Ferme dans la poussière Plante tes talons têtus.
Et où va la poussière  ?
Kerro Panille Poésies complètes

Ayant pris connaissance du dernier topo sur la géologie de Pandore, Kerro Panille éteignit l’holoscope. L’heure du repas était depuis longtemps passée, mais il ne ressentait aucune faim. L’atmosphère de Nef sentait le renfermé dans l’étroite cabine d’enseignement. Ce n’était guère surprenant  : il avait refermé hermétiquement le panneau d’accès secret, ne laissant fonctionner que la grille de ventilation au sol.


Et je suis assis sur la grille!


Il trouvait cela follement amusant. Il se leva, s’étira, songeant au cours qu’il venait d’absorber. Il rêvait depuis si longtemps de fouler aux pieds un vrai sol, une vraie terre, de plonger dans une vraie mer, de respirer une véritable atmosphère, qu’il craignait à présent d’être déçu par la réalité. Ce n’était pas la première fois que son imagination bâtissait des mondes imaginaires… et pas la première fois que la réalité le désappointait.

En de tels instants, il avait l’impression d’être beaucoup plus vieux que ses vingt ans. Il chercha, pour se rassurer, une surface polie dans laquelle il pût voir se refléter son visage. Il ne trouva qu’une minuscule portion du panneau d’accès, patinée par le frottement de sa propre main répété chaque fois qu’il venait s’isoler ici.

Oui… sa peau brune conservait l’aspect lisse de la jeunesse et sa barbe noire, frisée, entourait sa bouche avec son habituelle vigueur. Il fallait admettre que c’était une bouche généreuse. Et le nez était celui d’un pirate. Mais quels étaient les Neftiles qui savaient seulement que les pirates avaient existé  ?

Ses yeux, cependant, faisaient beaucoup plus que vingt ans. Pas la peine de le nier.


C’est Nef qui m’a rendu comme ça… ou plutôt non… Il secoua la tête. Il était obligé d’être honnête. C’est cette relation spéciale qu’il y a entre Nef et moi… c’est cela qui vieillit mon regard’.


Il y avait des réalités dans les réalités. Cette chose qui faisait de lui un poète, elle le forçait à gratter derrière chaque surface, comme un enfant en train de feuilleter maladroitement des pages de hiéroglyphes. Même quand la réalité était décevante, il se sentait obligé de la rechercher.

Pouvoir de la déception.

Il reconnaissait ce pouvoir comme distinct de la frustration. Il réunissait la faculté de regrouper, repenser, réagir. Il le forçait à s’écouter lui-même comme il écoutait les autres.

Kerro n’ignorait pas ce que la plupart des autres, côté nef, pensaient de lui.

Ils étaient persuadés qu’il était capable d’épier toutes les conversations même dans une salle pleine de monde, qu’aucun geste, qu’aucune inflexion de voix ne lui échappait. Il y avait des moments où c’était vrai, mais il gardait toujours pour lui les conclusions qu’il tirait de telles observations. Rares étaient ceux qui avaient à se plaindre de ses intrusions. On ne pouvait trouver, en vérité, de meilleur auditeur que Kerro Panille. Tout ce qu’il voulait, c’était écouter, apprendre, et en ressortir quelque chose d’ordonné dans ses poèmes.

Ce qui importait, c’était l’ordre. L’ordre merveilleux issu de la plus profonde inspiration. Pourtant… il fallait admettre que Nef présentait plutôt l’image d’un désordre infini. Un jour, il lui avait demandé de lui montrer sa forme. Simple caprice pour lequel il s’attendait plus ou moins à un refus. Mais Nef avait accepté de lui donner une vue d’ensemble par l’intermédiaire de ses senseurs internes, des organes optiques de ses unités robox d’entretien et même des navettes qui assuraient continuellement la liaison entre Nef et Pandore.

Vu de l’extérieur, rien n’était plus déroutant que le spectacle donné par Nef. D’énormes prolongements semblables à des éventails ou des ailes de papillons se déployaient dans l’espace. Des lumières brillaient à l’intérieur et l’on apercevait parfois des gens au travail derrière des verrières transparentes. Des serres hydroponiques, avait expliqué Nef.

La longueur totale de Nef avoisinait cinquante-huit kilomètres. Sur toute cette distance étaient réparties d’innombrables excroissances bulbeuses et tentaculaires dont les formes fragiles ne permettaient guère de deviner l’usage. Les navettes étaient lancées et récupérées par des tubes étroits qui hérissaient la structure de base dans toutes les directions. Les ailes hydroponiques s’étageaient et se succédaient en chaîne comme une prolifération mutante de spores en folie.

