Chapitre 1

Rédiger une (bonne)

dissertation de philosophie

Dans ce chapitre :

Comment faire un plan de dissertation

Tous les sujets possibles à portée de main !

Des exemples à imiter

Et, en bonus, deux contre-exemples : des vraies copies de bac… les plus nulles !

Les deux premières règles

Règle numéro 1 : bien lire la question

Le sujet de dissertation se présente toujours sous la forme d’une question. Il faut absolument éviter la précipitation (c’est une règle de la méthode de Descartes) : ce n’est pas parce que le mot « liberté » figure dans la question que le sujet porte sur la liberté en général. Tous les mots comptent : « À quelles conditions la liberté est-elle possible ? » ne signifie pas la même chose que « La liberté est-elle possible ? ». Si tous les sujets ont un rapport direct avec une ou plusieurs notions du programme, aucun sujet n’est une question de cours. On demande au candidat non pas de dire ce qu’il sait, mais de dire ce qu’il pense à partir de ce qu’il sait.

Règle numéro 2 : faire un plan

Une dissertation de philosophie est une réflexion ordonnée. Elle comprend toujours :

une introduction ;

un développement (en 2, 3 ou 4 parties) ;

une conclusion.

Le plan doit être rigoureusement établi avant que ne commence le travail de rédaction proprement dit. Il est pratiquement impossible de rédiger une dissertation de philosophie à l’aveugle, sans plan préconçu.

Rédiger l’introduction

C’est une partie à soigner particulièrement, car c’est elle qui montre au correcteur si le sujet a été compris ou non. Elle a pour but d’expliquer le sens de la question posée. Ce qui peut se faire de deux façons :

La question est posée autrement. Exemple, la question « L’histoire n’est-elle qu’un éternel recommencement ? » peut être mise sous la forme : « Au-delà de l’apparente nouveauté des événements, l’histoire ne ferait-elle que reproduire les mêmes faits ? » Il faut expliquer pourquoi la question peut se poser.

Les termes sont définis. Par exemple, sur l’histoire, on attend que le candidat lève l’équivoque, « histoire » en français signifiant deux choses au moins : la réalité du passé humain et la discipline qui l’étudie. Pour l’exemple cité, le candidat prendra soin de préciser que la question porte sur l’histoire comme réalité et non sur l’histoire comme science.

Une introduction ne devrait pas faire moins d’une quinzaine de lignes.

Allez directement au sujet. Ne remontez pas au Déluge, ne tournez pas autour du pot.

Doit-on annoncer le plan en fin d’introduction ?

Sur ce point, les professeurs ne sont pas d’accord eux-mêmes : certains le conseillent, d’autres le déconseillent. Le meilleur serait donc d’adopter une solution moyenne : le faire mais avec souplesse et légèreté !

Le développement

C’est le corps de la dissertation. Il comprend 2, 3 ou 4 parties – jamais moins de 2, mais pas plus de 4.

Pourquoi au moins deux parties ? Parce qu’une question philosophique, à la différence d’une question scientifique, est matière à controverse : il y a toujours plusieurs réponses possibles à la question posée.

On peut diviser les questions en deux groupes : il y a celles qui demandent plusieurs réponses qui se complètent. Exemple : « À quoi reconnaît-on une œuvre d’art ? » Dans ce cas, les réponses s’additionnent et ne se contredisent pas. Il y a, en second lieu, les questions qui demandent au moins deux réponses qui s’excluent. Exemple : « Une œuvre d’art doit-elle être nécessairement belle ? ».

Appelons « analytiques » les premiers sujets et « dialectiques » les seconds.

Les sujets analytiques

Ils sont de loin les moins nombreux et tendent même à disparaître complètement. On en parlera donc par curiosité historique. Ce sont ceux qui réclament du candidat le plus de connaissances précises. La qualité attendue est celle de l’exhaustivité : la meilleure copie sera celle qui aura fourni toutes les réponses possibles.

