28

Keller s’attarde sur les marches du perron pendant que j’entre pour me réchauffer. Je suis soulagée d’être de retour chez lui. Je m’affale sur la banquette corail et contemple le feu – plus de braises que de flammes maintenant – qui rougeoie dans la cheminée. Il y a un match de hockey à la télévision ; je baisse le son jusqu’à ce que le chahut du public soit à peine audible. J’ai l’impression d’avoir frôlé le pire. Je ne me souviens même plus comment j’ai pu envisager il y a peu de retourner dans mon horrible appartement, et je songe un moment à demander à des déménageurs d’aller récupérer mes affaires. À moins que je ne laisse tout pourrir sur place.

Quelques minutes plus tard, Keller s’approche de la porte d’entrée et tape des pieds pour chasser la neige. Je le regarde, enfouie sous une multitude de couvertures sur la banquette. Le froid a fait naître des taches rouges sur ses joues et son cou, et il renifle un bon coup.

« Tu attendais pour voir si Charlie allait revenir ? »

J’essaie de plaisanter, mais il me regarde d’un air sombre.

« C’était moche, marmonne-t-il. Toute cette histoire dehors. Je regrette ce qui s’est passé.

— Pas moi, dis-je.

— Tu vas bien ?

— Rudement bien. Et toi ? »

Il se laisse tomber dans le fauteuil et se tient la tête. Je me lève et fais quelques pas vers lui, sans savoir s’il veut que je me rapproche.

« Keller… Charlie est comme ça. Il n’y a rien à faire. Il aura tout oublié dans une heure, je le jure. (J’attends un moment.) Ce qui s’est passé ici avec Charlie… ça n’avait rien à voir avec toi. »

Je reste debout, raide. J’ai l’impression de sentir encore dans mon corps de vagues résonances de ce qui s’est passé à l’extérieur. La folie délirante de l’épisode.

Keller lève la tête.

« Il ne s’agit pas de Charlie », bougonne-t-il.

Cet après-midi-là, alors que Keller était à la recherche de primatologues dans le coin, Frank avait organisé une réunion au commissariat avec Joe et Tina Abernathy. Il avait décidé de les interroger à propos de la dent et de leur montrer la séquence provenant de la vidéo du système de surveillance. Keller et Celeste Southard nous attendaient à l’extérieur de la salle de réunion. Tina ne savait rien concernant la dent sur le fil et affirma qu’ils n’avaient jamais confié Miranda à une nourrice. C’était une chose qui lui tenait à cœur, avait-elle dit. Elle ne faisait pas confiance aux nourrices.

Joe et Tina se tenaient par la main pendant qu’ils visionnaient la bande du moniteur vidéo ; Tina a commencé à pleurer dès qu’elle a vu Miranda endormie. Puis, à la fin de la bande, quand deux mains se sont tendues vers le berceau et que la dent sur un fil s’est balancée devant l’objectif, elle s’est levée et a commencé à hurler. « Ce ne sont pas mes mains ! Ce sont les mains de qui ? Ce ne sont pas mes mains ! » Joe dut la faire sortir de la pièce, mais on pouvait encore l’entendre crier dans le couloir. Le docteur Southard lui avait ensuite administré des calmants.

À présent, Keller est assis, penché en avant, tête pendante.

« Ça fait un bout de temps que je fais ce boulot, mais quelquefois…»

Je me laisse tomber sur le large accoudoir du fauteuil à côté de lui et lui effleure le poignet. Il me prend la main et nous restons ainsi pendant qu’il s’accroche à moi, en silence. Au bout d’une minute, il dit :

« Ce n’était donc pas la mère sur la vidéo.

— Exact. Alors qui ? »

J’écoute les tourbillons de neige sur l’auvent, un bruit rond, qui sonne creux.

