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Anvers, Belgique — Hiver 1982

Des maillons pour encercler le monde d’une chaîne d’amour

Elle avait été une jeune femme belle, riche, promise à toutes les caresses d’un destin doré. Cette fille de notables de la haute bourgeoisie du port belge d’Anvers avait grandi dans l’opulence feutrée d’une de ces demeures qu’avait tant aimé peindre Rubens. Sa haute taille et son allure sportive contrastaient avec la finesse de son visage illuminé par deux yeux immenses couleur pervenche. Jacqueline de Decker était à dix-huit ans l’un des partis les plus séduisants du royaume de Belgique. Sa beauté et son rang faisaient tourner bien des têtes. À l’âge où les jeunes filles de son milieu rêvaient de s’étourdir dans les bals au bras de quelque prince charmant et de s’évader vers les plages dorées de la Côte d’Azur, elle préférait s’enfermer chaque jour de longues heures dans une chapelle pour écouter la voix intérieure qui l’appelait à une tout autre vocation.

Persuadée que Dieu lui enjoignait de rentrer dans les ordres pour aller aux Indes soigner les pauvres et les lépreux, elle fît sa valise et alla frapper à la porte du couvent des Sœurs Missionnaires de Marie. Heureuses d’accueillir cette jeune fille de la haute société, les religieuses voulurent lui offrir un dîner royal. Mais la boîte de saumon ouverte en son honneur était avariée. Jacqueline faillit trépasser au cours de la nuit. Voyant un signe dans cet empoisonnement, elle se traîna dès l’aube jusqu’au bureau de la mère supérieure et lui annonça qu’elle rentrait chez elle. « J’étais résolue à me consacrer à Dieu et à partir pour les Indes soigner les pauvres de l’Évangile, dira-t-elle, mais en restant dans le monde. »

Un jésuite belge, ami de l’évêque de Madras, cherchait des volontaires pour créer un centre médico-social dans une région déshéritée du Tamil Nadu. Sept jeunes Anversoises formaient déjà une équipe. C’est avec enthousiasme que Jacqueline de Decker se joignit à elles. L’invasion de l’Europe par les panzers d’Hitler devait briser net son beau rêve. La misère et la souffrance s’abattant sur la Belgique, Jacqueline et ses camarades se hâtèrent de passer leur diplôme d’infirmière et s’engagèrent dans la Croix-Rouge. Quatre années sous les bombes et dans les hôpitaux surpeuplés formèrent durement la jeune héritière à son idéal de charité. Son inlassable dévouement lui valut, à la Libération, d’être saluée comme une héroïne. Plusieurs notables intriguaient déjà auprès de ses parents, convoitant pour leur fils la main de cet ange en blanc couvert de médailles. Jacqueline était loin de penser au mariage. La guerre avait disloqué le petit groupe de ses amies avec qui elle avait décidé d’aller servir aux Indes. Plusieurs avaient été tuées sous les bombardements, une était entrée au couvent, les autres s’étaient mariées. Jacqueline restait seule prête à partir pour la grande aventure. Le 31 décembre 1946, elle embarqua sur un bateau en partance pour Madras.

À son arrivée, elle apprit que le jésuite belge qui avait inspiré sa venue en Inde était mort le jour même où elle avait quitté Anvers. Elle se retrouva complètement isolée. Pendant deux ans, vêtue comme les villageoises d’un sari de coton, elle vécut au milieu des pauvres qu’elle soigna dans un dispensaire de fortune installé dans un village des environs de Madras. Se contentant pour nourriture quotidienne d’une assiette de riz assaisonné de piments et de quelques verres de thé, dormant à même le sol dans une masure de planches infestée de rats et de cafards, unique Européenne à des kilomètres à la ronde, elle partagea la vie de souffrance et de privations des paysans sans terre, des chômeurs, des tuberculeux, des lépreux. Rude apprentissage qu’une foi à toute épreuve avait du mal à soutenir dans un isolement affectif et moral total. D’autant plus que la présence de cette étrangère blanche dans une telle cour des miracles suscitait parfois des réactions hostiles.