Le développement d’un plan analytique aura 2, 3 ou 4 parties – rangées par ordre d’importance : il faut commencer par les idées les plus évidentes, les plus banales, pour terminer par les moins évidentes, les moins connues. À la question « À quoi reconnaît-on une œuvre d’art ? », les réponses du type « à sa beauté » ou « à sa réputation » sont plus banales que, par exemple, le fait qu’une œuvre d’art ne puisse pas être autre chose qu’une œuvre d’art, qu’elle a, comme on dit, une « fin en soi ».

Les sujets dialectiques

La totalité des sujets est aujourd’hui de ce type. Ce sont les questions qui invitent à examiner un « pour » et un « contre », un « oui » et un « non ». Exemple : « Une œuvre d’art est-elle nécessairement belle ? » Thèse : oui, une œuvre d’art est nécessairement belle. Antithèse : non, une œuvre d’art n’est pas nécessairement belle.

Toujours commencer par examiner le point de vue contraire au sien. Si, pour reprendre l’exemple, vous pensez que la beauté est un critère indispensable pour définir une œuvre d’art, alors vous commencerez par évoquer et analyser les arguments de ceux qui pensent le contraire. Et inversement, si vous pensez que la beauté n’est pas un critère indispensable.

L’idéal pour les questions de ce type est de composer un développement en trois parties, c’est-à-dire rédiger une « synthèse » après la thèse et l’antithèse.

Il est très difficile, et pour certains sujets pratiquement impossible, de composer une synthèse contenant des idées nouvelles. La synthèse n’est pas un mélange comme le café au lait, mais un dépassement. Ne vous répétez pas ! Si vous n’avez pas assez de matériaux pour rédiger une troisième partie, contentez-vous de deux parties – le correcteur ne vous haïra pas pour cela.

La conclusion

Comme l’introduction, elle est indispensable à l’équilibre logique de votre dissertation. Elle a pour fonction de répondre à la question posée. Elle devra éviter à la fois la répétition (la conclusion n’est pas un résumé) et l’esquive (la conclusion ne doit pas oublier la question posée).

Tâchez de réserver pour votre conclusion une belle formule, qui fait mouche (mieux vaut faire mouche que faire tache). N’oubliez pas que l’impression finale de votre correcteur influencera forcément sa note.

Comme pour l’annonce du plan en introduction, les professeurs ne sont pas tous d’accord entre eux sur la conclusion : certains recommandent « d’ouvrir » la question, d’autres le déconseillent. Choisissez ici encore la légèreté et la souplesse – et comme vous avez eu le bon goût de renoncer à remonter au Déluge pour poser votre sujet, renoncez à invoquer l’Apocalypse des temps futurs pour terminer votre travail…

Pour résumer :

L’introduction pose le problème (« la problématique ») à partir de la question posée.

Le développement analyse le problème en plusieurs parties.

La conclusion donne la réponse au problème. N’hésitez pas à prendre parti ! Mais vous avez parfaitement le droit de critiquer, en fin de dissertation, la formulation de la question, et de dire qu’on ne peut pas y répondre simplement par « oui » ou par « non » !

Les différents types de questions

Qu’est-ce que…?

Cette forme a disparu, car elle invitait le candidat à réciter son cours plutôt qu’à réfléchir. Cette question porte sur l’essence, la nature d’une chose. Exemple : « Qu’est-ce qu’une théorie scientifique ? »

En philosophie, on pense volontiers par la négative : si on vous demande (à l’oral) de dire les caractères d’une théorie scientifique, posez-vous la question de savoir ce qu’est une théorie non scientifique (une théorie religieuse, par exemple).

Peut-on…?

Un jour, un directeur de théâtre surprend l’auteur Sacha Guitry en train de fumer dans sa loge :

« Monsieur Guitry, lui dit-il, on ne peut pas fumer ici !

Sacha Guitry le regarde, tire une bouffée et dit :

— Mais si, on peut très bien fumer ! »

La langue française ne fait pas la distinction que font les Anglais entre I can – je peux physiquement, objectivement – et I may – je peux légalement, moralement.

« Peut-on ? » renvoie à deux questions philosophiques : celle de la possibilité factuelle (est-ce possible ?) et celle de la possibilité morale (est-ce permis ?). En introduction, vous direz en quel sens il convient de prendre le sujet. Exemple : « Peut-on connaître autrui ? » (possibilité factuelle, est-ce possible ?), « Peut-on priver de liberté les ennemis de la liberté ? » (possibilité morale, a-t-on le droit ?).

