La séparation

Il y avait plusieurs mois déjà qu’ils s’étaient rencontrés, et des contretemps les avaient empêchés de se retrouver.

Ils étaient mariés tous les deux, ne fréquentaient pas les mêmes milieux, n’exerçaient pas le même métier : il était dessinateur, elle infirmière. Un soir, par hasard, ils se croisèrent devant un café qu’elle quittait alors que lui allait y entrer.

C’est là, entre deux whiskies, qu’ils s’embrassèrent, se caressèrent pour basculer dans un même désir taciturne, endigué dans son indécence par leur conscience d’être malgré tout dans un endroit public.

Il ne lui demanda rien, persuadé qu’ils avaient la nuit devant eux, que personne ne pourrait la leur prendre. Personne, non ; mais le quotidien, oui.

C’est en effet vers 11 heures et demie que sa compagne rajusta son slip et murmura qu’elle devait prendre son service de nuit à l’hôpital. Un peu sonnés, ils échangèrent leurs numéros de téléphone, elle sauta dans un taxi, il enfourcha plus rageusement son vélomoteur.

Ivre de pas mal de verres et d’encore plus de visions perturbantes, il se fit accrocher par une voiture qui lui refusa la priorité à un carrefour mal éclairé.

Deux heures plus tard, après une longue intervention aux urgences, il retrouvait son infirmière : elle travaillait au service réanimation.