Un jour de grand découragement, Jacqueline de Decker fit à pied le voyage jusqu’à Madras afin d’y chercher le réconfort spirituel d’un prêtre. Un missionnaire lui parla d’une religieuse européenne qui venait de quitter son couvent de Calcutta pour fonder un nouvel ordre religieux dont la vocation était, comme la sienne, de « vivre dans les bidonvilles au milieu des plus déshérités, soigner les malades et les mourants, éduquer les enfants des rues, prendre soin des mendiants, donner un abri aux abandonnés ». Deux jours plus tard, la jeune infirmière belge débarquait d’un wagon de troisième classe dans la grande métropole du Bengale. Après plusieurs jours de recherches, ce fut chez les sœurs d’une mission médicale américaine installée à Patna, dans la province voisine du Bihar, qu’elle trouva enfin celle qu’elle cherchait. Avant de s’immerger dans la misère et les souffrances des bidonvilles, la future Mère Teresa était venue là apprendre quelques rudiments de secourisme et de soins médicaux.

* * *

Ce petit bout de femme de trente-huit ans, au sourire lumineux, vivait déjà depuis dix-neuf ans aux Indes. Née à Skopje, alors en Albanie, fille d’un prospère entrepreneur, Agnès Bojaxhiu avait, très jeune, été appelée à la vie religieuse. À dix-huit ans, prenant le nom de Teresa en hommage à l’humble « petite fleur de Lisieux » à qui elle vouait un culte fervent, elle était entrée dans l’ordre irlandais de Loreto. Le 6 janvier 1929, elle débarquait d’un vapeur sur un quai de Calcutta, alors la plus grande métropole de l’Empire britannique après Londres. Seize ans durant, sous le voile noir des religieuses de sa congrégation, elle avait enseigné la géographie aux filles de la bonne société bengalie dans l’un des couvents les plus huppés de la capitale du Bengale. Jusqu’à ce jour du 10 septembre 1946 quand, dans le train qui l’emmenait pour sa retraite annuelle à Darjeeling, sur les pentes de l’Himalaya, un nouvel appel de Dieu avait bouleversé son existence. Une voix avait tonné dans son cœur. « C’était un ordre. Je devais abandonner le confort de mon couvent, renoncer à tout, et le suivre, lui, le Christ, dans les taudis pour le servir au travers des plus pauvres des pauvres. »

Sa supérieure, l’archevêque de Calcutta, toute la hiérarchie avaient tenté de la faire renoncer à son projet, de la convaincre que ce nouvel « appel » n’était sans doute qu’une hallucination due aux fatigues d’un climat accablant, à la tension régnant dans la ville ravagée par les émeutes entre communautés lors des luttes pour l’accession du pays à l’indépendance. Elle s’était montrée inflexible, avait écrit à Rome et obtenu, après une attente de près de deux ans, la permission du Saint-Père. Le 8 août 1948, elle avait franchi le portail de son couvent et troqué son habit pour le sari de coton le moins cher trouvé au bazar. Au dispensaire des sœurs infirmières américaines, sa première confrontation avec la maladie et la souffrance n’avait guère été glorieuse. À la vue du sang, elle s’était évanouie. Mais son indomptable volonté et sa foi devaient peu à peu l’aguerrir aux tâches les plus pénibles. Le soir, épuisée, elle renouvelait ses forces par la prière et la contemplation, à genoux devant le crucifix de la chapelle de la mission.

* * *

C’est là que Jacqueline de Decker fit sa connaissance. Une rencontre que ni l’une ni l’autre n’oublieraient. Elles avaient tant de choses à se dire, tant d’émotions à partager. Les deux années éprouvantes que la jeune Belge avait passées, seule, à soulager les misères des pauvres paysans des environs de Madras offraient à Teresa l’inestimable fruit d’une expérience vécue sur le terrain. De son côté, Teresa apportait à Jacqueline un projet à long terme : la création d’une congrégation religieuse uniquement consacrée au service des plus pauvres d’entre les pauvres. Elle espérait attirer vers elle des âmes généreuses désirant partager son idéal de pauvreté. Quelques anciennes élèves lui avaient déjà laissé entendre qu’elles la rejoindraient. En attendant, il lui fallait rédiger les règles de cette nouvelle communauté, les soumettre à Rome « prier pour qu’une bulle du pape l’autorise à fonder l’ordre des Sœurs Missionnaires de la Charité qui, en plus des trois vœux habituels de pauvreté, chasteté et obéissance, respecteraient un quatrième vœu, celui de « se mettre entièrement et de tout son cœur au service gratuit des pauvres ».

