Dans ce chapitre :
Les meilleurs conseils pour réussir le jour de l’épreuve…
… et pour réussir à ne pas rater !
Arriver frais et dispo
Il n’y a pas d’activité intellectuelle efficace sans bonne forme physique et sans tranquillité d’esprit.
Les révisions de dernière minute sont déconseillées : elles vous affoleraient inutilement en vous mettant la tête au-dessus de l’abîme de vos ignorances. Mangez bien, dormez bien, mettez-vous en état de calme olympien (le gore et le porno après minuit sont à éviter). Ne buvez pas d’alcool avant l’épreuve pour vous donner courage (cela se voit…). Pas de fumette non plus…
Le cerveau, même le vôtre, est de tous les organes celui qui dépense le plus d’énergie, aussi emportez avec vous friandises et boissons. Évitez tout de même les traces de chocolat fondu sur les copies !
La découverte des sujets
Les sujets sont choisis de telle manière qu’au moins une notion du programme soit clairement identifiée par les candidats. Repérez la ou les notions du programme en jeu.
Ainsi y a-t-il un sujet « sur » le bonheur ou un texte « sur » la vérité. Mais il s’agit de penser, et non de réciter. C’est pourquoi il est notifié à la commission chargée de choisir les sujets d’éviter les rédactions qui, empruntant littéralement les formules du programme, paraissent inviter les candidats à reproduire un cours, ainsi que l’emploi, dans le libellé des sujets, de termes techniques ou de termes exigeant la connaissance d’une doctrine philosophique déterminée (vous ne courez pas le risque de trouver « immanent » ou « transcendantal » dans la question posée, et vous pouvez faire votre dissertation même si vous ne savez rien de Platon ou de Kant).
C’est pourquoi il convient de bien lire l’intitulé des questions et le texte. Chaque mot compte, surtout dans les sujets de dissertation. Bien sûr, on évitera de prendre un sujet qui paraîtra trop obscur ou incertain.
Une fois que vous avez fixé votre choix, tenez-vous y. Il est catastrophique de se rendre compte après deux heures qu’on a fait fausse route, et de changer de sujet.
Ce qu’il faut faire
Bien lire tous les sujets, et choisir parmi eux, pas nécessairement celui qui vous plaît le plus, mais celui sur lequel vous aurez les choses les plus intéressantes à dire. Le sujet qui vous « dit quelque chose » peut être un piège pour vous, car il peut vous amener à dire ce que vous savez déjà au lieu d’exprimer ce que vous penserez (car on ne sait pas toujours ce qu’on pense avant de l’écrire : voir le chapitre sur le langage). Inversement, un sujet sur lequel vous n’avez pas d’idées préconçues pourra peut-être vous permettre d’être plus performant (n’oubliez pas que ce n’est pas l’erreur mais la banalité qui est le péché mortel de la philosophie).
Utiliser les quatre heures qui sont à votre disposition. Bien sûr, vous avez tous entendu parler d’untel qui l’an passé a eu 14 et est parti au bout d’une heure et demie. N’oubliez pas que l’épreuve dure quatre heures, et que vous êtes jugé(e) en fonction aussi de ce temps. Mieux vaut faire le sacrifice d’une heure de glande plutôt que celui de plusieurs points à une épreuve d’examen. Dites-vous bien qu’en philosophie on sait toujours. Prenez-vous la tête au moins une fois dans votre vie ! Pensez à toutes les éventualités, à toutes les réponses possibles. Il y en a là-dedans beaucoup plus que tout ce que vous pouvez imaginer (ceux qui ont un peu lu Freud le comprendront facilement).
Bien gérer son temps : un quart d’heure pour le choix du sujet, une heure et demie pour la rédaction du plan et du brouillon, deux heures pour la rédaction ; un quart d’heure pour la relecture finale (indispensable, pour éliminer les bourdes d’orthographe).
L’idéal est de rédiger l’introduction et la conclusion au brouillon et de se contenter d’un plan (précis, tout de même, avec sous-parties, phrases entières, références et citations) à partir duquel une rédaction improvisée pourra être faite. Il n’y a pas de règle absolue en la matière mais une copie de série L peut difficilement comporter moins de quatre pages écrites (soit la feuille entière de l’examen). Pour les séries S et ES, des copies de trois pages sont plus facilement admises. Pour les candidats des séries
technologiques, essayez d’aller jusqu’à la troisième page. Les correcteurs en seront émus jusqu’aux larmes.