Nous finissons par reprendre nos esprits. Keller me dit que, au cours de ses recherches aujourd’hui, il a appris qu’aucun zoologue de Cornell ne communiquait ses horaires de travail. Je lui caresse les cheveux – une fois – et je lui dis que nous aurions dû tous les deux faire carrière à l’université.

Il me dévisage un moment, puis il fourre ses mains dans ses poches.

« Viens, je vais te montrer quelque chose. »

Enveloppée dans une couverture, je me traîne derrière lui en chaussettes dans le couloir. Je m’attends à voir des dossiers et des rapports d’enquête. Nous entrons dans sa chambre. Il y a un nécessaire à toilette étalé sur son lit : brosse à dents, dentifrice, shampooing, peigne, savon. À côté, il y a plusieurs romans policiers – Agatha Christie – et, dans du papier de soie, un pyjama en coton peigné.

Keller se tient dans l’entrée et pique un fard quand il me voit toucher le pyjama.

« Je… j’espère… je ne sais pas si tu en portes ou si… (Il devient carrément écarlate et éclate de rire, en soufflant par le nez d’un air découragé.) Lena. Bon sang. »

Je lui souris.

« Tu as été super occupé.

— Putain, lâche-t-il, flegmatique, plus optimiste maintenant. Je n’arrive pas à croire à quel point cette histoire avec Charlie a pu m’atteindre. (Il secoue la tête.) Je suis retourné à l’âge des cavernes. Après une journée comme celle-ci. Quand j’ai cru qu’il allait essayer de te reprendre à… (Il s’arrête et lève les yeux, comme s’il voulait s’assurer de ma réaction.) Merde, j’étais prêt à le tuer.

— Avec ma bénédiction, lui dis-je. (Je détourne les yeux.) J’aime ces choses. Merci. Et je porterai le pyjama ce soir. Dans la chambre d’amis. »

Cette nuit-là, je me réveille enroulée dans les couvertures. La pièce est éclairée par la clarté de la lune qui filtre par les interstices des volets en bois. Pendant quelques secondes, je reste immobile, attendant que mon esprit émerge.

Je me lève en silence et me tiens debout au centre de la pièce, tendant l’oreille. De très loin, j’entends un gazouillis, le cri d’un chat, pareil à un pleur de bébé. Je me souviens du berceau vide dans la maison des Abernathy, je pense à Tina Abernathy hurlant dehors devant le commissariat et, en cet instant, je suis heureuse de ne pas avoir eu de bébé que j’aurais pu perdre. Je marche pieds nus sur le sol froid –, le pyjama flotte autour de moi. J’entends un souffle régulier qui provient de la chambre de Keller, mais le bruit s’interrompt dès que je m’approche de sa porte. Je savoure le silence riche, parfait de ce couloir, la façon dont il s’offre à mes regards. J’attends, hésitante, captive devant sa porte, comme si j’avais quitté ma propre peau.

Dehors, j’entends le bruit d’une portière de voiture qu’on claque vigoureusement dans le voisinage, le moteur qui gargouille pendant qu’il tourne au ralenti, le temps de chauffer. Je jette un coup d’œil dans la chambre et distingue les jambes de Keller allongées sous la couverture. Quelque chose tremblote et Keller s’approche de la porte. « Lena, chuchote-t-il, tu as besoin de quelque chose ? » Je touche son visage, mes doigts se repaissent de la barbe naissante sur ses joues, et je me faufile à côté de lui, dans sa chambre, sur son lit, m’assois sur les draps froissés couleur d’étain, et m’imprègne de l’odeur chaude de sa peau, un vestige d’eau de toilette.

« Je viens juste de me rappeler une chose, je chuchote. Je pensais à la dent sur un fil, en essayant de trouver un autre moyen de nous y prendre, tu sais ? » Il est près de moi, au bord du lit. « Oui ? »

Je me laisse aller en arrière, appuyée sur les coudes, les jambes pendant sur le côté.