Enthousiasmée par la perspective de vivre son propre idéal non plus en solitaire mais en équipe, Jacqueline de Decker adhéra d’emblée au projet de Teresa. Elle serait sa première compagne. Mais le destin devait en décider autrement. Alors qu’elle se préparait à suivre sa nouvelle amie dans les bidonvilles de Calcutta, elle se trouva soudain paralysée par d’insupportables douleurs dans la colonne vertébrale. Un choc subi à l’âge de quinze ans en plongeant dans une piscine était peut-être à l’origine de son mal. En dépit de soins intensifs, son état s’aggrava au point que l’on commença à craindre pour sa vie. Il fallut bientôt se résigner à la rapatrier en Belgique.

Jacqueline de Decker jura à Teresa de la rejoindre dès qu’elle serait rétablie. Sur le bateau qui la ramenait à Anvers, elle fut assaillie par un tel sentiment d’échec que plusieurs fois elle songea à se jeter par-dessus bord. « Devenue inutile, je n’avais qu’une idée : me supprimer. Dieu m’avait appelée en Inde et j’avais trahi Son appel, écrira-t-elle plus tard. Je ne cessais de Le prier, mais je ne sentais plus Sa présence. Si j’avais encore un rôle à jouer sur cette terre, le Seigneur devait m’adresser un signe. »

Elle allait guetter ce signe tout au long de ses mois de souffrance dans les hôpitaux de sa ville natale où des chirurgiens pratiquèrent sur elle plusieurs interventions et quinze greffes pour essayer de lui épargner une paralysie totale. Elle vécut un véritable supplice. Ce furent des mois de douleurs intolérables, au bout desquels elle se retrouva emprisonnée de la nuque jusqu’au bas des hanches dans le carcan d’un corset de plâtre. Quand elle réalisa qu’elle ne pourrait jamais retourner en Inde pour y travailler avec son amie Teresa, elle lui écrivit une lettre déchirante, l’adieu désespéré d’une femme qui voyait s’écrouler son rêve, le sens de sa vie.

Quelque temps plus tard, elle reçut un aérogramme de papier bleu tamponné à la poste centrale de Calcutta. En quelques lignes, Mère Teresa lui exposait un projet unique dans l’histoire des rapports entre les hommes : la création d’une fraternité tissant, au-dessus des terres et des océans, les liens d’une communauté mystique entre ceux qui souffrent dans leur corps et ont besoin d’agir et ceux qui agissent et ont besoin, pour ce faire, de la prière des autres. « Je viens te faire aujourd’hui une proposition qui te comblera de bonheur, écrivait Teresa à son amie belge en cette nuit d’octobre 1952. Veux-tu être ma sœur jumelle et devenir une Missionnaire de la Charité à part entière ? De corps en Belgique, mais d’âme en Inde. En te liant spirituellement à nos efforts, tu participeras par l’offrande de tes souffrances et ta prière à notre travail dans les bidonvilles. Notre tâche est gigantesque et j’ai besoin de beaucoup d’ouvriers. Mais j’ai besoin aussi d’âmes comme la tienne qui souffrent et prient pour le succès de notre entreprise. Veux-tu accepter d’offrir tes souffrances à tes sœurs d’ici pour leur donner chaque jour la force d’accomplir leur œuvre de miséricorde ? »

N’était-ce pas le signe attendu ? Jacqueline de Decker ajouta à la ferveur de son acceptation sa volonté de recruter d’autres handicapés susceptibles de partager le même idéal. Un idéal qui réussirait l’exploit de combiner deux grands mystères de la foi chrétienne, celui du pouvoir rédempteur de la souffrance, et celui de cette « communion des saints » qui prétend rassembler toutes les âmes de bonne volonté. Ainsi naquit l’Association des malades et souffrants affiliée aux Missionnaires de la Charité, une chaîne « dont les maillons d’amour allaient encercler le monde comme un rosaire ». Ses premiers membres comptaient vingt-sept handicapés majeurs et incurables, tous désireux d’offrir l’agonie de leur corps pour le succès du travail quotidien des vingt-sept premières jeunes sœurs – vingt-cinq Indiennes et deux Européennes – qui avaient suivi Mère Teresa dans les bidonvilles de Calcutta. Trente-cinq ans plus tard, c’étaient des milliers de malades, incurables et invalides qui se trouvaient reliés par leur prière et l’offrande de leur souffrance aux petites sœurs œuvrant dans les léproseries, les dispensaires, les orphelinats et les mouroirs créés par Mère Teresa à travers le monde.

Malgré son âge et son carcan de douleur, Jacqueline de Decker dirigeait aujourd’hui cette communion universelle depuis son modeste appartement des faubourgs d’Anvers, récoltant chaque matin sous sa porte les poignées d’enveloppes constellées de timbres du monde entier que venait de glisser le facteur.