Soigner la présentation. La vue du correcteur a peut-être encore baissé cette année, ménagez-la donc ! Si vous avez une écriture difficile (litote, etc.), efforcez-vous de la rendre plus lisible (ce n’est pas pour vous que vous écrivez).
Sauter une ligne après l’introduction et après chaque partie du développement (mais pas plus : ne sautez pas de ligne après chaque paragraphe pour faire croire que vous avez beaucoup écrit, ne donnez pas à penser à votre correcteur que vous avez attrapé la tremblante du mouton juste avant de venir). Évitez les fantaisies d’écriture – type violet fluo ou les petites fleurs à la place des points sur les i (ce dernier conseil s’adresse davantage aux candidates, plus poétiques que leurs camarades masculins).
Porter une attention particulière à l’introduction et à la conclusion. L’expérience montre qu’on peut avoir déjà une idée de la note finale rien qu’en lisant l’introduction (tous les professeurs le diront dans l’intimité). C’est par l’introduction que le candidat montre s’il a ou non compris le problème posé.
La conclusion est également très importante : elle déterminera l’impression sur laquelle restera le correcteur. C’est pourquoi il est conseillé de la rédiger à l’avance. Rien de plus calamiteux qu’une conclusion bâclée en deux lignes quelques secondes avant que le surveillant n’arrache la copie des mains ou, pire encore, qu’une conclusion absente.
Les titres des ouvrages cités sont soulignés. Les titres comportent des majuscules à l’article et au premier mot (exemple : La République), au premier mot seul lorsqu’il n’y a pas d’article (Critique de la raison pure).
Les citations sont entre guillemets. Il est inutile d’écrire les noms propres en capitales.
Ce qu’il ne faut pas faire
Se contenter de dire ce qu’on sait « à propos » du sujet. L’épreuve de philosophie n’est pas une épreuve de connaissance : les connaissances que vous avez acquises grâce à vos cours et à vos lectures doivent être mises au service d’un travail de pensée qui est d’argumentation et de réfutation, d’analyse et de synthèse.
Prendre le sujet comme simple prétexte pour traiter d’autre chose. Soyez donc attentif à tous les mots de la question (« L’histoire a-t-elle un sens ? » n’est pas un sujet sur l’histoire en général, un texte de Spinoza sur la liberté ne sera pas un prétexte à parler de la liberté en général, etc.).
Croire que les citations et les références aux grands auteurs sont attendues par les correcteurs. Vous pouvez très bien rédiger une excellente dissertation sur la notion de devoir sans faire référence à Kant. Encore une fois, un travail de philosophie n’est pas un devoir d’histoire ou de géographie.
Ne pas dépasser le niveau des opinions communes. Tous les sujets de dissertation et tous les textes, sans exception aucune, posent des problèmes qui sont matières à controverses (la philosophie n’est ni la science, qui n’admet que des solutions vraies, uniques, ni la technique, qui n’admet que des résultats efficaces uniques). S’il y a philosophie, il y a argumentation pour et contre, affirmation et objection. Rien ne doit être pris ni asséné comme évident.
Faire la peau de Platon ou de Descartes en deux coups de cuiller à pot ! Un grand nom n’est ni à vénérer (il ne peut servir de preuve) ni à démolir. N’oubliez pas qu’on ne vous demande pas de refaire le monde en quatre heures, mais plus humblement de réfléchir sur des problèmes qui ont occupé une bonne partie de la vie de ces auteurs qui, pour être nos devanciers, n’étaient certes pas nés de la dernière pluie…
Parler de soi. Un travail de philosophie n’est pas un blog. Certes, vous pouvez utiliser des expériences vécues et y faire référence, mais sans que cela tourne à la confession. D’une manière générale, il convient de préférer le « nous » au « je ».
Écrire des phrases trop longues qui noient le lecteur dans le chagrin ou trop courtes qui le ballottent désagréablement.
Faire usage de termes familiers et d’abréviations. Dites « amis » plutôt que « copains » et « discutable » plutôt que « taré ».
Et on rappelle que « etc. » s’écrit « etc. » et non « ect. ».
Les erreurs fatales à éviter
La pensée philosophique – on devrait dire, la pensée tout court – commence avec la critique de l’opinion, c’est-à-dire des préjugés, des idées toutes faites, des énoncés mal pensés. Par paresse ou par ignorance, nous nous contentons souvent de formules qui ne sont pas des pensées, mais que nous prenons pour telles.
