Je cherchais depuis un certain temps à acheter une maison à la campagne, mais celle-ci était la première que j’avais eu la curiosité de visiter.
Je venais de parcourir le rez-de-chaussée, je passai au premier étage.
La demeure devait dater des années 20, elle était isolée dans une morne campagne à 2 km du village. Elle me paraissait harmonieuse, inquiétante aussi avec ses vastes pièces toutes désertes, abandonnées depuis des années sans doute.
C’est en arrivant dans la plus grande chambre de l’étage que je ressentis une sourde inquiétude. Je m’étais arrêté au seuil de cette pièce, vide comme toutes les autres, à part une chaise en bois au milieu du parquet et deux candélabres en argent qui, posés de chaque côté d’un haut miroir, semblaient monter la garde sur une cheminée de marbre.
J’avançai vers le miroir, je vis les traits de mon visage s’altérer, déformés par la stupeur. J’apercevais le reflet des deux candélabres, des murs, du parquet, de toute la pièce où je me trouvais, mais sur la chaise reflétée se tenait une jeune femme qui n’existait pas dans la réalité.
Elle me tournait presque le dos, je la voyais cependant assez bien pour admirer la gracieuse cambrure de son dos, le profil d’un sein sans défaut, les longs cheveux sombres et ce corps languide, alangui, tendrement sculpté par une robe mauve aussi intemporelle que la vision de cette créature de l’impensable. Surtout qu’elle tourna la tête vers moi pour esquisser un lugubre sourire, m’adresser un brumeux regard de détresse teinté d’une étrange invite.
Puis elle se figea à tout jamais, gardant la pose, hiératique. Insoutenablement obsédante, inaccessible.
C’est ainsi que je rencontrai la femme qui devait me hanter toute ma vie.