20

J’ai soutenu le regard de Doj. Mon visage était glacé. « Qu’est-ce que la Clé ? » lui ai-je demandé sans que ma voix trahît la moindre émotion. Ficelés et bâillonnés, Narayan Singh et la Fille de la Nuit nous regardaient faire en attendant leur tour.

Doj n’a manifesté sa surprise que par le plus infime des battements de paupières. Il ne s’attendait pas à me voir jouer le rôle de l’inquisiteur.

J’étais de nouveau dans la peau de mon personnage, emprunté cette fois-ci à un malfrat qui nous avait fait du tort quelques années plus tôt. Vajra le Naga. Son gang était désormais hors circuit et Vajra parti pour un monde meilleur, mais son legs se révélait parfois très utile.

Doj partait assez raisonnablement du principe qu’il ne serait pas torturé. Je n’avais nullement l’intention d’aller si loin. Le sort de la Compagnie et celui des Nyueng Bao étaient désormais si intimement liés qu’il m’était impossible de le brutaliser sans m’aliéner l’amitié de nos plus utiles alliés.

Doj n’a rien répondu. Je ne m’attendais pas, d’ailleurs, à ce qu’il se montrât plus loquace qu’un caillou.

« Nous avons besoin d’ouvrir la route de la plaine scintillante, ai-je repris. Nous savons que vous ne détenez pas la Clé. Mais aussi par où nous devons commencer pour la chercher. Nous vous la remettrons avec plaisir dès que nous aurons libéré nos frères. » Je me suis accordé une pause, lui donnant ainsi l’occasion de me surprendre par sa réponse. Il n’en a rien fait.

« Vous vous opposez peut-être, pour des raisons philosophiques, à ce qu’on ouvre cette voie. Nous allons vous décevoir à cet égard. Elle le sera. D’une façon ou d’une autre. Il ne vous reste plus qu’une alternative : collaborer ou refuser de participer. »

Il a détourné très fugacement le regard, cherchant à déchiffrer dans sa posture l’attitude de Sahra.

C’était plus qu’évident : son mari était piégé sous la plaine scintillante. Les vœux d’un prêtre solitaire, zélateur d’un culte obscur et ésotérique, ne lui faisaient ni chaud ni froid.

Ni Banh Do Trang ni Ky Gota n’ont manifesté de témoignage de soutien, bien qu’ils lui fussent tous les deux favorables depuis des décennies. Par pure inertie.

« Si vous refusez de coopérer, nous ne vous rendrons pas la Clé après avoir mené notre opération à bien. Et c’est à nous de décider en quoi consistera cette collaboration. Mettre un terme définitif, en l’occurrence, à l’attitude nyueng bao convenue  – équivoques, propos évasifs et surdité sélective  – serait déjà un premier pas. »

Vajra le Naga n’est pas un personnage que j’aime fréquemment incarner. Le naga est un serpent mythique qui séjourne sous terre et n’éprouve aucune sympathie pour les êtres humains. L’ennui, c’est que je parvenais à me glisser dans la peau de cet individu comme si elle était taillée sur mesure. Me transformer en Vajra le Naga n’exigeait de moi qu’une infime distorsion émotionnelle.

« Vous détenez un objet que nous désirons. Un livre. » Je misais beaucoup sur les conclusions que j’avais tirées par intuition ou déduction en me fondant sur ce que j’avais appris de Murgen et de ses annales, sur le cours réel de divers événements cachés. « Il est environ de ces taille et épaisseur, et relié de vélin brun. Les écrits qu’il contient sont d’une main malhabile, dans une langue qui n’est plus parlée depuis sept siècles. En fait, il s’agit de la copie presque intégrale du premier volume des Livres des Morts, les textes sacrés perdus des Enfants de Kina. Vous l’ignoriez probablement. »

Narayan et même la Fille de la Nuit avaient tressailli.