Panille n’ignorait pas que Nef avait un jour présenté un aspect différent, celui d’un projectile uni et entièrement lisse, élargi au milieu en un triple aileron qui formait à l’arrière un trépied d’atterrissage. Cette silhouette unie demeurait à présent enfouie dans la mémoire confuse du temps. On l’appelait «le cœur» et seuls quelques rares vestiges étaient encore à même de rappeler sa structure  : une cloison blindée avec une porte étanche au bout d’une coursive, une succession de panneaux métalliques percés de hublots qui donnaient sur le mur aveugle d’une inaccessible annexe.

Vue de l’intérieur, Nef était tout aussi déconcertante. Les senseurs optiques lui montrèrent des alignements sans fin de chambres hybernatoires pleines de vies suspendues. A sa demande, Nef afficha les coordonnées du lieu, mais elles n’avaient aucune signification pour lui. Des hiéroglyphes. Il suivit le mouvement rapide des unités robox dans des coursives sans air, jusqu’à leur sortie à la surface des régions épidermiques. Là, au milieu des ombres projetées par les excroissances de toutes sortes, il assista aux travaux de réparation, d’aménagement ou même d’agrandissement ordonnés par Nef.

Panille avait déjà eu l’occasion d’observer d’autres Neftiles au travail. Il s’était alors senti fasciné, et un peu coupable. Comme un espion qui empiète sur la vie privée d’autrui. Il avait vu deux hommes manipuler un gros conteneur cylindrique dans un hangar de chargement pour l’expédier sur Pandore par la navette. Et il s’était dit qu’il n’avait pas le droit d’épier ces deux hommes sans qu’ils le sachent.

Quand le tour d’horizon avait été achevé, il s’était carré dans son siège, vaguement déçu. C’est alors qu’il s’était avisé que Nef faisait cela tout le temps, s’introduire dans la vie privée des gens. Rien de ce que faisait un Neftile ne pouvait être caché à Nef. Cette constatation brutale avait allumé en lui un foyer de ressentiment éphémère, immédiatement suivi d’un certain amusement.


Je suis dans Nef, j’en fais partie; et plus profondément encore, je suis Nef.


— Kerro!

La voix soudain issue du pupitre à côté du foyer holo le fit sursauter. Comment Hali avait-elle fait pour le trouver ici?

— Oui?

— Où es-tu  ?

Ahhh! Elle ne l’avait donc pas trouvé. C’était seulement son programme de recherche qui l’avait localisé. *

— J’étudie, répondit-il.

— Tu viens faire un tour avec moi  ? Je n’en peux plus.

— Où ça  ?

— L’arboretum où il y a les cèdres  ?

— Donne-moi cinq minutes pour finir ici et j’arrive.


— Je ne te dérange pas, au moins  ? Il remarqua le ton de défiance.


— Non, j’ai besoin d’une pause.

— Je t’attends devant les Archives.

Il entendit le déclic lorsqu’elle raccrocha. L’espace d’un instant, il contempla stupidement son pupitre.


Comment savait-elle que je travaillais aux Archives  ?


Un programme de recherche à son nom ne pouvait l’avoir renseignée sur l’endroit où il se trouvait.


Suis-je à ce point prévisible  ?


Il rassembla son mémobloc et son enregistreur puis ressortit par le panneau secret. Après l’avoir remis en place, il se glissa dans la travée de la salle de stockage des programmes et se retrouva dans la coursive. Hali Ekel était là, à quelques mètres de la porte. Elle lui fit un signe de main nonchalant.

— Salut.

L’esprit de Panille était encore à moitié dans la cabine. Il la regarda en clignant stupidement des yeux, conscient, comme à l’accoutumée, de sa très grande beauté. En de pareilles circonstances, quand il la rencontrait, par exemple, de manière imprévue au détour d’une coursive, c’était la première chose qui le frappait.

L’aspect stérilisé de l’inévitable diagnoskit à sa hanche n’avait jamais constitué une barrière entre eux. Elle était méditech à temps plein et il comprenait qu’elle devait faire face aux urgences de sa profession.

L’obscure profondeur de son regard, la masse noire de ses cheveux, la chaleur satinée de sa peau brune faisaient qu’il se penchait toujours légèrement vers elle ou qu’il lui faisait face au milieu d’une foule. Ils appartenaient à la même lignée sanguine, celle des nations d’Assia, sélectionnée pour sa vigueur, son sens de la survie et ses affinités avec la voie stellaire. Beaucoup croyaient qu’ils étaient frère et sœur, méprise soulignée par le fait que, de mémoire vivante, aucune parenté de cette sorte n’avait jamais existé côté nef. Il y avait bien des frères et sœurs dans les chambres hybernatoires, mais jamais on ne les voyait réveillés en même temps.

