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Encourageant les bêtes à grands cris et utilisant son fouet – ce qu'il ne faisait jamais – Nicolas conduisit le carrosse à une allure infernale. Bauer, sur son énorme cheval, ouvrait la route. Louis voulait arriver à Vernon avant que les portes de la ville ne ferment. Ils avaient sept lieues à franchir sur un chemin détestable.
Dans la voiture, la chaleur était étouffante et les cahots d'une grande violence. Ballotté en tous sens, Fronsac avait baissé les glaces des portières mais les secousses ne l'empêchaient pas de réfléchir. Il songeait à Gaston, au fond d'une cellule depuis deux semaines. Dans quel état allait-il le retrouver ? Quelques jours dans certains cachots du Châtelet ou de la Bastille rendaient fou, faisaient perdre les dents ou brisaient un homme définitivement. Si son ami avait trop souffert, Mondreville le payerait cher, se promit-il. D'autres questions se bousculaient, qu'il avait du mal à ordonner. Une revenait sans cesse : pourquoi le lieutenant du prévôt des maréchaux de Rouen avait-il emprisonné Gaston ? Son ami avait-il découvert quelque fait mettant en cause Mondreville ? De plus, comment un tel emprisonnement avait-il pu rester secret ? Richelieu, tout-puissant, jetait sans barguigner quelqu'un à la Bastille et l'oubliait, mais un seigneur justicier ou un lieutenant de prévôt ne disposait pas d'un tel pouvoir.
Louis, seigneur haut justicier, connaissait les procédures pénales. Un greffier devait tenir un registre des audiences, même si la justice seigneuriale était souvent rendue dans des tavernes et ne concernait que les gens de peu puisqu'il s'agissait surtout d'affaires de payement de cens, de loyer, de braconnage, de tutelle, de rixe ou de coups et blessures. Certes, les seigneurs disposaient parfois d'un carcan ou d'un échafaud pour fustiger, mais ils préféraient encaisser des amendes ou confisquer des biens. De surcroît, les condamnations étaient susceptibles d'appel devant un prévôt ou un lieutenant criminel. La peine de mort ne pouvait s'appliquer, sinon avec l'aval du parlement de Paris. Quant à retenir un magistrat, un procureur de la prévôté de l'Hôtel du roi de surcroît, c'était impossible !
L'emprisonnement de Gaston ne pouvait avoir été gardé secret qu'avec des complicités. Louis songea au nouveau vicomte de Vernon qui assistait M. de Blaru, alors à la Cour. Ce magistrat se nommait Marc-Antoine Le Normand et venait d'être nommé. Pouvait-il être corrompu ?
Enfin, il y avait l'affaire Richebourg et l'étrange coïncidence que deux traîne-rapière portant des bottes, dont l'un était blessé, se soient trouvés précisément à la table de Bréval, chez qui vivait la mystérieuse Anaïs qui s'inquiétait pour Richebourg ! De surcroît, à la même table se gobergeait le fils de Mondreville qui savait Gaston en prison à Vernon. Impossible de déceler du hasard dans un tel concours de circonstances.
Dès lors, qui étaient réellement Canto de La Cornette, Pichon de La Charbonnière et ce sombre individu à la figure de fripon, assis avec Bréval et Mondreville ? Que préparaient ces gens ? Richebourg aurait-il découvert quelque sombre entreprise ? Mais pourquoi ne pas l'avoir tué sur place, comme le domestique ?
Sitôt Gaston délivré, Louis se jura de découvrir les mystères de cette disparition.
*
Vernon, ville frontalière avec la Normandie longtemps anglaise, était protégée par une enceinte bastionnée, des remparts et un château érigé sous le règne de Philippe Auguste, véritable forteresse défendue par un talus en pique, des tours et un donjon circulaire.
Ils arrivèrent en vue de la porte de Bizi à l'instant où son capitaine faisait fermer les battants du corps de gardes. Voyant arriver un carrosse à grand train, l'officier attendit. Louis lui présenta son passeport. Marquis de Vivonne et chevalier de Saint-Michel, on ne pouvait que le laisser entrer, malgré l'heure tardive.