Préjugés, lieux communs, erreurs, illusions, idées préconçues sont répétés des milliers de fois à des milliers d’exemplaires. Leur présence est pour le correcteur un signe, un mauvais signe. Il est impératif de les éviter. Et pour cela il faut les connaître.
Ne pas oublier que ni les dictons ni les proverbes, ni même les citations des grands auteurs, ne sont d’indubitables vérités. Le prêt-à-penser, comme le prêt-à-porter, est de mauvaise qualité.
Tics de langage, pensées paresseuses
Depuis toujours (variante : de tout temps) : les deux premiers mots d’une foule de copies. Expression à éviter impérativement pour deux raisons : elle est banale et elle est fausse. De quoi pourrait-on dire en effet « depuis toujours », puisque tout a commencé un jour ?
Corollairement, il convient de se méfier de l’adverbe jamais : la nature et l’histoire sont vastes, et la réalité change.
Réaliser signifie « rendre réel ». Ne pas l’utiliser à la place de « prendre conscience ».
Le progrès est une idée, pas un fait. On n’est pas contraint d’y croire. Éviter de l’hypostasier (de le prendre pour une réalité autonome à la manière d’une force occulte).
La société est très souvent hypostasiée comme s’il s’agissait d’un être doté de conscience, d’intelligence et de volonté. La société est d’abord un terme commode pour désigner un ensemble d’individus vivant selon des coutumes et des lois globalement semblables.
La nature est elle aussi hypostasiée. Évitez de lui attribuer une personnalité, avec intelligence et volonté (style : la nature « se venge » de ce qu’on lui fait subir). Évitez les majuscules de majesté style « Dame Nature ».
Le bon sens est souvent bien mauvais. Que la Terre soit immobile, que les femmes n’aient pas d’âme, que les Africains soient des singes, c’était, jadis, une question de « bon sens ».
La tolérance est une valeur morale et politique, pas une valeur intellectuelle. Les erreurs et les absurdités sont intolérables, la barbarie aussi.
Les « on dit » les plus affreux
Tout est affaire d’opinion. Toutes les opinions se valent. Cette position est intenable proprement, car si l’on admet que toutes les opinions se valent, alors on admettra que l’opinion selon laquelle toutes les opinions ne se valent pas vaut l’opinion selon laquelle toutes les opinions se valent.
Donc, on ruine son opinion dans le moment même où l’on prétend la glorifier. Même chose pour l’énoncé « à chacun sa vérité » : qu’advient-il si ma vérité, c’est de dire qu’« à chacun sa vérité » est une idiotie ?
Tous les goûts sont dans la nature. Il faut être tolérant. Et si le goût de celui-là, c’est de violer ou de torturer les enfants ? Il y a des gens qui dévorent leurs propres excréments (cette perversion s’appelle coprophagie) : il est douteux qu’ils fassent un dîner aussi fin que s’ils avaient mangé à La Tour d’Argent, qui reste l’un des meilleurs restaurants de Paris. La tolérance est une valeur politique qui ne s’applique qu’au domaine idéologique (religion, politique). Parler de tolérance à propos d’idées et de goûts en général n’a aucun sens rationnel.
C’est le progrès ! Un progrès est par définition positif (il nous apporte un plus et/ou un mieux). Si une découverte ou une intervention est dommageable pour l’homme, alors ce n’est pas un progrès : juste une innovation.
Tout est art, tout peut être art. On entend cela souvent dans la bouche de ceux qui ne font pas dans la dentelle. Il est rassurant de penser que le bruit qu’on fait peut être de la musique, et que les taches qu’on fait peuvent être de la peinture. Dira-t-on que celui qui a roté trois fois et qui l’a compté est un mathématicien ? Le domaine de l’art est celui de la transcendance de la valeur : laissons les démagogues et les ignorants dans l’illusion que les graffitis du métro sont de l’art : ils ne le sont pas plus que les pétarades des grosses cylindrées ne sont de la musique.
Les goûts sont subjectifs. Il est évident qu’un goût est lié à un sujet sensible : mais on pourrait le dire aussi de n’importe quel énoncé scientifique. Les goûts ne sont pas aussi personnels qu’on le croit : 200 millions d’Américains, sans doute plus, aiment le Coca-Cola et croient que c’est leur goût personnel. Un goût n’est pas quelque chose d’inné : il s’acquiert, se transforme, se forme et se déforme. Quel goût un aveugle peut-il avoir pour la peinture, un sourd pour la musique ?
Il y a du bon et du mauvais en tout. Pensée idiote : quel est le bon côté d’Auschwitz, et le mauvais d’une sonate de Mozart ? Quel est le bon du mauvais et le mauvais du bon ?