Pourquoi…?

Comme la question « qu’est-ce que ? », il s’agit d’une forme disparue, car elle conduisait à un développement analytique (plusieurs réponses peuvent s’additionner).

Il faut bien repérer l’équivoque de la question en français : « pourquoi ? » peut renvoyer, en amont, aux causes (« Pourquoi une société a-t-elle besoin de lois ? ») ou bien, en aval, à la finalité, aux objectifs (« Pourquoi pense-t-on ? ») – en ce cas, « pourquoi ? » doit s’entendre comme « pour quoi ? ».

La synthèse des deux problèmes (celui des causes ou des conditions, d’un côté, celui des fins ou des buts, de l’autre) est possible. Ainsi, à la question « Pourquoi travaille-t-on ? », on attend aussi bien l’analyse des causes que celle des objectifs.

Faut-il…? Doit-on…?

Chacune de ces deux questions a deux sens possibles :

celui d’une nécessité logique (exemple : « Faut-il opposer le corps et l’esprit ? » signifie : doit-on opposer le corps et l’esprit pour comprendre la réalité telle qu’elle est ?) ;

celui d’une nécessité morale, d’une obligation (exemple : « Faut-il déclarer les hommes égaux entre eux ? » ou « Doit-on mettre le bonheur au premier rang des valeurs d’existence ? » signifie : cela correspond-il à l’idéal ? au bien ?).

Existe-t-il…? Y a-t-il…?

On demande par ce type de question d’examiner les arguments « pour » et « contre » la réalité d’une idée (exemples : « La vérité absolue existe-t-elle ? », « Y a-t-il un ordre de la nature ? »).

Quel…? Qu’est-ce qui…? En quoi…?

Ces questions engagent des développements analytiques et tendent donc à disparaître complètement. On demande au candidat de penser à tous les éléments possibles de réponses (« Quelle est la valeur culturelle de la technique ? », « Qu’est-ce qui dans la vie humaine peut échapper à la valeur d’utilité ? », « En quoi le travail humain est-il différent de l’activité animale ? » sont des questions que vous pouvez entendre à l’oral, et que vous vous poserez éventuellement dans le cours de vos dissertations ou explications de texte).

La confrontation entre deux concepts

Exemples : « Le plaisir et le bonheur », « Démontrer et prouver », « L’œuvre d’art et l’objet technique ». Ce type de sujet, comme les dinosaures, a disparu.

On invitait à réfléchir sur les relations de ressemblance et de différence qui peuvent exister entre les deux termes. Un plan en deux parties (thèse : l’opposition ; antithèse : les ressemblances), ou en trois parties (s’il y a synthèse), était tout indiqué. Vous l’échappez belle !

Cela dit, la tendance, ces dernières années, est de marier dans la question de dissertation deux notions du programme. Exemples : « Toute prise de conscience est-elle libératrice ? » (L, 2007) associe la conscience et la liberté ; « Toute vérité est-elle démontrable ? » (ES, 2004) associe vérité et démonstration ; « Si la technique est libératrice, de quoi nous libère-t-elle ? » (S, 1999) associe technique et liberté. Même chose pour « Faut-il préférer le bonheur à la vérité ? » (ES, 2006) et « L’expérience peut-elle démontrer quelque chose ? » (S, 2006).

Les questions ouvertes

« Suis-je le jouet de mon inconscient ? », « L’histoire a-t-elle un sens ? », « La politique est-elle affaire de technique ? » : ici les plans dialectiques s’imposent. Il y a un « pour », un « contre », et peut-être une synthèse possible. Dites-vous bien que vous ne serez pas jugé sur votre réponse, mais sur la manière dont vous aurez organisé votre argumentation.

Les questions fermées ou presque

Normalement, les sujets de dissertation appellent toutes les réponses possibles. Il existe néanmoins trois types de sujets qui réclament une réponse attendue :

Ceux qui se présentent sous la forme d’une question restrictive (du type : « ne… que ? » ou « seulement ? »). Exemples : « Le langage n’est-il qu’un moyen d’expression ? », « Travaille-t-on seulement pour satisfaire ses besoins ? » La réponse attendue ici est « non ». On demandera néanmoins au candidat qu’il argumente aussi, en première partie, en faveur du « oui ».