S'orientant en fonction du donjon de Philippe Auguste dépassant des toits, ils arrivèrent rapidement devant le pont-levis du château fort construit à l'époque où la Normandie appartenait aux Plantagenêts. Cette forteresse, ainsi que le pont sur la Seine avec ses trois tours crénelées et le château de Vernonnet, appelé aussi des Tourelles, sur l'autre rive du fleuve, constituaient la barrière érigée par Philippe Auguste afin de protéger l'Île-de-France.
Mais la Normandie était française depuis longtemps et la barrière sans utilité. À la fin du siècle précédent, on avait construit un jeu de paume dans la grande salle du château et des moulins sur le bastion. Les tours servaient désormais de refuge aux corbeaux, les toitures percées laissaient voir leurs charpentes et seuls quelques salles et logements accueillaient la prévôté et les prisons. C'est là que logeait le prévôt Jacques Langlois.
Ce soir-là, lui et le vicomte recevaient les magistrats du parlement de Rouen, fidèles à la régente, qui avaient accepté de siéger à Vernon. L'année précédente, le duc de Longueville avait entraîné le parlement de Normandie dans sa révolte contre l'autorité royale, une fronde d'autant plus facile qu'à Rouen, comme à Aix, Mazarin avait vendu des charges de conseiller uniquement pour combler les besoins du Trésor. Et comme il y avait, dès lors, trop de magistrats, la chancellerie avait décidé de les faire siéger à tour de rôle, par semestre. Les parlementaires s'étant insurgés contre cette décision réduisant la valeur de leur office et de leurs revenus, pour se faire obéir des magistrats rétifs, la régente avait donc transféré le parlement de Rouen à Vernon, ville restée fidèle sous l'autorité du marquis de Blaru. Mais seule une partie des conseillers s'y était rendue en février 1649 ; essentiellement les magistrats ayant acquis les nouvelles charges vendues par Mazarin. C'est eux que le vicomte accueillait ce soir-là, pour les informer des tractations menées à la Cour.
Or, maintenant qu'ils avaient payé leur charge et que Longueville avait fait sa soumission, Mazarin, désireux d'obtenir le retour au calme dans le parlement de Normandie, envisageait de supprimer leurs offices !
*
Flanqué de deux tourelles ébranlées, le pont-levis n'avait plus été relevé depuis des années. Bauer s'y engageait quand, à l'intérieur de la porte ogivale, deux hommes tenant mousquet et hallebarde l'interpellèrent.
— Service de Sa Majesté ! lança le Bavarois afin de forcer le passage.
Soit ces fortes paroles impressionnèrent les deux gardes, soit le colosse les effraya, mais ils s'écartèrent devant la monstrueuse jument. Le carrosse suivit.
La cour était emplie de voitures, de chevaux et de chaises à porteurs. Le prévôt et le vicomte recevaient beaucoup de monde, ce qui se révélerait peut-être une complication pour le rencontrer, s'inquiéta Louis.
Sitôt le carrosse arrêté, il descendit. Déjà Bauer avait laissé son cheval à un valet. Les deux hommes approchèrent du perron de la grande salle où retentissaient éclats de voix et douce musique de viole. Devant la porte, quelques couples prenaient l'air, car il faisait effroyablement chaud à l'intérieur. Les hommes, vêtus de noir comme devaient l'être des magistrats ou des officiers, regardèrent ces inconnus avec un mélange de surprise et d'intérêt.
Ôtant son chapeau devant les dames, Louis demanda :
— Messieurs, l'un de vous pourrait-il prévenir monsieur le vicomte que le marquis de Vivonne souhaite lui faire passer quelques mots d'une extrême importance.
— Venez-vous de la Cour, monsieur ? s'enquit le plus âgé.
— Je ne peux parler qu'à monsieur le vicomte, monsieur.
— Je vais prévenir monsieur le prévôt, décida l'homme âgé.
Il entra en boitillant légèrement.
