CHAPITRE XLII
Wedge plongea et effectua une manœuvre qui l’amena face aux deux Mirettes.
Il en visa une et pressa la détente. Le cockpit s’enflamma, puis l’appareil tomba en vrille pour aller s’écraser sur une tour d’acier renforcé.
Son partenaire tenta de le venger, mais Wedge ne lui laissa aucune chance d’y parvenir.
Il le prit immédiatement en chasse.
Un quadruple faisceau de rayons laser percuta le panneau solaire du Tie. Le vaisseau tomba en piqué. Avant d’avoir atteint les entrailles de Coruscant, il heurta une voie de circulation aérienne et explosa.
Le Rogue ramena son appareil à une altitude élevée, et s’efforça d’éprouver du chagrin pour le pilote à qui il venait d’ôter la vie…
Sans succès.
Autour de lui s’agitaient les chasseurs Tie impériaux et les ailes X de son escadron. Des faisceaux laser rouges et verts emplissaient le ciel et des Tie explosaient régulièrement, projetant alentour toutes sortes de débris et de pièces métalliques. Malgré l’aspect dramatique et excitant de la bataille, Wedge demeura de marbre.
Plus loin dans le ciel, une aiguille blanche semblait fendre les airs.
Le superdestroyer Lusankya, d’une longueur totale de huit kilomètres, s’élevait au-dessus de la zone où il était resté tapi des années durant.
Wedge savait que les superdestroyers étaient entrés en service après la bataille de Yavin. Autrement dit, celui-ci avait été construit et caché sur Coruscant avant Endor. Mais le pilote ne pouvait concevoir qu’on n’ait jamais remarqué l’énorme vaisseau.
Le pouvoir de l’Empereur était-il assez fort pour contraindre des milliers de gens à oublier qu’ils avaient vu le Lusankya être enterré ici ?
Aussi abominable que paraissait cette hypothèse, Wedge espérait que c’était la bonne.
L’autre possibilité, que l’Empereur ait ordonné la suppression de tous les témoins, le dégoûtait davantage encore.
— Leader Rogue, un Frelon fonce sur vous, l’informa une voix.
— Merci, Cinq.
Le chef des Rogues vira à bâbord, puis fit un looping qui le dégagea de la ligne de tir ennemie.
Utilisant le système télémétrique d’un griffe-ciel pour garder la trace du Frelon, il prit un virage serré autour de la flèche du bâtiment.
Le vaisseau impérial manœuvra pour l’éviter.
Wedge fit feu.
La moitié des rayons manquèrent leur cible et glissèrent sur le pare-brise de l’appareil, mais l’autre moitié atteignit de plein fouet son panneau solaire tribord et traversa le cockpit. Le vaisseau fit une série d’embardées, percuta un Affreux et explosa.
Au sud, le Lusankya quittait la planète. Sa forme rappelait celle de l’Exécuteur de Vador, vu sur Hoth et à Endor.
Mais sa coque reposait sur une imposante plate-forme constituée de cellules hexagonales.
Proue pointée vers le ciel, le destroyer activa ses propulseurs et s’éleva, laissant dans son sillage une colonne de fumée. À l’approche d’un griffe-ciel suspendu, il ralentit sa course. Le bâtiment faisait une cible facile.
Les batteries du Lusankya commencèrent à tirer, passant le relais à d’autres armes à mesure que le vaisseau continuait d’avancer.
En quelques secondes, ce qui avait été un élégant disque pourvu d’une paradisiaque jungle ithorienne, fut réduit à une demi-lune qui alla s’écraser dans le district des montagnes.
Quand le Lusankya reprit de la vitesse, les artilleurs changèrent de cible et tirèrent dans les couches supérieures de l’atmosphère. Les rayons atteignirent le premier des deux boucliers qui enveloppaient la planète. Créés pour prévenir une attaque extérieure, ces boucliers se révélaient tout aussi efficaces de l’intérieur. Pourtant, après vingt secondes d’un feu soutenu, une brèche s’ouvrit dans le premier.
Les Tie qui luttaient contre l’Escadron Rogue firent demi-tour et se précipitèrent à la poursuite du vaisseau. Incapables de se propulser dans l’hyperespace, ils seraient coincés sur Coruscant s’ils ne parvenaient pas à rattraper le Lusankya.
Les pilotes qui ne seraient pas abattus seraient faits prisonniers.
Et si mon vaisseau avait causé autant de dégâts en s’enfuyant, je ne m’attendrais pas à beaucoup d’indulgence de la part de mes ennemis, songea Wedge.
— Mynock, donne-moi les coordonnées du Lusankya, ordonna-t-il.