« Je pensais juste à une époque où j’étais petite, je vivais chez mes parents adoptifs… je croyais alors que si on restait silencieux et qu’on écoutait très, très attentivement, on serait capable de percevoir le bruit de ses pensées.

— Ah, oui. (Il se laisse glisser à côté de moi, pose sa tête sur ses bras croisés.) Comme quand on écoute dans un coquillage.

— J’imaginais… j’imaginais que ça serait un tas de petits chuchotements qui diraient toutes sortes de choses, celles qu’on connaît et celles qu’on était sur le point de dire, mais aussi des choses qu’on avait oubliées, ou certaines dont nous ne savions même pas qu’elles étaient dans notre esprit.

— Mmmm. Tu avais quel âge ?

— Petite. Mais j’étais toute seule, souvent. J’avais beaucoup de temps pour rêver. »

Il s’allonge à côté de moi et se tourne pour me regarder ; son visage est près du mien. Je vois luire ses yeux.

« Tu as essayé de voir si ça marchait ? »

Je souris au plafond.

« Pia ne le voulait pas. Elle n’aimait pas du tout entendre parler de ça. C’était seulement pour elle une preuve supplémentaire que j’étais folle.

— Alors tu n’as jamais pu expérimenter ta théorie ? »

Je me mets à plat, retirant mes coudes, et pose ma tête à hauteur de celle de Keller. J’entrecroise mes doigts dans le noir.

« Eh bien, une nuit, Henry est venu, une fois Pia couchée. Et il a dit : Ta mère m’a parlé d’une idée à toi… à propos d’écouter ce qu’il y a dans la tête des gens. Je me souviens de l’avoir regardé, les yeux écarquillés, presque effrayée qu’il me punisse pour avoir eu des idées biscornues. Et il a simplement mis la tête comme ça, sur l’oreiller à côté du mien… et il m’a dit : Tu veux essayer ? »

Keller me regarde, si silencieux que je ne suis pas sûre qu’il m’ait entendue.

« Alors tu l’as fait ? demande-t-il enfin.

— Ouais, dis-je en souriant.

— Et tu as entendu quoi ? »

Je regarde Keller.

« Je l’ai entendu chuchoter : Tu vas dormiiiiiiir. »

Il rit. Dans le lointain, il y a les piaulements du chat, un cri hargneux qui vous fige le sang, on croirait qu’il pose une question, qu’il répète le mot « bébé » encore et encore. Au bout d’un moment, Keller demande : « Tu veux essayer de nouveau ? »

Je glisse sur quelques centimètres et appuie mon oreille contre le haut de son crâne. Puis je ferme les yeux et aucun de nous ne parle.

J’écoute et il semble presque possible d’entendre les bruits d’un monde invisible, un monde microscopique de globules et de lymphe, de tendons et de neurones, de filaments subatomiques de la pensée. Le souffle de Keller monte et descend comme un courant, comme si nous flottions ensemble à la surface d’une mer nocturne, je m’élève et retombe avec lui. Et à cet instant, les yeux toujours clos, sans réfléchir à la façon de m’y prendre ou à ma peur éventuelle, je lui murmure simplement : « Keller, je veux te dire. Enfin voilà… je veux te dire d’où je viens. »

Je commence par ma théorie du passé : les fragments de souvenirs bizarres ; le crash de l’avion, l’odeur de kérosène et de métal brûlé. Je lui dis tout ce que je sais ou crois savoir. Des bribes et des fragments. Fouiller la forêt tropicale en quête de nourriture. Marcher et dormir dans les branches, avancer au milieu de volutes de fleurs et de baies, effleurer la crête d’épines sur le dos des caméléons, l’éclat d’une langue de serpent ou d’une patte de gecko. Apprendre à sentir et à goûter et à voir le monde comme le font les singes. Les longs bras d’une mère singe. Je fixe le plafond, de sorte que je ne peux voir le visage de Keller. Mais comme il ne parle ni ne s’éloigne, je lui raconte mes deux dernières années, ma vie solitaire à la résidence Saint James et mon retour sur le passé, mes tentatives pour resituer des bouts de souvenirs pareils à une germination à l’intérieur de mon corps, cet autre moi s’éveillant, une façon de voir le monde et de me souvenir d’un passé, lui-même aussi étrange et éclaté que la folie.