Louis bouillait, s'inquiétant de ce que préparait Mondreville. Peut-être était-il déjà en route pour extraire Gaston du château des Tourelles et l'emprisonner ailleurs. Fronsac hésitait à envoyer Bauer là-bas quand quelqu'un sortit de la salle. Dans la soixantaine, vêtu d'un pourpoint gris à taille haute, en camelot de Hollande, le nouveau venu affichait le regard distant de celui qui ne croit plus à grand-chose. Il était accompagné d'un jeune homme lui ressemblant beaucoup et portant épée.
— Je suis Jacques Langlois, prévôt de cette ville, fit le premier d'une voix chuintante. Voici mon fils Pierre, qui a la survivance de ma charge. Que voulez-vous, monsieur ?
— Pouvons-nous faire quelques pas, monsieur le prévôt ?
L'autre hocha la tête. Sous les regards déçus et curieux, ils s'éloignèrent des oreilles indiscrètes.
— Mon nom est Louis Fronsac. Je suis chevalier de Saint-Michel. Monsieur (il désigna Bauer) a été l'ordonnance de Monsieur le Prince. Je viens d'apprendre que vous détenez secrètement, dans les cachots du château des Tourelles, monsieur Gaston de Tilly, procureur à la prévôté de l'Hôtel du roi. Monsieur de Tilly est un magistrat on ne peut plus proche de monsieur le chancelier, et fort apprécié de Sa Majesté la régente et de Mgr Mazarin. Vous n'ignorez pas qu'une telle détention est un crime de lèse-majesté, avec toutes les conséquences que cela pourrait impliquer pour vous, pour monsieur le vicomte et pour la ville de Vernon comme ses habitants.
— Monsieur de Tilly ? s'étonna le prévôt. Gaston de Tilly ?
— Le connaissez-vous ?
— J'ai connu son père, Louis de Tilly. La dernière fois que je l'ai vu, c'était ici, justement. Louis était un gentilhomme que je tenais en grande estime. Sur mon honneur, je puis vous assurer que son fils n'est pas prisonnier ici.
— D'où tenez-vous vos affirmations, monsieur ? lança dubitativement le fils du prévôt à Fronsac.
C'était un homme dans la trentaine, au visage carré et énergique.
— Le fils de monsieur Mondreville vient de me l'avouer il y a à peine une couple d'heures. Son père, pour des raisons que j'ignore, a saisi monsieur de Tilly et l'a enfermé voici près de deux semaines dans un cachot du château des Tourelles.
— Je comprends mieux, chuinta le prévôt en hochant la tête. Monsieur Mondreville loue effectivement un cachot aux Tourelles, pour sa propre seigneurie. Mais ce que vous m'apprenez est fort ennuyeux. Car le prévôt Mondreville est un proche de monsieur le duc de Longueville… Cela aurait-il un rapport avec les troubles ?
— Non, monsieur. Je pense qu'il s'agit d'une affaire familiale.
— Nous allons tirer cela au clair. Laissez-moi vous conduire auprès de monsieur le vicomte. Les prisons de la ville sont ici, mais je n'ai aucune autorité sur les Tourelles, qui dépendent de monsieur le marquis de Blaru. Cependant monsieur Le Normand pourra vous remettre un ordre de libération. Ensuite, je réglerai cette affaire avec monsieur Mondreville, bien que sa seigneurie dépende de la vicomté de Mantes.
Sous les regards intrigués des curieux, ils revinrent vers la grande salle. Louis entra avec le prévôt et son fils, laissant Bauer et Nicolas dehors.
*
Malgré sa haute charpente, il régnait une chaleur insupportable dans la salle du jeu de paume qui disposait seulement de minuscules fenêtres du côté de la cour. Les murs avaient été décorés de tapisseries normandes. Un lustre rond, en fer, portait quelques dizaines de bougies. Des valets distribuaient verres de vin et petits pâtés posés sur des guéridons. Sur une estrade, quatre musiciens jouaient de la viole et du luth.