Le droïd afficha une représentation du superdestroyer sur son moniteur. Le radar indiquait que le vaisseau se trouvait à vingt-cinq kilomètres de distance. Wedge frissonna en songeant qu’il semblait toujours aussi énorme.
— Escadron Rogue, en formation, ordonna-t-il. Nous avons trois minutes pour rattraper le Lusankya. Achevons les Tie qui restent avant qu’il puisse les récupérer. Souvenez-vous que ce bâtiment est une véritable forteresse armée. Quand je vous l’ordonnerai, vous cesserez votre attaque. Compris ?
Wedge transféra l’énergie des boucliers à ses moteurs et accéléra.
Il vit Asyr arriver à son niveau.
— Pas d’actes d’héroïsme, pilote Sei’lar, lança-t-il. Je veux pouvoir vous rendre cette datacarte.
— À vos ordres, commandant.
Antilles jeta un coup d’œil à son moniteur, puis au Tie dont ils approchaient à toute vitesse.
— J’assure vos arrières. Il est à vous, annonça-t-il.
— Merci, commandant.
La Bothane accéléra jusqu’à se trouver en bas à droite du Tie, à deux cent cinquante mètres de distance. Elle se plaça dans le sillage de l’appareil et tira deux fois. Le premier rayon alla se ficher dans le panneau solaire ennemi, y laissant deux longues traînées. Le second atteignit les échappements bâbord. La Mirette explosa.
— Joli coup, Deux, la félicita Wedge.
— Merci, chef.
Le leader des Rogues consulta le chronomètre de son écran.
— Encore deux minutes et demie avant d’atteindre la cible, nota-t-il. Mynock, avertis-moi trente secondes avant.
Le Lusankya continuait à tirer dans les boucliers de la planète.
Les rayons qui cherchaient à l’atteindre depuis le sol se révélaient inefficaces et glissaient littéralement sur lui.
À force de tirs répétés, le Lusankya parvint à élargir la brèche du bouclier inférieur et à la maintenir ouverte pendant que les artilleurs s’attaquaient au bouclier supérieur. Les protections finirent par céder.
Mynock bipa pour signifier que la cible ne se trouvait plus qu’à trente secondes de distance.
— Rogue, cessez l’attaque, ordonna Wedge. Les autres sont en train de s’enfuir.
Il ne restait qu’une demi-douzaine de Tie. Force de protection, ils avaient fait leur travail en empêchant les chasseurs locaux d’approcher du Lusankya pendant qu’il décollait, alors que ses boucliers n’étaient pas encore activés.
— Quatre, ici Leader Rogue, reprit Wedge. Abandonnez la poursuite.
— Encore quelques secondes, supplia Erisi.
— Revenez tout de suite, Quatre !
— Mais je le tiens presque…
— Vous êtes trop près. Quatre, revenez immédiatement !
La jeune femme tira une rafale qui atteignit le panneau solaire tribord du Tie, à droite du cockpit. Quelque chose explosa à l’arrière du vaisseau. Deux secondes plus tard, celui-ci se désintégra dans un nuage de fumée noire, et une énorme boule de feu se forma devant l’aile X d’Erisi.
— Réintégrez l’unité, Quatre.
— Je l’ai eu, chef.
— Et vous avez grillé au passage. Revenez ici.
— Mon gouvernail ne fonctionne plus, lâcha Erisi, affolée.
— Quatre, vous êtes trop près du Lusankya. Sortez de là !
Wedge vira à gauche et décrivit une large boucle.
— Mynock, repère sa position d’après les données de son unité R5, ordonna-t-il.
Il reprit son comlink.
— Quatre, retournez-vous puis plongez. La gravité est votre alliée.
— À vos ordres. Non, attendez.
Un hurlement strident sortit du haut-parleur.
— Ils sont en train de m’aspirer. Je suis à pleine puissance, mais je n’arrive pas à me dégager. Aidez-moi !
Wedge tira sur le manche à balai de son appareil et se dirigea vers le Lusankya. Il crut apercevoir la petite tache de l’aile X d’Erisi contre l’énorme coque du superdestroyer, mais un rayon dirigé vers lui l’effaça de son champ de vision. Il ramena le manche contre sa poitrine, fit remonter son aile X, puis reprit la direction de la planète.
— Escadron Rogue, avec moi, enjoignit-il. Nous rentrons.
— Mais chef, on ne peut pas la laisser comme ça.
— Ça suffit, Gavin. C’est un superdestroyer. Nous ne l’arrêterons pas.
— L’impossible est…
— Je sais, Rogue, je sais. (Wedge consulta son moniteur et frissonna.) Mais pour le moment, ce serait prendre beaucoup de risques pour peu de résultats. Même si l’impossible est ce que l’escadron réussit le mieux, ça ne signifie pas que nous pouvons toujours gagner.