Ceux qui se présentent sous la forme d’une alternative (du type : « ou bien… ou bien…? »). Exemple : « L’art est-il affaire d’imitation ou bien de création ? », « La morale est-elle de l’ordre de la raison ou du sentiment ? » Après avoir analysé les deux réponses contraires, le candidat aura intérêt à sortir de l’alternative dans une troisième partie (la synthèse) ou en conclusion.

Ceux qui comportent les adverbes « toujours », « nécessairement », « tous », « tout ». Exemples : « L’efficacité d’une pratique prouve-t-elle nécessairement la validité de la théorie sur laquelle elle se fonde ? », « L’égalité est-elle toujours juste ? », « Tout ce qui est possible techniquement est-il, pour autant, souhaitable ? » On attend à l’évidence une réponse négative à ces questions. Mais le candidat aura d’abord réfléchi à la possibilité du « oui » qu’il traitera dans une première partie.

Quelques exemples de plans possibles

Est-ce dans la nature humaine qu’il faut chercher l’origine des injustices ?

Thèse : l’injustice vient de la méchanceté, de l’envie, de l’inégalité naturelles.

Antithèse : l’injustice est un produit de la société et de l’histoire.

Est-il nécessaire d’être cultivé pour apprécier une œuvre d’art ?

Thèse : le contact avec l’art peut être immédiat (à la différence du contact avec une théorie scientifique, par exemple). Pour la musique, il suffit de n’être pas sourd.

Antithèse : apprécier, c’est juger. Or juger c’est comprendre. On ne peut comprendre sans connaître.

Synthèse : la culture n’est pas une condition suffisante pour apprécier une œuvre d’art – ni même une condition nécessaire. Inversement, une absence de culture ne ruine pas nécessairement l’appréciation (il y a des « coups de foudre » en art comme en amour).

Faut-il admettre toutes les opinions ?

Thèse : la nécessité de la tolérance. La liberté de penser.

Antithèse : mais il est des opinions dangereuses ou inacceptables (en France, le racisme est un délit : il est interdit de l’exprimer publiquement).

Synthèse : admettre ne signifie pas approuver. En tant que telle, une opinion n’est pas dangereuse si elle reste privée, personnelle. Mais il est clair qu’on ne peut pas admettre l’expression publique de toutes les opinions.

L’apparence est-elle trompeuse ?

Oui : voir le mythe de la caverne (chapitre 40). Les illusions des sens.

Non : la richesse, apparente, par exemple, n’est pas un signe de pauvreté. La culture n’est pas le masque de l’inculture, etc.

Synthèse : l’apparence est un signe. Comme telle, elle est à interpréter. La vérité et le mensonge (ou l’illusion) ne sont pas dans le signe mais dans l’interprétation, pas dans l’objet interprété mais chez le sujet interprétant.

La connaissance scientifique est-elle désintéressée ?

Oui : la principale finalité de la science est la recherche de la vérité.

Non : les motivations psychologiques (ambition, désir de puissance, appât du gain) sont inséparables de la recherche scientifique.

Le pouvoir de l’État est-il un facteur de liberté ou d’oppression ?

Les deux : tout dépend des situations et des circonstances.

Facteur d’oppression : la dictature, le totalitarisme.

Facteur de liberté : seul l’État peut exprimer l’intérêt général. L’État libère des pouvoirs locaux, des féodalités idéologiques et financières. Exemple de la Russie actuelle – où de multiples mafias se sont substituées à l’État.

Exemple de dissertation rédigée (en noir) et annotée (en gris) : « La nature peut-elle constituer un modèle ? »

Un modèle peut être descriptif, en représentant par réduction ou simplification ce qui est, ou bien normatif, s’il fixe un idéal que nous devrions atteindre. Ce n’est pas dans le même sens que nous parlons d’un modèle d’avenir ou d’un modèle de société. De plus, un modèle peut être matériel, « concret » (une maquette d’architecte est un modèle), aussi bien que formel, « abstrait » (les modèles mathématiques). La difficulté du sujet tient à l’incertitude et à l’ampleur de ces deux concepts (modèle, nature). D’où la nécessité de les définir en introduction.

