s’en apercevra, il ne saura pas s’en expliquer les raisons. Il ne voudra pas admettre que c’est de la jalousie, et cela ne servirait pas à grand-chose de le lui dire.


Il était évident, pour quiconque observait Scudi quand elle regardait Brett, qu’elle n’avait d’yeux que pour ce garçon.

Brett avait découvert le garde-manger et s’était mis à réchauffer un ragoût de poisson. Sans regarder Scudi, il demanda :


- Tu veux manger quelque chose, Scudi? Ayant suffisamment aéré sa combinaison, elle y glissa son jeune corps souple et acheva de la refermer avant de répondre :

- Oui, s’il te plaît, Brett. J’ai très faim.


Brett lui passa un bol fumant et interrogea Twisp du regard. Le pêcheur secoua négativement la tête. Bushka accepta après une légère hésitation qui parut éloquente à Twisp.


77 ne veut rien devoir au gosse!


Devant la nourriture, Brett avait des réactions îliennes et Bushka aussi. La prime éducation dominait. Brett respecta le rituel avant de remplir son propre bol. Un capucin affamé n’aurait pas pu en engloutir le contenu plus vite. Dès qu’il eut fini, Brett rinça le bol par-dessus bord puis le rangea. Il se tourna alors vers Twisp en disant :


- Merci beaucoup.


- Merci de quoi? demanda Twisp, surpris. La nourriture appartenait à tout le monde.

- De m’avoir appris à faire attention et à réfléchir.

- J’ai fait cela, moi? Je croyais que tout le monde avait ces capacités de naissance.


Bushka suivait cette conversation avec un sarcasme à peine dissimulé. Il ressassait de sombres pensées. La proximité de Gallow, Nakano et Zent… les Capucins verts, prêts à frapper… tout cela l’emplissait de terreur. Ils allaient sûrement se lancer à la poursuite des fugitifs. Pourquoi ne le feraient-ils pas? Il y avait la fille de Ryan Wang parmi eux. Quel otage inespéré! Il pensait particulièrement à Zent, avec son regard de brute qui se complaisait à infliger la douleur. Bushka se demandait comment ces deux gosses avaient fait pour rouler des individus comme ceux-là, même si Gallow avait tendance à sous-estimer ses adversaires.

Bushka regarda Scudi. Nef! Quel corps! Celui qui la posséderait posséderait le monde. Et il savait que ce n’était pas une exagération. Nul ne pouvait douter que son père, en contrôlant le commerce alimentaire des Siréniens, contrôlait la moitié de Pandore. Et maintenant qu’il était mort, tout cela allait certainement revenir à Scudi.

Les yeux mi-clos, Bushka considérait le jeune couple qui se trouvait à côté de lui.


Gallow a dû les prendre pour deux gamins terrorisés.


Bushka avait appris le danger des conclusions trop rapides quand il s’était trouvé seul à bord du coracle avec Twisp. Visiblement, Scudi était amoureuse pour la première fois. Mais cela lui passerait. C’était toujours ainsi. Les sbires de son père étaient toujours vivants. Ils mettraient un terme à cela, dès qu’ils s’en apercevraient. Dès qu’ils verraient les yeux de mutant du gamin.

Twisp se mit debout sans lâcher la barre et mit une main en visière contre son front pour se protéger du soleil qui quittait l’horizon.


- Hydroptère… dit-il. Il se dirige vers Vashon.

- Je vous l’avais dit! s’écria aussitôt Bushka.

- Je crois qu’il avait une bande orange sur la cabine, ajouta Twisp. C’était un officiel.

- Ils nous recherchent, dit Bushka, et ses dents commencèrent à claquer.

- Ils ne changent pas de cap. Ils sont bien pressés.


Twisp se baissa pour allumer son récepteur radio réglé sur la fréquence d’urgence. La voix de l’annonceur de Vashon leur parvint à mi-phrase :


- … a déclaré que les œuvres vives de l’île n’étaient pas immédiatement en danger. Nous avons heurté le fond à la limite d’une formation de varech de dimensions colossales. Juste à l’est de l’île, on aperçoit des lignes de récifs et des terres émergées. Les pêcheurs qui désirent regagner Vashon sont priés de le faire par les eaux libres du sud-ouest. Nous répétons : A la suite d’un échouement, tous les quartiers centraux sont actuellement en cours d’évacuation. L’existence de Vashon n’est pas menacée tant que les conditions météorologiques demeurent favorables. Des mesures sont prises pour réparer les dégâts et des secours Siréniens ont été promis. Nous diffusons un communiqué toutes les heures et nous vous conseillons de laisser votre récepteur en marche sur la bande d’urgence.


Scudi secoua la tête et murmura :


- Le Contrôle des Courants était censé empêcher que de telles choses surviennent.


- C’est du sabotage, dit Bushka. Gallow est derrière tout ça. Je le sais.

- Des terres émergées… murmura Twisp.


Le grand changement était en train de se produire. Déjà.


L'effet Lazare
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