« Ce livre a été dérobé dans la forteresse de Belvédère par le sorcier le Hurleur. Il l’a caché ensuite, car il ne tenait pas à ce que Volesprit ni l’enfant le retrouvent. Soit vous l’avez vu faire, soit vous êtes tombé dessus par hasard peu après. Vous l’avez planqué à votre tour dans un endroit que vous jugiez sûr. En oubliant que rien ne demeure caché pour l’éternité. Tôt ou tard, certains yeux finissent par tout découvrir. »

J’ai de nouveau laissé à Doj le temps d’y aller de son commentaire. Il a préféré s’abstenir.

« Vous avez le choix, bien entendu. Mais je me permets de vous rappeler que vous atteignez un âge avancé, que votre successeur désigné est enseveli sous cette plaine avec mes frères et que Gota, dont l’enthousiasme aujourd’hui est sujet à caution, reste la plus favorable de vos alliés. Vous pouvez bien sûr choisir de vous taire à jamais, auquel cas vous emporteriez la vérité dans la tombe. Mais la Clé restera où elle est. En d’autres mains que les vôtres. Avez-vous suffisamment mangé ? Quelqu’un veut-il bien apporter quelque chose à boire à notre hôte ? Qu’on ne nous taxe pas de manquement à l’hospitalité. »

« Tu ne lui pas arraché une seule parole, s’est plaint Qu’un-Œil dès que Doj ne s’est plus trouvé à portée d’ouïe.

— Je ne m’y attendais pas. Je voulais simplement lui donner quelque chose à ruminer. Allons bavarder avec les deux autres. Ramène Singh ici, ôte-lui son bâillon et place-le de manière à ce qu’il ne puisse pas voir la fille. » Celle-ci était terrifiante. Il émanait encore d’elle, bien que ficelée et bâillonnée, une puissante et troublante aura. Mettez-la en présence d’individus déjà disposés à la croire sous l’égide de la déesse ténébreuse et vous comprendrez aisément pourquoi le culte des Félons refaisait surface. Que ce phénomène fût encore assez récent ne manquait pas d’intérêt. Narayan et elle avaient mené pendant une décennie l’existence de fugitifs, s’efforçant péniblement de reprendre le contrôle des rares Félons survivants tout en évitant les agents de la Protectrice, et à présent, au moment précis où nous avions enfin l’impression de pouvoir tirer quelques barbiches, eux aussi rendaient public le fait qu’ils avaient également survécu.

Je concevais aisément que l’imagination gunnie pût établir des liens entre ces événements et y déceler signes avant-coureurs et présages de l’Année des Crânes.

« Narayan Singh, ai-je poursuivi de ma voix de Vajra le Naga, vous êtes un vieillard obstiné. Vous devriez être mort depuis longtemps. Sans doute Kina a-t-elle un petit faible pour vous. Ce qui permettrait de supposer que la déesse tenait précisément à ce que vous tombiez entre mes mains. » Nous autres Vehdnas avons le don de tout coller sur le dos de Dieu. Rien ne peut se produire hors de sa volonté. C’est donc qu’il aura d’ores et déjà mesuré la profondeur du bran et décidé de t’y plonger. « Et ne te méprends surtout pas. Ces mains sont rouges de sang. »

Singh m’a dévisagée. Il ne me craignait pas plus que cela. Ne me reconnaissait même pas. Si nos chemins s’étaient croisés auparavant, j’avais été un inconvénient trop infime pour qu’il en gardât le souvenir.

Mais la Fille de la Nuit, elle, se souvenait de moi. Elle voyait même en moi une erreur qu’elle ne commettrait plus jamais. Peut-être voyais-je moi aussi en elle une erreur qui nous était désormais à jamais interdite, même si elle devait par la suite se révéler un instrument efficace. Elle réussissait presque à effrayer Vajra le Naga, qui, de son vivant, avait été bien trop obtus pour comprendre dans sa chair la signification de la crainte.

