61) – Je viens de me rendre compte que je n’ai pas encore raconté comment je m’étais retrouvé dans cette cellule. S’il est vrai que ces notes doivent me servir à ne pas devenir fou, il est peut-être bon de raconter tout ce que je me rappelle sur ce qui est arrivé comme si je m’adressais à un lecteur futur et improbable. Permets-moi, lecteur, cette nouvelle interruption. Je sais que tu es beaucoup plus désireux de poursuivre ta lecture que d’écouter le récit de mes vicissitudes, mais rappelle-toi que, si marginal que tu me voies là, en bas, tu me dois un peu d’attention en remerciement de mon fructueux labeur, sans lequel tu ne pourrais apprécier l’œuvre mentionnée qui te plaît tant. Ainsi donc, lis-moi avec patience. On se rappellera que la nuit où j’ai achevé de traduire le chapitre précédent, je me suis proposé d’attraper mon visiteur inconnu, le mystérieux falsificateur du texte sur lequel je travaille. Dans ce but, j’ai éteint les lumières de la maison et feint de me coucher, mais je suis en fait resté aux aguets dans le séjour, caché derrière une porte, attendant sa "visite". Au moment où j’étais presque sûr qu’il ne viendrait plus. j’ai entendu un bruit. J’ai penché la tête par la porte entrouverte, et j’ai eu juste le temps de distinguer une ombre qui se jetait sur moi. Je me suis réveillé avec un fort mal de tête, et je me suis vu enfermé entre ces quatre murs. Quant à la cellule, je l’ai déjà décrite, et je renvoie le lecteur intéressé à une note précédente. Sur la table, se trouvaient le texte de Montalo et ma propre traduction, qui s’arrête au chapitre Sur ma traduction, une note écrite sur une feuille volante revêtue d’une fine calligraphie : "TU N’AS PAS BESOIN DE SAVOIR QUI JE SUIS. APPELLE-MOI « ANONYME ». MAIS SI TU VEUX VRAIMENT SORTIR D’ICI, CONTINUE TA TRADUCTION. QUAND TU L’AURAS TERMINÉE, TU SERAS LIBRE." C’est pour l’instant le seul contact que j’aie eu avec mon ravisseur anonyme. Enfin, celui-ci et sa voix asexuée, que j’écoute de temps en temps à travers la porte de la cellule, m’ordonner : "Traduis !" C’est ce que je fais. (N.d.T.) ↵