Dans l'assistance, nombreuse et bruyante, les éclats de voix fusaient, parfois pleins de colère et de ressentiment. Beaucoup de magistrats s'inquiétaient de leur prochain retour à Rouen. Par contre, les femmes, pour la plupart habillées de ces jupes droites avec busc et collets de dentelles que l'on appelait des modestes – ce qu'elles n'étaient pas, tant elles étaient passementées de fils d'or et d'argent – avaient hâte de retrouver la grande ville, ses bals et ses fêtes. Si les hommes se drapaient de noir, chez les épouses et leurs filles, les couleurs des soies, satins et taffetas rivalisaient de variété. Quelques-unes avaient crêpé leurs cheveux avec cette fine frisure ovale autour de la tête que l'on nommait la coiffure à bouffons, d'autres y avaient ajouté une garcette. Toutes étaient maquillées d'une épaisse couche de céruse.
Le prévôt se dirigea vers un groupe entourant un homme rondelet, au visage potelé barré d'une belle moustache blonde en queue de canard. Il était vêtu de soie noire et arborait une épée de parade au côté. Quand il vit le prévôt et son fils accompagnés d'un inconnu, il leur lança un regard interrogateur.
— Monsieur le vicomte, fit le premier en s'inclinant, monsieur le marquis de Vivonne souhaite vous dire quelques mots en privé.
Le premier magistrat de la ville baissa ses lourdes paupières sans pour autant quitter Fronsac des yeux. Puis son regard tomba sur les galants noirs.
— Je crois avoir entendu parler de vous, déclara-t-il lentement. Êtes-vous monsieur Louis Fronsac ?
— En effet.
Le vicomte adressa un signe à ses compagnons et s'éloigna vers une partie de la salle où il n'y avait personne.
— Qu'avez-vous à me dire, monsieur ?
En quelques mots hachés, Louis raconta ce qu'il savait sur l'emprisonnement de Gaston. Le vicomte l'écouta sans afficher la moindre expression. Mais quand le marquis de Vivonne eut terminé, il laissa tomber d'un ton dubitatif, presque désobligeant.
— Votre histoire… m'étonne beaucoup, monsieur le marquis. Il n'y a aucun prisonnier en ce moment aux Tourelles.
— Monsieur le vicomte, je ne repartirai pas sans monsieur de Tilly. Je vous le répète, monsieur de Tilly est au plus près de monsieur le chancelier. Et Mgr Mazarin l'apprécie particulièrement. Si vous refusez de me laisser entrer aux Tourelles, j'en conclurai que vous cautionnez son emprisonnement. Auquel cas, le compagnon qui m'attend dehors partira sur-le-champ pour Paris et reviendra demain avec un détachement des cent-suisses. Non seulement monsieur de Tilly sera libéré, mais vous serez mis en cause dans un crime de lèse-majesté.
Le visage poupin se décomposa.
— Vous… vous me menacez ?
— Non, je vous mets cordialement en garde. Puis-je donc obtenir un ordre écrit pour faire sortir monsieur de Tilly du château des Tourelles ? Monsieur le prévôt m'accompagnera.
Le vicomte maîtrisa sa colère. Vernon et le château dépendaient du bailliage de Gisors cédé par François Ier à Renée de France, puis transmis au duc de Nemours, époux de la sœur du duc de Beaufort. M. Le Normand avait payé sa charge seulement deux cent mille livres en offrant un donatif1 à l'intendant du duc. Si la reine et la Cour se déclaraient contre lui, il n'était donc en rien certain de garder la confiance de M. de Nemours. Pourquoi prendre le risque de tout perdre en soutenant Mondreville qui, après tout, n'était que le locataire d'un cachot ? Il fit un signe rageur à un valet.
— Portez-moi une écritoire !
Le valet revint rapidement avec une table pliante tandis qu'un second domestique apportait sur un plateau cornet d'encre, plumes, canifs, feuilles, cire et réchaud à bougie.
Restant debout, sans même retailler la plume, Le Normand écrivit rageusement :
« Au concierge et sergent du château des Tourelles,
« M. Fronsac est autorisé à faire sortir du château de Vernonnet tout prisonnier qui pourrait y avoir été enfermé par M. Mondreville.