Il y a un long silence. Finalement, quand Keller parle, sa voix paraît plus basse, d’une neutralité prudente.

« Autrement dit, tu ne sais rien de sûr, c’est ça ? Enfin, tu te souviens, mais ce sont à peine des souvenirs…» Je confirme d’un signe de tête.

« Et Pia ne peut ou ne veut pas te donner plus de détails ? Aucune piste, même ? Ou d’autres moyens de vérifier ?

— Tu rigoles ? (Je ferme les yeux en souriant.) Un rien blesse cette femme. Pour elle, tout est une affaire personnelle. Même si ça n’a rien à voir avec elle. »

Finalement, il dit d’une voix tranquille : « Mais l’autre jour, avec Pia, c’est ce que tu disais… que les bébés te ramènent à ta propre histoire. »

La sensation de mains m’écrasant les côtes semble s’atténuer. Un doigt à la fois.

« J’ai commencé à me demander si l’assassin – peu importe qui – n’est pas aussi à ma poursuite. »

Je hasarde un coup d’œil dans sa direction. Il a l’air concentré et grave. J’attends. J’espère sans doute qu’il va me rabrouer comme Charlie l’aurait fait, me dire que je me raconte des histoires. Mais Keller ne fait pas ça. Il hoche la tête.

Je fixe les motifs en plâtre du plafond. Ils semblent se creuser et prendre une teinte bleutée, comme s’ils se couvraient d’eau.

« Je sais que ça paraît dingue. Je le sais, et je ne t’en voudrais pas si tu ne me crois pas. Ce serait peut-être mieux, d’ailleurs. »

Il s’appuie sur un coude et me regarde. Je le sens me dévisager avec une énorme tendresse. Le clair de lune inonde la chambre et son visage est baigné d’une lumière nacrée. Il me dit d’une voix douce et impatiente : « Bon sang, Lena, bien sûr que je te crois. »

Je m’adosse à la tête de lit pour bien intégrer ça. J’attendais, pour le moins, le gentil coup de coude dans les côtes, une imitation de Tarzan à la Charlie, ou une injonction façon Pia, qu’on allait faire comme si je n’avais jamais dit ces choses extrêmement embarrassantes que je venais de dire.

Je le regarde fixement.

« Mais alors… (Je touche un des barreaux recourbés au-dessus de ma tête.) Alors ça ne te dérange pas ? Ça ne t’embête pas ? »

Il se rapproche du lit, pose un bras sur le bord.

« Si quoi ne m’embête pas ?

— Tout ça, ce que je t’ai dit sur mon passé, toute cette histoire ? (J’ai une voix très basse et mes doigts glissent sur les bords lisses des barreaux.) Que je suis peut-être dingue.

— Lena, tu m’as parlé de toi. (Le sourire de Keller a disparu, il a le visage sérieux et solennel, et c’est comme si l’air était chargé d’émanations empêchant les gens d’avoir des relations plus étroites et que nous les avions traversées.) C’est ce qui t’est échu. Le passé est non négociable. Les autres doivent faire avec. »

Je suis tellement heureuse d’entendre ça que j’ai presque envie de lui serrer la main.

« Cool. (J’ai l’impression d’analyser les mots qu’il vient de prononcer.) Non négociable.