« Tu es perturbé par ce qui s’est passé, mais tu n’as pas peur. Tu te reposes sur ta déesse. Parfait. Permets-moi de te rassurer. Nous ne te ferons aucun mal. À condition que tu coopères. Et en dépit de tout ce que tu nous as fait subir. »

Il n’en croyait pas un mot et je ne pouvais guère le lui reprocher. « Entretenir une faible lueur d’espoir » est un expédient habituel auquel tout bourreau recourt pour s’adjuger la coopération de ses victimes.

« Quelqu’un d’autre en pâtira, en l’occurrence. » Il tenta de se retourner vers la fille. « Pas seulement ici, Narayan Singh. Pas seulement elle. Même si c’est par là que nous commençons. Tu détiens un objet que nous voulons, Narayan. En revanche, nous savons que tu accordes de la valeur à un certain nombre de choses. Je suis prête à faire un échange, je t’en fais le serment au nom de tous nos dieux. »

Narayan n’avait rien à répondre. Pas encore. Mais je pressentais que les mots justes risquaient de trouver le chemin de ses oreilles.

La Fille de la Nuit l’avait senti aussi. Elle se trémoussait. Tentait d’émettre des bruits étranglés. Elle se montrerait tout aussi cinglée et cabocharde que sa mère et sa tante. Sûrement héréditaire.

« Narayan Singh. Dans une autre vie, tu as été marchand de légumes dans une ville du nom de Gondowar. Tous les étés, tu en partais pour mener ta section de toogas. » Il avait l’air tout à la fois intrigué et mal à l’aise. Il ne s’était pas attendu à ça. « Tu avais une épouse, Yashodara, que tu appelais Lily dans l’intimité. Et une fille, Khaditya, peut-être un nom de baptême un tantinet trop futé. Ainsi que trois fils : Valmiki, Sugriva et Aridatha. Tu n’as jamais vu le benjamin car il n’était pas encore né quand les Maîtres d’Ombres ont emmené tous les hommes valides de Gondowar en captivité. »

Narayan semblait plus troublé et embarrassé que jamais. Son existence avant l’arrivée des Maîtres d’Ombres était un épisode oublié. Depuis son salut imprévu, il ne se consacrait plus qu’à sa déesse et à sa fille.

« Cette époque était à ce point incertaine que tu pars depuis du principe, plausible, que rien n’a survécu de ces années de ton existence précédant l’arrivée des Maîtres d’Ombres. Mais ce présupposé est faux, Narayan Singh. Yashodara a porté ton troisième fils, Aridatha, et vécu assez longtemps pour le voir devenir adulte. Bien qu’elle ait connu la misère et le désespoir, ta Lily vivait encore voilà deux ans. » De fait, elle n’était morte que peu après qu’on l’avait localisée. Je ne sais toujours pas de source sûre si certains de nos frères n’auraient pas cédé à un zèle excessif dans leur quête de Narayan. « De tes trois fils, seuls Aridatha et Sugriva sont encore de ce monde, ainsi que ta fille Khaditya, bien qu’elle se fasse appeler Amba depuis qu’elle a appris avec horreur que son propre père n’était autre que le notoirement infâme Narayan Singh. »

En volant le bébé de Madame, Narayan s’était assuré que son nom survivrait éternellement et s’ajouterait à la liste des plus grands scélérats. Tous les gens d’un certain âge le connaissaient, ainsi qu’une pléiade d’histoires horribles courant sur son compte… la plupart inventées, sinon agglomérats de contes se rattachant à d’autres démons à forme humaine dont le temps avait estompé l’ignominie.

En dépit de sa volonté bien déterminée de feindre l’indifférence, j’avais capté son attention. La famille est un sujet crucial pour la majorité des gens, hormis une petite poignée.

« Sugriva a pris ta relève, quoique son désir d’échapper à ta réputation l’ait d’abord poussé à s’installer en premier lieu à Ayodahk puis à Jaicur, quand la Protectrice a décidé du repeuplement de cette cité. Il lui semblait qu’en vivant au milieu d’étrangers il pourrait se forger un passé plus propice. »

Les deux captifs n’ont pas manqué de prendre note de mon malencontreux emploi du nom « Jaicur ». Ce qui ne leur fournissait aucune information utile mais leur apprenait au moins que je n’étais pas de Taglios. Nul Taglien ne donnerait à cette ville un autre nom que Dejagore.