Quant à la nature, elle peut être prise au sens général d’essence (la nature d’une chose quelconque) ou bien au sens physique de réalité objective existant indépendamment du travail humain, que ce soit l’environnement immédiat de l’homme (la Terre et sa banlieue) ou l’univers tout entier.

La question posée ne garde qu’un seul sens aux termes de « nature » et de « modèle » : elle revient à se demander si la nature conçue comme réalité physique (les étoiles lointaines mais aussi les animaux et les éléments tout proches) peut contenir des principes et des valeurs applicables à la réalité humaine. Il faut en introduction délimiter le champ de la question qu’on va traiter.

En d’autres termes, la nature, qui comprend primitivement tout ce qui est, peut-elle aussi être conçue comme indiquant tout ce qui doit être ? L’introduction doit reformuler la question. Ainsi montre-t-on, d’une part, qu’on l’a comprise et, d’autre part, qu’on se l’est intellectuellement appropriée.

Nous dirons dans une première partie les arguments de ceux qui ont vu dans la nature un modèle et la manière dont ils l’ont effectivement utilisé. Dans la seconde partie, nous analyserons les objections qu’on peut formuler contre cette thèse. On peut annoncer le plan, à condition que cela soit de manière légère.

Première partie : La nature est un modèle

Si l’on définit la nature comme la totalité de ce qui est, a été et sera, alors sa fonction paradigmatique (de modèle) est nécessairement impliquée. Nous commencerons par cette thèse dans la mesure où nous ne la partageons pas. Premier argument. Il faut toujours commencer par ce qu’il y a de plus général.

Comment trouverions-nous un modèle ailleurs que dans la nature dès lors que la nature étant Tout, elle exclut tout ailleurs ? C’est ainsi que les stoïciens déduisirent de leur cosmologie (il n’y a qu’un univers sans transcendance et rationnel) une morale : la sagesse est de vivre « conformément à la nature », c’est-à-dire faire en sorte que l’ordre qu’on peut mettre en soi, dans sa vie, soit analogue à celui qui peut être observé dans le cosmos. Une référence philosophique n’est pas une preuve mais constitue pour la pensée la meilleure illustration. Ce qui nous conduit à l’idée d’harmonie. Il est toujours préférable de ménager les transitions entre les parties et les sous-parties du développement. Une dissertation n’est pas une mosaïque mais un tableau.

L’harmonie de la nature est une notion d’autant plus riche qu’elle unit en une même représentation la valeur logique et rationnelle de l’ordre, et la valeur sensible et émotive de la beauté, ou plutôt elle prouve que, à l’origine, il n’est pas de raison qui ne soit belle ni de beauté qui ne soit rationnelle. Le Soleil est beau parce qu’il nous donne l’image d’un cercle parfait. Référence à la théorie classique, d’origine grecque : une même mesure peut se trouver dans la nature et dans les œuvres des hommes.

Pendant longtemps, en fait jusqu’à la révolution de l’art moderne, la nature n’a pas seulement constitué un modèle pour l’art, elle a constitué le modèle par excellence. Le cas de l’art est exemplaire. Référence à la théorie de la mimésis (imitation). Ce qui pouvait s’entendre en deux sens : ou bien les formes, les bruits et les couleurs de la nature trouvaient un répondant dans les œuvres, ou bien l’artiste cherchait dans sa création à manifester une dynamique ordonnée analogue à celle que la nature nous livre.

Néanmoins, cette conception d’une nature modèle des actions et des œuvres des hommes n’est pas à l’abri de la critique. Transition vers la seconde partie (antithèse).

Seconde partie : La nature n’est pas un modèle

En fait, les œuvres et les actions des hommes, loin d’imiter la nature, la dépassent pour constituer un autre ordre, au-dessus d’elle : celui de la culture.

