CHAPITRE XXXIX

— C’est pas le gros type qu’on cherche ! lança l’un des trois hommes qui faisaient face à Corran.

— Aucune importance. Tuez-le quand même.

Corran porta la main droite à sa taille et saisit le sabrolaser, qu’il activa en direction du trio. La lame décrivit une courbe ; les soldats impériaux plongèrent pour s’abriter.

L’un d’eux tenta d’atteindre l’arme, mais la manqua à deux reprises.

Horn brandit sa lame. Il entendit un bruit sourd qui couvrit le fracas du fusil-blaster. Il plongea sur sa gauche, roula et se rétablit en position accroupie. Suivant la trajectoire d’un cône de lumière mobile, il tira à sa base. Aucun cri ne vint confirmer qu’il avait atteint sa cible.

Deux rayons laser provenant de sa droite le forcèrent à se baisser. Lorsqu’il se glissa dans l’ombre d’une statue, ses deux ennemis éteignirent leurs lampes.

Deux hypothèses : soit ils ont des comlinks et vont coordonner leur attaque. Soit ils vont ou ont déjà demandé du renfort, et l’attente sera à leur avantage. Il faut que je sorte d’ici, et le seul moyen est de passer par où ils sont arrivés. C’est maintenant ou jamais.

Corran se redressa, utilisant la lueur de son sabrolaser pour repérer les obstacles. Le chemin avait l’air dégagé. Il piqua un sprint, tourna à l’angle d’une statue, puis d’une vitrine, avant de se précipiter vers la porte.

Les rayons qui fusèrent vers lui brûlèrent sa cape à plusieurs endroits, mais ses assaillants ajustèrent leurs tirs et criblèrent l’entrée de trous. Des tirs qui auraient dû toucher Corran en plein cœur et le réduire en cendres.

Ce serait arrivé si la cape du pilote ne s’était pas prise dans une vitrine, le faisant trébucher. Le fugitif rétablit son équilibre et s’élança vers l’embrasure de la porte, les pieds en avant, quelques centimètres à peine sous la ligne de feu. Il retomba durement sur le côté, s’écorcha le genou, puis glissa jusqu’au milieu de la pièce.

Le poing sur le manche de son sabrolaser, il l’éteignit et rampa en direction de la porte. Il espérait trouver en chemin le fusil-blaster du soldat abattu. Alors qu’il se plaquait contre le mur, il aperçut la forme de l’arme, à deux mètres environ, du mauvais côté de l’entrée.

Même s’il savait que la seule solution était de se précipiter vers la sortie, la douleur qu’il éprouvait à la hanche et au genou l’informa que tout ce qu’il pourrait faire serait de boitiller jusque-là.

Il crut que tout était perdu.

Alors il entendit un bruit sourd contre le mur, derrière lui. Avant de reconnaître le « clic » d’un comlink, il se leva, réactiva son sabrolaser et l’abattit de toutes ses forces sur le mur. Au sommet de sa course, l’arme émit un crépitement, pendant que du sang traversait le rayon de lumière argenté.

Un homme presque coupé en deux s’écroula sur le seuil au moment où le troisième Impérial ouvrait le feu. Une décharge effleura la main droite du pilote, qui réagit en tirant deux fois. Le porteur du fusil s’écroula sur l’une des vitrines.

Dans la pénombre, Corran vit ses mains tressaillir, comme s’il cherchait encore à appuyer sur la gâchette de son arme. Puis il mourut.

Corran désactiva son sabrolaser et le mit à sa ceinture. Il glissa le blaster dans sa poche, rampa par-dessus le corps du premier garde, défit la sangle de son casque et le lui ôta. À l’intérieur, il trouva un comlink, qu’il activa. Il écouta un moment, pour savoir si des commandos étaient en route ; l’appareil demeura silencieux.

Corran récupéra le blaster du deuxième garde, vérifia la charge, puis examina son propriétaire. Les tenues des trois hommes ne ressemblaient à aucun des uniformes impériaux qu’il avait vus auparavant. Les gardes eux-mêmes étaient assez mal assortis pour n’être pas des commandos.

Corran supposa qu’ils appartenaient à une force de police locale.

Corran régla la fréquence du comlink, espérant déterminer où il se trouvait. Même s’il haïssait l’Empire, il était forcé d’admettre que son organisation était des plus efficaces. Sur chaque monde, des stations relais avaient été mises en place pour fournir l’heure locale et celle de Coruscant.

Le pilote maintint l’appareil contre son oreille et se traîna lentement vers le trou que le trio avait creusé dans le mur, au fond de la pièce.

— Ça doit être un monde complètement perdu pour qu’ils n’envoient que trois hommes arrêter un évadé…

Même s’ils m’ont confondu avec Derricote. Je me demande si je vais en sortir un jour, soupira-t-il.

Une voix métallique résonna dans l’appareil.

— Huit heures quarante-cinq minutes, Temps Galactique, annonça-t-elle.

— Bien, je suis sur un monde qui a le même horaire que Coruscant.

Grâce à la lampe juxtaposée au canon du fusil-blaster, Corran inspecta la pièce qui se trouvait de l’autre côté du trou. Elle était vide, calme, et surtout, elle comportait une issue.

Le pilote allait y entrer quand deux idées totalement inconciliables lui vinrent à l’esprit. Il était clair qu’il se trouvait dans une sorte de dépôt rempli de reliques Jedi. Or, l’endroit dont il s’était échappé ressemblait fort à une retraite de Moff impérial. Mais lequel d’entre eux aurait risqué sa position en gardant tant de matériel ennemi ? Seul un homme très puissant pouvait se le permettre, et ce genre de type ne se retirait pas sur des planètes isolées.

Il n’existait pas de Moff assez puissant pour se permettre de défier ainsi Vador et l’Empereur. Seul ce dernier aurait pu…

Corran en resta bouche bée. Si l’on ajoutait à ça l’heure de Coruscant…

Il s’effondra contre le mur.

C’est impossible. Je ne peux pas me trouver sur Coruscant. Je me rappelle avoir voyagé à bord d’un vaisseau. Mais si ça n’était qu’une simulation de plus ? Peut-être suis-je sur Coruscant, Isard voulant me faire croire le contraire. Ça expliquerait pourquoi personne n’a jamais trouvé Lusankya.

Corran se tourna vers l’homme qui gisait à terre.

Isard a suffisamment de pouvoir sur les autorités locales pour leur faire rechercher Derricote. Je me suis peut-être dégagé de ses griffes, mais la liberté est encore loin.

Il jeta un coup d’œil au comlink et songea à rechercher les fréquences militaires utilisées par l’Escadron Rogue. Mais il rejeta cette idée pour deux raisons.

Je n’ai pas les bons codes pour me faire entendre. Même si j’y parvenais, il faut tenir compte du traître. J’ai besoin de quelqu’un de confiance.

Il se cala sur une fréquence.

— Ici Corran Horn, annonça-t-il. Je ne suis pas mort, mais j’ai l’impression de l’être. Et j’aurais besoin d’aide pour ressusciter.