« Aridatha est devenu un très beau jeune homme, bien fait de sa personne, ai-je poursuivi. Il est soldat, sous-officier de grade élevé d’un des bataillons de la ville. Son ascension a été fulgurante. Il s’est fait remarquer. Il a de fortes chances de devenir un de ces officiers de carrière que le Grand Général a imposés à l’armée. »

Je me suis tue. Silence. Certaines personnes présentes écoutaient ce récit pour la première fois, bien que Sahra et moi nous fussions depuis longtemps renseignées sur tous ces individus.

Je me suis levée et je suis sortie me servir une grande tasse de thé. Je suis incapable de me plier aux cérémonies du thé des Nyueng Bao qui me considèrent, bien entendu, comme une barbare. Je n’aime pas beaucoup non plus leurs tasses lilliputiennes. Quand j’ai envie de thé, je fais les choses sérieusement. Fort, amer, avec une bonne dose de miel.

Je me suis rassise face à Narayan. Personne n’avait ouvert la bouche pendant ma brève absence. « Alors, saint vivant des Étrangleurs, as-tu réellement secoué toutes les chaînes terrestres ? Aimerais-tu revoir ta Khaditya ? Elle était bien petite quand tu es parti. Et tes petits-enfants ? Tu en as cinq. Il me suffirait d’un seul mot pour en faire venir un ici en moins d’une semaine. » J’ai siroté une gorgée de thé en fixant Narayan dans le blanc des yeux et en laissant s’ébattre son imagination. « Mais tout se passera très bien pour toi, Narayan. J’y veillerai personnellement. » Je lui ai décoché mon sourire à la Vajra le Naga. « Quelqu’un pourrait-il escorter ces deux personnes jusqu’à leur chambre ?

— Tu comptes t’en tenir là ? m’a demandé Qu’un-Œil après leur départ.

— Je vais laisser Singh réfléchir à l’existence qu’il n’a jamais vécue. À ce qu’il pourrait aussi perdre le peu qu’il en reste. Et à la perte de son messie. Alors qu’il s’épargnerait toutes ces tragédies en nous expliquant où nous pourrions trouver le souvenir qu’il a emporté de la cachette de Volesprit près de Kiaulune.

— Il n’ose même respirer pas à fond sans en demander l’autorisation à la fille.

— Nous allons bien voir comment il se débrouille confronté à la nécessité de prendre seul ses décisions. S’il tergiverse trop et que le temps nous presse, tu pourras toujours me jeter un sort pour qu’il me prenne pour elle.

— Et elle ? demanda Qu’un-Œil. Tu comptes la travailler toi-même au corps, elle aussi ?

— Oui. Dès maintenant. Jette-lui ces sorts d’étranglement. Un pour chaque poignet et cheville. Et double la mise à la gorge. » Nous avions pratiqué l’élevage du bétail, entre autres choses, au fil des années, et Gobelin et Qu’un-Œil, dans leur invraisemblable paresse, avaient mis au point ces sorts d’étranglement qui se resserraient de plus en plus étroitement à mesure qu’un animal s’éloignait d’un repère établi. « C’est une femme de ressources et une déesse veille sur elle. Je préférerais la tuer et en finir une fois pour toutes, mais, si nous le faisions, Singh refuserait de nous aider. Si elle parvient à s’échapper, je veux remporter un franc succès. Un succès fatal. Qu’elle défaille d’asphyxie. Je refuse qu’elle ait des contacts réguliers avec un seul des nôtres. Souviens-toi de ce que sa tante Volesprit a fait à Saule Cygne. Tobo ? Cygne a-t-il dit quelque chose d’intéressant ?

— Il se contente de jouer aux cartes. Il n’arrête pas de parler, mais pour ne rien dire. Un peu comme l’oncle Qu’un-Œil. »

Soupir. « C’est toi qui lui as dit de répéter ça, face de crapaud ?