Être libre, c’est faire ce qui nous plaît. Voir chapitre 25.
La liberté, c’est faire ce qu’on veut. Voir chapitre 25.
La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres. Voir chapitre 25.
Tout ça est une question de mots. On ne croit pas si bien dire. Car il n’y a pas de pensée ni d’action sans mots. Quels sont ceux qu’on appelle « hommes d’action » ? Ceux qui parlent : chefs, entrepreneurs, dirigeants. Faire, c’est faire faire, et pour faire faire, il faut parler. On croit souvent qu’il y aurait une idée, une pensée avant et en deçà du langage. C’est une illusion. Une pensée informulée est une pensée vague, souvent c’est une absence de pensée.
La vérité n’est pas toujours bonne à dire. Mais la vérité n’existe que formulée dans et par le langage. Cette proposition revient donc à dire : la réalité nous fait peur, courage ! fuyons !
Le principal, c’est d’être bien dans sa tête. En somme, mieux vaudrait être une ordure tranquille qu’un brave type tourmenté !
Des goûts et des couleurs, on ne dispute pas. Le goût n’est pas inné, il s’éduque, se forme ou se déforme. Aimer, c’est connaître. D’un autre côté, admettons que les goûts soient subjectifs, mais alors, justement, il faudrait en discuter. Car si l’on ne parle pas de ce qui pose problème, de quoi alors parlera-t-on ? Il est certain que ce n’est pas de 2 fois 2 font 4 qu’on dispute.
Les absurdités philosophiques
Les sociétés non civilisées n’existent que chez les animaux. À propos des hommes, l’expression jure comme « cercle carré » ou « couleur transparente ». Toute société humaine a par définition une civilisation ; point n’est besoin pour cela de portables.
Société peu civilisée n’est pas de meilleure veine : la civilisation n’est pas une température susceptible de monter ou de descendre. Le Papou n’a pas de 4 x 4, mais il a une technique, un art, des lois, une langue, des coutumes, des croyances : il n’en faut pas davantage pour avoir une civilisation. Sur ce plan, le plus intelligent des animaux est infiniment au-dessous du plus abruti des hommes.
Vie naturelle (à propos de l’être humain). À strictement parler, rien de ce qui est humain n’est naturel. La culture façonne les besoins, le corps, les émotions. On ne naît plus, on ne vit plus, on ne meurt plus de façon « naturelle ».
Les races humaines. Il n’y a des races que chez les animaux (domestiques qui plus est). Le racisme commence précisément avec l’affirmation qu’il existe des races au sein de l’humanité. Si l’on veut parler de l’humanité sur le plan biologique, mieux vaut dire « le genre humain » ou « l’espèce humaine » plutôt que « la race humaine ». Si l’on veut parler des peuples, il faut écrire « ethnies ». Si l’on veut parler de l’apparence physique (couleur de la peau, cheveux, etc.), il faut dire : « types physiques ».
La loi de la jungle, qui désigne un prétendu état de concurrence brutale entre les individus (ou les espèces), où les seules relations seraient celles de la proie et du prédateur, n’a existé nulle part, dans aucun écosystème et dans aucune société. Les liens de solidarité spontanée (naturelle) ou volontaire (humaine) ont une importance au moins aussi grande.
Un mauvais progrès. Un progrès est bon, par définition. Si l’innovation est mauvaise, c’est donc que ce n’est pas un progrès.
Ne pas confondre
Obligatoire et nécessaire L’obligation est d’ordre moral et juridique, la nécessité d’ordre logique et physique. Le lion n’est pas « obligé » de manger de la viande, il est « contraint » de le faire.
Création et origine L’origine est un fait, la création une théorie. On ne peut écrire « la création du monde » (ou de l’homme) comme s’il s’agissait d’un fait. C’est une croyance. On dira : « l’origine du monde » (ou de l’homme). On peut parler de « création », mais à condition de préciser qu’il s’agit d’une croyance.
Écologie et écologisme L’écologie est une science (celle des relations entre les êtres vivants et leur milieu), l’écologisme est une idéologie (politique de protection de la nature).
Destin et déterminisme Le destin est une idée, un objet de croyance, pas une réalité objective. On n’est pas forcé d’y croire. Le déterminisme est une théorie « rationnelle » (philosophique) selon laquelle les événements naturels se suivent dans un ordre nécessaire (principe de causalité).