— Cela dit, je crois qu’on va devoir adopter une démarche un peu différente, poursuit-il. Je ne sais pas si l’un ou l’autre de ces souvenirs a à voir ou pas avec l’enquête. Mais le fait que tu aies autant de questions sans réponse sur ton propre passé – à l’époque où tu étais toi-même bébé –, cela pourrait vouloir dire qu’il y a davantage de liens entre toi et ces dossiers qu’on ne le soupçonnait jusqu’ici. Si l’assassin est une espèce de… je ne sais pas, en admettant même qu’il fasse partie de ton passé…»

Je n’avais pas envisagé cela.

Il s’étire en avant, les mains glissant sur ses jambes, faisant jouer les muscles deltoïdes et les trapèzes dans son dos. En se détendant, il poursuit :

« Au lieu d’essayer de trouver l’assassin en passant par les bébés, il faudrait qu’on trouve, disons, le lien avec toi. Tu sais ? La dent, les singes…

— Et la croix sur ma fenêtre. »

Il me regarde, étonné :

« Hein ?

— Oui, un soir, quand je suis rentrée chez moi, il y avait une croix. Quelqu’un l’avait dessinée dans la saleté sur la fenêtre. Et la semaine dernière, quelqu’un, une femme, m’a prise en chasse. Il faisait nuit et elle me poursuivait.

— Bon Dieu, Lena. (Il se redresse, droit sur son séant.) Tu as signalé ces choses-là ? »

J’entoure mon buste de mes bras.

« J’ai eu peur, mais j’ai cru que c’était cette folle de journaliste.

— Elle t’a littéralement poursuivie ? Elle n’a pas dit pour quel journal elle travaillait, par exemple ? Elle t’a posé quel genre de questions ?

— Enfin, je me souviens d’une seule question, mais c’était plutôt bizarre, quelque chose du genre : Pourquoi tu ne sauves pas les bébés ? Pourquoi tu ne les sauves pas ?

— Pourquoi tu ne les sauves pas ? (Son visage est attentif, les yeux profondément calmes.) Pour moi, ça ne ressemble pas à une question de journaliste.

— Ah, non ? »

Je pense à la horde de journalistes massée devant le laboratoire dans le froid matinal, toutes les questions dont ils m’ont mitraillée. Sur l’anthrax, les conspirations, les terroristes. Je me rappelle comment Joan, la journaliste du café, m’a fait l’offrande de ses propres angoisses professionnelles et de ses déceptions personnelles. Et il me semble que les journalistes sont parfaitement capables de poser n’importe quelle question, dans le seul but de pondre un papier.

Mais quand je pense à cette question dans la ruelle, la voix bizarre, obsédante me revient, et maintenant il me semble que c’était davantage une façon de me narguer. A-t-elle prononcé mon nom ? Cela n’est plus très clair, toute la scène a l’air comme noyée dans le brouillard. Je ne peux plus me fier à mon souvenir. Cependant, ma peau se hérisse sur mes bras, mes épaules et sur ma nuque, et mon souffle devient plus court, plus rapide. Alors je regarde Keller, les yeux grands ouverts à présent, et, je le sens, avec ma propre peur. « Keller, je demande, qui c’était ? Qui me poursuivait ?

— C’était peut-être simplement un « individu profondément perturbé », dit-il avec la voix pompeuse d’un présentateur de télévision, essayant de m’amuser, mais la plaisanterie tombe à plat. (Il ajoute, d’une voix plus neutre :) Une SDF, peut-être. » Mais je perçois toute la perplexité dans sa voix.

 

Origine
titlepage.xhtml
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_000.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_001.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_002.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_003.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_004.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_005.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_006.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_007.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_008.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_009.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_010.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_011.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_012.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_013.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_014.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_015.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_016.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_017.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_018.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_019.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_020.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_021.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_022.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_023.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_024.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_025.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_026.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_027.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_028.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_029.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_030.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_031.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_032.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_033.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_034.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_035.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_036.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_037.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_038.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_039.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_040.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_041.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_042.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_043.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_044.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_045.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_046.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_047.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_048.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_049.html
Abu-Jaber,Diana-Origine(2008).French.ebook.AlexandriZ_split_050.html