* * *

Ce matin d’hiver 1982, une lettre postée à Jérusalem suscita son émotion. Dans l’incapacité d’écrire, son auteur, frère Philippe Malouf, l’avait dictée à l’un de ses amis.

Chère Jacqueline, ma sœur,

Pour qu’une rose soit belle, dit-on, il faut parfois sacrifier quelques rameaux du rosier, commençait le jeune moine libanais de l’abbaye des Sept-Douleurs de Latroun, en Israël. Depuis l’accident qui m’a privé de l’usage de mes membres, je n’ai pas senti pousser en moi la sève de cette rose. Au contraire, je me suis laissé glisser dans les cris de la colère, dans les sanglots de la révolte. Même avec l’affection de tous ceux qui m’entourent, je n’ai pas réussi à surmonter mon handicap, à trouver en Dieu la force d’accepter ce que j’avais humainement perdu.

Pourtant, après la visite dans ma chambre d’hôpital d’une jeune Israélienne, elle aussi paralysée sur son fauteuil roulant, j’ai été submergé par l’espérance. Cette jeune fille m’a invité à trinquer à la vie ». Elle a secoué mon amertume, balayé ma rage. J’ai senti que je devais cesser de subir, assumer enfin mon malheur, m’accomplir dans une autre voie. Mais lorsque je suis rentré au monastère, le monde a basculé à nouveau, les démons de la révolte ont commencé à me tarauder. Révolte contre Dieu créateur de la vie, révolte contre les bien portants autour de moi. Mon handicap me détournait de tout ce qui était vivant. Il me rendait égoïste, me centrait sur moi-même, abolissait tout le reste. Je voulais pourtant lutter contre cette déchéance.

Combien de fois n’ai-je pas essayé de rassembler ma foi pour songer au Christ sur sa croix ? Une voix me disait alors : « Ne gaspille pas ta souffrance. Tu ne peux plus bouger, tu ne peux plus participer au travail des hommes, mais tu as Dieu, et avec Lui tu peux sauver le monde. »

Philippe Malouf racontait ensuite qu’un ami archéologue américain lui avait apporté le numéro de Life Magazine consacré à Mère Teresa de Calcutta, où l’on parlait notamment des malades et des souffrants unissant ses Missionnaires de la Charité à des milliers de volontaires à travers le monde. Il avait aussitôt écrit à la religieuse qui lui avait répondu de son écriture ronde et bien dessinée. Elle avait émaillé ses propos de considérations pratiques et de messages spirituels. « Vous pouvez faire beaucoup plus sur votre lit de souffrance que moi sur mes jambes », avait-elle affirmé d’emblée. Puis, avec fermeté, elle avait rappelé au jeune moine que la souffrance est une école d’héroïsme et de sainteté. Elle l’avait engagé à dépasser son épreuve, à l’offrir avec sa prière à l’une de ses sœurs. « Elle a besoin de vous pour avoir la force d’accomplir sa tâche active au service des pauvres de Dieu. » Mère Teresa avait conclu en suggérant à son correspondant d’écrire à Anvers à la personne chargée de « marier » chacune de ses sœurs à son soutien spirituel.

Jacqueline de Decker relut plusieurs fois la lettre du moine infirme et la plaça au-dessus de sa pile de courrier en instance. Puis elle sortit d’un classeur une feuille de papier sur laquelle une responsable de la maison mère des Missionnaires de la Charité à Calcutta avait inscrit les noms des dernières religieuses entrées dans la congrégation. En tête se trouvait celui d’une jeune fille originaire de Bénarès qui venait d’être affectée à l’un des lieux les plus éprouvants créés par Mère Teresa, le mouroir du Cœur Pur de Calcutta, dernière étape sur terre des moribonds recueillis dans les rues de l’inhumaine cité. En raison de son douloureux passé, cette novice aurait certainement besoin d’un solide soutien spirituel. Jacqueline de Decker écrivit le nom du frère Philippe Malouf en face de celui de « l’ex-petite charognarde du Gange ». Plutôt que de changer son nom pour celui d’un saint de la chrétienté, Mère Teresa lui avait suggéré de garder en religion celui que ses parents lui avaient donné à sa naissance. La fille du brûleur de cadavres de Bénarès s’appelait à présent sœur Ananda – sœur Joie.

Plus grands que l'amour
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