Le cercle se resserra autour d'eux, poussé par la Garde curieuse qui avait rompu le carré et voulait voir le combat. Blade manœuvra adroitement Lycus pour le placer au centre même du cercle puis, paraissant renoncer, il lui offrit une ouverture en abaissant son bouclier et en parlant.
— Lycus! Tu as assez prouvé. Je...
Lycus se fendit désespérément. Blade para, tomba sur un genou, prit un nouveau coup sur son bouclier levé et frappa de taille aux jambes de l'officier. Le coup sauvage trancha les muscles des deux jambes au-dessus des genoux. Lycus s'écroula et, perdant son sang à flots, il chercha à se soutenir en s'appuyant sur son épée. Blade feinta à sa gorge. Lycus leva son épée pour parer le coup, et ses jambes fléchirent sous lui. Blade abaissa sa lame vers une faille de sa cuirasse. L'acier plongea et ressortit dans le dos de Lycus. De petits morceaux de viscères et de tissu pulmonaire tombèrent quand Blade retira son épée et laissa Lycus s'affaler sur le ventre à ses pieds.
Blade n'hésita pas. D'un coup violent il trancha la tête, en se disant que celui-là avait été vraiment un homme, et appela un piquier. Quand l'homme arriva, il fit planter la tête au bout de la pique et la remettre à un sous-officier samostain. Les soldats s'écartèrent pour le laisser passer. Blade le considéra et lui dit :
— Apporte cela à Hectoris. Rappelle-lui mes conditions. Je serai sur la plage dans quelques heures et, s'il n'est pas un pleutre, il m'y attendra. Et si tu es sage, si tu es aussi las de la guerre que tu le parais, tu répéteras à tous ce que tu as vu et entendu ici. Revenez à la raison toi et tous tes soldats! Laissez Hectoris prendre les risques, pour une fois!
Tous les Samostains commençaient à sortir du carré. Blade rappela le sous-officier.
— Rappelle à Hectoris que Juna fait partie du marché. Je m'attends à la trouver aussi sur la plage. Répète-le-lui. Maintenant va. Je te laisse une demi-heure d'avance.
Blade se remit en selle et écouta le rapport d’Edyrn sur les pertes subies.
— Fais soigner et panser les blessés qui peuvent marcher, ordonna-t-il. Nous devrons abandonner les autres.
— Il est d'usage de les égorger, monseigneur. C'est une mort plus miséricordieuse que de rester blessé et sans défense à la merci des bêtes sauvages et des vautours.
Blade hésita un instant, puis il secoua la tête.