« Fait à Vernon, le vendredi 13 août 1649.
« Le Normand, vicomte. »
Il sortit ensuite un sceau d'une poche de son pourpoint de soie vert, fit chauffer la cire et cacheta le pli.
— Voici l'ordre que vous me demandez. Si ce procureur du roi est effectivement enfermé dans le cachot de monsieur Mondreville, j'en ignore tout et j'en dégage, par avance, ma responsabilité. Monsieur le prévôt vous portera l'assistance nécessaire.
Sans attendre de réponse, il leur tourna le dos et retourna vers ses amis.
*
Fronsac s'adressa au prévôt qui dissimulait un sourire.
— Allons-y ! décida-t-il.
Dans la cour, il proposa au père et au fils de monter dans son carrosse. Le prévôt accepta et s'assit à côté de lui, son fils en face.
— Vous connaissiez bien le père de Gaston de Tilly ? s'enquit Louis, tandis que la voiture franchissait le pont-levis, Bauer suivant à cheval.
— Bien ? Non ! Mais nous nous rencontrions souvent. Je crois pouvoir affirmer que nous avions une certaine estime l'un envers l'autre. Il était très apprécié de monsieur de Sully. Sa disparition m'a beaucoup affligé.
— Gaston de Tilly est mon ami depuis vingt-cinq ans, monsieur le prévôt. Pourtant, il est revenu à Tilly sans m'en parler. Il voulait enquêter sur la mort de son père.
— Enquêter ? répéta le prévôt, comme s'il n'avait pas compris.
— Vous avez bien entendu. Son oncle, décédé il y a peu, lui avait laissé une lettre dans laquelle il s'interrogeait sur les circonstances de l'accident au cours duquel étaient décédés ses parents.
— Je me souviens que leur voiture avait versé…
— Que savez-vous d'autre ?
— Sur l'accident lui-même, rien de plus, mais sur ce qui s'est passé à ce moment-là, je n'ai rien oublié…
Il parut hésiter.
— Il venait de se produire un vol important.
— Un vol… De quoi s'agissait-il ?
— Trois jours avant la mort de monsieur de Tilly, on avait détourné un transport de la recette des tailles de Normandie. Monsieur de Tilly avait retrouvé un des voleurs, mort, hélas ! tué par ses complices. J'avais fait pendre son corps ici.
Le carrosse s'était arrêté devant la porte fortifiée du pont. Tandis que les gardes de nuit l'ouvraient, le prévôt désigna la potence dressée.
— On pourrait avoir tué monsieur de Tilly pour que les investigations s'arrêtent ? osa Louis.
— Non, car monsieur de Tilly n'était pas seul à enquêter, il y avait aussi le vicomte de l'Eau, le lieutenant criminel, moi-même et encore le prévôt des maréchaux. Nous avons d'ailleurs poursuivi les recherches après sa mort, mais l'affaire est très vite tombée dans l'oubli, car une dizaine de jours plus tard, le maréchal d'Ancre, alors gouverneur de Normandie, était tué. Après le vol, nous craignions tous pour nos charges, mais le jeune roi a eu d'autres préoccupations que de nous sanctionner. Et puis la confiscation de la fortune de Concini a largement compensé la perte des tailles…
Pendant que son père parlait, Pierre Langlois considérait Louis Fronsac avec perplexité. Le marquis de Vivonne renouait minutieusement un de ses galants noirs. Extrêmement concentré dans cette opération, il paraissait abîmé dans de profondes réflexions et peu intéressé par ce qui se racontait. Jacques Langlois s'en aperçut à son tour et se tut, quelque peu froissé par cette attitude indifférente.
Louis leva alors la tête et le gratifia d'un chaleureux sourire.
— Ne croyez pas que je ne vous écoute pas, monsieur le prévôt. Vous venez de me donner un fil de l'écheveau, expliqua-t-il avec affabilité.
— Quel écheveau ? s'étonna Langlois, interloqué.
— Celui qui me permettra à coup sûr de tisser l'histoire de l'assassinat des parents de mon ami Gaston.
1 Un pot-de-vin.