L’art moderne, en tournant radicalement le dos à toute forme naturelle (la peinture réaliste, la littérature naturaliste, la poésie descriptive, la musique imitative) nous a rétrospectivement fait comprendre que tout art est, comme son nom le dit assez, artifice. Le cas de l’art réévalué à la lumière de la modernité. Le modèle d’un portrait, quand il existe, est d’abord mental. Remise en question de l’idée même de modèle. C’est pourquoi les portraits d’un grand peintre, avant de ressembler à leurs modèles, se ressemblent entre eux parce qu’ils sont tous liés par un même style, qui est celui de leur auteur.

L’homme voit moins la nature telle qu’elle est qu’il ne la voit tel qu’il est. Deuxième temps : n’y a-t-il pas illusion à voir dans la nature un modèle ? La nature est moins notre miroir que notre écran (à entendre comme l’écran de cinéma sur lequel on projette des images). Si, par exemple, sous l’influence conjuguée du libéralisme économique et du darwinisme, la concurrence a été vue comme la loi par excellence du monde vivant (la prétendue loi du plus fort), c’est parce que la compétition représentait la forme même de la vie sociale : on a voulu la voir dans la nature dans la mesure où elle existait d’abord dans la société. De fait, les relations de solidarité dans la nature (symbiose, parasitisme) sont au moins aussi importantes que celles de concurrence. C’est ainsi que l’idée de norme passe du sens descriptif (la normale, c’est la moyenne dans une population donnée) au sens prescriptif (la normale, c’est l’idéal auquel il faut parvenir). Analyser, c’est distinguer. Dans le concept de « normalité », voisin de celui de « modèle », deux sens différents sont repérables.

Un modèle est une forme choisie. Or, si la nature contient la totalité des formes, elle ne peut jouer le rôle de modèle. C’est l’abondance même de la nature, son caractère contrasté, qui nous interdit d’en faire un modèle. Le monde animal, par exemple, est si divers qu’il comprend des exemples de tout : veut-on la violence ? Voici le tigre. Veut-on la paix ? Voilà le paresseux. Tel oiseau est monogame, tel autre polygame. Chacun pioche dans ce vaste répertoire en fonction de ses préjugés.

L’ordre et le désordre, l’harmonie et le chaos sont moins des réalités objectives pouvant désigner la nature que des façons de la considérer. Tout dépend en fait du niveau auquel on la verra : ce qui à une certaine échelle apparaît ordonné (un peuplier, la marche du Soleil, la succession des générations) peut apparaître désordonné à une autre (un peuplier n’est pas parfaitement symétrique, la Terre n’a pas une trajectoire rigoureusement régulière, et les générations admettent des anomalies dans leurs successions).

Quant aux valeurs que nous projetons sur la nature, elles ne sont que le témoignage de notre nostalgie. Quand on ne vit pas un idéal, on le rêve. La nature est le rêve de l’homme moderne. Ainsi la verra-t-on belle, pure, innocente, comme si ces mots pouvaient avoir un sens objectif appliqué à une autre réalité qu’humaine.

Conclusion

L’homme moderne, fatigué de son histoire, se plaît à voir dans la nature tout ce qui lui manque dans la société. La conclusion fait le bilan de la dissertation. Elle veillera à ne rien répéter. Et pourtant, aucune des grandes valeurs auxquelles il peut croire ne peut être réalisée ailleurs que dans la société : alors que la nature est soumise à la rigide nécessité, l’homme y introduit une plage de liberté, alors que la nature est sourde et aveugle, l’homme y ajoute une intelligente sensibilité.

Ni pour le technicien (l’avion n’a pas pris l’oiseau pour modèle, il ne vole pas comme lui en battant des ailes), ni pour la politique (il n’y a pas de système de sécurité sociale pour les animaux malades), la nature ne peut représenter un modèle. La culture ne dérive pas de la nature, elle la transcende.

Le pire juste au-dessus du vide !

Pour avoir zéro en philosophie, il suffit d’être absent ou de remettre une copie blanche. Quelques lignes permettent d’obtenir un 1 ou un 2.

Voici deux exemples édifiants de très mauvaises copies de bac que j’avais photocopiées en toute clandestinité pour mes classes de terminale.

Peut-être ont-elles été rédigées par vos parents. N’ayez crainte : la Nullité n’est pas héréditaire. J’ai mis 1 à la première et 4 à la seconde. On remarquera qu’à la différence des histoires drôles, les copies brèves ne sont jamais les meilleures.