Des notes pour un poème s’allumèrent sous son front, s’ajoutant à tous ceux qu’elle lui avait déjà inspirés et qu’il gardait pour lui.


Noire et resplendissante étoile, prends Le peu de lumière que j’ai Et de tes doigts agiles entremêlés aux miens Sens le souffle!


Avant d’avoir eu le temps de penser à mettre cela dans son enregistreur, il s’avisa qu’elle n’aurait pas dû arriver là si vite. Il n’y avait aucun poste d’appel à proximité.

— D’où m’as-tu appelé  ?

— Du Quartier Médical.

Son regard remonta la coursive. Le Quartier Médical était au moins à dix minutes de là.

— Mais comment as-tu fait pour…

— J’ai commandé dix minutes de temporisation sur toute la conversation.

— Mais c’est…

— Tu vois comme tes répliques sont banales  ? J’ai pu enregistrer les miennes avec une synchronisation parfaite.

— Mais ma…

II désigna du menton l’entrée de la salle des programmes.

— Ça? C’est où tu te caches toujours quand on te cherche partout.

— Hmmm…

Il lui prit la main et ils se dirigèrent vers la coque ouest.

— Je te trouve bien pensif, lui dit-elle. Moi qui croyais te faire une surprise, t’étonner… te faire rire, au moins.

— Excuse-moi. Ça m’embête un peu, qu’on me prenne comme ça au dépourvu. Je me reproche bien assez de ne pas savoir écouter les autres, de n’avoir pas… la réplique facile, au bon moment.

— C’est plutôt sévère comme autocritique, pour un poète.

— Il est bien plus facile d’ordonner des caractères sur une page ou un enregistrement holo que d’ordonner sa propre vie… Sa propre vie… Pourquoi est-ce que je parle comme ça?

Elle lui passa un bras autour de la taille et l’attira contre elle tout en marchant. Il sourit. Ils arrivèrent bientôt au Dôme des Cèdres. Ils étaient côté jour. La lumière de Réga leur parvenait filtrée par les écrans de protection. Les verts se paraient de tons bleus aux reflets apaisants. Kerro aspira une grande goulée d’air oxygéné. Il entendait les oiseaux gazouiller derrière une sonobarrière à sa gauche, là où la végétation était le plus dense. On voyait d’autres couples au loin sous les arbres. C’était un lieu de rendez-vous prisé.

Hali fit glisser la courroie de son diagnoskit et attira Kerro auprès d’elle sous les frondaisons. L’humus était tiède et moelleux, l’air était imprégné d’agréables moiteurs et le soleil brillait à travers les ramures des cèdres. Ils s’étendirent sur le dos, épaule contre épaule.

— Hmmm, fit Hali en cambrant les reins. Qu’est-ce que ça sent bon ici!

— Ici  ? Ici n’a pas plus d’odeur que là!

— Oh, tais-toi! Tu sais très bien ce que je veux dire. L’air, la terre mouillée, les miettes dans ta barbe… Elle glissa les doigts à rebrousse-poil dans ses favoris, dans sa barbe… Tu es le seul Neftile qui porte une barbe, ajouta-t-elle en rapprochant son visage du sien.

— C’est ce qu’on dit.

— Et ça te plaît  ?

— Je n’en sais rien… Il tendit la main pour caresser la courbe du petit anneau de métal qui lui perçait la narine gauche… Où as-tu trouvé ça  ?

— C’est un robox qui l’a laissé tomber.

— Laissé tomber  ? Il paraissait surpris.

— Je sais. Les robox n’ont pas l’habitude de perdre leurs affaires. Celui-ci était en train de réparer un senseur devant la salle de lecture juste à côté de Comportement I. Je l’ai vu faire tomber l’anneau et je l’ai ramassé, voilà tout.

— C’est drôle que le robox n’ait pas cherché à te le reprendre.

— J’ai pensé comme toi. J’avais l’impression d’avoir découvert un trésor fantastique. Ils ne laissent jamais rien traîner. Nef sait ce qu’ils font avec toute cette ferraille qu’ils emportent.

Elle glissa son bras sous sa nuque et l’embrassa. L’instant d’après, elle se dégagea. Il s’écarta d’elle et s’assit.

— Merci beaucoup, mais…

— C’est toujours «merci beaucoup mais…»

Furieuse, elle luttait contre les manifestations physiques de sa propre passion.