— C’est du Cygne tout craché », ai-je fait. J’ai fermé les yeux et je me suis mise à masser mes sourcils entre pouce et index, tout en m’efforçant de congédier Vajra le Naga. Son indifférence reptilienne ne manquait pas d’attraits. « Je suis tellement fatiguée…

— Alors pourquoi ne pas prendre tous notre retraite ? a croassé Qu’un-Œil. On s’est appuyé le capitaine et ses conneries de retour au Khatovar pendant toute une foutue génération, et ça n’a réussi qu’à nous enfoncer davantage. Et maintenant c’est vous, les deux bonnes femmes, avec votre sainte croisade pour ressusciter les Captifs. Trouve-toi un lascar, greluchonne. Passe une année entière à le sauter, jusqu’à ce que sa cervelle explose. On ne réussira jamais à les tirer de là. Acceptez-le. Tâchez de vous convaincre qu’ils sont morts. »

Je croyais entendre la voix traîtresse qui, du fond de mon âme, me chuchotait toutes les nuits à l’oreille avant que je ne m’endorme. À tout le moins pour ce qui concernait l’impossible retour des Captifs. « Pourrions-nous invoquer notre mort préféré, Sahra ? Demande-lui ce qu’il pense de notre plan, Qu’un-Œil.

— Peuh ! Charge-t’en, face de crapaud. J’ai besoin d’un petit remontant. »

Gota lui a emboîté le pas en se dandinant, toute souriante malgré ses articulations endolories. Nous ne les reverrions pas avant un bon bout de temps. Avec un peu de chance, Qu’un-Œil s’enivrerait rapidement et cuverait son poison dans un coin. Dans le cas contraire, il sortirait de son trou en titubant, chercherait des noises à Gobelin et nous nous retrouverions contraints de le ficeler. Ça risquait de tourner à l’aventure.

« Tiens, voilà notre fils prodigue ! » Sahra avait enfin réussi à ramener Murgen dans la boîte à brume.

« Parle-moi du corbeau blanc, lui ai-je intimé.

— Je le visite parfois. Ce n’est pas délibéré. » L’air intrigué.

« Nous avons exfiltré Narayan Singh et la Fille de la Nuit du Chor Bagan, aujourd’hui. Il s’y trouvait un corbeau blanc. Tu n’étais pas là.

— Je n’étais pas là. » De plus en plus intrigué. Voire troublé. « Je ne m’en souviens pas, en tout cas.

— Il me semble que Volesprit l’a repéré. Et elle connaît ses corbeaux.

— Je n’étais pas là, a poursuivi Murgen, mais je me souviens de détails de l’affaire. Ça ne va pas recommencer !

— Calme-toi. Dis-nous ce que tu sais. »

Il a entrepris de nous rapporter tout ce qu’avait dit et fait Volesprit après avoir esquivé les tirs des embusqués. Mais il a refusé de nous expliquer comment il était au courant. Il en était incapable, à mon avis.

« Elle sait que nous détenons Singh et la fille, a déclaré Sahra.

— Mais en aura-t-elle deviné la raison ? La Compagnie a une vieille dent contre eux.

— Elle voudra voir les corps pour se convaincre que l’affaire s’arrête là. Elle n’est toujours pas persuadée de la mort de Cygne. Une femme très suspicieuse, la Protectrice.

— Pour Narayan, ce devrait être facile… à condition de rendre la présentation crédible. Les petits vieux crasseux et décharnés aux dents vertes grouillent par millions dans les parages. Mais on risque assurément de manquer de belles donzelles de vingt ans aux yeux bleus et à la peau plus blanche que l’ivoire.

— Les Gris vont à coup sûr s’affoler dorénavant, a laissé tomber Sahra. Qu’elle soupçonne ou non quelque chose, la Protectrice ne permettra à personne de trafiquer dans sa belle cité.

— Ce que la Radisha risque de contester. Ce qui me rappelle un truc qui me trotte depuis quelque temps derrière la tête. Écoutez et dites-moi ce que vous en pensez. »