Naturel et bon Tout ce qui est naturel n’est pas bon et ce qui est bon n’est pas nécessairement naturel. Les microbes sont naturels et la plus belle musique ne l’est pas.
Spontané et inné Un acquis peut finir par devenir spontané (exemples : l’embrassade et la poignée de mains sont devenues spontanées, elles sont pourtant des conventions sociales acquises).
Évolution et histoire L’évolution est naturelle (biologique), tandis que l’histoire est humaine.
Relatif et subjectif De ce qu’un phénomène soit relatif (à un observateur donné, à un instrument de mesure, ou à une table des valeurs) il ne s’ensuit pas qu’il est subjectif. Si tout ce qui est subjectif est relatif, l’inverse n’est pas vrai.
Droit et justice Presque toujours le droit a été injuste (l’esclavage a été légitimé par tout un ensemble de lois).
Inconscient et inconscience L’inconscience est un état (exemple : le coma), l’inconscient est une structure psychique reconnue par la psychanalyse (mais contestée par certains).
Normal et naturel Qu’elle soit une moyenne statistique ou un idéal à atteindre, la norme est mesurée ou déterminée par l’homme et non par la nature. « Le crime est normal », disait Durkheim, en ce sens qu’il n’y a pas de société sans crime. Cela ne signifie évidemment pas que le crime soit naturel.
Les erreurs historiques les plus courantes
Galilée n’a pas découvert que la Terre est ronde et il n’est pas mort pour cela. Depuis longtemps les hommes connaissaient la nature sphérique de celle-ci (en mer et du haut d’une montagne, l’horizon est circulaire) ; il faut distinguer circulaire et sphérique. Galilée avait affirmé que la Terre tourne un siècle après que des navigateurs portugais eurent effectué le premier tour du monde en bateau, et Galilée est mort dans son lit. L’Église catholique a été suffisamment bête et méchante pour qu’on n’aille pas la charger de victimes supplémentaires.
Einstein n’a pas inventé la bombe atomique et il ne l’a pas lancée sur Hiroshima. Einstein était un physicien qui a trouvé des lois qui furent ensuite à la source de l’invention de la bombe atomique (faite par d’autres que lui).
Picasso n’est pas un peintre abstrait. Il a déformé ses sujets mais les a gardés : il est resté un grand peintre figuratif.
Les enfants sauvages n’ont en fait jamais existé. Il est physiquement impossible que des enfants survivent plus de quelques jours dans la nature, loin et hors de toute société humaine.
L’état de nature est une théorie, pas un fait. C’est une hypothèse théorique, et non une période historique ou préhistorique.
L’homme reste toujours le même. Il y a pourtant de sacrées différences entre l’australopithèque et l’homme moderne…
Il y a toujours eu la guerre. Il n’y a jamais eu « toujours ». L’univers est né, il disparaîtra ; la Terre est née, elle sera anéantie ; l’homme est né, il mourra. Même les étoiles, que durant des millénaires les hommes ont prises pour des signes d’éternité (chez les Grecs, elles étaient des dieux), disparaîtront.
La guerre est née avec l’agriculture, la propriété, l’accumulation primitive du capital (la fameuse guerre du feu est une fiction littéraire, elle n’a historiquement jamais existé). La guerre est née il y a 10 000 ans. L’homme est cent fois plus vieux qu’elle. Il y a soixante ans, on entendait dire que les Français et les Allemands se feront toujours la guerre !
La loi du plus fort. Qui est le plus fort dans la nature ? L’insecte est plus fort que le microbe, l’oiseau plus fort que l’insecte, le lion plus fort que l’oiseau, mais le microbe peut faire mourir le lion. La force physique n’assure pas le pouvoir. Dans les sociétés, c’est souvent le plus vieux (donc le moins fort physiquement) qui a le pouvoir. La force n’est que le pouvoir des faibles (aucun enfant de la bourgeoisie américaine n’est devenu champion du monde de boxe).
Les hommes ont toujours lutté pour la liberté et la justice. Totale contre-vérité : c’est la résignation et non la révolte qui est l’état normal des humiliés et des offensés. « Il y a une chose que les hommes préfèrent à la liberté, c’est la servitude » (Dostoïevski). Le peuple n’a presque jamais fait la révolution lui-même, on l’a presque toujours faite pour lui. Parce que le peuple ne veut rien, le droit de vote, la richesse, la santé, l’hygiène ont été voulus pour lui, à sa place.
Noubliez pas ! Votre performance philosophique sera jugée à votre capacité à vous libérer des idées reçues.