— Je ne me sens pas prêt, fit Kerro comme pour s’excuser. Je ne sais pas pourquoi, et je t’assure que ce n’est pas un caprice. J’ai ce besoin de minuter les choses, d’attendre que tout soit propice.

— Qu’est-ce qui pourrait être plus propice  ? Nous avons été sélectionnés pour la reproduction alors que nous nous connaissions déjà depuis longtemps. Ce n’est pas comme si nous étions des étrangers.

Il ne pouvait se résoudre à rencontrer son regard.

— Je sais. N’importe qui côté nef peut faire partenaire avec n’importe qui d’autre, mais…

— Mais  ? fit-elle en se retournant pour contempler la base de l’arbre qui les abritait. Nous pourrions être un couple reproducteur. Un sur… je ne sais pas combien. Deux mille? Nous pourrions faire un enfant. Tu te rends compte?

— Ce n’est pas ça. C’est…

— C’est toi qui es toujours si officiel, si conventionnel. Toujours en train de te référer aux schémas sociaux, aux schémas de langage… tu ne vois donc pas que…

Il tendit le bras dans sa direction, posa un doigt sur sa bouche pour la faire taire, l’embrassa doucement sur la joue.

— Pardonne-moi, Hali, c’est plus fort que moi. Faire partenaire, pour moi, ce doit être un don si intense que je veux m’y engloutir tout entier.

Elle roula sur le côté et releva la tête pour l’observer, les yeux luisants.

— Où est-ce que tu vas chercher toutes ces idées  ?

— Elles viennent de ma façon de vivre, et de ce que j’ai appris.

— C’est Nef qui t’apprend ça  ?

— Nef ne me refuse pas les éclaircissements que je lui demande.

Elle regarda morosement le sol à ses talons.

— Nef ne veut même pas m’adresser la parole.


Sa voix était à peine audible.


— Si tu sais lui demander, Nef répond toujours, fit Kerro. Puis il ajouta, comme une arrière-pensée qui risquait de demeurer entre eux  : Et tu es obligée d’écouter.

— Tu me l’as déjà dit; mais tu n’expliques jamais comment il faut faire.

Il ne pouvait manquer de percevoir la jalousie qui était dans sa voix. Il ne connaissait qu’une seule façon de répondre.

Je vais t’offrir un poème, dit-il. Puis il s’éclaircit posément la voix.


Le bleu lui-même nous enseigne le bleu.


Elle fronça les sourcils, en se concentrant sur ses mots. Puis elle secoua la tête  :

— Je ne te comprendrai jamais, pas plus que je ne comprends Nef. Je fais mes Vénefrations; j’obéis scrupuleusement aux commandements de Nef… Elle le regarda dans les yeux… Je ne t’ai jamais vu faire tes Vénefrations.


— Je suis l’ami de Nef.

La curiosité d’Hali fut plus forte que sa rancœur.

— Qu’est-ce que tu apprends avec Nef  ?

— Trop de choses pour t’expliquer.

— Dis-m’en une, rien qu’une!


— D’accord, fit-il en hochant la tête. Par exemple, qu’il a existé de nombreuses planètes et de nombreux humains. Leurs langages et la chronique de leurs siècles tissent un enchevêtrement magique. Leurs paroles chantent dans ma tête. On n’a même pas besoin de comprendre les paroles pour les entendre chanter.

Elle ressentit à ces mots une étrange sensation d’émerveillement.


— Nef te fait entendre des mots que tu ne comprends pas?

— Seulement quand je lui réclame l’original.


— Mais pourquoi veux-tu entendre des choses que tu ne comprends pas  ?

— Pour faire vivre tous ces gens, pour qu’ils fassent partie de moi. Pas pour les dominer, mais pour m’identifiera eux, au moins l’espace d’un ou deux battements.


Il la dévisagea gravement avant de poursuivre  :


— N’as-tu jamais eu envie de creuser une terre antique pour exhumer des gens dont personne ne connaissait l’existence?


— Des ossements  ?


— Non! Des cœurs, des existences. Elle secoua lentement la tête.

— Je ne te comprends pas, Kerro, tu vois. Mais je t’aime. Il acquiesça silencieusement en pensant  : C’est vrai, l’amour se passe de compréhension. Elle le sait, mais elle ne veut pas l’admettre dans sa propre vie.


Il se remémora les mots d’un ancien poème côté Terre  : «L’amour n’est pas une consolation, mais une lumière.» La pensée, le poème de la vie, c’était cela, la consolation. Un jour, se dit-il, il lui parlerait d’amour; mais pas ce jour-ci.


L'incident Jésus
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