Est-ce que tout ce que l’homme fait a un sens ?

« L’homme est guidé par son inconscience. Il ne sait pas ce qu’il fait vient de lui ou d’elle, l’inconscience. Faire quelque chose avec du sens, c’est le faire avec logique et dans les règles, pas n’importe comment, et le plus souvent c’est pour aider, pour aller vers le positif, le bien. Alors que l’inverse ne rime et n’aboutit à rien dans la vie. Il ne faut pas faire les choses sans raison, donc sans sens. Les hommes sont donc classés en deux catégories pour ce problème, nous en ferons d’ailleurs nos deux parties : ceux qui font les choses avec du sens et les autres qui souvent ont du mal à avancer dans leur vie.

I. Hommes faisant les choses avec du sens

a. Positif pour eux (la vie)

b. Ils savent que quand ils font quelque chose, c’est pour aboutir à un plus dans leur vie

c. Ils aident les autres

II. Les hommes faisant les choses n’importe comment, sans sens

a. Ils créent souvent le mal

b. Négatif pour eux, car souvent avec leurs actes sans sens, ils ne s’aident pas

On peut dire que cela ne rime à rien si on veut avancer dans la vie de faire les choses n’importe comment. Au contraire, souvent ces personnes sont mal dans leur tête et elles amènent le mal aux autres avec leurs actes. Alors qu’une personne saine et logique aura des actes sensés qui l’emmèneront à un stade supérieur dans tous les domaines. Mais une personne est poussée par son inconscience, donc même si son acte n’est pas sensé, elle n’y est pour rien et réagit une fois la chose faite.

Alors est-ce que l’inconscience ne nous pousserait pas à faire des actes insensés ? »

La raison humaine est-elle, par nature, conduite à supposer dans le monde plus d’ordre qu’elle n’en trouve ?

Ce second exemple de copie nulle est plus étoffé et mieux rédigé. Il faut dire que le sujet était coton !

« L’homme doué de Raison est capable par celle-ci de juger, de concevoir, d’évaluer la valeur des choses, c’est elle qui le conduit dans ses actes et pensées.

Il en est dépositaire et c’est ce qui le distingue de l’animal. La raison qui mène l’homme dans sa vie à agir selon les circonstances de façon très aléatoire, pourrait être conduite à supposer dans le monde plus d’ordre qu’elle n’en trouve. Mais dans quel ordre est-ce que le monde évolue, existe-t-il un ordre ?

La raison humaine manifeste son influence par le comportement qu’adopte l’homme. C’est elle qui le dirige, le mène, elle aspire à être comme un guide moral. L’homme doit dans le sens de la morale et par la raison il est capable de porter des jugements adéquats aux circonstances.

Elle est pour l’homme le pouvoir du choix dans les meilleures conditions possibles et elle est le moyen offert par la nature de juger, dans le But de Bien Agir.

Le monde évolue selon un ordre qui naît de l’histoire. Par l’histoire, qui suit un ordre d’évolution dans le temps, on distingue des changements importants. L’histoire, qui comporte toutes les souffrances, les guerres passées, s’est déroulée dans un ordre qui lui est propre et elle ne changera pas.

Dans tout le monde, toutes les sociétés ont un ordre hiérarchique, une structure qui la met en ordre. Les classes sociales sont faites en fonction d’un ordre, ainsi que la vie a un ordre selon les différents âges. La nature a fait évoluer l’humain selon un ordre qui ne peut être détourné, la jeunesse puis la vieillesse. Par la raison, on peut observer que dans le monde entier tout est mis en œuvre selon un ordre qui ne peut être dissout.

Tout être vivant connaît une hiérarchie. En ce qui concerne les animaux, la chaîne alimentaire les classe dans un ordre spécifique jusqu’à l’homme.

La vie n’est possible que par le respect de cet ordre car tout serait bouleversé dans le cas où cette disposition des choses viendrait à changer.

La raison humaine nous donne le pouvoir de juger, elle est conduite à supposer dans le monde plus d’ordre qu’elle n’en trouve. »